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Implications possibles pour les entrepreneurs

2 Stress professionnel et burnout, modèles et théories

2.3 Implications possibles pour les entrepreneurs

Les hommes vivent des niveaux de dépersonnalisation plus importants que les femmes (Ogus, Greenglass et Burke, 1990 ; Greenglass, Burke et Ondrack, 1990 ; Schwab et Iwanicki, 1982). L’une des explications est la norme sociale masculine qui se focalise sur les valeurs de la force, de l’indépendance et de l’invulnérabilité (Green-glass, 1995). Une autre explication découle d’un grand besoin d’accomplissement qui fait partie intégrante du rôle masculin.

Les explications avancées ont un réel retentissement dans le cas des entrepreneurs qui sont décrits comme ayant un besoin d’accomplissement important et un fort lea-dership. L’image sociale de l’entrepreneur est imprégnée par la force et la résistance. L’échec à faire face aux difficultés revient à admettre l’incapacité individuelle à être un entrepreneur, réussir et avoir une utilité sociale.

Ces résultats rejoignent ceux d’autres études, où l’aspect désocialisation des per-sonnes vivant un burnout est mis en avant (Jackson et Maslach, 1982). La fuite de la relation avec l’autre est liée au fait de ne plus pouvoir tolérer les frustrations. Elle s’accompagne d’irritabilité, d’attitudes négatives, baisse de la confiance en ses compétences et donc la détérioration de la qualité du travail (Kahill, 1988 ; Maslach et Jackson, 1982, 1985).

Le burnout affecte la vie sociale des personnes et submerge leur vie familiale. Il en découle des tensions entre les deux (Burke et Deszca, 1986). Les conséquences du burnout affectent négativement les capacités sociales d’interaction positives. Ces interactions jouent un rôle important sur le plan professionnel. L’altération de ces capacités peut réduire les capacités de l’entrepreneur à identifier les opportunités et les ressources nécessaires au comportement entrepreneurial.

Les résultats concernant le niveau de stress des entrepreneurs comparativement aux salariés ne sont pas concordants. Le manque de cohérence est lié à l’hétérogénéité des échantillons d’entrepreneurs et de salariés, mais aussi aux limites des outils mo-bilisés. Les comparaisons se font directement sur le seul critère d’être employé ou de travailler pour son propre compte, alors que les conditions salariales et entrepreneu-riales diffèrent en fonction du niveau de responsabilité et de la taille de l’entreprise. Parallèlement, les outils les plus utilisés se fondent sur les spécificités du contexte salarial qui diffère de celui entrepreneurial.

Malgré les limites précédemment citées, certains montrent que le contexte entre-preneurial affecte la santé des entrepreneurs de manière négative. Ainsi, les troubles les plus cités, rapportés dans une étude suédoise sur les propriétaires dirigeants de PME, dans l’ordre décroissant, sont : les troubles musculo-squelettiques, les pro-blèmes de santé mentale et une santé générale faible (Gunnarsson, 2010). Ces ré-sultats soutiennent que les dirigeants font face au stress dans le cadre du travail. Ce stress influence négativement leur état de santé, indépendamment du fait qu’ils subissent plus ou moins de stress que les salariés.

Les contraintes professionnelles assimilables à des facteurs de stress, en plus d’avoir des répercussions sur l’état de santé, affectent l’évaluation individuelle des évènements et des situations (Gollac et Volkoff, 2006). Certains évoquent des senti-ments d’insatisfaction, des symptômes tels que l’anxiété, la dépression et l’irritabilité (Rahim, 1996). Pour Naffziger, Hornsby et Kuratko (1994), les entrepreneurs peuvent avoir envie d’arrêter mais hésitent à se désengager compte tenu de leurs investisse-ments antérieurs. Ils se sentent alors comme prisonniers de leur entreprise à cause de la pression sociale face à l’échec et des risques de perte des investissements réalisés. L’engagement en termes de temps pour les diverses activités de l’entreprise ex-plique en partie le stress entrepreneurial et la baisse de la satisfaction au travail. La satisfaction est en relation avec le besoin d’accomplissement et d’indépendance. Elle catalyse l’implication et l’engagement dans le travail afin d’assouvir des ambitions généralement démesurées (Akande, 1994).

