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BIODIVERSITÉ, PARCS NATIONAUX ET RÉSERVES

LITTÉRATURE ET DOCUMENTS CONSULTÉS

1.1. BIODIVERSITÉ, PARCS NATIONAUX ET RÉSERVES

Aucun parc national ne se trouve dans le district du Tanganyika ; néanmoins, le district compte deux régions d’une très grande importance biologique.

La région montagneuse dans l’est fait partie du Rift Albertin. Le Rift Albertin est le fossé tectonique qui s’étend du nord du lac Albert à l’extrémité sud du lac Tanganyika. Il comprend les lacs du Rift ainsi que tout le couvert végétal se développant sur ses pentes.

Dans la suite de ce chapitre, l’expression « Rift Alber-tin » désignera exclusivement la région terrestre du Rift (donc sans les lacs) ; on traitera le lac Tanganyika comme une région à part.

La région du Rift Albertin (Plumtre et al. 2003 : 107) est considérée comme une région d’importance mondiale pour la protection de la nature. Elle abrite une énorme richesse en espèces, dont une grande partie est endémique (c’est particulièrement le cas des oiseaux).

Le lac Tanganyika (Coulter 1991 : 354, Coulter 1994 : 13-18, Snoeks 2000 : 17-38, De Vos & Snoeks 1994 : 391-405) est le plus ancien, le plus grand et le plus profond lac du grand Rift est africain. Il existe sous différentes formes depuis environ 20 mil-lions d’années durant lesquelles son niveau a varié considérablement. Il est parfois tombé à moins de 600 m, ce qui a entraîné la formation de trois lacs séparés, correspondant aux trois sous-bassins recon-nus aujourd’hui. Le lac mesure 650 km de long et

50 km de large en moyenne. Son volume d’eau est de 18 880 km3, ce qui en fait la seconde réserve d’eau douce au monde, après le lac Baïkal. Sa profondeur maximale est de 1470 m. Le littoral composé d’une mosaïque d’habitats différents, comme des côtes rocheuses, des plages de galets ou de sable, mesure environ 2000 km. L’eau oxygénée est présente jusqu’à environ 70 m de profondeur dans le nord du lac et 200 m dans le sud.

Le grand âge du lac et la présence de différents types d’habitat combinés à la présence d’eau oxygé-née en grande profondeur ont fait du lac Tanganyika un important centre d’évolution et de spéciation.

La faune du lac est caractérisée par une énorme diversité. Comme beaucoup d’espèces ont évolué dans le lac lui-même, le nombre d’espèces endé-miques est particulièrement élevé. Un grand nombre d’espèces et d’espèces endémiques d’invertébrés et de vertébrés ont été rapportées. Les sangsues (20 espèces ; 12 endémiques), les gastéropodes (60 ; 37), les copépodes (69 ; 33), les ostracodes (64 ; 60) et les insectes (nombres non connus) consti-tuent quelques exemples d’invertébrés. En ce qui concerne les vertébrés, les poissons (parmi lesquels on distingue deux groupes) forment le groupe le plus diversifié : poissons cichlidés (250, dont 98 % endé-miques) et poissons non cichlidés (145 ; 61).

1.2. INVERTÉBRÉS

Comme indiqué ci-dessus, une très grande diver-sité de groupes d’invertébrés a été rapportée. En voici quelques exemples.

1.2.1. OSTRACODA (OSTRACODES) (Martens 1994 : 203-222)

Les ostracodes sont des espèces de crustacés bivalves de petite taille (d’une longueur d’1  mm ou moins). Ils sont très importants aussi bien en nombre qu’en diversité dans la communauté ben-thique7 du lac Tanganyika. À présent, 64 espèces dans 16 genres ont déjà été décrites, dont 60 espèces et 6 genres endémiques, donc uniques au lac. Beau-coup d’espèces restent néanmoins non décrites et des estimations indiquent un total de 200 espèces dans 25 genres. Ces ostracodes jouent un rôle très

7 «Benthique » : des organismes benthiques sont des orga-nismes vivant près du fond (du lac, de la rivière, de la mer, de l’océan, etc.). L’ensemble des ces organismes forme le benthos.

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important dans la chaîne alimentaire, notamment comme alimentation de nombreux poissons.

1.2.2. GASTROPODA (GASTÉROPODES) (Martens 1994 : 203-222)

Les gastéropodes (mollusques) consistent en deux groupes, les escargots avec coquille en spirale et les limaces (ces dernières sont absentes du lac).

Généralement, les gastéropodes lacustres ont des coquilles faiblement calcifiées et sans ornements.

