• Aucun résultat trouvé

Chapitre II : État des publications des lettres

D) Henri III (1959)

Bien peu de lettres de ce roi ont été publiées avant sa réhabilitation. Le XIXe siècle compte seulement une livraison de ses « poulets » à la duchesse d‟Uzès (dans Le Cabinet

his-torique de 1873) : telle est l‟image que l‟on voulait alors donner de lui. En 1919, ce sont ses

lettres affectueuses à Gilles de Souvré qui paraissent dans l‟Annuaire Bulletin de la Société de

l’Histoire de France ν là encore, c‟est l‟anecdote qui est privilégiée par rapport à la dimension historique.

δes recherches de Pierre Champion n‟inversent la tendance que dans la deuxième moitié

du XXe siècle. Il faut attendre 1959 pour que débute l‟édition scientifique des lettres qu‟il a

rassemblées. Elle est assurée par Michel François, puis par Jacqueline Boucher à partir de 2000 (Lettres de Henri III, roi de France, 6 vols). δes tomes se succèdent au rythme d‟un par

décennie et il reste à couvrir encore les années 1585 à 1589. Les éditeurs ne laissent de côté

29 Gustave Baguenault de Puchesse, « Jeanne d‟Albret et Catherine de εédicis, Lettres inédites (1570-1572) »,

Annuaire-Bulletin de la société de l'histoire de France, Paris, Nogent-le-Rotrou, t. 47, 2e partie 1910, p. 215. 30 « Vingt sept lettres inédites », par Baguenault de Puchesse, Bulletin historique et philologique, 1917, p. 130.

65

aucune des missives recueillies par Pierre Champion : un millier entre 1566 et 1574, puis le volume augmente et se stabilise autour de cinq à six cents par an. Les moyens du XXe siècle ne sont toutefois pas ceux du précédent : ces textes ne sont pas reproduits dans leur intégralité.

δes seules à échapper à la réduction drastique du résumé sont celles qui portent l‟écriture

royale : « Je me suis en tout cas fixé pour principe de donner le texte intégral de tous les écrits

autographes du souverain, qu‟il s‟agît de lettres entières ou d‟un simple post-scriptum μ c‟était là, en effet, le seul parti qui permît de faire connaître dans toute sa fraîcheur d‟expression la pensée du roi décrié […]31

», explique Michel François. On apprend toutefois dans

l‟introduction du tome II que des billets autographes adressés à des maîtresses et datant des

années 1575-1578 ont été délibérément exclus pour être reportés dans un volume ultérieur. Comme celles de ses homologues, les lettres autographes du roi ne comportent la plu-part du temps aucune date (L.H. III, I, Introduction, p. X), comme celles de ses homologues. Cet élément récurrent de l‟écriture épistolaire royale laisse supposer que la datation était une

tâche administrative réservée aux secrétaires. Mais cela ne facilite pas le classement des lettres ! Soucieux de donner des repères à son lecteur, Michel François distingue des missives de différente nature : les lettres sur parchemin ou sur papier, intitulées « de par Monsieur le

Duc d‟Anjou » ou « de par le roi », et qui, parce qu‟elles sont établies suivant des règles

parti-culières, peuvent seules être dites « lettres closes » ; les lettres par secrétaire, signées du duc

ou du roi et contresignées par un secrétaire d‟État ; les billets plus ou moins longs, griffonnés,

à la hâte, avec des taches (L.H. III, I, préface, p. XII). Aux deux premières catégories appar-tient la correspondance officielle, « soit que dans le premier cas, il s‟adresse plus volontiers

aux cours souveraines ou à des communautés d‟habitants, soit que, dans l‟autre, il

corres-ponde avec des souverains ou des princes étrangers, ou exprime ses ordres à tel ou tel de ses subordonnés ou de ses sujets » (L.H. III, I, préface, p. XIII). La dernière catégorie représente sa correspondance privée, ses échanges avec un familier, une maîtresse, un membre de la

fa-mille royale. Grâce à cette édition, nous avons donc la garantie d‟avoir accès au moins aux

lettres autographes du roi.

Henri III a écrit également des vers : Édouard Frémy mentionne à ce sujet les

témoi-gnages de Passerat, Vauquelin de la Fresnaye, et d‟Aubigné32Ŕ mais on n‟en a pas retrouvé la

trace.

31 Lettres de Henri III, roi de France, recueillies par Pierre Champion, Éd. Michel François, tome I, Paris, Klincksieck, 1959, t. I, Introduction, p. XIV (dorénavant abrégé en L.H. III. dans le corps du texte)

32

Édouard Frémy, L’académie des derniers Valois, Genève, Slatkine Reprints, 1λ6λ [Réimpression de l‟édition de Paris, 1887], p. 134-137.

66

Les quatre personnages que nous venons de citer représentent, dans l‟ensemble des rois

et reines de France et de Navarre du XVIe siècle, des exceptions. δ‟ampleur et la difficulté de la tâche consistant à rassembler ainsi leurs lettres en tendant à l‟exhaustivité, comme l‟intérêt

plus ou moins soutenu pour leur personne, expliquent que pareil travail n‟ait pu être fait de manière systématique pour tous. Heureusement, nous disposons tout de même d‟éditions

rela-tivement conséquentes pour quelques autres personnages.

II) Des livraisons conséquentes (de 100 à 500 lettres rassemblées)

Comme les souverains précédents, Marguerite de Navarre, Antoine de Bourbon,

Mar-guerite de Valois et sa sœur Élisabeth ont vu leurs premières séries de lettres éditées au XIXe

siècle. Mais les premiers ayant régné sur un petit pays, et la dernière apparaissant comme une figure moins imposante que son époux Philippe II, on n‟a pas conservé d‟eux des quantités de

pièces aussi considérables.

