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QUELQUES INSTRUMENTS DE MUSIQUE DU TANGANYIKA

3. LES IDIOPHONES

3.1. LE TAMBOUR À FENTE

On retrouve dans la région deux formes clas-siques de tambours à fente, celle cylindro-conique récoltée par le capitaine Storms (MO.0.0.31697) et celle trapézoïdale collectée par Albert Maesen et introduite dans les collections du MRAC en 1955 (MO.1953.74.7717). Les notes des Pères Blancs donnent les descriptions suivantes de ces instru-ments. « Le kiondo (pluriel : biondo) : tronçon d’arbre évidé, percé de deux ouvertures rectangulaires, com-muniquant par une étroite rainure ; bords échancrés.

Longueur de 50 à 60 centimètres. On frappe le tam-tam à l’aide de mailloches (« musimpo – misimpo), formées de baguettes dont l’extrémité est enveloppée de caoutchouc. »

Emploi : 1) Les biondo accompagnent les chants et les danses ; 2) Transmettent à distance les nouvelles : ceci est un art réservé à des spécialistes. Ce langage Le tambour nfukuwla

Tabwa.

(MO.0.0.3430, collection MRAC Tervuren ;

© MRAC Tervuren.)

(MO.0.0.31695, collection MRAC Tervuren ;

© MRAC Tervuren.)

Tumbwe.

(& MO.0.0.31696, collection MRAC Tervuren ;

© MRAC Tervuren.)

(MO.1973.16.34, collection MRAC Tervuren ; photo J. Van de Vyver, © MRAC Tervuren.)

Tambour à fente kiondo (Weghsteen 1964.)

TROISIÈME PARTIE : LES HOMMES

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tambouriné s’exprime par des coups de baguettes. On dit à haute voix chacun des mots qu’on confie au tam-bour. On dirait vraiment qu’ils transmettent à distance leurs paroles par les sons qu’ils provoquent avec leur baguette. La plupart ne connaissent que des formules stéréotypées. Exemple pour réunir les gens : « Kali hala muibunge, kahilo asahwile mukwabo » (bis) = « que ceux qui sont loin se groupent, que quiconque n’y est pas soit averti par son compagnon ». Exemple pour la guerre : « Bilonda balume, balumiani batembo mu nkulila » = « aux armes, o hommes, soyez des héros pour frapper ». Le nkumvi : gong ou tambour plat en forme de trapèze renversé ; il est fait d’une seule pièce de bois évidé. Hauteur = 75 centimètres. Il sert à la plupart des danses et aussi à la téléphonie dans le village.

Un autre tambour à fente est relevé par le R. P. Wegh-steen, il s’agit du nkumwi. « Ce gong ou tambour plat en forme de trapèze renversé est taillé d’une seule pièce dans un bloc de bois. »

3.2. LES LAMELLOPHONES

Aux dires du capitaine Storms, les lamello-phones ne sont pas très communs dans la région ; un seul de cette catégorie d’instrument sera d’ailleurs récolté. Tout porte à croire qu’il s’agirait d’un kabwai (MO.0.0.31699), c’est le nom donné par le Père Blanc.

Une sanza à 1117 lames. Les hauteurs de ces lames ne nous sont malheureusement pas connues. Mais le capitaine prendra soin de préciser qu’à l’intérieur de la planche, faisant office de caisse de résonance,

17 Bien que l’instrument décrit par le père ne comporte que 9 lames.

sont placées des perles mitunda et de petites plaques de fer pour créer un léger grésillement qui confère à l’instrument une identité propre en termes de timbre. Il souligne également en bas de page que ces instruments peuvent allégrement être nantis d’une seconde caisse de résonance en calebasse, toujours pour en augmenter le volume sonore, comme nous pouvons le voir sur la figure ci-dessous.

Tambour à fente cylindro-conique.

(MO.0.0.31697, collection MRAC Tervuren ; photo J.-M. Vandyck, © MRAC Tervuren.)

Tambour à fente trapézoïdal.

(MO.1953.74.7717, collection MRAC Tervuren ;

© MRAC Tervuren.)

Tambour à fente trapézoïdal nkumwi.

(Weghsteen 1964.)

Différents lamellophones répertoriés par le R. P. Weghsteen en 1964. Le premier est désigné par le terme likembe, le deuxième par le terme kabwai et le troisième par le terme kankobele.