Ceux du lac Tanganyika ont une coquille fortement calcifiée et ornementée (généralement avec des ner-vures bien développées et parfois même la présence d’épines) qui les font ressembler à des espèces uni-quement marines. Cette évolution vers des coquilles fortifiées et ornées serait le résultat d’une compéti-tion entre prédateurs (crabes d’eau douce) et proies (gastéropodes). Comparés aux autres crabes d’eau douce, les crabes du lac Tanganyika ont une par-ticularité ; une de leurs pinces est nettement plus grande et plus forte que l’autre. Cette « compétition » entre prédateur et proie a mené à une « course aux armements », avec comme résultat la fortification des coquilles face au développement de pinces plus fortes chez les crabes et vice versa.

1.3. POISSONS

1.3.1. POISSONS DES RIVIÈRES

Dans la faune piscicole du district du Tanganyika, une distinction s’impose entre faune des rivières et faune du lac Tanganyika. Pour la faune des rivières, les listes d’espèces sont entièrement basées sur une série de cartes de distribution portant sur l’ensemble des poissons d’eau douce du Congo (ces cartes de distribution ont été réalisées au sein du laboratoire d’ichtyologie du MRAC). Elles ont été établies et mises à jour à partir des données de distribution de la FishBase (Froese & Pauly : 10/2009) et des don-nées tirées de la littérature. La plupart des espèces de la liste ont été recueillies à l’intérieur des frontières du district. Par ailleurs, un certain nombre d’espèces recueillies en dehors du district ont également été ajoutées à la liste. Ces espèces sont soit largement répandues dans la région, soit ont été recueillies non loin des frontières du district du Tanganyika, dans des affluents débouchant dans les rivières à l’intérieur du district. Leur présence à l’intérieur du district lui-même est, par conséquent, hautement probable.

En ce qui concerne les poissons, la faune des rivières du bassin congolais est dominée – et c’est donc aussi le cas dans le district du Tanganyika – par une série d’ordres ou de familles.

L’ordre des Characiformes est l’un des plus riches en termes d’espèces dans le bassin du Congo. Il est dominé par les familles des Alestiidae et des Disti-chodontidae. Le genre Hydrocynus (poisson-tigre) fait partie de la famille des Alestiidae. Le poisson- tigre est le plus grand poisson prédateur du bassin du Congo. Il se caractérise par un corps fuselé et par une large bouche pourvue de dents acérées et forte-ment développées.

La famille des Cyprinidés ou carpes (de l’ordre des Cypriniformes) comprend plusieurs genres. Deux d’entre eux comportent de nombreuses espèces : le genre Barbus qui regroupe principalement les petits barbeaux, et le genre Labeo où l’on retrouve une série d’espèces de plus grande taille. Bien que ces deux genres regroupent de très nombreuses espèces, celles-ci sont souvent fort semblables et donc diffi-ciles à identifier.

La famille des Mormyridés ou poissons-éléphants (de l’ordre des Osteoglossiformes) comprend une série d’espèces caractérisées, entre autres, par la pré-sence d’un organe électrique. Cet organe se trouve à la base de la queue et peut émettre des impulsions électriques. Leur tête est dotée de récepteurs grâce auxquels ils peuvent capter ces impulsions élec-triques. Ces impulsions leur permettent de s’orienter et de détecter leur proie (ce système est donc compa-rable au système d’écholocation des chauves-souris) et servent aussi à la communication entre individus de la même espèce. La forme des impulsions est dif-férente pour chaque espèce, si bien que ces animaux sont capables de faire la distinction entre des impul-sions émises par des membres de leur espèce (parte-naires potentiels) et des individus appartenant à une autre espèce.

L’ordre des Siluriformes (poissons-chats) com-prend différentes familles présentant une grande variété sur le plan morphologique et écologique.

Les poissons-chats se caractérisent, entre autres, par l’absence d’écailles sur le corps et la présence de bar-billons – parfois très longs – au niveau de la bouche et du menton. Le genre Clarias (famille des Clarii-dae) a une importance commerciale considérable.

Différentes espèces sont fréquemment utilisées en aquaculture en raison de leur grande tolérance par rapport à leur environnement et de leur capacité à être élevées en grand nombre.

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Tout comme les poissons-chats, les espèces de la famille des Cichlidés (nom scientifique Cichlidae, de l’ordre des Perciformes) présentent une grande variété morphologique et écologique (voir aussi le paragraphe sur les poissons du lac Tanganyika).

Les tilapia(s) (Oreochromis niloticus et les espèces apparentées) sont d’une très grande importance économique. Ces espèces sont souvent utilisées en aquaculture et sont ainsi bien souvent introduites dans des régions où elles n’étaient pas présentes à l’origine. L’Oreochromis niloticus absent du bassin du Congo, mais exceptionnellement présent dans le lac Tanganyika, a été introduit en maints endroits où il entre en compétition avec les Cichlidæ d’origine, qu’il finit bien souvent par évincer.

