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PARTIE I : INTRODUCTION

III. 2.1.1.2. La voie du méthylérythritol phosphate

III.2.2. La biosynthèse des caroténoïdes

III.2.3.2. Formation des autres apocaroténoïdes

Chez les plantes, les apocaroténoïdes se situent en grande partie dans la membrane des thylakoïdes (Kloer et Schulz, 2006) et peuvent jouer des fonctions biologiques importantes dans la croissance et le développement des plantes ainsi que dans la couleur, la saveur et les arômes des fruits et légumes et des plantes ornementales (Ohmiya, 2009).

Les apocaroténoïdes sont issus du clivage d’une grande variété de carotènes et de xanthophylles par les enzymes appartenant à la famille des CDD. Il existe 4 sous-familles : CDD1, CDD4, CDD7, et CDD8.

Les CDD1 clivent de nombreux substrats, tous les carotènes sous forme trans (β-carotène, zéaxanthine et lycopène) (Auldridge et al., 2006; Bouvier et al., 2005a; Giuliano et al., 2003), les apocaroténales (Schmidt et al., 2006; Vogel et al., 2008) et les apolycopénales (Ilg et al., 2009), en position C9-C10 (C9’-C10’) pour former deux cétones (C13) et un dialdéhyde (C14). Les produits formés dépendent du substrat (Schwartz et al., 2001). Les CDD1 peuvent également cliver, en position C5-C6 (C5’-C6’) du lycopène, chez Arabidopsis thaliana, pour former un composé volatile (Vogel et al., 2008), et en position C7-C8, chez le riz, pour former du géraniale (Ilg et al., 2009).

L’enzyme CDD4 permet le clivage du β-carotène, chez E. coli en position C9-C10 (C9’-C10’), pour former la β-ionone (Huang et al., 2009; Rubio et al., 2008). Elle peut également cliver la zéaxanthine en position C7-C8 (C7’-C8’) chez le crocus (Bouvier et al., 2003), et le lycopène en position C5-C6 (C5’-C6’) chez Bixa orellana (Ohmiya, 2009).

Les enzymes CDD7 catalysent le clivage du β-carotène, en position C9-C10, pour produire un aldéhyde (C27), le 10’-apo-β-caroténale et la β-ionone. L’aldéhyde formé est clivé par la CDD8, en position C13-C14 pour donner le 13-apo-β-caroténone (Schwartz et al., 2004).

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Figure 17: La régulation de la voie de biosynthèse des précurseurs.

Les flèches rouges représentent les enzymes flux-déterminantes et flux-limitantes, les flèches jaunes une régulation par la lumière, les flèches vertes le rétrocontrôle négatif et les flèches rouges le rétrocontrôle positif.

34 III.2.4. La régulation de la voie de biosynthèse

La régulation de la voie de biosynthèse des caroténoïdes est complexe et se produit à différents niveaux (Taylor et Ramsay, 2005) (Figure 17).

III.2.4.1. Régulation transcriptionnelle

Plusieurs étapes de la voie du méthylérythritol-phosphate (MEP) et de la voie de biosynthèse des caroténoïdes sont connues pour être des étapes régulant l’accumulation des caroténoïdes.

III.2.4.1.1. Régulation au niveau de la voie du méthylérythritol phosphate

Dans la voie du MEP, deux enzymes permettent la régulation de la synthèse des précurseurs, IPP et DMAPP, nécessaires à la biosynthèse des caroténoïdes : la 1-déoxy-D-xylulose-5-phosphate synthase (DXPS), et la 1-déoxy-D-1-déoxy-D-xylulose-5-phosphate synthase (DXR) (Botella-Pavia et al., 2004; Carretero-Paulet et al., 2006) (Figure 17).

La DXPS qui contrôle la première réaction dans la voie de biosynthèse de MEP est une enzyme flux-déterminante, c’est-à-dire qu’elle module plus ou moins le flux de la voie de biosynthèse. L’analyse de l’expression de DXPS, chez plusieurs espèces, lors de l’accumulation des isoprénoïdes terminaux suggère que l’augmentation des niveaux en DXPS est indispensable pour fournir les précurseurs nécessaires (Botella-Pavia et al., 2004; Bouvier et al., 1998; Chahed et al., 2000; Estevez et al., 2001; Lois et al., 2000; Veau et al., 2000).