Lamellophones Kabwai.

(MO.0.0.31699, collection MRAC Tervuren ; photo J. Van de Vyver,

© MRAC Tervuren.)

TANGANYIKA

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3.3. LES HOCHETS

Dans les collections du MRAC, nous pouvons distinguer deux types de hochets, ceux en vannerie (MO.0.0.7716), et ceux en calebasse (MO.0.0.31861).

Le premier objet est un hochet en vannerie, à l’inté-rieur duquel sont placées de petites coques de fruit solides, et attaché à un manche en bois par une pièce de tissu. Le deuxième est une calebasse entière sur laquelle passe un filet auquel peuvent être attachées des coquilles de bois ; cet instrument est fort proche organologiquement du shekeré cubain et mandingue.

Les formes géométriques gravées sur les parois exté-rieures rappellent celles du kominio.

Il est intéressant de voir ici que ces deux instru-ments ne se retrouvent pas dans les descriptions des auteurs que nous avons suivis jusqu’ici ; ceux-ci décrivent d’autres idiophones. Dans sa description (1964 : 85-111), le R P. Weghsteen parle de différents types de hochets, fort en usage dans le Marungu,

qu’il précise n’être utilisés que comme instruments de danse complétant les parures, accompagnant les chants et terminant les formations orchestrales. Nous les retrouvons dans la figure ci-dessous à gauche, et nous adoptons la définition de l’auteur. Le premier objet est un nsombe, « grelot naturel composé de huit coques d’un fruit […] accouplées deux à deux sur des bâtonnets ou réunies par des liens en fibres végétales » (Weghsteen 1964). Le deuxième est un grelot en fer désigné sous le vocable ngwele et qui est constitué d’un ovale de fer replié, à l’intérieur duquel se trouve une bille ou un caillou arrondi. Ces grelots sont reliés entre eux sur une lanière en cuir et atta-chés aux chevilles ou aux poignets des danseurs. On retrouve dans les collections du MRAC des instru-ments similaires notamment à ceux des régions limi-trophes, notamment au Rwanda (MO.0.0.41802).

3.4. LES CLOCHES

Le luembo, cloche double (MO.0.0.31692) est décrit ici comme instrument de signalement. « Le maillet qui sert à les frapper est le même que celui qui sert à battre les gongs de bois. Ces cloches construites de la même façon que les clochettes qui servent à la parure, donnent comme le gong deux sons différents […] les bords en sont soigneusement soudés par un martelage au rouge vif. Les deux cloches sont réu-nies par une bélière et suspendues à une forte corde » (Storms 1886).

Cet instrument est parfois aussi utilisé pour sou-tenir des récits ou des fables en venant enrichir la palabre d’un soubassement musical et en s’y subs-tituant parfois à l’instar du langage tambouriné des tambours à fentes kiondo vus plus haut, fonction-nant sur l’alternance de tons hauts et de tons bas, comme le dépeint très clairement le commandant Storms. D’autres cloches font également partie de l’instrumentarium de la région, et le père Weghsteen vient, une fois n’est pas coutume, compléter les man-quements dans nos collections de ses précises des-criptions. Il s’agit de la cloche dibu, « clochette en fer, c’est-à-dire une lame de fer repliée grossièrement sur elle-même, dont le battant en fer plain est suspendu à l’intérieur à une tige très mince et recourbée qui per-met d’y passer une ficelle pour le suspendre au cou d’une chèvre, parfois même à la patte d’un coq, pour en faciliter la garde, mais surtout au cou des chiens de chasse qui en courant agitent la clochette dont le tintement effraie le gibier et permet aux chasseurs de la suivre dans les hautes herbes » (Weghsteen 1964).

Hochet en vannerie.

(MO.0.0.7716, collection MRAC Tervuren ; photo J. Van de Vyver, © MRAC Tervuren.)

Hochet en calebasse.

(MO.0.0.31861, collection MRAC Tervuren ; photo J. Van de Vyver,

© MRAC Tervuren.)

Instruments de musiques batabwa (Weghsteen 1964).

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TROISIÈME PARTIE : LES HOMMES

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Le terme et l’usage qui en est fait rappellent les dibu, les clochettes en bois des Bakongo, qui, elles, sont placées sous le ventre des chiens pour révéler leur présence lorsqu’ils n’aboient pas (MacGaffey 2002).