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Fonctions cardiovasculaires

3 Le système circadien et l’impact de la perturbation circadienne

3.1 Le système circadien

3.1.3.2.3 Fonctions cardiovasculaires

L'organisation fonctionnelle du système cardiovasculaire montre une rythmicité circadienne clairement orchestrée par l’horloge biologique centrale : la pression artérielle, la fréquence cardiaque, les résistances périphériques et l’activité de l’hormone vasodilatatrice et vasoconstrictrice montrent des variations circadiennes prononcées. Chez l'Homme, la pression artérielle est plus basse durant la nuit (moins de 10 à 20 % par rapport au jour), atteignant un minimum autour de 3 h et des pics après le réveil (9 h) ; un second pic est souvent vu en début de soirée (19 h). Chez les jeunes adultes en bonne santé, l’augmentation de la pression artérielle systolique du matin est de 20-25 mm Hg, mais chez les personnes âgées, qui ont des artères moins conformes et élastiques, elle peut être aussi grande que 40-60 mm Hg. Le déclin de la pression pendant le sommeil est plus marqué chez les femmes que chez les hommes. Le rythme circadien de la fréquence cardiaque se rapproche étroitement de celui de la pression artérielle dans des conditions normales et montre une forte dépendance génétique en matière de moyenne journalière, d’amplitude des variations, et d’heure de pointe pendant les 24 heures. Bien que la pression artérielle et la fréquence cardiaque soient normalement en parallèle, plusieurs études suggèrent que les rythmes circadiens de ces deux paramètres cardiovasculaires pourraient être régulés de façon différentielle. Les rythmes cardiaques semblent être plus intrinsèques, entraînés en

grande partie par les variations journalières de l'activité du système nerveux autonome, sympathique et parasympathique. Des études ont montré que l'horloge centrale pourrait moduler la fonction cardiaque par une stimulation nerveuse directe. Une forte corrélation existe entre les variations journalières des paramètres cardiovasculaires et les niveaux plasmatiques de noradrénaline et d’adrénaline (Young et al., 2006).

Bien que les rythmes circadiens de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, et du débit cardiaque soient classiquement attribués aux rythmes des constituants neuroendocriniens, les rythmes au niveau cellulaire jouent également un rôle important. Des horloges cellulaires existent dans au moins deux principaux types de cellules du système cardiovasculaire, les cardiomyocytes et les cellules des muscles lisses vasculaires. La manipulation génétique des composants de l’horloge circadienne, tels que CLOCK et BMAL1, les variations du gène de l'horloge humaine PER3, et l'ablation génétique de l'horloge circadienne dans les cellules endothéliales ou musculaires lisses vasculaires, modifient de manière significative ou suppriment les rythmes circadiens de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle (Portaluppi et al., 2012). Les horloges du système cardiovasculaire influencent potentiellement la fonction cardiovasculaire en permettant l'anticipation de l'action des facteurs neuro-hormonaux, assurant ainsi une réponse appropriée rapide.

Ainsi, une interaction complexe entre les facteurs environnementaux et le système circadien endogène (horloges centrales et périphériques) contribue aux changements de la fonction cardiovasculaire au cours de la journée. En plus de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle, d'autres paramètres du système cardiovasculaire présentent aussi des variations circadiennes, par exemple le volume systolique, le débit cardiaque, le flux sanguin, la résistance périphérique, les paramètres électrocardiographiques, les concentrations plasmatiques d'hormones (la noradrénaline, la rénine, l’angiotensine, l’aldostérone, l’hormone natriurétique auriculaire), la viscosité sanguine et l'activité fibrinolytique (Lemmer et al., 2006). Il faut noter que l'infarctus du myocarde est de deux à trois fois plus fréquent le matin, entre 6 h et midi, que la nuit, et que des variations circadiennes ont également été établies dans la présentation des arythmies cardiaques à la fois supraventriculaires et ventriculaires. Finalement, les rythmes circadiens affectent également la pharmacocinétique et la pharmacodynamique des médicaments cardiovasculaires. Ainsi, les rythmes journaliers des risques des troubles du rythme cardiaque, de la morbidité, de la mortalité des maladies cardiovasculaires, ainsi que des mécanismes physiopathologiques sous-jacents sont différents. Cela suggère que les interventions préventives et thérapeutiques devraient être adaptées en conséquence pour améliorer les conditions de santé et de travail.

