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Les institutions cantonales

LE CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET HISTORIQUE

Chapitre 1 : Les définitions générales et le cadre institutionnel

A. Les institutions cantonales

79. Le canton de Genève dispose d’une organisation classique du pou-voir dans une démocratie : le Conseil général, dénomination historique du corps électoral (1.) ; le Grand Conseil, pouvoir législatif (2.) ; le Conseil d’Etat, autorité exécutive (3.) ; et le pouvoir judiciaire (4.). Le principe de la séparation des pouvoirs est explicitement consacré à l’article 130 Cst/GE132.

80. A teneur de l’article 1, alinéa 2 Cst/GE, la souveraineté réside dans le peuple ; tous les pouvoirs politiques et toutes les fonctions publiques ne sont qu’une délégation de sa suprême autorité. Cette déclaration, à faible portée pratique, trouve son origine dans les luttes pour la démocratie qui ont mar-qué l’histoire de Genève133.

1. Le Conseil général (corps électoral)

81. Selon l’article 46 Cst/GE, le corps électoral, agissant collectivement, forme le Conseil général ; il ne délibère pas. Le Conseil général est synonyme de corps électoral.

82. L’emploi de cette notion dans le droit genevois remonte au XIVesiècle134, mais son origine « se perd dans la nuit du Moyen-âge »135. Composé des bour-geois de Genève, le Conseil général débattait des affaires de la cité et élisait chaque année ses représentants de manière analogue à la Landsgemeinde des cantons de Suisse centrale136.

130 MGC 1958 III 1998 ; ROLG 1958 p. 298 et p. 301.

131 FF 1959 I p. 1433 ss et p. 1591. A propos de cette garantie, voir Töndury (2004) p. 86.

132 SJ 1999 I 161, consid. 2.a,Union genevoise des carrossiers(TF, 30.11.1998, pour un commen-taire, voir Michel Hottelier,PJA1999/3 p. 344) ; ATF 114/1988 Ia 286,Alain Fracheboud et Jean Dunant, consid. 5.a ; SJ 1972 465, consid. 1.b,Comité pour une élection ouverte(TF, 23.12.1971), consid. non publié à l’ATF 97/1971 I 676,Comité pour une élection ouverte; SJ 1985 172,N.(CE, 14.11.1984) ; SJ 1980 505, consid. 2.c,Regina Film SA(TA, 23.11.1980) ; SJ 1979 389, consid. 7, M.(TA, 11.10.1978). Voir aussi Auer / Malinverni / Hottelier (2006 I) no1726 ; Battelli / Huber / Secretan (1957) p. 467-468 et, pour les relations entre le Conseil d’Etat et le pouvoir judiciaire, Blaise Knapp,Exécutif et judiciaire à Genève, Genève, 1978.

133 Voirinfrano152 ss. Sur le sujet spécifique de la souveraineté du peuple, voir Maurice Battelli,

« La notion de souverainetés du peuple dans les constitutions genevoises du XIXesiècle »,in: Demokratie und Rechtstaat, Festschrift zum 60. Geburstage von Prof. Dr. Zaccaria Giaccometti, Zurich, 1953, p. 10 ss.

134 Dufour (2001) p. 23 ; Giraux (1993) p. 286 ; Beausire / Stoller (1987) p. 5.

135 Fazy (1890) p. 20.

136 Braun (2006) p. 96 ; Dufour (2001) p. 23 ; Fazy (1890) p. 20.

83. Aujourd’hui, le Conseil général est composé des citoyens et citoyennes suisses, âgés de dix-huit ans révolus, domiciliés dans le canton, qui jouissent de leurs droits politiques et qui ne les exercent pas dans un autre canton (art. 1, let. a LEDP). Les Suisses et les Suisses de l’étranger peuvent, à certaines conditions et s’ils en font la demande, être électeurs en matière cantonale (art. 1, let. b LEDP).

84. Le Conseil général est compétent pour nommer le pouvoir exécutif (art. 47, al. 1 ; art. 102, al. 1 Cst/GE), élire les députés du Grand Conseil (art. 70 Cst/GE) et les représentants au Conseil des Etat (art. 51, al. 1 Cst/GE et art. 150, al. 3 Cst.), demander et se prononcer sur un référendum facultatif (art. 53 ss Cst/GE), adopter les actes soumis au référendum obligatoire (art. 53A Cst/GE), lancer et se prononcer sur une initiative populaire (art. 64 ss Cst/GE), ainsi que pour élire les magistrats du pouvoir judiciaire (art. 132, al. 1 Cst/GE) et de la Cour des comptes (art. 47, al. 1 Cst/GE).

