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Identité territoriale ou identité du territoire ?

institutionnelles de faire territoire : quelle intention derrière la production de récit territorial ?

4. De l’identité territoriale à l’image et à l’imaginaire du territoire

4.2. Identité territoriale ou identité du territoire ?

L’embarras généralisé des sciences humaines vis-à-vis de la notion d’identité

Nombreux sont les auteurs à avoir pointé du doigt depuis les années 2000 le recours exagéré à la notion d’identité, ce qui génère pour le chercheur comme pour les politiques un certain nombre d’« embarras » (Descombes, 2013). Roger Brubaker va jusqu’à dénoncer une « capitulation » des sciences humaines et de la littérature devant le mot « identité », cette capitulation ayant un coût à la fois intellectuel et politique (Brubaker, 2001). Il considère qu’il est trop difficile de débarrasser la notion des connotations réifiantes qui lui sont associées, notamment dans certains discours politiques ou médiatiques. La notion d’identité est, en suivant la terminologie bourdieusienne, à la fois une catégorie pratique (ou indigène, c’est-à-dire utilisée dans le vocabulaire de l’expérience sociale quotidienne des individus) et une catégorie d’analyse, supposée construite par les chercheurs avec plus de recul. Ce double statut conduit à des confusions majeures lors de son utilisation, y compris au sein du discours scientifique puisque les deux utilisations s’influencent l’une l’autre. Bien sûr, la notion d’identité est aujourd’hui majoritairement employée dans les sciences sociales dans une perspective résolument constructiviste69 (Berger et Luckmann, 1986 ; Goffman, 1973) et l’accent est mis sur le fait que les identités sont des notions construites, fluides – voire labiles - et multiples, ce qui permet d’emblée de se prémunir de toute accusation d’essentialisme.

68 « Quella laziale è un’identità tenue perché affianca e integra identità locali forti che generano senso di appartenenza,ed è relazionale perché frutto di una incessante, quotidiana, minuta relazionalità fatta di reti e di flussi materiali e immateriali che intrecciano strettamente i diversi territori provinciali. »

69 Ce qui ne semble pas être le cas dans l’usage politique qui est fait de la notion, encore très largement empreinte d’essentialisme.

Mais ne peut-on pas dire avec Brubaker qu’il s’agit là d’un constructivisme « mou », qui rend la notion presque inutilisable dans des analyses sociales parce que son sens a été dévalué à force d’être trop utilisée ? Cet auteur conclut qu’il serait plus pertinent et plus efficace de chercher, dès que cela est possible, à remplacer le terme d’identité par d’autres mots plus féconds. Les termes qu’il propose en remplacement sont les suivants : « communalité », « connexité » et « groupalité » mais leur utilisation me semble malaisée dans la langue française, en particulier dans le contexte disciplinaire de la géographie. La même conclusion se retrouve chez Avanza et Laferté, qui se présentent comme les « enfants critiques de la révolution constructiviste en sciences sociales » (Avanza et Laferté, 2005) et expriment eux-aussi un malaise vis-à-vis du vocabulaire dominant utilisé pour exprimer l’inscription des individus et des groupes sur les territoires. Leur article « Dépasser la construction des identités » reprend cette idée et cherche à montrer que les notions d’ « identification » chez Noiriel, d’ « image sociale » chez Chamboredon et Méjean et d’ « appartenance » chez Renahy permettent, si on les traite conjointement, de dépasser le concept fortement problématique d’identité (Avanza et Laferté, 2005). Une fois de plus, la solution pour se détourner de l’utilisation du vocable identitaire passer par son remplacement par un triptyque de termes couvrant chacun une des dimensions de l’identité. Je partage cette vision et considère effectivement comme salutaire la tentative de se dégager d’un usage inconditionnel ou mal circonscrit de la notion d’identité. Je tenterai à mon tour dans la suite de ce travail de faire un usage limité et raisonné du vocable identitaire et de chercher des notions plus précises pour décrire les phénomènes observés, sans pour autant décider d’adopter ni le triptyque proposé par Brubaker, ni celui proposé par Avanza et Laferté, qui ne me semblent pas immédiatement mobilisables dans le champ de la géographie et des sciences du territoire. Je propose donc d’analyser ici les différentes acceptions théoriques de l’identité territoriale en géographie, et de tenter la formalisation de catégories plus adaptées à la description de mon objet de recherche.

