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Les échecs devant le Grand Conseil 1. Le projet de modification de la loi sur

LE CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET HISTORIQUE

Chapitre 1 : Les définitions générales et le cadre institutionnel

B. Les échecs devant le Grand Conseil 1. Le projet de modification de la loi sur

les votations et élections (1954)

239. Au mois de février 1954, le député Chalut a déposé un projet de loi destiné à introduire l’initiative populaire municipale par le biais d’une modi-fication de la loi sur les votations et élections450.

240. Le Grand Conseil a rejeté ce projet pour trois motifs principaux : une introduction de l’initiative municipale devait impérativement prendre la forme d’une modification constitutionnelle451; les communes genevoises n’avaient que des compétences administratives qui se prêtaient mal au droit d’initiative452; enfin, le droit de pétition suffisait amplement aux habitants pour influencer la politique communale453. Le 7 mai 1955, le Grand Conseil a choisi d’ajourner indéfiniment la proposition qui lui était soumise454.

2. Le projet de modification constitutionnelle (1966)

241. En 1966, un nouveau projet, de rang constitutionnel, a été déposé par le député de Félice455. Pour la première fois, l’objet de l’initiative municipale a été défini par un catalogue d’objets (art. 69 du projet) : « Il importe d’abord de fixer la liste des objets sur lesquels peut s’exercer le droit d’initiative : ce sont ceux que la loi sur l’administration des communes place dans les compé-tences du conseil municipal de la commune où l’initiative est lancée »456. 242. Ce projet a, à nouveau, été sujet à controverses. Les députés craignaient que les propositions des citoyens ne prennent pas en compte les possibilités financières limitées des communes457. Ils soutenaient que l’initiative popu-laire municipale ne pouvait pas être introduite en raison des compétences essentiellement administratives des communes458. Consultée, l’Association

450 MGC 1954 I 267.

451 MGC 1955 I 446, p. 446, M. Lecoultre, rapporteur de la majorité ; MGC 1955 I 753, p. 758-759, M. de Senarclens, Conseiller d’Etat.

452 MGC 1955 I 446, p. 446, M. Lecoultre, rapporteur de la majorité ; MGC 1955 I 753, p. 759, M. de Senarclens, Conseiller d’Etat ; MGC 1955 I 753, M. Maître.

453 MGC 1955 I 753, p. 754-755, M. Lecoultre, rapporteur de la majorité.

454 MGC 1955 I 753, p. 761.

455 MGC 1966 IV 3399.

456 MGC 1966 IV 3399, M. de Félice.

457 MGC 1966 IV 3399, p. 3405 et p. 3411, M. Duboule, Conseiller d’Etat.

458 MGC 1966 IV 3399, p. 3405, M. Duboule, Conseiller d’Etat, p. 3408, MmeGirardin, p. 3412-3413, M. Fontanet ; MGC 1969 I 593, p. 594-595, p. 608, M. Picot, rapporteur de la majorité.

des communes genevoises a d’ailleurs désapprouvé ce projet459. Le 21 février 1969, le Grand Conseil a refusé l’introduction de l’initiative municipale460. 243. A la fin des débats, l’auteur du projet a néanmoins fait une remarque dont la trace se retrouve aujourd’hui dans l’énumération des objets de l’initia-tive municipale inscrits à l’article 36 LAC461:

« C’est bien une attribution de la commune que de décider de percer une rue, de refaire un chemin, d’acheter un bâtiment, une propriété, de bâtir une école, de créer une fondation d’intérêt communal. Toutes ces choses-là sont des problèmes d’intérêt général qui pourraient fort bien être pro-posés par une initiative des citoyens déçus de ce que leurs autorités ne le fassent pas. »462

C. La consécration de 1981

1. L’affaire de « l’Hôtel de l’Ecu de Savoie »

244. En 1977, l’opportunité d’introduire l’initiative municipale s’est impo-sée à l’occasion d’un événement de la vie politique carougeoise463. Le 10 fé-vrier 1977, le Conseil municipal de la Ville de Carouge a refusé d’acquérir un bâtiment, « l’Hôtel de l’Ecu de Savoie », pour le préserver d’une démolition annoncée464. Conformément aux indications qui figuraient sur la délibération du Conseil municipal affichée au pilier communal, un groupement pour la protection du vieux Carouge, « Le Boulet », a lancé un référendum. Le 14 mars 1977, il a déposé 1386 signatures à l’appui de sa demande.