La DXR est une enzyme flux-limitante, c’est-à-dire qu’elle peut stopper le flux de la voie de biosynthèse. Chez Arabidopsis thaliana, l’augmentation de l’expression de la DXR entraîne une augmentation de l’accumulation de chlorophylles et de caroténoïdes (Carretero-Paulet et al., 2006). Par contre, il n’existe pas de corrélation entre les niveaux de DXR et l’accumulation des caroténoïdes dans les chromoplastes lors de la maturation chez la

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Figure 18: La régulation de la voie de biosynthèse des caroténoïdes.

Les flèches rouges représentent les enzymes flux-déterminantes et flux-limitantes, les flèches jaunes une régulation par la lumière, et les flèches vertes un rétrocontrôle négatif. Les enzymes notées en vert indiquent qu’elles requièrent un rapport PQ/PQH2 élevé.

36 tomate (Rodriguez-Concepcion et Boronat, 2002). Ces observations suggèrent que la DXR ne serait plus une étape limitante après la transformation des chloroplastes en chromoplastes.

Lois et al. (2000) ont montré qu’il existe une corrélation entre l’expression des gènes Psy et Dxps dans les fruits de tomate. L’augmentation des niveaux d’expression de Dxps induit une augmentation de l’expression de la Psy et une augmentation de la quantité de caroténoïdes.

III.2.4.1.2. Les étapes clés de la voie de biosynthèse des caroténoïdes

Plusieurs étapes de la voie de biosynthèse des caroténoïdes sont connues pour être des étapes régulatrices (Figure 18).

La PSY est une enzyme flux-déterminante (Cazzonelli et Pogson, 2010; Romer et al., 2000; Shewmaker et al., 1999; Stalberg et al., 2003) et le principal contrôle de la voie en aval de la GGPP (coefficient de contrôle du flux = 0,36) (Fraser et al., 2002). L’augmentation de l’expression de la Psy chez les bactéries et les plantules transgéniques d’Arabidopsis thaliana a montré une augmentation de la concentration en caroténoïdes (Shewmaker et al., 1999;

Stalberg et al., 2003). De plus elle réagit aux facteurs environnementaux (Cazzonelli et Pogson, 2010).

De même, de nombreuses études indiquent que les étapes de biosynthèse des caroténoïdes catalysées par la PDS (coefficient de contrôle du flux = 0,1), LCY-β ou HY-β peuvent être des étapes limitantes. L’augmentation de l’expression de Pds, par addition de copie du gène chez E. coli induit une augmentation de l’accumulation de caroténoïdes (Kajiwara et al., 1997). L’augmentation de l’expression de la Lcy-β résulte également en une augmentation des niveaux en caroténoïdes totaux (Ronen et al., 2000; Rosati et al., 2000).

L’enzyme HY-β joue également un rôle crucial dans la régulation. Chez Arabidopsis thaliana, trois gènes sont impliqués, Chy1, Chy2 et P450. Un mutant chy1chy2, inhibant l’expression de ces gènes, montre une augmentation en caroténoïdes totaux, en β-carotène, en

Partie I : Introduction bibliographique

37 violaxanthine et en phytoène mais une diminution en zéaxanthine (Fiore et al., 2006). De la même façon, l’augmentation de l’expression de la Hy-β chez Arabidopsis thaliana résulte en la conversion de β-carotène en xanthophylles (Du et al., 2010). Chez les tubercules de pomme de terre, l’augmentation de l’expression de la Psy, de la Pds, de la Zds, de la Crtiso et de la Lcy- β ou l’étude des mutants chy1, chy2, lut5 (β-HY) et lcy-β amènent à l’accumulation de β-carotène (Diretto et al., 2010; Diretto et al., 2006).

III.2.4.2. Rôle de la lumière

La lumière a un rôle régulateur dans la biosynthèse des caroténoïdes chez les plantes (Giuliano et al., 2003; Von Lintig et al., 1997; Welsch et al., 2000; Welsch et al., 2003;

Woitsch et Romer, 2003). Alba et al. (2000) ont montré que les phytochromes transmettent le signal lumineux requis pour la pigmentation des fruits lors de la maturation. Chez la tomate, les mutants hp1 et hp2 caractérisés par une augmentation de la concentration en caroténoïdes, sont hypersensibles à la lumière (Peters et al., 1989). De même les niveaux d’ARNm du gène Psy sont plus élevés dans les feuilles de tomate (Giuliano et al., 2003) et d’Arabidopsis thaliana (Von Lintig et al., 1997) lorsqu’elles sont exposées à la lumière. Les résultats obtenus par Liu et al. (2004), sur les fruits de tomate, par l’étude mutant hp1 qui présente une mutation au niveau d’un gène codant pour une protéine impliquée dans la transmission du signal lumineux, suggèrent que la lumière est également impliquée dans la synthèse des caroténoïdes au niveau des chromoplastes.

