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Une histoire industrielle “ancienne” marquée par une diversité de procédés, produits et demandes des diversité de procédés, produits et demandes des

DONT ON TROUVE DÉJÀ TRACE DANS LE PASSÉ

1. Une histoire industrielle “ancienne” marquée par une diversité de procédés, produits et demandes des diversité de procédés, produits et demandes des

consommateurs, concurrencés par la houille

Si la bioraffinerie forestière bénéfice d’un engouement récent, le principe et les produits de la bioraffinerie lignocellulosique ont des origines très anciennes. Des

études archéologiques ont permis de dater des traces d’utilisation de brai de

bouleau1 remontant au Néolithique (Regert, Garnier, Decavallas, Cren-Olivé, & Rolando, 2003). Les origines de la fabrication de papier sont très controversées dans

les études archéologiques chinoises. Le dogme de l’invention du papier à partir de

bois (écorce de murier) par Cai Lun - un officier de l’empereur vers 105 après J.C. a été réfuté par la découverte de trace de papiers au nord de la Chine, datant de deux siècles auparavant (Jixing, 2008). Les procédés de prétraitement et de transformation de la biomasse forestière sont également antiques. Les méthodes de distillation étaient déjà probablement utilisées par les babyloniens au IIe millénaire av. J.C. (Levey, 1956). Une tablette cunéiforme datant de 1200 av. J.C. est la plus ancienne mention à ce jour de l’utilisation d’alambic (Levey, 1955). Ce n’est toutefois qu’en 1661 que Robert Boyle applique la méthode de distillation au bois. De même, il va falloir attendre la fin du 18ième et le début du 19ième siècle pour voir l’essor des produits chimiques issus de la bioraffinerie forestière.

La Révolution industrielle, avec le développement de la métallurgie puis de la

machine à vapeur, se construit sur l’exploitation massive de charbon. Or, le gaz de

bois, l’un des principaux coproduits de la transformation du charbon de bois, était usuellement récupéré et liquéfié. Ce liquide, identifié comme le « burnt – wood acid » ou acide pyroligneux par Johan Rudolf Glauber en 1658, a été étudié très tôt afin de

trouver un moyen de le valoriser comme source d’acide acétique2, acétone et

méthanol3 (alcool méthylique). La distillation appliquée au bois pour obtenir cet acide pyroligneux est mise au point en 1796 en Ecosse. C’est ce procédé qui sera copié et permettra l’essor de cette industrie à l’échelle commerciale par James Ward en 1830 dans le Massachussetts et en 1852 à Milburn, New York (Baker, 1985). Le premier four pyrolytique est mis au point par Carl Reichenbach en 1812. Les procédés avec les fours pyrolytiques spéciaux sont restés pratiquement inchangés jusque dans les années 1920 tandis que la distillation en cornues de fer a été grandement améliorée, notamment par un procédé viable de valorisation de l’acide acétique mis au point en 1824 par Mollerat et Jasmeyer (Hawley, 1923).

1 Colle issue de la combustion anaérobie d’écorce de bouleau.

2 La première utilisation industrielle de l’acide acétique servait comme fixateur pour les teintures

textiles

3 « Le Méthanol, acool de bois toxique, était mélangé à d’autre spiritueux potables afin de s’assurer que les personnes qui en buvaient ne deviennent pas aveugles : la condition standard pour qu’un alcool industriel soit exempté de taxes. » (Glesinger 1949 p216) (Traduction libre).

26 Mais ce n’est qu’en 1835 que la plupart des recherches sur ce « wood spirit » ont été menées, notamment par Colin, Dobereiner, Gmelin, Liebig, Sweitzer, mais surtout Taylor Dumas et Peligot (Withrow, 1915). De nouveaux procédés font alors leur apparition et l’hydrolyse1 est utilisée sur le bois à partir de 1883. En 1908, des chercheurs américains se sont déplacés en Allemagne pour étudier de nouveaux procédés qui, en éliminant les alambics en cuivre, réussissaient à produire de l’acétate directement à partir de l’alcool brut et à l’échelle commerciale (French & Withrow, 1915). En Suède, les usines papetières de Skutkär et Donnarspet développèrent un procédé de transformation du tall oil de l’industrie papetière à partir des recherches de Wallin, puis d'Ekstrom. Ce procédé, mis en œuvre à l’échelle commerciale en 1912, produisait 8000 litres d'alcool à 50 degrés par jour (Boullanger, 1924).