Jusqu’aux années 2000, et malgré des travaux pionniers comme ceux d’Armand Frémont sur l’espace vécu, les géographes francophones semblent avoir eu quelques réserves à assumer les dimensions spatiales de l’identité comme objet de recherche. En 2005, M.-C. Fourny écrivait à ce propos que « l’actualité de la question identitaire l’a de fait imposée aux géographes, mais l’identité territoriale comme concept géographique n’a pas été remis en perspective ». Soulignons que la soutenance de son mémoire de HDR intervient justement au moment où les géographes se saisissent de la manière la plus franche de cette question, à travers notamment la parution de deux numéros thématiques dans des revues phares de la discipline : les Annales de Géographie en 2004 (le numéro est dirigé par Guy Di Méo et intitulé « Composantes spatiales, formes et processus géographique des identités ») et l’Espace Géographique en 2006 (« L’identité territoriale en question »). Ces publications prennent place dans une période charnière pour les études sur les identités collectives, elle correspond à la phase de recul critique évoquée plus haut vis-à-vis d'une notion tellement galvaudée dans

le langage courant et la presse qu'elle est devenue suspecte, mais également à une période où devient centrale la question des relations entre deux échelons en pleine restructuration : le local, et le global, pensés sous l’angle d’un réseau de villes et d’acteurs mondialisés. Le choix de la majorité des géographes francophones, résolument placée du côté des représentations mentales, me semble ainsi particulièrement éclairant et mérite d’être comparé avec la littérature spécialisée italienne. Les géographes italiens se sont également posé récemment à plusieurs reprises la question de savoir s’il était encore opportun de parler d’identità territoriale (Banini, 2003, 2013 ; Governa, 1999 ; Governa et Dematteis, 2005). La conclusion de ces travaux réside dans l’établissement d’une définition de cette notion comme l’aboutissement d’un processus actif, volontaire, par la collaboration d’acteurs locaux :

« l’identité territoriale ne se définit plus seulement sur la base de la proximité des sujets, elle ne se crée pas par le simple fait de partager passivement un territoire donné, mais elle dérive d’une action sociale, de l’agir en comment des sujets dans la construction de projets collectifs, de la mobilisation des groupes, des intérêts et des institutions territoriales, d’un processus de construction collective du niveau local, de la capacité/possibilité pour ce niveau local de se comporter comme un sujet collectif70 » (Governa, 2005)

La perspective est donc moins culturelle que dans le cas français mais plus résolument actorielle et tournée vers la mise en évidence des spécificités locales, dans une optique de développement territorial. Il ne s’agit pas seulement de montrer, à l’image de l’usage que font les hommes politiques de cette notion, que les identités territoriales gagnent aujourd’hui en importance en ce qu’elles procureraient un forme de stabilité et de sentiment de sécurité dans un contexte marqué par des changements profonds de nos sociétés (Agnew, 2001). Il est plutôt ici question d’accorder à la notion une portée opérationnelle, proche de l’idée de projet. Les travaux de M. Labianca qui visent à expliciter les différentes modalités de l’usage du terme identità dans les documents de planification et d’aménagement de la région des Pouilles (Labianca, 2014) en sont un témoignage71. Une première lecture de ces documents a été pour

70 « L’identità territoriale non si definisce più solo sulla base della prossimità dei soggetti, non si crea per condivisione passive di un certo territorio, ma deriva di un’azione sociale, dall’agire in comune dei soggetti nella costruzione di progetti collettivi, dalla mobilitazione dei gruppi, degli interessi e delle istituzioni territoriali, da un processo di costruzione collettiva del livello locale, dalla capacità/possibilità dello stesso di comportarsi come un soggetto collettivo”.

71 Et constitueront une inspiration quant à la méthodologie d’analyse des documents du même type dans mon propre corpus. : « Dalla lettura dei documenti regionali emergono interessanti aspetti sul valore, sul significato anche economico e sociale degli aspetti identitari locali. » (p.8) « L’applicazion del metodo di ricerca ai diversi piani di area vasta evidenzia una particolare comunanza di certi tratti o interpretazioni dell’identità » (p42) (…) l’identità dunque, è comunemente intesa come un insieme di « elementi caratterizzanti e specifici del territorio che coincidono in sostanza con : radici storiche, aspetti geomorfologici, profile urbanistico, socio-demografico, economico, dotazione infrastrutturale, specializzazzioni economico-produttive, elementi storici, architettonici, paesaggistici… del contesto di riferimento » (p43)

elle l’occasion de relever une « récurrence significative » des termes suivants : territoire, région, développement et identité, termes qu’elle n’hésite pas à qualifier de « concepts géographiques (…) autour desquels gravite l’ensemble du corpus des documents régionaux ».