L’expression des gènes de la voie du MEP peut également être régulée par la lumière (Carretero-Paulet et al., 2002; Estevez et al., 2001; Rodriguez-Concepcion et al., 2004). Chez Arabidopsis thaliana, l’étude de mutants hypo-sensibles à la lumière montre que les voies de perception et de transduction du signal lumineux régulent la voie du MEP au niveau de la DXPS et de la DXR (Rodriguez-Concepcion et al., 2004).

III.2.4.3. Rôle du statut redox des plastoquinones

Le contrôle redox est connu pour être un mécanisme régulateur majeur de la voie de biosynthèse des caroténoïdes (Pfannschmidt et al., 2001).

38 La désaturation du phytoène par la phytoène désaturase et celle du carotène par la ζ-carotène désaturase, est une réaction complexe nécessitant des co-facteurs et une étape d’oxydation, durant laquelle un électron est transféré du phytoène à la plastoquinone (Voir réaction p.29). Chez le tabac, lorsque le transport d’électrons photosynthétiques et la réduction de la plastoquinone ont été inhibés par le 3-(3,4-dichlorophényle)-1,1 diméthylurée (DCMU), une augmentation des niveaux de transcrits de la β-carotène hydroxylase et de la zéaxanthine époxydase, est observée ainsi qu’une augmentation de la quantité de pigments photosynthétiques. Les niveaux de transcrits des gènes Hy-β et Zep sont également régulés par le statut redox des plastoquinones (Woitsch et Romer, 2003). En effet ils nécessitent, tout comme PDS et ZDS, un rapport PQ/PQH2 élevé (Steinbrenner et Linden, 2003).

III.2.4.4. Rôle des produits finaux

L’expression de la Dxs peut être inhibée par des intermédiaires de la voie du MEP tels que le déoxyxylulose, chez la tomate (Lois et al., 2000; Rodriguez-Concepcion et al., 2001).

Chez des tomates surexprimant de façon constitutive le gène Pds, une diminution de la quantité de caroténoïdes totaux a été observée (Giuliano et al., 2000). La surexpression de la désaturase d’origine bactérienne, qui transforme le phytoène en lycopène, dans des plants de tomates est responsable de l’obtention de fruits présentant des teneurs accrues en β-carotène mais, avec des concentrations en caroténoïdes totaux 2,5 fois plus faibles par rapport aux fruits des plants non transformés. Ce phénotype est dû à l’augmentation de l’expression de la lycopène β-cyclase, à la diminution de l’expression du gène codant pour la phytoène synthase, et à l’augmentation des teneurs en β-carotène (Botella-Pavia et Rodriguez-Concepcion, 2006). Ces études suggèrent un rétrocontrôle négatif sur l’expression des gènes Psy et Pds par le β-carotène ou l’un de ses métabolites.

Cazzonelli et Pogson (2010) soulignent l’existence d’une interaction entre la voie de biosynthèse des caroténoïdes et la voie du méthylérythritol phosphate dans la régulation de DXPS. En effet, la DXPS peut être rétrocontrôlée par une accumulation de caroténoïdes chez la tomate (Lois et al., 2000; Rodriguez-Concepcion et al., 2001). L’augmentation de

Partie I : Introduction bibliographique

39 l’expression de la Psy chez un transgène d’Arabidopsis thaliana, induit une augmentation des ARNm de la Dxps, ce qui révèle un mécanisme de rétrocontrôle initié par la PSY qui stimule les substrats de le voie du MEP (Rodriguez-Villalon et al., 2009a, b).

III.2.4.5. Rôle du stockage des caroténoïdes

La biogenèse des organites, tels que les chloroplastes, est déterminante dans la taille et le nombre des compartiments de stockage des plastes et peut affecter l’accumulation des caroténoïdes (Cazzonelli et Pogson, 2010).