3.1.3.2.4 Cognition

Il est bien démontré que les capacités cognitives varient sur 24 heures en fonction de l’état d’éveil et de sommeil (cf. Figure 8 ci-dessous). Les performances cognitives sont régulées à la fois par le système circadien (niveau plus élevé durant la journée biologique et plus faible durant la nuit biologique), et par la pression de sommeil (niveaux de performance réduits si la durée d’éveil augmente), et ceci de façon indépendante ou non. Selon le moment du cycle jour-nuit pendant lequel une performance cognitive est demandée, le temps de réaction et la capacité d’attention soutenue seront différents. Ceci contribue à un rythme journalier de la pertinence de la réponse motrice ou cognitive. Le temps de réaction et la possibilité de réponses inappropriées (lapses), souvent évalués par le test de performance psychomotrice, évoluent de la même façon que la somnolence perçue au cours du cycle jour-nuit (et qui peut être évaluée par des échelles de type Karolinska sleepiness scale (KSS)).

Cette régulation circadienne cognitive permet de maintenir un niveau de performance stable au cours de la journée, dans des conditions où l’horloge biologique est synchronisée et le sommeil est nocturne. En revanche, dans des conditions où l’horloge est désynchronisée, comme cela se produit lors du travail de nuit par exemple, la conjonction d’une heure biologique inappropriée et d’une veille de longue durée (la durée de la veille est plus grande

avant de prendre le poste de travail de nuit que de jour) abaisse très sévèrement les performances cognitives et le niveau de vigilance.

Figure 6 : régulation circadienne et homéostasique des performances cognitives, mnésiques et psychomotrices.

Les performances au test d’addition (ADD), au test de substitution de symboles (DSST), au test de mémorisation (PRM), et au test de mesure du temps de réaction (PVT) sont contrôlées par le système

circadien (colonne de gauche, leur niveau dépend de l’heure à laquelle la tâche est effectuée) et par le processus homéostatique (les performances diminuent au cours de la journée parallèlement à

l’augmentation de la pression de sommeil). Figure de Wyatt et al.,1999.

3.1.3.2.5 Humeur

Les études en laboratoire chez l’Homme montrent que l’humeur est influencée par une interaction complexe, non additive, entre l’heure biologique interne (la phase circadienne) et la durée de la veille préalable (cf. Figure 7).

La nature de cette interaction est telle que des changements modestes dans la synchronisation du cycle veille-sommeil (la position du sommeil dans les 24 heures) peuvent avoir des effets majeurs sur l’humeur subséquente (Boivin et al.,1997). En d’autres termes, l’humeur est régulée par le système circadien de manière à être plus positive de jour que de

nuit. De plus, l’humeur se détériore progressivement avec la pression de sommeil qui s’accumule au cours de la veille.

Figure 7 : régulation circadienne de l’humeur.

La figure de gauche illustre la régulation circadienne de l’humeur, qui est au plus haut de jour et au plus bas de nuit. À droite, en haut, on voit que l’humeur se détériore progressivement durant la veille ;

d’après Boivin et al. (1997).

Comme pour la performance cognitive, cette double régulation de l’humeur permet, dans des conditions où l’horloge biologique est synchronisée et le sommeil nocturne, de maintenir un niveau d’humeur stable au cours de la journée. Dans des conditions où l’horloge est desynchronisée, en particulier lors du travail de nuit, l’humeur est au plus bas durant la veille nocturne. Ce phénomène pourrait contribuer à l’humeur anxiodépressive observée chez certains travailleurs postés.

3.1.4 Les différences individuelles

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