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Les autorisations de construire

LA FORME ET L’OBJET DE L’INITIATIVE

Chapitre 3 : La forme de l’initiative

F. Quelques cas particuliers d’initaitives administratives 1. Le classement des bâtiments

2. Les autorisations de construire

512. L’octroi ou la révocation des autorisations de construire relève d’une compétence d’un département de l’administration cantonale (art. 2 LCI). Le respect du principe de la légalité exclut ainsi une initiative législative qui concerne une autorisation de construire définie890. S’agissant d’actes adminis-tratifs susceptibles de toucher des droits du requérant ou des voisins, le prin-cipe d’égalité (art. 8 Cst.) s’oppose également à une initiative constitutionnelle qui porte sur une autorisation de construire891. Cette exclusion doit également concerner l’octroi ou la modification d’une autorisation de construire sur un immeuble public. Certes, le principe d’égalité de traitement ne restreint pas les initiatives administratives sur les projets publics892. La position des tiers pouvant toutefois être touchée par cette construction, le droit d’initiative doit être exclu. La révocation d’une autorisation de construire qui concerne un projet public pourrait cependant être réclamée au moyen d’une initiative

886 ZBl 1989 491, consid. 3.a (TF, 18.12.1988). Pour une critique, Tanquerel (2006) p. 570.

887 Voirinfrano1110 ss et no1498.

888 Pour le cas de l’initiative municipale, voirinfrano857.

889 Voirsuprano473.

890 Voirsuprano395 ss.

891 Voirsuprano406.

892 Voirsuprano407.

constitutionnelle, car la position des tiers n’est pas directement concernée par une telle révocation893.

513. La doctrine s’est prononcée de manière unanime contre l’admissi-bilité des initiatives qui portent sur des autorisations de construire894 et le Tribunal administratif des Grisons a exclu que le corps électoral puisse se prononcer sur de telles autorisations895.

514. Le Tribunal fédéral a toutefois rendu un récent arrêt qui peut laisser penser qu’une initiative est envisageable dans le domaine des autorisations de construire896. Le recours portait sur la décision du Grand Conseil de dé-clarer valide l’initiative « pour un stade raisonnable » (IN 118), qui proposait notamment de réduire une subvention accordée par le Grand Conseil « avec comme condition que la réalisation de ce projet n’implique pas la construc-tion d’un centre commercial dans le secteur de La Praille, soit les terrains situés entre la route des Jeunes et les voies CFF » (art. 1 in fine de l’initiative).

Le stade et le centre commercial ayant été au bénéfice d’une autorisation de construire en force897, l’initiative aurait abouti à la révocation de ces autorisa-tions. Le Tribunal fédéral a pourtant confirmé la validité de cette clause, étant néanmoins rappelé qu’il a invalidé l’initiative pour un autre motif898:

« Le recourant invoque l’art. 65B Cst/GE. Il admet qu’une initiative populaire peut, en droit genevois, contenir des normes matériellement de rang admi-nistratif, pour autant toutefois que la législation cantonale soit respectée et que l’acte en question soit de la compétence du pouvoir législatif, et non du gouvernement ou de l’administration. En l’espèce, l’initiative aurait pour ef-fet la révocation des autorisations de construire et le centre commercial. Un tel acte contraire serait de la compétence exclusive de l’autorité qui a délivré les autorisations, soit le DAEL899. Il en résulterait que l’art. 1, deuxième partie

893 Si un immeuble est intégré au patrimoine financier (sur cette notion, voirinfrano682 ss) d’une commune, celle-ci pourrait toutefois se prévaloir de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.) afin de s’y opposer, en soutenant qu’elle est touchée comme un particulier.

894 Tanquerel (2006) p. 569-570 et p. 571-573 ; Hohl (1989) p. 56 ; Tanquerel (1988) p. 226 ss ; Manfrini (1986a) p. 1083 ; Zaugg (1983) p. 320-321 ; Knapp (1980) p. 2257.