L’industrie de distillation du bois s’est considérablement développée au début des années 1900, comme beaucoup d’autres industries chimiques (Hawley, 1923). Cependant, il est important de noter que celle-ci2 concerne essentiellement les feuillus. La distillation des résineux est restée longtemps cantonnée aux usages traditionnels de bois d’œuvre ; les seuls produits chimiques qui se sont développés

étant l’essence de térébenthine et la valorisation des résines par entraînement à la

vapeur (Hawley, 1923).

La houille est, cependant, entrée progressivement en compétition avec le charbon de bois et l’a remplacé en grande partie dans la sidérurgie, pour des raisons techniques

et économiques3. La distillation de bois ne reviendra en force qu’avec une

augmentation phénoménale de la demande en alcool méthylique et autres dérivés du bois, à partir des années 1850 (Withrow 1915). La consommation de méthanol et

d’acide acétique a ainsi été multipliée par 10 entre 1890 et 1940 (Glesinger 1949 p

217). La réponse à l’augmentation de la demande a pu se faire grâce aux nombreux

travaux et avancées scientifiques réalisés à cette époque dans le domaine de la chimie du bois. Cela a permis d’aboutir, dans les années 1940, à une liste de 60 produits chimiques différents obtenus à partir de l’acide pyroligneux (Glesinger, 1949).

1 L'hydrolyse a pour objectif de casser les molécules de sucre qui composent la cellulose (C6) et les hémicelluloses (C5 et C6). Les hémicelluloses en C5 sont plus facilement hydrolysables et se

dégradent plus rapidement que la cellulose, c’est pourquoi la méthode d’hydrolyse diffère en fonction du produit que l’on désire obtenir. Pour maximiser le rendement des hémicelluloses, on choisit des conditions plus douces (190°C) et on choisit dans le cas contraire un environnement plus chaud (215°C) pour dégrader les glucoses de la cellulose. Elle se produit en deux phases : une hydrolyse

concentrée à l’acide sulfurique suivie d’une dilution à l’eau pour faire une deuxième hydrolyse avec une solution de 1% d’acide sulfurique. Tandis que l’hydrolyse enzymatique utilise des enzymes cellulase pour découper les polymères de sucres de la cellulose et de l’hémicellulose. L’origine des

enzymes est également diverse. Certaines ont été extraites des bactéries contenues dans le tube

digestif d’organismes xylophages comme les termites pour produire de l’éthanol (Wertz, Deleu, Coppée, & Richel, 2017).

2 Aussi appelé hydrolyse du bois.

3 « Le gaz des fours à coke fournit de la chaleur aux villes et aux industries. Les gaz des fours à charbon, en revanche, contribuent à la distillation du processus lui-même [...] Ainsi, la distillation des gaz de bois n'est pas seulement moins intéressante que la transformation des gaz de coke dans les valeurs du produit final ; c'est également beaucoup trop de gaspillage. Plus de 70% de la substance ligneuse entrant dans l'étuve de distillation est perdue dans les vapeurs incondensables. » (Glesinger 1949 p 217) (traduction libre).

27 Le chimiste français Anselme Payen, qui a consacré ses travaux à l’étude du raffinage de sucre de betteraves et canne à sucre, est également à l’origine des premières études sur la composition chimique du bois. Il parvient à isoler et déterminer la formule chimique du composant majeur des parois végétales du bois qu’il nomme « cellulose » en 1834, en créant ainsi le suffixe « –ose » pour caractériser les glucides. Payen fait référence à la « matière incrustante » aux propriétés mécaniques et structurantes vis-à-vis de la cellulose, qui sera nommée « lignine » par le chimiste Franz Ferdinand Schulze en 1839. Sa composition chimique restera pourtant un mystère pendant de longues années avant que le chimiste allemand Karl Freudenberg ne l’établisse en 1927. C’est en 1890 que le chimiste allemand Emil Herman Fischer identifie les xyloses de l’hémicellulose, ce qui lui valut le prix Nobel de chimie en 1902. Entre-temps, les recherches sur la valorisation de la cellulose donnent naissance à plusieurs produits de la chimie de spécialité. En 1838, Théophile Jules Pelouze confectionne la nitrocellulose – ou nitrate de cellulose – qui, très inflammable, est utilisée comme explosif à l’état sec. C’est avec le nitrate de cellulose que fut développée la première matière plastique issue de bois : le celluloïd. Créé en 1870 par la Hyatt Manufacturing Company, le celluloïd a été initialement conçu pour remplacer l’ivoire d’éléphant dans la fabrication de boules de billard. La fin du 19ème siècle voit ainsi apparaître la majorité des produits de chimie de spécialité traditionnellement rattachée à la bioraffinerie forestière : la production de viscose débuta dans les années 1890 et la cellophane a été inventée en 1912. En 1923, les chimistes allemands, Franz Fischer et Hans Tropsch, qui travaillent alors au Kaiser Wilhelm Institut de Mülheim-an-der-Ruhr, un institut de recherche dédié à la valorisation du charbon, déposent un brevet