« Les résultats obtenus dans cette analyse montrent que, à chaque fois que le rédacteur fait explicitement référence au terme identité, il lui reconnait une fonction essentielle pour favoriser la mise en valeur du territoire, la cohésion sociale, la construction et la consolidation de réseaux entre acteurs, la participation de la communauté, l’attachement aux lieux, la rénovation de la politique, des modèles de gouvernance et de développement du territoire. A l’identité territoriale est donc reconnue un rôle crucial pour l’efficacité des projets de développement pour la période de programmation 2007-201372 » (Labianca, 2014)

Pour la géographie italienne, l’identité territoriale serait donc surtout perçue comme une ressource qui peut permettre la constitution de « systèmes territoriaux » associant les différents types d’acteurs (Fiori, 2012) ; autant de notions utiles pour ma lecture qui envisage ce discours – cette rhétorique ? – du point de vue de l’institution. Ces considérations ont des implications méthodologiques directes : au-delà des discours directs, officiels et publics des acteurs, elles poussent à nouveau à investiguer la littérature grise des projets de territoire, mais aussi celle associée aux « Grands Événements », porteuse peut-être de plus de nuance et de diversité dans les usages de certains de ces termes clés, au premier rang desquels celui d’identité.

Distinguer « identité territoriale » et « identité du territoire »

L’apport crucial des débats internes à la géographie universitaire de ces dernières décennies réside bien dans la distinction opérée entre « identité du territoire » et « identité territoriale », ou selon la formulation d’Yves Guermond la distinction entre "l'identité d'une région" et la « conscience identitaire régionale des individus" (Guermond, 2006, p. 292). La même opération se retrouve chez les géographes italiens dans un travail récent de synthèse du groupe de recherche « identità territoriale » de l’Association des Géographes Italiens (Banini, 2013). Dans cet ouvrage, Tiziana Banini propose de distinguer ce qu’elle appelle « deux catégories conceptuelles » différentes : une « identità del luogo », définie sur la base des représentations ou images les plus partagées par des groupes à propos des lieux en question, et une « identità di luogo », entendue comme cette partie de l’identité personnelle qui découle du fait d’habiter en des lieux spécifiques, d’y être attaché (Bonnes et al., 2009). Il s’agirait alors

72 « Riepilogandoi risultati ottenuti dall’analisi, tutte le volte in cui il redattore fa esplicito riferimento all’identità riconosce ad essa una funzione essenziale per favorire la valorizzazione dei territori, la coesione sociale, la costituzione e il consolidamento di reti fra diversi attori, la partecipazione della comunità, l’attaccamento ai luoghi, il rinnovamento della politica, del modello di governance e di sviluppo del territorio. All’identità territoriale, dunque, si riconosce espressamente un ruolo cruciale per l’efficacia del progetto di sviluppo per il periodo di programmazione 2007-2013. »

de séparer d’un côté un état caractérisant un espace à un moment donné et dont la mise en évidence des éléments le rend singulier vis-à-vis des territoires environnants lui confèrerait une « identité », et de l’autre, une expression de la territorialité des individus s’exprimant sous la forme d’un attachement à une portion d’espace et susceptible de générer un sentiment d’identité collective.

L’identité territoriale comme sentiment d’appartenance ou attachement territorial

