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de co-construction de l’action publique ?

5.2 Les savoirs profanes au servir de l’intérêt collectif Dans le but de permettre aux collectifs des riverains d‟élaborer un contre-projet crédible et

5.2.5 Groupe d’études financières et juridiques

Comme pour les quatre autres groupes, les questions financières et juridiques ont alimenté les débats lors des réunions du quartier. « L’argent est le nerf de la guerre » a-t-on l‟habitude de dire, surtout pour un projet de cette envergure. Ayant examiné les données fournies par Rennes Métropole, le groupe d‟études financières et juridiques a constaté un certain nombre d‟imprécisions dans le dossier financier. Dans le « Dossier pour la Commission d‟enquête publique », le groupe d‟études financières et juridiques a donné tous les détails sur les incohérences relatives aux chiffrages de Rennes Métropole pour la réalisation de la ligne B. Ainsi, sans aller dans les détails, nous avons estimé nécessaire de reprendre quelques éléments de ces études financières qui nous permettent de comprendre les enjeux financiers dudit projet.

Le premier constat effectué par le groupe d‟études financières et juridique était celui d‟un « mélange d’euros de dates de valeurs25 différentes, rendant difficile, voire erronée toute

comparaison » (« Position des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs », 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2).

Le deuxième constat était que : « le projet final, estimé à 1029 euros (valeur 2005) dans le dossier, n’est pas le projet réel. Celui-ci a en effet subi les modifications suivantes, mais son chiffrage n’a pas été revu en fonction de cela » (« Dossier pour la Commission d‟enquête publique », annexe 12, vol. 2)

- Boucle de Maurepas en tranchée couverte, et non plus en tunnelier.

- Tracé Buttes de Coësmes et contournement sud d’Atalante, et non plus cœur de quartier des Longs Champs.

25 En effet, selon les conjonctures économiques, la cote d‟une monnaie peut être plus ou moins élevée. Et le

- Tracé aérien fortement revu en baisse en 2011, moins de 20% sur le tronçon) (« Position des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs », 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2).

Comme l‟a constaté le groupe d‟études financières, le coût d‟une tranchée couverte est moins élevé que celui d‟un tunnelier. De ce fait, la Métropole aurait dû revoir sa copie sur le chiffrage. Il en est de même pour le passage du métro avenue Buttes de Coësmes, jugé moins coûteux que s‟il passait au cœur du quartier en tunnelier.

Le troisième constat était celui de l‟« absence de calculs financiers sur les tronçons autres que le quartier Nord-est » (« Position des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs, 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2). Si nous suivons bien le raisonnement du groupe d‟études financières, il n‟est pas juste que Rennes Métropole fasse un chiffrage basé uniquement sur le secteur Nord-est. C‟est d‟ailleurs ce qui fait dire aux acteurs associatifs qu‟il y a une inégalité de traitement évident entre les riverains des différents quartiers desservis par la future ligne B. Alors qu‟ils paient leurs impôts au même titre que les autres Rennais.

Par ailleurs, les auteurs de ces études financières soulignent que : « Rennes Métropole choisit donc un métro aérien sur une base purement financière », quand bien même « les aspects financiers du projet restent très flous » (« Position des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs », 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2). D‟autre part, ils indiquent que : « L’écart aérien/tranchée couverte est largement dans la marge d’erreur globale. » et que « seul le quartier Nord-est semble bénéficier d’un choix basé exclusivement sur les coûts » (« Position des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs », 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2).

Le quatrième constat effectué par le groupe d‟études financières et juridiques est que « les chiffrages ne tiennent compte que de l’investissement et pas des coûts de fonctionnement […] Or il y a une grande différence de coût entre l’aérien et le souterrain ». Exposé aux intempéries, le viaduc coûterait plus cher à entretenir que le tunnelier, qui a une durée de vie plus longue.

En fin, le groupe indique « avoir demandé à plusieurs reprises des éléments financiers sur les coûts d’exploitation d’un métro aérien et d’un métro souterrain, sans succès. »26 (« Position

des habitants sur l‟ensemble des tracés aux Longs Champs », 05 mars 2009, annexe 11, vol. 2).

Ces différentes incohérences sur les chiffrages, l‟un de nos interlocuteurs l‟avait évoqué en ces termes : « Je pense que le problème aujourd’hui…avec les élus, t’as des gens avec internet qui ont de plus en plus d’informations ; donc il y a moyens de creuser les choses, et il y a moyens de trouver des failles. Honnêtement, le DAD, il y a plein de failles dedans » (Interviewé 1, annexe 1, vol. 2).

Il ajoute que : « Honnêtement le DAD il y a plein de failles dedans. C’est un gros dossier, on voit des choses. Je pense que le dossier est sorti fin 2007. Au lancement de la campagne électorale, le dossier n’était pas encore finalisé. Il y avait une volonté de le sortir à ce moment-là, je pense, c’est ce qui fait qu’il y avait plein des zones d’ombre » (Interviewé 1, annexe 1, vol. 2). L‟idée de la sortie du « dossier d‟aide à la décision » au lancement de la campagne renvoie à la question de l‟opportunisme des hommes politiques, qui sont en général à l‟affût des moments opportuns pour proposer une reforme ou lancer un projet d‟aménagement.

De ce qui précède, l‟examen des travaux des différents groupes d‟études pour l‟élaboration du scénario « habitants » nous a permis de tester une de nos hypothèses sur la « réflexivité de nos sociétés ». Loïc Blondiaux souligne que « ce scénario met en avant l’élévation du niveau de compétence des citoyens ordinaires dans les sociétés contemporaines, leur aptitude à remettre en cause les formes traditionnelles d’expertise et à produire eux-mêmes des connaissances originales et utiles à l’action publique » (Blondiaux, 2008 : 26).

Cette production des connaissances est rendue possible grâce à la facilité de l‟accès et au partage de l‟information et des expériences individuelles. Depuis le développement des réseaux des télécommunications et l‟avènement d‟internet, on assiste à une explosion de l‟information accessible à tous. C‟est en ce sens que l‟un de nos interlocuteurs disait : « […] Et internet facilite l’accès à l’information. Moi le DAD, machin, la tranchée couverte, on tape sur Google, dix minutes après, je sais c’est qu’une tranchée couverte. C’est vrai que c’est une source d’information importante » (Interviewé 1, annexe 1, vol. 2).

Notons que la particularité des réseaux sociaux et les forums de discussion constituent des mines d‟informations de tout genre. Et la propension d‟aller sur internet pour s‟informer sur tel ou tel sujet participe à la désacralisation de la parole des techniciens experts et des hommes politiques. C‟est ce qui ressort de notre analyse de la concertation spécifique aux

Longs Champs. D‟ailleurs l‟élaboration du scénario « habitants » doit largement à l‟accès à l‟information par les riverains.

Passé cette phase de la mobilisation des ressources par les différents groupes d‟études, il convient à présent d‟examiner la conception et le contenu du scénario « habitants ».

5.3 Le scénario « habitants » : le « faire commun »

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