895 PVG 1986 14 (TA/GR, 7.05.1986). Voirsuprano428. Voir aussi ZBl 1986 175, consid. 5 (TF, 29.05.1985) où le Tribunal fédéral a confirmé l’invalidation d’une initiative municipale qui pro-posait d’accorder au pouvoir législatif la compétence d’accorder une autorisation de construire les parkings de plus de 200 places. Il a toutefois fondé son raisonnement uniquement sur le droit cantonal, qui devait être interprété comme interdisant un transfert de cette compétence au pouvoir législatif.

896 ATF 128/2002 I 190, consid. 3.1,Michel Rossetti.

897 Voir Arrêt TF du 16 avril 2002 dans la cause 1A.47/2002,Comité de citoyennes et citoyens pour un choix démocratique et raisonnable. Sur l’histoire de la construction du stade et du centre com-mercial, voir Fischer (2003).

898 Voirsuprano478.

899 Aujourd’hui, il s’agirait du département des constructions et des technologies de l’information (DCTI).

de l’initiative serait nul, faute de compétence du Grand Conseil en matière d’autorisation de construire. Le recourant perd de vue que si, selon lui, la ré-vocation des autorisations de construire est une conséquence de l’initiative, elle ne figure nullement dans le texte de celle-ci. L’acte contraire que pourrait impliquer l’acceptation de l’initiative n’est pas conséquent pas automatique ; il ne serait d’ailleurs pas effectué directement par le Grand Conseil, mais éventuellement exécuté par les autorités administratives compétentes. »900 515. Cette jurisprudence, qui a été critiquée901, semble signifier qu’une ini-tiative peut porter sur une compétence de l’exécutif si elle ne contient pas directement l’acte proposé. L’initiative n’aurait qu’un contenu « programma-tique » et l’autorité ordinaire demeurerait formellement compétente pour ar-rêter la décision. L’initiative proposerait ainsi un but, acceptable : la révoca-tion des autorisarévoca-tions de construire. Charge ensuite à l’autorité compétente de le réaliser.

516. Ce raisonnement n’est pas convaincant. Il permettrait à une initia-tive de porter sur toutes les compétences de l’exécutif, pour autant qu’elle laisse formellement à ce dernier le soin d’adopter l’acte concerné. L’autorité ordinaire n’aurait plus aucune marge de manœuvre. Elle devrait respecter la proposition du corps électoral et adopter la mesure réclamée sans pouvoir effectuer la pesée des intérêts nécessaires à sa décision. De plus, l’observation d’une procédure particulière afin d’adopter une décision dont le résultat est déjà spécialement imposé par la loi n’a guère de sens. Ce procédé risque d’en-traîner une violation des droits procéduraux des particuliers902.

517. L’interdiction de lancer une initiative qui a trait à une compétence de l’exécutif ne saurait être contournée au moyen d’une proposition d’une règle programmatique qui impose à ce dernier d’adopter une décision. En réalité, une telle initiative porte sur une attribution de l’exécutif, qui est exclue du droit d’initiative en application des principes de la légalité (art. 5 Cst.) et de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.).

518. Une initiative qui réclame une autorisation de construire ne doit pas non plus être interprétée comme une demande de planification afin d’être dé-clarée recevable. Le Grand Conseil a pourtant considéré que l’initiative « en vue de l’adoption d’une loi comportant aménagement de la zone Rôtisserie-Pélisserie » (IN 4) qui demandait notamment que cinq parcelles de la com-mune de Genève soient « destinées à l’aménagement d’un ensemble locatif, commercial, de verdure et de détente […] selon demande préalable DP 14 000 »

900 ATF 128/2002 I 190, consid. 3.1,Michel Rossetti.

901 Voir Tanquerel (2006) p. 571-573 ; Tanquerelin: RDAF 2003 I p. 368. Voir également Zufferey in: DC 2003/1 p. 20.

902 Voir Tanquerel (2006) p. 573 ; Tanquerelin: RDAF 2003 I p. 368.

réclamait l’adoption d’une zone protégée. Il s’agissait pourtant d’une réfé-rence à une requête précise d’autorisation de construire déposée par des pro-moteurs. L’initiative réclamait ainsi une autorisation de construire, ou une dérogation à une procédure ordinaire pour un cas particulier et aurait dû être invalidée903.

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