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Burnout dans le processus entrepreneurial

La recherche en entrepreneuriat s’intéresse aux motivations individuelles et aux conditions environnementales qui poussent à la création d’entreprise. Elle aspire à identifier des leviers pour améliorer la croissance, le développement et la pérennité des entreprises. Les résultats qui en découlent sont d’une grande importance pour atteindre les objectifs sociaux et économiques attendus au niveau politique. Toute-fois, ces objectifs peuvent être entravés à cause des effets induits par certains risques. Parmi ces risques, les risques psychosociaux représentent ceux qui suscitent le plus d’intérêt, de nombreuses actions ont été mises en place afin de lutter contre eux.

Les risques psychosociaux sont en relation avec une baisse de la performance des organisations directement à travers la baisse de la motivation, de l’engagement et l’augmentation du turnover. La relation indirecte est explicitée par la réduction de la performance liée à la dégradation de l’état de santé des travailleurs. D’après Tron-tin et coll. (2010), en France en 2007, le coût minimal estimé du stress professionnel est compris entre 1.9 et 3 millards d’euros. Cette estimation se fonde sur le calcul des absences et des coûts liés aux symptômes et aux maladies associés aux risques psychosociaux.

Les actions développées pour lutter contre les risques psychosociaux reposent sur la multitude des résultats issus de la recherche. Le développement, la structuration et la systématisation des travaux sur l’interaction entre les conditions de travail et la santé du travailleur ont conduit à identifier des facteurs ou des risques ainsi que des effets ou des conséquences qui y sont rattachées. La population des entrepreneurs est rarement incluse dans ces études. Pourtant, certains chercheurs alertent sur la présence de ces risques et la gravité des conséquences qu’ils peuvent avoir

notam-ment sur le maintien et l’évolution des entreprises. Actuellenotam-ment, cette thématique est en phase d’émergence et manque de structuration. Les publications sur le thème de la santé des entrepreneurs sont sporadiques (Torrès et Chabaud, 2013 ; Torrès, 2013). Elles mobilisent des cadres d’analyse et des outils différents. Les plus récentes font appel à des outils validés et produisent des résultats robustes. Elles concernent le stress professionnel et confirment la présence de stresseurs dans le contexte en-trepreneurial. Les résultats permettent de discuter leur influence potentielle sur les individus et les organisations.

Une des conséquences de l’exposition au stress professionnel est le développe-ment du syndrome de burnout. Il représente un risque fort pour différentes catégories de travailleurs. En termes de risques, les entrepreneurs dans le cadre du processus entrepreneurial font face au stress professionnel. Il est reconnu comme une caracté-ristique de leur contexte professionnel. Ainsi, il est possible que le burnout puisse être aussi un risque pour le processus entrepreneurial. D’ailleurs, Jamal (2007) suppose que les entrepreneurs seraient plus exposés au burnout que d’autres catégories de travailleurs. Pourtant, la question du burnout ne fait pas l’objet de recherches empi-riques chez les entrepreneurs. Le travail de Gryskiewicz et Buttner (1992), est le seul qui s’y intéresse mais uniquement dans l’objectif de valider un modèle explicatif. Les auteurs ne montrent pas de relations particulières avec le contexte entrepreneurial ni avec les conséquences.

Wincent et Örtqvist (2006b) ainsi que Tetrick et coll. (2000) ont mené un travail plus spécifique. Ils montrent que certaines demandes professionnelles intrinsèques au processus entrepreneurial conduisent à l’épuisement émotionnel. Ce dernier est la principale dimension du burnout. Certains le considèrent même comme le point de départ du développement du symptôme (Leiter, 1993).

Dans la littérature entrepreneuriale, différentes approches ont été développées pour discuter les éléments intervenant dans le processus entrepreneurial (section 1). Certaines approches se focalisent sur les individus pour dégager des caractéristiques relatives au comportement entrepreneurial. L’innovation, la prise de risque et la proactivité se dégagent comme des gages d’entrepreneuriat. Le concept de l’orien-tation entrepreneuriale (innovation, prise de risque, proactivité), en l’absence d’une définition claire et consensuelle de l’entrepreneur acquiert une importance capitale.

sociales sont importantes pour construire ou identifier les opportunités. Elles inter-viennent positivement dans le processus entrepreneurial. Le rôle de ces éléments est explicité dans les différentes approches qui peinent à porter une vision processuelle. Cette lacune renvoie au manque d’intégration et de considération pour l’aspect in-teractionnel entre l’individu et son environnement.

Afin de répondre à la problématique de ce travail, il est nécessaire de faire appel à des emprunts théoriques et méthodologiques provenant de la psychologie (section 2). De nombreux modèles empiriquement validés, coexistent pour identifier les facteurs de stress professionnel et évaluer leurs effets. En ce qui concerne le burnout, certains modèles dominent la recherche. Ils portent une vision processuelle où le burnout est le résultat de l’exposition prolongée à un stress aiguë. Les recherches de Maslach et ses collègues ont été pionnières et demeurent influentes, le burnout est considéré comme un concept tri-dimensionnel comportant : l’épuisement émotionnel, le cynisme ou le désengagement et la réduction du sentiment d’accomplissement personnel. La prin-cipale limite de ce modèle est le manque de soutien empirique pour la troisième dimension proposée, et la focalisation sur l’influence des contextes professionnels à forte interaction interpersonnelle.

La prolifération des travaux sur le burnout a montré son existence dans la plu-part des professions et pas uniquement celles où les contacts interpersonnels sont exacerbés. Le modèle de Demerouti et coll. (2001a) prend en compte uniquement les deux dimensions validées par les différentes méta-analyses. Conçu pour être utilisable dans l’ensemble des contextes professionnels possibles, il se défait des particularités professionnelles. Il s’inspire de la théorie de conservation de ressources pour expliquer le développement du burnout (section 3).

Le burnout est considéré comme un construit bi-dimensionnel avec l’épuisement émotionnel et le désengagement. Les ensembles représentés à la fois par les demandes et par les ressources peuvent contenir toutes les demandes et les ressources perti-nentes pour l’étude du burnout dans un contexte professionnel particulier. Ce modèle ainsi que la théorie de conservation des ressources se dégagent comme des grilles de lecture adéquates pour répondre à la problématique de ce travail. Les demandes et les ressources particulières au contexte entrepreneurial peuvent être étudiées sous l’angle de risques issus ou pesant sur le déroulement du processus entrepreneurial.

1 Du processus entrepreneurial à l’étude du