Chez le chou-fleur, le mutant or, dont le niveau de transcrit des gènes impliqués dans la biosynthèse des caroténoïdes est identique à celui des plantes témoins, présente une augmentation de la concentration en β-carotène. Cette accumulation de β-carotène dans les chromoplastes révèle que la différenciation des plastes est un mécanisme important dans le contrôle de l’accumulation des caroténoïdes dans les plantes (Li et al., 2001). Chez la tomate, le mutant hp1 montre une augmentation des niveaux en caroténoïdes dus à l’augmentation du nombre et de la taille des plastes (Cookson et al., 2003). Chez la tomate, des mutants hp2dg ont montré une augmentation, au stade mature, des métabolites ayant une activité antioxydante : caroténoïdes, tocophérols et acide ascorbique, en même temps qu’une augmentation du nombre de cellules dans le fruit, une augmentation du nombre de chloroplastes par cellule, et une augmentation du volume des chloroplastes (Bino et al., 2005). Cette étude a été complétée par une étude des gènes impliqués (Kolotilin et al., 2007). L’expression des gènes impliqués dans la voie du méthylérythritol phosphate synthétisant les précurseurs nécessaires à la biosynthèse des caroténoïdes, ceux impliqués dans la biogénèse des chlorophylles, ainsi que ceux impliqués dans la photosynthèse est augmentée (Kolotilin et al., 2007). Il y a apparemment une coordination entre les mécanismes moléculaires dirigeant la biogénèse des plastes et ceux impliqués la biogénèse des métabolites secondaires (Kolotilin et al., 2007).

Dans les fruits mûrs de tomate, le mutant hp3 est caractérisé par un déficit de 75%

d’acide abscissique, une augmentation de 60% des niveaux de transcrits du gène FtsZ codant pour une protéine de tubuline impliquée dans la division des plastes et une concentration en

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Tableau 2: Effets positifs des facteurs de l’environnement, la lumière, la température, l’approvisionnement en carbone, la sécheresse, la salinité et la fertilisation azotée, sur la concentration en caroténoïdes par rapport à la matière fraîche dans différents fruits d’après Poiroux-Gonord et al. (2010).

Facteurs environnementaux Espèces Composés Effets Références

Faible température moyenne journalière Solanum lycopersicum L. β-carotène ++ (Koskitalo et Ormrod, 1972)

Forte exposition à la lumière Malus domestica Borkh. cv. Gala caroténoïdes totaux + (Li et Cheng, 2008)

Spectre de lumière (lumière bleue) Solanum lycopersicum L. lycopène et β-carotène + (Gautier et al., 2005b)

Forte radiation UV-B Malus domestica Borkh. β-carotène + (Rudell et al., 2002)

Rapport feuilles sur fruit élevé Mangifera indica L. caroténoïdes totaux ++ (Joas, 2008)

Citrus unshiu [Mak.] Marc. caroténoïdes totaux ++ (Iglesias et al., 2001)

Fortunella crassifolia Swingle β-cryptoxanthine +++ (Kondo et al., 2005)

Sécheresse Solanum lycopersicum L. cv. Mini Carol, cv.

Cherry Pink, cv. Yellow Carol

caroténoïdes totaux + (Matsuzoe et al., 1998) Spinacia oleracea L. β-carotène, lutéine, néoxanthine et

violaxanthine

+ (Leskovar et al., 2007)

Salinité élevée Lactuca sativa L. caroténoïdes totaux ++/+++ (Kim et al., 2008)

Capsicum annuum L. lycopène + (Navarro et al., 2006)

Solanum lycopersicum L. lycopène et β-carotène ++ (De Pascale et al., 2001)

Solanum lycopersicum L. lycopène et β-carotène +/++ (Krauss et al., 2006)

Conductance électrique élevée Solanum lycopersicum L. carotènes ++ (Wu et al., 2004)

Teneur en azote élevée Capsicum annuum L. lycopène et β-carotène +/++ (Flores et al., 2004)

Solanum lycopersicum L. lycopène +/++ (Aziz, 1968)

Citrus, Solanum tuberosum L., Solanum lycopersicum L.

carotènes + (Mozafar, 1993)

+, jusqu’à + 30% ; ++, de +30% à +100% ; +++, supérieur à +100% .

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41 caroténoïdes plus élevée de 30% (Galpaz et al., 2008). Ces résultats montrent qu’une carence en acide abscissique conduit à une augmentation de la taille des plastes, probablement due à une augmentation de la division des plastes, ce qui entraînerait une biosynthèse accrue des caroténoïdes.

IV. Influence des facteurs de l’environnement sur la biosynthèse et l’accumulation des caroténoïdes

Les facteurs environnementaux (lumière, température, et disponibilité en eau) qui déterminent la conductance stomatique et la pression partielle en CO2 au niveau des sites de carboxylation. Ils conditionnent donc des gains et des pertes de carbone, et influencent l’allocation des ressources carbonées entre les différents puits. Le statut carboné qui en résulte détermine la synthèse des métabolites primaires et secondaires.