A) Henri II (1666)

Beaucoup moins populaire que son père, et moins étudié par les historiens, Henri II a fait pourtant l‟objet de publications abondantes quoique disséminées. Tout d‟abord, on trouve

plus de 50 de ses missives dans les volumes de sources diverses comme celui de Ribier (1666). Ce sont en grande partie des minutes de dépêches adressées à des ambassadeurs.

Tou-tefois, on a la chance d‟en découvrir une de la main du roi au maréchal de La Mark, pour l‟exhorter à régler la mésentente entre le cardinal de Ferrare et l‟ambassadeur d‟Urfé (Ribier,

II, 273). On y trouve aussi une intéressante série de 3 lettres au duc de Guise et au cardinal de Tournon, relatives à la défaite de Saint-Quentin (août 1557).

Dans la première moitié du XIXesiècle ont paru deux courts recueils d‟écrits du roi. Ce sont d‟une part les Lettres inédites de Henri II, Diane de Poitiers, Marie Stuart, […] publiées

par J.-B. Gail (1828), toutes adressées à Anne de Montmorency, avec qui le roi entretenait une amitié profonde de longue date. Nous avons donc là une série de 10 autographes adressés à

l‟un des personnages les plus importants du royaume. εais d‟autres lettres y sont

mention-nées, ou réduites à quelques lignes, sans que l‟éditeur explique pourquoi il n‟en donne pas tout le contenu. D‟autre part, en Écosse, dans le Miscellany of the Maitland Club (1834), ont

67

paru 24 missives du roi à la reine douairière d‟Écosse, εarie de Guise et une au sieur de

Vil-legagnon, capitaine des galères33.

Par la suite, on a continué à publier des lettres de Henri II lorsque l‟occasion se

présen-tait, dans certains recueils de sources ou ouvrages historiques. Il s‟en trouve par exemple plus

de 50 dans les Mémoires-journaux de François de Lorraine publiés par Michaud et Poujoulat (première série, tome IV, 1839). Les Documents historiques inédits de Champollion-Figeac (1847) reproduisent 9 missives de Henri II. Les 5 billets connus du roi à sa maîtresse sont dans les Lettres inédites de Diane de Poitiers (1866). Des ouvrages consacrés aux souverains de Navarre en ont aussi donné : la Galerie des hommes illustres du Vendômois du Marquis de Rochambeau (1879) offre une lettre à Antoine de Bourbon, et Marguerite d’Angoulême

d‟Hector de la Ferrière (1891), 3 lettres à εontmorency et au duc d‟Aumale au sujet du ma-riage de Jeanne d‟Albret34

. Il existe en outre un important Recueil de lettres missives adres-sées à Antoine de Bourbon publié par l‟abbé Blanchet (1905), qui en compte plus de 15 du

roi, portant toutes sa signature. En regard de cette quantité, les Documents pour l’histoire du règne de Henri II rassemblés par Marchand (1902) représentent un piètre apport avec une seule lettre.

Comme souvent, le XXe siècle est bien moins dynamique dans la recherche des textes.

ζous avons pu repérer seulement une lettre à Henri d‟Albret dans la Revue historique et

ar-chéologique du Béarn et du Pays Basque (1919), et une autre donnée par Germaine Garnier dans La politique du connétable Anne de Montmorency (1957). ζous savons qu‟il s‟en trouve

dans Calendar of Letters and Papers of the reign of Henry VIII (1λ65), mais nous n‟avons pu

consulter cet ouvrage ν le titre laisse supposer qu‟il doit s‟agir de dépêches à destination des

ambassadeurs en Angleterre. Nous avons enfin apporté notre contribution, en complétant les lettres tronquées données par J.-B. Gail dans le recueil cité plus haut, et en ajoutant huit iné-dits autographes adressés à Montmorency (le tout paru dans la revue Réforme, Humanisme, Renaissance, 2006). La Bibliothèque nationale de France conserve plusieurs centaines

33 Les éditeurs laissent planer un doute sur la nature de ces lettres μ ils indiquent en introduction qu‟elles portent toutes une formule finale et une signature de la main du roi, mais ajoutent qu‟elles sont fréquemment

contresi-gnées par le secrétaire Bordelet (« Letters from Henry II King of France to his Cousin Mary Queen Dowager of Scotland. » Miscellany of the Maitland Club. Edinburgh, 1834, p. 208). Comment savoir si le roi les a dic-tées ou complètement confiées aux soins du secrétaire ? La question semble difficile à trancher, mais

lors-qu‟une lettre comporte une anecdote sarcastique vis-à-vis de l‟ambassadeur d‟Angleterre, par exemple, on peut supposer qu‟elle émane directement du souverain et que ce n‟est pas le secrétaire qui en prend la

responsabili-té.

34 Ces trois lettres sont tronquées, mais grâce aux références des manuscrits donnés par l‟auteur, nous avons pu avoir connaissance du texte intégral. Hélas, il est question d‟une quatrième lettre (dite gauloise) sur le même sujet mais elle n‟est pas reproduite, et nous n‟avons pas pu la retrouver (Il s‟agit d‟après δa Ferrière de B.n.F.

68

d‟inédits du roi, dont plusieurs séries adressées au connétable de εontmorency. Au total, plus

de 200 lettres du roi ont été mises au jour.

Les poèmes à Diane de Poitiers ont été reproduits par Ivan Cloulas dans sa biographie.