2. Le Grand Conseil

85. Le pouvoir législatif est exercé par le Grand Conseil, composé de cent membres élus par le Conseil général d’après le principe de la représentation proportionnelle tempéré par un quorum de 7% (art. 70 Cst/GE)137. Le terri-toire cantonal forme une seule circonscription et le Grand Conseil est renou-velé intégralement tous les quatre ans (art. 71, al. 1 Cst/GE). Tous les citoyens qui jouissent de leurs droits électoraux sont éligibles (art. 72 Cst/GE)138. 86. En comparaison intercantonale, le Grand Conseil se caractérise par une taille (nombre de sièges) raisonnable ainsi que par une activité très in-tense du plénum et de ses diverses commissions139. En 2005, le Grand Conseil a tenu pas moins de 69 séances plénières représentant 145 heures de séances où il a traité 1184 objets, dont 5 initiatives populaires, 484 projets de loi, 156 motions, 121 pétitions ainsi que 95 interpellations urgentes écrites. Il a

137 Pour une présentation du mode de décompte des votes d’une élection au Grand Conseil, voir SJ 2006 I 533,Alliance de gauche et consorts(TF, 8.05.2006).

138 Pour une présentation de l’histoire du Grand Conseil et de l’élection de cet organe de 1892 à 1985, voir Beausire / Stoller (1987). Pour une présentation plus générale du Grand Conseil, voir Pierre Pittard, « Le pouvoir législatif à Genève à travers les siècles »,Annexe au Mémorial du Grand Conseil1985 p. 1 ss. A teneur de la Constitution, les députés doivent être choisis parmi les électeurs laïques du canton (art. 72 Cst/GE). Une telle limitation est cependant contraire à la Constitution fédérale. Voir ATF 114/1988 Ia 395,F. X.Comparer avec RDAF 1975 275,Corthay(TA, 11.06.1975) qui admet encore que les candidats au poste de maire devaient être choisis parmi les électeurs laïcs de la commune.

139 Sciarini (2003) p. 1 et p. 5 ss. Pour une comparaison intercantonale du nombre de députés, voir Nicolas Schmitt, « La diminution du nombre de députés dans les parlements cantonaux », Bulletin de législation1997/1 p. 9 ss et le tableau reproduit dans Ulrich Klöti, « Kantone und Gemeinden »,in: Klöti / Knopefel / Kriesi / Linder / Papadopoulos,Handbuch der Schweizer Politik, Zurich, 2002, 3eéd., p. 400.

en outre procédé à 49 élections140. Quant aux commissions parlementaires, au nombre de 26, elles ont siégé 685 fois en 2005141. Comme au niveau fédéral et dans les autres cantons, le Grand Conseil est peu représentatif de la com-position sociologique de la population cantonale : les jeunes, les personnes âgées et les femmes142 sont sous-représentés alors que les universitaires, les indépendants et les personnes employées dans une association politique sont surreprésentés143.

87. Le Grand Conseil est notamment chargé d’adopter les projets de loi (art. 78 Cst/GE), y compris constitutionnelle (art. 179, al. 1 Cst/GE), de voter le budget (art. 81 Cst/GE), de se prononcer sur les impôts, les dépenses, les emprunts et les aliénations du domaine public (art. 80 Cst/GE), d’accorder la grâce (art. 77 Cst/GE), ainsi que d’approuver l’aliénation des immeubles qui sont propriété privée des collectivités publiques (art. 80A Cst/GE)144. Cer-taines de ces compétences seront approfondies lors de l’examen de l’objet de l’initiative législative cantonale, qui ne peut porter que sur des objets relevant de la compétence des députés145.

88. Les membres du Grand Conseil disposent du droit d’initiative et peuvent proposer des projets de loi, des propositions de résolution, des mo-tions, des demandes d’interpellation ou des questions écrites (art. 89 Cst/GE).

La forme des délibérations et le déroulement des séances du Grand Conseil sont déterminés dans une loi (art. 100 Cst/GE) fréquemment modifiée, la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (LRGC)146.

140 Rapport de gestion du Conseil d’Etat de la République et canton de Genève pour l’année 2005, Genève, 2006, p. 433.

141 Rapport de gestion du Conseil d’Etat de la République et canton de Genève pour l’année 2005, Genève, 2006, p. 434.

142 A ce propos voir Direction du Service du Grand Conseil,Note sur la représentation des femmes au sein du Grand Conseil de la République et canton de Genève (1961-2005), Genève, 2006 ; « Les femmes « ne sont pas des politiciens comme des autres » », FAO du 23 septembre 2005 ; Service pour la promotion de l’égalité entre homme et femme,Pressons Mesdames ! Enquête sur la visibilité des candidats dans la presse genevoise de 1961 à 1981, Genève, 2005.

143 Sciarini (2003) p. 1 et p. 12 ss. La surreprésentation des personnes employées dans des asso-ciations politiques peut être mise en parallèle avec la professionnalisation de la charge parle-mentaire. Sur ce sujet particulier, voir Wolf Linder / Heidi Z’graggen,Professionalisierung der parlamente im internationalen Vergleich, Studie im Auftrag der Parlamentsdienste der Schweize-rischen Bundesversammlung, Berne, 2004.