L’investissement financier, l’impératif de rembourser des créances et l’obligation de dégager des profits peuvent expliquer le fort engagement. Ce dernier est à l’origine de la solitude et de l’isolement (Gumpert et Boyd, 1984 ; Boussaguet et Canevet-Lehoux, 2013). Les conséquences sont un accès restreint aux ressources portées par le réseau social, ainsi qu’un manque de soutien social néfaste pour la santé mentale. La détérioration de la santé mentale, liée au burnout, est spécifiée par la baisse de l’estime de soi, l’irritabilité, l’anxiété et le sentiment d’impuissance, les changements de personnalité avec des attitudes cyniques et agressives, le manque de concentra-tion, la baisse de la mémoire avec un manque de précision et l’augmentation de la désorganisation (Maslach et Jackson, 1982 ; Kahill, 1988). D’après une étude menée en situation simulée, les personnes vivant un burnout prennent des décisions plus ra-pidement que les autres et s’y attachent fermement (McGee, 1989). Ce qui exprime

un changement concernant les capacités de prise de décision qui peuvent traduire une altération ou impliquer des effets négatifs.

Hobfoll (1989, 2001), stipule que le manque de ressources nuit aux capacités in-dividuelles à faire face au stress. Ainsi, comme présenté précédemment, les individus qui ont peu de ressources ne peuvent pas engager des ressources et espérer en ga-gner. Les investissements qu’ils réalisent sont moins importants et donc les retours sur investissements sont moindres. Dans les situations de manque de ressources, ce sont les stratégies d’évitement qui priment car elles nécessitent peu de ressources. Toutefois, elles ne peuvent être que temporaires. Dans les situations où l’individu perçoit une perte ou une menace pour ses ressources, il est fragilisé. La priorité est donnée à leur protection et leur maintien.

Le stress professionnel tout autant que le burnout sont directement en relation avec les facteurs se trouvant dans l’environnement professionnel. L’engouement que présente leur étude est directement en relation avec les conséquences négatives qu’ils portent pour l’individu et l’organisation. Les effets sur l’individu se retrouvent dans la dégradation de son état de santé mentale et physique. Le manque de ressources pour faire face aux stresseurs induit des comportements de retrait et une baisse de la productivité.

Les entrepreneurs font face à des demandes psychologiques importantes mais disposent d’autonomie et de compétences pour y répondre. Ils semblent profiter de beaucoup de satisfaction professionnelle à travers l’accomplissement personnel. Tou-tefois, cette satisfaction est sujette à des effets négatifs induits par les stresseurs et le burnout. Les ressources familiales jouent un rôle important dans le processus entrepreneurial. En plus des informations et du soutien matériel, elles apportent un soutien social qui est modérateur de l’impact des demandes professionnelles.

Synthèse

— Plusieurs approches pour le stress professionnel cohabitent dans la littérature. Les modèles qui en découlent ont été validés dans de nombreuses études. Ils permettent de dégager un ensemble d’antécédents et de conséquences pos-sibles à mobiliser.

— Le burnout en tant que concept de recherche est un concept bi-dimensionnel avec l’épuisement émotionnel et le désengagement. Il est la conséquence d’une exposition prolongée à un haut niveau de stress.

— Le conflit travail-famille, la baisse de la satisfaction et de l’engagement profes-sionnels font partie des conséquences induites par le burnout. L’épuisement des ressources de l’individu traduisant ce syndrome conduit au développe-ment de comportedéveloppe-ments affectant négativedéveloppe-ment la performance de l’individu et de l’organisation.

— Pour faire face à l’épuisement des ressources, les individus mettent en place des stratégies visant à anticiper, réduire ou éliminer les facteurs de stress. Dans la situation de burnout, la dégradation de l’état de santé mentale et physique s’accompagne de comportements de retrait et d’une auto-évaluation négative des capacités individuelles.