sur la production d’hydrocarbure par la catalyse de monoxyde de carbone et

d’hydrogène. Ce procédé, qui a été déterminant dans la production de carburant liquides en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale, est resté inchangé jusqu’à récemment où il a été remis au goût du jour et rebaptisé BtL pour « Biomass to Liquid » (Martino Nieddu & Vivien, 2015).

En 1914, des chimistes européens ont construit un procédé de fermentation de la mélasse qui fut implanté directement à l’échelle industrielle après la Première Guerre mondiale en Europe, et arriva aux Etats-Unis en 1926, s’accaparant une large part du marché d’acide acétique, originellement détenu par la distillation du bois. Dix ans plus tard, l’acide acétique et le méthanol synthétique à partir de houille brisèrent à leur tour le marché en divisant les prix de moitié, faisant reculer de plus de 20% les parts de marché de ces produits issus du bois. Les distilleries de bois fermèrent les unes après les autres. Cette pente descendante fut interrompue avec la Seconde Guerre mondiale qui vit vingt-deux usines de fabrication de sucre de bois construites

en Allemagne à travers le Plan de quatre ans (Vierjahresplan, en allemand). D’autres

installations furent construites en Autriche, en Bohème et au Japon et ce secteur devint rapidement un pilier structurant de l’économie de guerre mise en place par le troisième Reich. Ainsi, bien avant le début de la guerre en Europe, le sucre de bois était devenu partie intégrante de la structure économique des pays de l’Axe. La Suède, la Norvège et la Finlande remplacèrent également leur activité de pâte et papiers par de la valorisation de sucre de bois. Cette industrie se développa donc considérablement en temps de guerre, notamment pour la valorisation alimentaire de la cellulose (fourragère et levure torula1) pour pallier à la pénurie de fourrage pour le bétail. De pauvre qualité nutritive, parfois même dangereuse pour la santé et produisant un surcoût de production, cet usage disparut en même temps que furent

1 Du nom latin Candida utilis. Cette levure inactivée est riche en protéines et en acides aminés libres qui se développent sur les substrats cellulosiques sulphatés.

28 rétablies les lignes d’approvisionnement en houille et en pétrole après la Seconde Guerre Mondiale (Glesinger 1949). Bien que moins connus, les produits alcooliques, la valorisation des sucres et l’extraction d’aromatique, comme la vanilline, faisaient déjà partie du champ des possibles dans l’environnement économique forestier d’après-guerre. Le large spectre de produits réalisables à partir de bois est donc pratiquement le même après la Seconde Guerre mondiale que celui que l’on connaît aujourd’hui.

Peu d’améliorations techniques ont été apportées jusqu’en 1970, alors que le premier choc pétrolier impliquait de nouveaux besoins en fuel d’origine renouvelable. De nouveaux réacteurs ont été ajoutés aux pyrolyseurs traditionnels et de nouvelles recherches ont été menées pour comprendre davantage les réactions fondamentales au cours de la pyrolyse du bois, suivi de procédés dits de « Fast Pyrolysis » avec un rendement en acide pyroligneux et en gaz grandement amélioré pour atteindre une échelle commerciale dans les années 1980 et 1990 (Garcia-Perez, Lewis, & Kruger, 2010) (Garcia-Perez et al., 2010). Au même moment, des microbiologistes

allemands ont développé une bactérie génétiquement modifiée (Klebsiella

planticola), afin de produire de l’éthanol à partir de résidus forestiers (Feldmann,

