• Aucun résultat trouvé

Titre : L’analyse du cycle de vie d’une communauté de pratique: une perspéctive ethnographique.

4.3 IL ÉTAIT UNE FOIS DIX ANS DE VIE D’UN FABLAB

Comprendre et raconter dix ans d’histoire d’une communauté invite à entrer dans la « cuisine » de l’analyse ethnographique. C’est ainsi se saisir de l’ensemble des ingrédients collectés, dans la richesse de leurs contextes, les articuler avec les séquences d’action pour identifier les moments de bifurcation dans la trajectoire de la communauté et l’évolution de sa structure morphologique.

Ne retenant que la perspective rendue ainsi opératoire, nous avons considéré le processus de cycle de vie comme une histoire, résultant de causalités multiples et interdépendantes qui se combinent dans le temps, jalonnée par quatre principales étapes.

Nous faisons le récit de chacune, dans un volet descriptif puis analytique.

4.3.1 PHASE 1 : 2009 - 2014 NAISSANCE D’UNE COMMUNAUTÉ DE PRATIQUE : UNE STRUCTURE DE TYPE CORE-PÉRIPHÉRIE

4.3.1.1 Volet descriptif

• 2009 - 2012 : création d’une communauté

Artilect est une association créée en 2009 à Toulouse. Ce FabLab est le premier français à s’inscrire sur la liste FabLab.io de la FabFoundation et à rejoindre le réseau international des FabLabs. Les deux fondateurs de cette structure bénéficient du soutien de plusieurs acteurs et institutions locales. Rapidement un groupe d’une dizaine de membres se constitue. Ces individus (principalement masculins) bénéficient d’un lieu (un local de 12m2), de quelques outils mutualisés, ainsi que de temps de formation et de convivialité.

Dès l’année 2010, les membres de l’association œuvrent ensemble à la création de projets collaboratifs permettant de récolter des fonds pour celle-ci. Ces projets sont autant d’occasions pour eux d’apprendre à se connaître davantage et à travailler ensemble ; également, de clarifier l’identité de l’association ainsi que ses objectifs et son mode de fonctionnement.

En 2011, le déménagement dans un plus grand local facilite les temps de travail collectif. Un rendez-vous hebdomadaire s’institue : c’est l’OpenLab (le lundi soir). Le groupe de douze hommes très actifs fonctionne de manière informelle ; autour de lui des individus s’agrègent jusqu’à constituer une communauté d’une 50aine de personnes. Le président de l’association est la figure publique et engage de nombreuses démarches partenariales.

Rapidement, parmi la dizaine de membres très impliqués, certains contestent le mode de gouvernance statutaire de l’association dont seuls les deux fondateurs sont officiellement administrateurs. Ils constituent un groupe de travail dédié à la transformation des statuts.

• 2013 - 2014 (1bis) : un premier changement d’échelle

En janvier 2013 Artilect déménage une seconde fois, dans un lieu grand, accessible et visible en centre-ville de Toulouse. L’activité se développe et se formalise. Un des membres actifs de la première heure est embauché comme FabManager ; une gestionnaire administrative est aussi embauchée ; conjointe de l’un des fondateurs, elle est connue de tous les premiers membres.

De nouveaux statuts sont votés en juin 2013, intronisant un bureau plus étendu.

Les OpenLab sont toujours des rendez-vous hebdomadaires incontournables pour les membres actifs et l’occasion de réunions diverses (du bureau, des groupes de travail). Ce sont aussi des temps d’accueil et de visite pour le public. Le FabLab attire de plus en plus de curieux et de nouveaux membres actifs se manifestent.

Le nombre de membres augmente rapidement atteignant les 350 en janvier 2014. Par le biais des initiatives des membres fondateurs et grâce à l’action de nouveaux membres actifs, de nombreux partenariats sont établis avec divers acteurs locaux (universités, lycées, écoles d’architecture, de design, mais aussi startups, TPE et PME du domaine du numérique).

Les membres fondateurs constatent l’apparition d’un nouveau type d’adhérents qu’ils nomment « les membres clients », en ce que ces derniers ne s’impliquent pas dans le fonctionnement du FabLab et n’en ont aucunement l’intention. Ils observent également l’augmentation du nombre de membres considérés comme « usagers », différents des précédents en ce qu’ils ne parviennent pas (encore) à trouver leur place dans l’association. Pour favoriser les rencontres et la collaboration entre les membres, les membres du bureau instaurent des rencontres mensuelles composées d’un temps formel de présentation de projets, suivi d’un appel à compétences puis d’un apéritif convivial (Les Super Lundis).

4.3.1.2 Volet analytique

Cette phase semble caractériser l’apparition d’une communauté de pratique qui vit un premier cycle. L’ensemble des caractéristiques nécessaires à sa robustesse sont réunies : les membres se rencontrent régulièrement, se connaissent, se font confiance, communiquent et règlent in situ leurs conflits. Un noyau de membres actifs participe à « la règle » et à « sa

circule au sein du groupe core ainsi que vers la périphérie par l’intermédiaire de quelques individus du groupe core ayant une forte centralité.

Dans un premier temps, et malgré la faible accessibilité de son lieu, l’organisation rayonne sur son territoire ce qui lui permet d’avoir accès à un espace plus grand.

Suite à ce (second) changement de lieu, la communauté vit un premier changement d’échelle tout en préservant ses caractéristiques clés susmentionnées.

Figure 5 : Représentation de la structure communautaire d’Artilect- Phase 1 (2009-2012)

4.3.2 PHASE 2 : 2014-2016 - CHANGEMENT D’ÉCHELLE : VERS UNE STRUCTURE DE TYPE CONSTELLATION

4.3.2.1 Volet descriptif

Au cours de l’année universitaire 2014/2015 quatre éléments majeurs marquent la dynamique communautaire d’Artilect :

Artilect organise un festival national avec un faible budget (environ 60 k€). Cet évènement voit le jour grâce à une très forte mobilisation bénévole de nombreux membres de l’association : des membres actifs (fondateurs et autres), des membres jusqu’alors usagers, mais devenant ici actifs et d’autres encore rejoignant l’association à cette occasion. Ce projet d’envergure est piloté par un coordinateur et 6 commissions thématiques ayant chacune un responsable.