IV.1. Les effets de l’environnement sur l’accumulation des caroténoïdes

Un certain nombre d’études se sont intéressées aux effets des facteurs climatiques sur la concentration en micronutriments, en vitamines et en composés secondaires des fruits et légumes. Ces études ont montré qu’il est possible d’augmenter substantiellement les concentrations en métabolites secondaires, et notamment en caroténoïdes, chez divers fruits et légumes en fonction des conditions environnementales (Tableau 2) mais également de les diminuer (Tableau 3).

La biosynthèse des caroténoïdes est affectée par les faibles températures moyennes journalières. Chez la tomate, la diminution des températures de 17,8/25.6°C à 2,8/13,9°C entraîne une augmentation de la concentration en β-carotène (+68,2%) (Koskitalo et Ormrod, 1972).

Généralement une bonne exposition et/ou une forte intensité lumineuse sont des facteurs positifs pour l’accumulation des caroténoïdes chez la pomme (Li et Cheng, 2008).

L’utilisation de longueurs d’onde spécifiques (Gautier et al., 2005b) et l’irradiation aux UV-B (Rudell et al., 2002) sont également des techniques favorables à l’augmentation, de la

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Tableau 3: Effets négatifs des facteurs de l’environnement, la lumière, la température, l’approvisionnement en carbone, la sécheresse, la salinité et la fertilisation azotée, sur la concentration en caroténoïdes par rapport à la matière fraîche dans différents fruits d’après Poiroux-Gonord et al. (2010).

Facteurs environnementaux Espèces Composés Effets Références

Augmentation de température du fruit Solanum lycopersicum L. caroténoïdes totaux - (Gautier et al., 2005a)

Spectre de lumière (verre/plastique contre condition de culture en plein champ)

Solanum lycopersicum L. lycopène et β-carotène -/-- (Cabibel et Ferry, 1980)

Concentration en concentration élevée Citrus aurantium L. (feuilles) lycopène -- (Schwanz et al., 1996)

Rapport feuilles sur fruit élevé Citrus clementina Hort. ex Tan. caroténoïdes totaux --- (exprimé en MS)

(Gonord et al., 2009)

Sécheresse Solanum lycopersicum L. caroténoïdes totaux - (Riggi et al., 2008)

Salinité élevée Solanum lycopersicum L. caroténoïdes totaux - (De Pascale et al., 2007)

Teneur en azote élevée Citrus unshiu [Mak.] Marc. Color index - (Iglesias et al., 2001)

-, jusqu’à - 30% ; --, de -30% à -100% ; ---, supérieur à -100%

Partie I : Introduction bibliographique

43 concentration en carotène et en lycopène chez la tomate (Gautier et al., 2005b), et en β-carotène chez la pomme (Rudell et al., 2002).

L’augmentation du nombre de feuilles par fruit entraîne une augmentation de la concentration en caroténoïdes totaux chez la mangue (Joas, 2008), et la mandarine (Iglesias et al., 2001), et en β-cryptoxanthine (+31,8% ) chez le kumquat (Kondo et al., 2005).

Les effets sur la biosynthèse des caroténoïdes de la sécheresse et d’une salinité élevée sont variables. Les effets peuvent être négatifs (De Pascale et al., 2007; Riggi et al., 2008) positifs (De Pascale et al., 2001; Kim et al., 2008; Krauss et al., 2006; Leskovar et al., 2007;

Navarro et al., 2006; Wu et al., 2004), ou non significatifs (Krumbein et al., 2006). Ces observations contradictoires sont dues à des interactions de facteurs. Ainsi, une baisse de la conductance stomatique et de la photosynthèse serait favorable en pénalisant la formation des précurseurs tandis que l’exacerbation du stress photooxydatif fournirait un stimulus positif pour la synthèse des caroténoïdes. Cependant, l’effet d’une salinité élevée n’est pas totalement assimilable à un stress hydrique car les plantes sont en plus soumises à un stress lié à un excès en ions sodium et chlorure ce qui pourraient expliquer, partiellement, la diversité des réponses obtenues.

L’effet de la privation en azote sur la concentration en caroténoïdes est différent selon les espèces. Un effet négatif a été observé chez le poivron (Flores et al., 2004), les agrumes, la pomme de terre (Mozafar, 1993) et chez la tomate (Aziz, 1968; Mozafar, 1993), et un effet positif chez la mandarine (Iglesias et al., 2001).

IV.2. Statut carboné ou stress oxydatif ?