Sprenger, & Sahm, 1989). Mais, dix ans plus tard, les recherches de Holmes et Ingham certifient que cette bactérie est capable de tuer ou d’inhiber la croissance des plantules de blé en favorisant le développement excessif de nématodes dans l’ensemble des microcosmes étudiés (Holmes, Ingham, Doyle, & Hendricks, 1999). Cette souche fut rapidement interdite et détruite car un accident de propagation de la bactérie hors du milieu confiné industriel était trop risqué pour les cultures vivrières et, par extension, pour la sécurité alimentaire mondiale. Cependant, la recherche en organismes génétiquement modifiés à destination de la bioraffinerie ne s’est pas arrêtée là. Ainsi, l’entreprise Enobraq (qui n’est autre que le mot carbone à l’envers), créée début novembre 2015 au sein de la Toulouse White Biotechnology (TWB), a

mis au point un micro-organisme de synthèse : Saccharomyces cerevisiae qui,

quand on injecte de l’hydrogène, est capable d’inverser son processus digestif pour

capter et transformer du CO2 en sucre afin de produire molécules chimiques et biocarburant.

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2. “The New Age of Wood”?

C’est avec le premier choc pétrolier que les programmes de recherches se multiplient sur les propriétés de la biomasse et sa transformation à destination de produits non alimentaires et qui, selon Nieddu et alii, « vont connaître un nouveau

cycle d’espérances (et de désillusions) dans la période 1975-1990, avant d’aboutir

au début des années 2000, à travers les programmes liés aux agrocarburants, à la

mise en forme de l’objet bioraffinerie. » (Martino Nieddu & Vivien, 2015).

On trouve écho de ces débats dans les écrits de l’économiste Nicholas Georgescu-Roegen (1975). Quand le terme « bioéconomie » apparaît sous sa plume1, il s’est engagé dans la controverse soulevée par la publication du premier rapport au Club

de Rome (Meadows, Meadows, Randers, & Behrens, 1972)2. Il s’est rangé aux côtés

de Dennis Meadows pour l’aider à combattre les arguments des économistes standards en faveur de la poursuite de la croissance sur le long terme. Georgescu-Roegen donne alors un autre sens au terme « bioéconomie » que celui qui prévaut jusqu’alors, à savoir l’économie des ressources naturelles renouvelables. Chez Georgescu-Roegen, le terme bioéconomie désigne la problématique de survie à laquelle est confrontée l’espèce humaine. S’il veut vivre et se développer, l’homme ne doit, en effet, pas uniquement chercher de la basse entropie pour son corps à travers sa nourriture, il doit aussi en quérir pour maintenir la base matérielle et énergétique des objets techniques qui l’entourent. Or, souligne Georgescu-Roegen, depuis la Révolution industrielle, un phénomène de substitution des sources de basse entropie biologiques par des sources de basse entropie minérales est observé. L’humanité, écrit Georgescu-Roegen, est devenue ainsi une véritable force géologique, confrontée à l’épuisement des ressources fossiles et à la perturbation des grands cycles biogéochimiques. Notre auteur en appelle à économiser les ressources fossiles, dont le stock est fini, et à préparer l’arrivée de « Prométhée III », celui qui permettra l’avènement d’un « nouvel âge du bois », qui diffèrera de celui du passé, parce que les connaissances techniques sont plus étendues aujourd’hui qu’hier. « A ceux qui font valoir que nous pouvons enfin extraire des protéines des

combustibles fossiles », Georgescu-Roegen [1975:134] réponds : « La saine raison

nous commande de faire l’inverse, c’est-à-dire de transformer la matière végétale en hydrocarbures combustibles – orientation manifeste naturelle déjà explorée par plusieurs chercheurs». Et, pour appuyer son propos, Georgescu-Roegen [1975:158] évoque dans une note en bas de page le fait que « durant la Deuxième Guerre mondiale, en Suède notamment, on conduisait des automobiles roulant avec le gaz pauvre obtenu par la combustion du charbon de bois avec du petit bois d’allumage dans un container servant de réservoir ! » (Nicholas Georgescu-Roegen, 1975).

1S’agissant de bioéconomie, Georgescu-Roegen [1975:157] écrit dans une note de bas de page qu’il

a vu ce terme pour la première fois dans une lettre du philosophe roumain, Jiri Zeman.