La définition la plus commune du territoire fait de lui un espace socialement approprié. L’identité territoriale est, dans une première approche, souvent privilégiée par les auteurs francophones, une notion commode pour désigner ce rapport étroit entre l’homme - ou la société - et l’espace approprié et sa définition serait alors « la modalité à partir de laquelle un collectif fonde la conscience de sa singularité en la référant à un espace qu’il institue sien » (Fourny, 2005). L’acception de l’identité territoriale dont il est question ici est généralement rapprochée dans la littérature scientifique de celle de l’appartenance territoriale. Il n’est cependant nul besoin de fréquenter quotidiennement ou même régulièrement une portion d’espace pour éprouver envers elle ce sentiment d’appartenance réciproque, cette « relation duale » qui se traduit à la fois par une identification à un territoire donné (je suis de là) mais aussi par une appropriation (c’est « chez moi », c’est « mon pays », « ma » terre…) bien décrite par Yannick Sencébé (Sencébé, 2001, 2007, 2008). La notion d’appartenance territoriale est toutefois sujette aux mêmes critiques que celle d’identité territoriale : celles d’être porteuse de connotations idéologiques trop lourdes, notamment à travers des métaphores (Encadré 1) qui sont utilisées pour l’exprimer» (Debarbieux, 2014). L’idée d’enracinement par exemple, peut rendre l’impression d’un certain fixisme et d’une passivité du sujet. Cet obstacle peut être dépassé par un changement de terminologie, notamment en faisant appel aux notions « d’inscription spatiale » (Guérin-Pace et Filippova, 2008), « d’ancrage » et « d’attachement » supposées plus ouvertes. La notion d’attachement est par exemple très présente dans les travaux de Bruno Latour, pour qui le terme revoit à « ce qui nous attache à autrui et aux choses, qui crée des collectifs non seulement humains mais associant des artefacts ou des éléments naturels (les « non-humains ») aux individus et aux groupes. L’attachement ne ressortit pas d’une rationalité objective et indépendante, mais réside dans le mouvement, dans le sens qui conduit à établir une relation. » (Fourny, 2005, p. 85).

Encadré 1. L’identité territoriale comme enracinement, ancrage ou amarrage

Si ma thèse propose d’analyser les discours, dans leur fond comme dans leur forme, elle ne peut faire l’économie d’une étude attentive des métaphores employées dans mon corpus pour décrire le territoire et son organisation. Or, le fait de porter volontaire l’attention sur l’usage métaphorique des termes dans les supports de la communication institutionnelle ne peut pas aller sans une réflexion sur l’usage qui en est fait dans le discours scientifique. En

effet, « la dimension proprement métaphorique d’un terme, manifeste au moment de son adoption initiale pour désigner autre chose que son signifié usuel, est rarement assumée comme telle dans le langage scientifique » (Debarbieux, 2014). Or, la question de l’identité territoriale est un terreau fertile à la multiplication des tropes, des figures de style et en particulier des métaphores. Enracinement, ancrage voire amarrage sont ainsi mobilisés tour à tour comme des déclinaisons de l’attachement au territoire (formule englobante) sans que la différence entre ces termes ne soit pleinement exploitée. C’est le constat que fait Bernard Debarbieux, qui propose, au contraire, de s’appuyer sur la valeur métaphorique de ces différents termes pour construire une typologie des formes de l’habiter, pour préciser la variété des rapports aux lieux que les individus entretiennent : « Ce distinguo exploite leur signification métaphorique respective, tout en ouvrant la voie à une forme de conceptualisation de chacun : l’ancrage renverrait à une inscription conjoncturelle d’un acteur dans un milieu et une position spatiale donnée ; l’amarrage renverrait à un lien ou un ensemble de liens, eux aussi conjoncturels, qu’un acteur établit au sein d’une configuration spatiale simple ou complexe ; l’enracinement renverrait à une inscription structurelle, plus forte donc, mais davantage capable de menacer l’acteur en question si l’environnement et la configuration spatiale venaient à changer de nature ou si l’acteur devait s’en éloigner. » (Debarbieux, 2014). En effet, on retrouve dans la métaphore horticole de l’enracinement l’image de la plante qui plonge ses racines dans le sol et qui s’en nourrit, et qui le spécifie avec pour corollaire la métaphore du déracinement qui voudrait que le l’arrachage à un sol amène l’organisme concerné à péricliter, ou du moins à en rester durement traumatisé. Le passage, par glissement sémantique, à l’humain ou au collectif humain a très peu modifié le sens cette métaphore.