IV.2.1. L’influence du statut carboné sur la concentration en caroténoïdes

IV.2.1.1. Liens entre les métabolismes primaire et secondaire

Les métabolites primaires (chlorophylles, acides aminés, nucléotides, carbohydrates,...) participent à la croissance et au développement de la plante via leurs rôles dans la photosynthèse, la respiration, ou le transport des solutés. Les métabolites secondaires sont impliqués dans la structure des plantes, dans les interactions avec les facteurs biotiques du milieu et en particulier dans la défense contre les agressions.

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Figure 19: Théorie de l’équilibre entre les mécanismes de différenciation et de croissance. Représentation de l’évolution du taux net d’assimilation, du taux de croissance relatif et du taux de synthèse des métabolites secondaires en fonction de la disponibilité en nutriments d’après Glynn (2007).

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45 IV.2.1.1.1. Théories déterministes

L’idée centrale des théories déterministes est que les plantes doivent optimiser la répartition de leurs ressources entre le métabolisme primaire impliqué dans la croissance et le développement et le métabolisme secondaire orienté vers la défense contre les pathogènes, l’adaptation à l’environnement, la survie et la propagation de l’espèce. Les deux métabolismes, sont en compétition pour les ressources carbonées.

La répartition du carbone entre les métabolismes primaire et secondaire est étudiée depuis des dizaines d’années par les écologues. Plusieurs hypothèses complémentaires et parfois contradictoires ont été proposées pour expliquer cette distribution. La théorie de l’équilibre entre les mécanismes de différenciation et de croissance (Growth Differentiation Balance Hypothesis, GDBH), est la plus élaborée des hypothèses de défense des plantes (Stamp, 2003).

La théorie de l’équilibre entre les mécanismes de différenciation et de croissance a été formulée initialement par Loomis (1932, 1953) et complétée par la suite par Lorio (1986) et Herms et Mattson (1992) (Figure 19).

Elle prédit comment les plantes allouent leurs ressources entre les processus liés à la différenciation et les processus liés à la croissance dans différentes conditions environnementales. Cette théorie prédit que I) les plantes soumises à de faibles disponibilités en ressources présentent une faible croissance et une faible production en métabolites secondaires ; II) l’allocation pour la production de métabolites secondaires est plus faible chez les plantes croissant avec des ressources élevées (Herms et Mattson, 1992) ; III) les plantes soumises à des disponibilités en ressources intermédiaires ont la plus grande concentration en métabolites secondaires tandis que l’accumulation de la biomasse est intermédiaire (Loomis, 1932, 1953; Luxmoore, 1991) (Figure 19).

Les concentrations en métabolites secondaires suivent une courbe en cloche et présentent un maximum pour de niveaux de ressources intermédiaires.

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Figure 20: Réseau de signalisation impliquant les interactions entre les hormones et les espèces réactives de l’oxygène d’après Fujita et al. (2006).

Partie I : Introduction bibliographique

47 IV.2.1.1.2. Théories mécanistes

Les physiologistes ont émis l’hypothèse que les carbohydrates ont un rôle modulateur sur la biogénèse des métabolites secondaires. Chez les agrumes, le saccharose favorise le changement de couleur d’une manière dépendante de l’éthylène (Iglesias et al., 2001). La limitation en saccharose, due à la répression du gène Psy1, retarde et réduit l’accumulation de lycopène et de phytoène sur les disques de péricarpe (Telef et al., 2006). Ces observations suggèrent que le saccharose agit comme une molécule stimulante qui accroît l'accumulation des caroténoïdes après l'induction de leur synthèse. Dans les feuilles, l’accumulation des sucres solubles régule négativement l’expression des gènes de la photosynthèse et conduit à une perte de chlorophylles (Koch, 1996; Krapp et al., 1991;

Rolland et al., 2002; Rolland et al., 2001). En admettant que les synthèses des chlorophylles et des caroténoïdes sont coordonnées, il faut s’attendre à ce que les sucres répriment la synthèse des caroténoïdes. Mortain-Bertrand et al. (2008) ont observé que l’accumulation des sucres dans les feuilles de tomate réprime les gènes codant pour les enzymes de la voie

Rolland et al., 2002; Rolland et al., 2001). En admettant que les synthèses des chlorophylles et des caroténoïdes sont coordonnées, il faut s’attendre à ce que les sucres répriment la synthèse des caroténoïdes. Mortain-Bertrand et al. (2008) ont observé que l’accumulation des sucres dans les feuilles de tomate réprime les gènes codant pour les enzymes de la voie