144 Voir ATF 106/1980 Ia 389,Chevalley.

145 Voirinfrano358 ss.

146 Sur le Grand Conseil, voirVade-mecum, I-Grand Conseil – Mode d’emploi;Vade-mecum, II-La fonction de député;Vade-mecum, III-Le député membre de commission, brochures éditées par le Service du Grand Conseil de la République et canton de Genève, Genève, 2005. Sur l’élection du Président du Grand Conseil, voir Pierre Stoller, « L’élection du Président du Grand Conseil », Annexe au Mémorial du Grand Conseil1988, p. 1 ss. Sur le Mémorial du Grand Conseil, voir Anne Schmutz, Pierre Beausire, Pierre Stoller, « Le Mémorial du Grand Conseil et ses rédacteurs », Annexe au Mémorial du Grand Conseil1989, p. 1 ss.

89. A noter que dans un ouvrage véhiculant une vision idéaliste – voire utopiste – de la séparation des pouvoirs, un journaliste et un député genevois ont exposé que le Grand Conseil genevois avait perdu la maîtrise du pou-voir face au poupou-voir judiciaire et à l’administration, qui était devenue toute puissante147.

3. Le Conseil d’Etat

90. Le pouvoir exécutif est exercé par le Conseil d’Etat, composé de sept membres (art. 101 Cst/GE), élus tous les quatre ans par le Conseil général selon le système majoritaire (art. 102 Cst/GE). Sont éligibles les électeurs de vingt-sept ans révolus (art. 104 Cst/GE).

91. Les Conseillers d’Etat assistent aux séances du Grand Conseil et ont le droit de prendre part aux discussions, de présenter des projets de lois et des amendements ainsi que de faire toute proposition (art. 90 Cst/GE).

92. Selon le Tribunal fédéral, le Conseil d’Etat dirige la collectivité148. A teneur de la Constitution, il promulgue et exécute les lois en prenant à cet ef-fet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 116 Cst/GE)149, présente le budget au Grand Conseil (art. 117, al. 1 Cst/GE), lui rend compte de l’administration et des finances (art. 117, al. 2 Cst/GE), dirige l’administration (art. 118, al. 1 Cst/GE), nomme et révoque les fonctionnaires (art. 120 Cst/GE), veille au bon fonctionnement des autorités inférieures (art. 122 Cst/GE), et édicte les rè-glements de police (art. 125 Cst/GE)150. Il est par ailleurs chargé des relations extérieures du canton (art. 128 Cst/GE).

147 Gautier / Praplan (2006).

148 ATF 121/1995 I 252, consid. 2,Alliance de gauche et consorts. Voir aussi ATF 132/2006 I 104, consid. 4.1,Thierry Clément.

149 Voir SJ 1999 I 161, consid. 2,Union genevoise des carrossiers(TF, 30.11.1998 ; pour un commen-taire, voir Michel Hottelier,PJA1999/3 p. 344) ; SJ 1998 489, consid. 4.c-d,Fédération des taxis indépendants de Genève, Salvador Perez et Isidore Guarino(TF, 18.12.1997) ; ATF 97/1971 I 676, consid. 2,Comité pour une élection ouverte; SJ 1985 172,N.(CE, 14.11.1984) ; SJ 1974 41, consid. 4, Groupe d’habitants des Eaux-Vives et Delle Corraz(TA, 11.09.1973) ; Auer (1991) p. 153 ; Auer (1981) p. 292 ; Haenni (1971) p. 46 ss.

150 Voir ATF 114/1988 Ia 286,Alain Fracheboud et Jean Dunant(sur cet arrêt, voir Jean Dunant,Livre blanc, Blanc-seing donné par le Tribunal fédéral au Conseil d’Etat genevois avec le prétexte de soumettre à autorisation les armes à rechargement semi-automatique, Genève, 1989. Ce pam-phlet a l’intérêt de reproduire tous les actes de procédure ayant conduit à l’arrêt du Tribunal fédéral) ; ATF 111/1985 Ia 231, consid. 5.a,Rolf Himmelberger; ATF 101/1975 Ia 473, consid. 4, R. et consorts; ATF 100/1974 Ia 189, consid. 4,Feuz; Plädoyer 1989/4 60,C.(CJ, 24.04.1989) ; SJ 1980 505, consid. 3-4,Regina Film SA(TA, 23.11.1980) ; RDAF 1979 215, consid. 5,Rex Film SA(TA, 7.05.1977) ; RDAF 1976 68,P.(TA, 4.02.1976 ; SJ 1976 205, consid. 5,Rex Film SA(TA, 7.05.1975) ; Auer / Malinverni / Hottelier (2006 I) no1679 ; Auer (1991) p. 155 ss ; Auer (1981) p. 295 ss. Voir aussi ATF 103/1977 Ia 169,Petitpierre.

4. Le pouvoir judiciaire

93. A Genève, il existe des tribunaux en matière civile, pénale et ad-ministrative (art. 131 Cst/GE)151, dont la liste figure à l’article 1 LOJ152. Les magistrats sont élus tous les six ans par le Conseil général selon le système majoritaire (art. 132, al. 1 et 2 Cst/GE)153. L’élection des juges prud’hommes et le remplacement des postes vacants relèvent de la compétence du Grand Conseil (art. 132, al. 1 et al. 4 Cst/GE). En pratique, les élections sont majori-tairement tacites154.

B. Les communes genevoises

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