Il y a là un implicite à régler, ou plutôt une ambiguïté à lever : tel qu’il est envisagé ici, le sentiment d’appartenance n’est pas exclusif. Il est bien sûr possible de ressentir une appartenance envers plusieurs territoires en même temps (Guérin-Pace et Filippova, 2008). De nombreuses études menées en France (Dargent, 2001 ; Dupoirier, 1998 ; Dupoirier et Schajer, 1994), en Italie (Caciagli, 2003a ; Ferrarotti, 1998) ou à l’échelle européenne (sondages réguliers Eurobaromètre) ont aujourd’hui démontré que le sentiment d’appartenance ou la « conscience régionale ou locale » peut s’exprimer vis-à-vis des différents niveaux de collectivités territoriales emboitées (ou non) sans entretenir de rapport de concurrence. Il est donc désormais courant de le décrire comme un phénomène résolument multiscalaire (Belhedi, 2007 ; Di Méo, Sauvaitre et Soufflet, 2004 ; Guérin-Pace et Guermond, 2006), ce qui signifie aussi que le développement par les acteurs d’une collectivité locale d’un discours visant à développer le sentiment d’appartenance des habitants à cette échelle ne se fait pas nécessairement au détriment des autres échelons. Les différentes enquêtes Eurobaromètres (Eurobaromètre 47, 1995 ; Eurobaromètre 81, 2014) ; présentent d’ailleurs le phénomène de multi-appartenance comme particulièrement vif chez les pays méditerranéens – dont l’Italie -, ce qui tend à les distinguer de leurs voisins européens : « l’interaction entre les échelles d’appartenance se présente dans les pays méditerranéens sur

un mode additionnel, plutôt que par une priorité marquée de telle référence vis-à-vis de telle autre » (Rivière, 2004a, p. 85). Les résultats des enquêtes sur l’opinion publique menées en Italie confirment cette variété des échelles d’appartenance. Les travaux menés récemment par les sociologues italiens Ilvo Diamanti et Luigi Ceccarini à l’occasion du cent-cinquantenaire de l’Unification Italienne concluent en effet que « le localisme ne constitue pas une identité qui s’oppose à la dimension nationale »73 (Diamanti et Ceccarini, 2011). Les chercheurs en sciences sociales sont conscients des biais introduits par la manière dont est la question de l’appartenance est formulée dans ce type d’enquêtes, en témoignent le débat au sujet de la « question Moreno74 », qui a fait l’objet d’un numéro complet de la Revue Internationale de Politique Comparée (De Winter, 2007 ; Frognier, 2007). Ces sondages sont donc toujours à interpréter avec précaution et sont, en tout état de cause, difficilement comparables si la question de l’attachement subjectif des individus à une portion d’espace n’a pas été posée exactement dans les mêmes termes.

L’identité d’un territoire

Les chercheurs qui mobilisent la notion d’identité territoriale distinguent au sein de leurs travaux une seconde approche, qu’ils qualifient à l’aide de l’expression « identité du territoire ». Ainsi un lieu, un territoire, pourrait être doté d’une identité en vertu de sa spécificité, de ce qui le rend reconnaissable et identifiable, distinct des territoires qui l’environnent (indépendamment de l’existence ou non d’une conscience régionale ou locale chez ses habitants). Ici aussi, c’est la version constructiviste de la notion d’identité qui est privilégiée : « l’identité donnée à un lieu est fondée sur des propriétés objectives, que redoublent les propriétés subjectives et symboliques » (Michon et Koebel, 2009). Il s’agit d’un construit social, une sorte d’attribut, conféré à un lieu ou un territoire par un individu ou un groupe social afin de le « faire exister » à ses yeux. Michon et Koebel remarquent également que l’identité d’une région suppose l’existence d’une culture partagée, mais qu’elle « n’existe souvent que par la volonté politique qui [la] porte et les plans de communication qui l’accompagnent. L’identité est alors une notion commode pour parler d’espaces dont les caractéristiques sont complexes, ce qui est particulièrement fréquent chez les politiques qui ont besoin d’ensembles cohérents et homogènes » (Michon et Koebel, 2009). L’identité du

73 “Il localismo non costituisce un'identità oppositiva alla dimensione nazionale. (...)Per cui in Italia non ci si dice romani, vicentini, urbinati, torinesi, veneti, siciliani, napoletani, lombardi, milanesi, toscani, fiorentini, pugliesi... o italiani. Ma e italiani. Milanesi e italiani. Napoletani e italiani. Bolognesi e italiani. Marchigiani e italiani. Oppure, viceversa, italiani e romani, ... e catanesi, ... e milanesi. Al tempo stesso. Senza