1.3.2. POISSONS DU BASSIN DU LAC TANGANYIKA (Snoeks et al. 1994 : 355-372)

Dans la faune piscicole du bassin du lac Tanga-nyika, on distingue généralement deux groupes.

Le premier comprend la famille des Cichlidés et le deuxième toutes les autres familles. À elle seule, la famille des Cichlidés représente le plus grand nombre d’espèces du lac. Parmi les non-Cichlidés, il y a des familles dont certaines (espèces) se retrouvent plu-tôt dans les affluents ou les marécages autour du lac (Characidae, Cyprinidae), alors que d’autres familles comptent en leur sein un nombre d’espèces (endé-miques) ayant évolué dans le lac même (Synodontis, Lates, Mastacembelidae, détails plus bas, cf. infra).

Avec environ 250 espèces, dont 98 % d’endé-miques, la famille des Cichlidés représente plus de la moitié des espèces du lac. Les espèces de Cichlidés offrent une variété morphologique étonnante.

La plupart des espèces de cichlidés sont adap-tées à des habitats ou substrats très spécifiques. Cer-taines vivent le long de la côte, avec une préférence unique pour les côtes rocheuses, sablonneuses ou à fond de galets, etc. Ces espèces ont souvent aussi une préférence spécifique. Certaines vivent en eau peu profonde, d’autres dans des zones de profondeur délimitées. La présence d’oxygène jusqu’à 200  m a permis à certaines espèces de s’adapter à ces grandes profondeurs, alors que d’autres sont confinées dans les eaux ouvertes.

Bien que la majorité des espèces soit caractéri-sée par un régime alimentaire souvent très spécia-lisé, celles-ci exploitent des sources alimentaires très diverses. La famille des Cichlidés est, entre autres, caractérisée par la présence de deux mâchoires

internes (une évolution du dernier arc branchial).

La dentition des mâchoires externes sert à brouter ou à capturer la nourriture ou la proie, tandis que la dentition interne sert à mâcher. La forme de la dentition externe et interne peut donc varier et est adaptée totalement à leur tâche spécifique (exemples cf. infra). En général, on distingue des planctoni-vores, des herbivores et des prédateurs (insectiplanctoni-vores, piscivores etc.). Dans ces catégories, de nombreuses adaptations particulières ont eu lieu. Parmi les her-bivores, il y a des espèces qui broutent les algues poussant sur les rochers (dents externes en forme de lame, dents internes fines) ; d’autres qui peignent les algues pour en extraire des organismes qui y vivent (dents externes mobiles avec plusieurs pointes fines, formant une sorte de peigne ou brosse, dents internes fines) ; d’autres enfin, les planctonivores, qui se nourrissent en filtrant le plancton par les épines sur les branchies (dents externes réduites, dents internes fines). Parmi les prédateurs (carnivores) on trouve des insectivores (dents externes en forme de canines, dents internes fines), des mollusquivores (dents externes en forme de canines, dents internes grandes et molariformes pour creuser les coquilles) et des piscivores (dents externes fortes en forme de canines, dents internes légèrement molariformes).

Certains de ces prédateurs sont extrêmement spécia-lisés et mangent uniquement les juvéniles ou les œufs d’autres poissons. Il y a même un genre de Cichli-dés qui ne mange que les écailles d’autres espèces.

Pour ce faire, ils ont une bouche asymétrique (ils attaquent leur proie du côté de prédilection ; ceux qui ont la bouche dirigée vers la droite attaqueront du côté gauche et vice versa) et une dentition externe unciforme pour arracher les écailles de la proie.

Parmi les Cichlidés du lac, les soins apportés à la progéniture sont très développés et très variés. Il y a les pondeurs sur substrat qui déposent leurs œufs sur le sol ou dans la végétation et qui, par la suite, protègent leurs œufs et les juvéniles. Il y a ensuite les incubateurs buccaux spécialisés. Dans la majorité des espèces qui pratiquent l’incubation buccale, c’est uniquement la femelle qui prend soin des œufs et des alevins. Dans d’autres espèces, les alevins sont prin-cipalement gardés et protégés par le mâle seul ou les deux parents ensemble. Dans le cas des incubateurs buccaux, la reproduction est caractérisée par des comportements spécifiques (mais variables selon les espèces) des femelles et des mâles. Une description plutôt générale suit (il a y bien sûr de nombreuses variantes de ce comportement). La femelle, attirée

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par un mâle qu’elle choisit comme partenaire, dépose ses œufs sur le substrat ou dans un nid construit par le mâle. Elle fait un tour puis récupère ses œufs en les prenant dans la bouche. Le mâle passe ensuite au même endroit en montrant sa nageoire anale ornée de taches ressemblant aux œufs. Quand la femelle essaie de récupérer ces « œufs », le mâle lâche son frai que la femelle avale. Celui-ci féconde les œufs dans sa bouche.