245. Suite à un avis de droit de Knapp465, le Conseil d’Etat a annulé la procédure de référendum, car le droit genevois assignait à cette institution un rôle négatif qui permettait exclusivement aux citoyens de s’opposer à un

459 MGC 1969 I 593, p. 593-594, M. Picot, rapporteur de la majorité.

460 MGC 1969 I 593, p. 614.

461 Selon l’art. 36, al. 1 LAC, l’initiative municipale s’exerce sur les objets suivants : la construction, la démolition et l’acquisition d’immeubles communaux (let. a) ; l’ouverture ou la suppression de rues ou de chemins communaux (let. b) ; les travaux d’utilité publique communaux (let. c) ; les études d’aménagement du territoire communal (let. d) ; la constitution de fondations d’intérêt communal de droit public ou privé (let. e) ; les activités sociales, culturelles, sportives et récréa-tives, ainsi que leurs aménagements et installations (let. f ).

462 MGC 1969 I 593, p. 613-614, M. de Félice.

463 Beausire (1983) p. 186quater.

464 Ce bâtiment, sis à la rue Vautier, a finalement été préservé et transformé en un centre musical.

465 Il s’agit d’un avis de droit de Blaise Knapp du 6 mai 1977. Cité dans l’ACE du 1erjuin 1977, il n’est pas publié et nous n’avons pas réussi à en obtenir un exemplaire.

projet adopté par les autorités466. Il a considéré que la demande de référendum déposée par le groupement pour la protection du vieux Carouge devait être traitée comme une pétition.

2. L’adoption de l’initiative municipale

246. Dans ces circonstances, les députés Rossel, Borner et Riesen ont rapidement déposés deux projets de loi visant à introduire l’initiative muni-cipale467. Ils ont été bien accueillis par un Grand Conseil marqué par l’affaire carougeoise468. Une minorité y est néanmoins demeurée opposée en raison des prérogatives administratives des communes469.

247. La commission du Grand Conseil chargée de l’étude de ces projets a arrêté l’orientation de la réglementation qui est encore en vigueur à ce jour.

Le principe de l’initiative devait être prévu dans la Constitution et c’est la loi qui devait en définir les détails. L’initiative devait en outre être non rédigée et être limitée à une énumération d’objets inscrits dans la loi470.

248. Le 18 décembre 1980, le Grand Conseil a accepté la loi constitution-nelle introduisant l’initiative populaire municipale471. Le 10 mai 1981, le peuple a adopté cette modification de la Constitution avec 59,9% de votes favorables472. Cette novelle est entrée en vigueur le 30 mai 1981473 et a obtenu la garantie fédérale le 15 décembre 1981474.

466 ACE du 1erjuin 1977. Voir à ce propos la FAO du mercredi 8 juin 1977. A noter que selon le Tribu-nal fédéral, un référendum contre une décision négative est impossible, sauf si le droit canto-nal le prévoit explicitement. Voir ATF 101/1975 Ia 378,Bischoff; ATF 99/1973 Ia 524,Röösli. Voir toutefois Auer (1978) p. 180 ss qui soutient que le référendum contre une décision négative est possible sauf si le droit cantonal l’exclut explicitement. Sur cette question, voir Grisel (2004) p. 383-384 ; Hangartner / Kley (2000) no1670 ; Karl Spühler, « Zur zulässigkeit des fakulta-tiven Referendums gegen negative Beschlüsse von Zürcher Gemeindeparlemente »,ZBl1989, p. 529 ss ; Brandt (1982) p. 295-296 ; Konrad Keller, « Zur Frage des Zulässigkeit des Referen-dums gegen negative Entscheindungen des Gemeindeparlements »,ZBl1978 p. 49 ss.

467 MGC 1977 III 3926 ; MGC 1977 III 3934.

468 MGC 1977 III 3926, p. 3932, M. Rosselet ; MGC 1977 III 3934, p. 3935, MM. Borner et Riesen, p. 3943, M. Maître, p. 3944, M. Duboule, Conseiller d’Etat.

469 MGC 1980 I 151, p. 164, M. Micheli, rapporteur de la minorité. A l’époque, la doctrine s’interro-geait sur la pertinence d’employer des instruments de démocratie directe pour des décisions concrètes, voir Morand (1982).

470 MGC 1980 I 151, p. 153-154 et p. 156, M. Ziegler, rapporteur de la majorité.

471 MGC 1980 IV 4604, p. 4617 ss.

472 ROLG 1981 p. 158.

473 ROLG 1981 p. 170-172.

474 FF 1981 III 895 ; FF 1981 III 1097.

249. Le 4 juin 1981, le Grand Conseil a adopté la modification de la LAC mettant en œuvre le principe accepté par le constituant. Cette modification législative contenait notamment la définition de l’objet de l’initiative475. 250. L’introduction de cette institution répondait manifestement à une at-tente des électeurs. Huit mois après son entrée en vigueur, le premier texte fut déposé en Ville de Genève. Il demandait la « réhabilitation/remise en état du quartier des Grottes »476. Depuis lors, trente initiatives municipales ont abouti dans les différentes communes genevoises.

D. Les évolutions de la réglementation

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