2 Le texte « Energy and Economic Myths » provient initialement d’une conférence dispensée en 1972

à la School of Forestry and Environmental Studies de l’Université de Yale dans le cadre d’un débat

relatif au premier rapport au Club de Rome. Dans un premier temps, Georgescu-Roegen va défendre les positions exprimées par Meadows et ses collègues. Il entrera même en contact avec ce dernier

pour l’aider à contrer les arguments des économistes orthodoxes. Il s’en éloignera ensuite, critiquant la perspective de l’état stationnaire qui est au cœur du rapport Meadows et défendant une perspective

30 Or, « The Coming Age of Wood » est aussi le titre d’un ouvrage publié par Egon

Glesinger1 en 1949. Dans la préface de ce livre, Sir John Boyd Orr, M.P. souligne le

fait que Glesinger démontre l’importance capitale que tient la ressource forestière dans la production de nombreux produits de consommation afin de construire un monde d’abondance pour notre population grandissante sur notre planète limitée et

saccagée : « Building a world of plenty […] from our « plundered » planet, which has

no more lands ready for easy cultivation and where large areas of our fertile land are

now man-made desert? ». Outre le renouvèlement des ressources utilisées, l’auteur

s’interroge sur une meilleure utilisation de la ressource en valorisant chaque déchet de l’industrie forestière dont le domaine d’application est grandiose. « From this waste, almost any product man needs can be made, even an hamburger and the

alcoholic « aquavit » which the Swedes enjoy », écrit Glesinger (1949). Ce dernier

décrit ainsi les possibilités de transition d’un système productif reposant sur des ressources fossiles vers un système productif renouvelable basé sur la ressource du bois.

Pour appuyer son propos, Glesinger aborde, à travers une série d’illustrations figurant dans la 2ème partie de son livre, le fonctionnement de l’arbre, sa composition, les différentes forêts mondiales, les volumes de consommation et leurs valeurs ajoutées, les différentes caractéristiques des déchets de l’industrie forestière. Parmi ces différentes illustrations, on trouve celle où figure son concept de « pyramide du bois » (Voir Figure 2), précurseur de celui d’usage en cascade, qui veut qu’aucun déchet ne soit gaspillé grâce à la bonne combinaison d’usages et de technologies. Le placage et contreplaqué nécessitent un bois de haute qualité et les grumes destinées au sciage et au bois construction impliquent un diamètre minimum ; la pâte à papier se réserve le bois qui est trop petit ou trop défectueux pour les autres usages ; le bois chimique tient ici le rôle de matière première de base. Cette activité peut consommer théoriquement n’importe quel bois, ce qui en fait une industrie tampon, capable d’utiliser les déchets de n’importe quel autre secteur ou d’utiliser un

bois dont la qualité est impropre à ces autres secteurs. « Wood chemistry,

theoretically, could consume the whole crop. In practice however, only wood that fails

to make the grade in others processes » (Glesinger 1949, p. 123).

1 Egon Glesinger fut le secrétaire général du comité international du bois (CIB) de 1933 à 1946

jusqu’à l’obtention du poste de député directeur de la division forestière de la FAO. Dans sa préface à The Coming Age of Wood (1949), Sir John Boyd Orr explique que cette position au CIB a permis à

Glesinger d’être au plus proche des manœuvres que l’Allemagne nazie a entrepris pour contrôler les

ressources forestières européennes, dont le potentiel dépassait les croyances de nombreux gouvernements, et leur permettraient de résister à n’importe quel potentiel blocus.

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Figure 2 : Pyramide du bois, usage en cascade (Glesinger 1949)

(Veneer: Placage, Contreplaqué ; Saw logs: Bois d’œuvre; Reconstructed wood :

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3. L’essor institutionnel de la bioraffinerie forestière

Le concept de bioraffinerie se développe depuis les années 2000 dans les documents cadres des institutions européennes. Il apparait de plus en plus comme l’outil technique et industriel novateur, porteur des espoirs d’opérationnalisation des projets politiques de la transition énergétique et de la bioéconomie. En 2009, s’est terminé le projet « Biorefinery Euroview »1 financé par l’Union européenne dans le cadre du 6ème PCRD. Dans le cadre du 7ème PCRD, entre 2009 et 2011, a été

mené le projet Star Colibri (Strategic TARgets for 2020 – COLlaboration Initiative in

BioRefInery), dans un objectif de diffusion des bioraffineries, l’exploitation industrielle de la recherche et développement et la rédaction d’une feuille de route pour