Le bassin du lac Tanganyika abrite aussi un grand nombre d’espèces de non-Cichlidés. Un total de 145 espèces, dont 61 endémiques au bassin ont été rap-portées (dans certains genres comme Mastacembelus et Synodontis, de nouvelles espèces endémiques ont depuis été décrites).

La famille des Cyprinidae (barbeaux, 46 espèces, 14 endémiques, la majorité de ces espèces se retrouvent dans les affluents, pas dans le lac), celle des Bagridae (poissons-chats ; 18 espèces, 14 endé-miques), celle encore des Mochokidae [(en parti-culier le genre Synodontis), poissons-chats ; 18, 10]

et enfin celle des Mastacembelidae (anguilles épi-neuses ; 12, 11) sont autant d’exemples de familles ou de genres riches en espèces. En dehors du lac Tanganyika, la famille des Latidae (constituée du seul genre Lates) est représentée dans toute l’Afrique par une seule espèce, Lates niloticus (perche du Nil).

Quatre espèces de Lates endémiques, L. angustifrons, L. mariae, L. microlepis et L. stappersi ont évolué dans le lac Tanganyika.

Dans le genre Synodontis, une espèce lacustre a développé le parasitisme sur la progéniture d’autres espèces. Elle est connue sous le nom vernaculaire de « synodontis coucou ». Synodontis multipunctata profite de la stratégie de reproduction d’environ six espèces de Cichlidés qui pratiquent l’incubation buc-cale (voir plus haut). Pendant la reproduction de ces Cichlidés, la femelle de S. multipuctata passe subrepti-cement à travers la frayère des Cichlidés pour y dépo-ser ses œufs fécondés. La femelle du Cichlidé les prend ensuite dans sa bouche, comme s’il s’agissait de ses propres œufs. Comme les œufs de Synodontis éclosent avant ceux des Cichlidés, les alevins de Synodontis mangent les œufs des Cichlidés en développement.

1.3.3. LA PÊCHE DANS LE LAC TANGANYIKA (Coulter 1991)

Les poissons représentent une source de pro-téines très importante pour la population de la RD Congo. La pêche au niveau du lac Tanganyika, qui

supporte une énorme biomasse (estimations jusqu’à 2 740 000 tonnes pour tout le lac), a donc une grande importance économique. Pour assurer une pêcherie durable, il est indispensable d’avoir une bonne idée de la production annuelle du lac et des quantités de poissons pêchés chaque année. Malheureusement, il n’y a de données fiables pour aucun de ces deux para-mètres. En ce qui concerne la production au niveau du lac, on ne dispose que d’estimations approxima-tives (variant entre 467 000 tonnes minimales et 2 740 000 tonnes maximales), et les statistiques de pêche dans le lac Tanganyika sont très peu fiables, parfois même très peu crédibles (MH, observation personnelle).

En gros, on distingue deux types de pêche dans le lac Tanganyika : la pêche côtière, qui est artisanale, et la pêche au large, qui est principalement une pêche industrielle.

La pêche au large, certainement la plus impor-tante au niveau du lac, cible principalement la perche du Nil (les quatre espèces de Lates) et deux espèces de sardines d’eau douce (Limnothrissa miodon et Sto-lothrissa tanganicae, famille Clupeidae).

Les plus grandes menaces pour la pêche dans le lac Tanganyika sont la surexploitation de certaines populations ou espèces et l’emploi de méthodes de pêche destructives. La surexploitation peut induire une réduction de la taille moyenne des espèces ciblées, voire leur disparition totale. Dans la partie zambienne du lac, par exemple, les trois plus grandes espèces de Lates ont presque disparu à cause de la surexploitation. Des méthodes de pêche destructives sont, entre autres, les ichtyotoxines (qui éliminent toute la communauté de poissons) essentiellement utilisées dans les rivières où elles constituent une menace majeure pour la survie des populations.

L’usage de filets à mailles serrées (de trop petite taille), voire de filets fabriqués de toile de mousti-quaire qui capturent des spécimens de toutes tailles (y compris les juvéniles), a une influence ravageuse sur la survie des populations et peut mener à l’effon-drement totale de ces populations et, donc, de la pêche elle-même.

1.4. AMPHIBIENS ET REPTILES