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INTRODUCTION DE LA PARTIE

2.4 UN CADRE D’ANALYSE DE LA GOUVERNANCE DES RÉSEAUX INTER ORGANISATIONNELS

2.4.2 DEUX APPROCHES DE LA GOUVERNANCE DES RÉSEAU

2.4.2.1 Gouvernance régie par des mécanismes sociaux

La première vision, influencée par la sociologie des organisations, consiste à penser que la gouvernance d’un réseau est assurée par le biais de mécanismes sociaux. Pour Jones et al. (1997), la gouvernance d’un réseau consiste en l’accomplissement de deux principales missions : la coordination et la protection des relations dans un contexte changeant. Ils proposent quatre mécanismes sociaux qui permettent d’assurer ces missions, de faire d’un réseau une organisation viable tout en minimisant les coûts de transaction, et favoriser la coopération dans le collectif :

- L’accès restreint qui protège les formes d’interactions et favorise la coopération entre les membres.

- L’existence d’une macro-culture ou socle de valeurs, normes et pratiques communes permettant de faire ensemble, « la macroculture coordonne les activités interdépendantes

entre entités indépendantes afin que des tâches complexes puissent être accomplies» (Jones

et al., 1997, p929). Sa construction s’inscrit dans le temps et son contenu doit être en mesure d’évoluer.

- L’existence de sanctions collectives qui renforcent la perception des comportements acceptables ou non – dépendamment de la macro-culture. Elles constituent à la fois le mécanisme social qui assure le respect des normes et le rempart contre l’opportunisme et les comportements déviants.

- La réputation évalue le degré de fiabilité et de compétence d’un membre du réseau. Ce mécanisme peut être dangereux – particulièrement dans un réseau comptant un grand nombre de membres – car l’information peut être partielle, déformée, datée. De plus il renforce le risque de créer des groupes restreints et de voir leur homophilie s’amplifier.

Ces mécanismes favorisent la réduction des coûts de coordination et le maintien de la collaboration. Ils requièrent un équilibre et une certaine cohérence dans la mise en œuvre au sein d’un réseau, des déséquilibres pouvant renforcer le dilemme social, encourager les pratiques opportunistes et entraver l’accomplissement du but commun. La difficulté réside dans la nature de ces mécanismes qui – à l’exception de la restriction de l’accès - émergent des dynamiques sociales de façon informelle.

2.4.2.2 Des modèles fondés sur des mécanismes de coordination

Pour identifier différents modèles de gouvernance des réseaux, Provan et Kenis adoptent une approche hybride : perspective analytique et gouvernance pour étudier les mécanismes de coordination utilisés pour coordonner et manager le réseau global. Ils présentent trois principaux modèles de gouvernance (Provan et Kenis, 2008 ; Provan et al., 2007).

Réseau Gouverné par les Participants (RGP) : Ce modèle « Apparait lorsque les

organisations composant le réseau prennent elles-mêmes à la fois les décisions stratégiques et opérationnelles concernant le fonctionnement du réseau. » (Provan et al., 2007 ; 504). Le

contrôle peut y être exercé de façon formelle (réunions, élection de représentants) ou informelle (interactions et collaboration non coordonnées des participants intéressés au succès du réseau). Aucune organisation n’est dédiée à la coordination ni ne représente le réseau. Il peut arriver qu’un sous-groupe soit en charge de certaines activités administratives ou de coordination. C’est selon eux la forme la plus commune (notamment dans le secteur de la santé). D’après les auteurs, « Seul le fait que tous les membres du réseau participent, sur un pied d'égalité,

permettra aux participants de s'engager à atteindre les objectifs du réseau. » (Provan et Kenis,

2008 ; 234)

Réseau Gouverné par une Organisation Leader (RGOL) : Dans ce type de réseau tous

les membres partagent le même objectif et interagissent entre eux. C’est toutefois un modèle centralisé dans lequel une des organisations membre joue le rôle de leader.

« Une organisation leader assure l'administration du réseau et/ou facilite les activités

des organisations membres dans leurs efforts pour atteindre les objectifs du réseau, qui peuvent être étroitement liés aux objectifs de l'organisation dirigeante. » (Ibid 2008 ; 235). En plus de

son activité classique – au même titre que les autres membres - elle est responsable de la maintenance des relations existantes et du développement de relations extérieures. Elle possède les ressources, la puissance et la légitimité suffisante pour se voir attribuer ce rôle. Elle peut émerger directement du réseau ou être mandatée par un financeur extérieur.

Réseau Gouverné par une organisation chargée de l’administration (Network

Administrative Organization – NAO) : C’est un modèle centralisé dans lequel une structure administrative (la NAO) distincte des membres est spécialement créée pour et dédiée à la gouvernance du réseau. Elle est nommée par mandat ou par les organisations elles-mêmes. Elle peut être de taille modeste (un individu chargé de la coordination, considéré comme un facilitateur ou un intermédiaire) ou plus conséquente (une organisation formelle « directeur exécutifs, équipe, bureau Provan et al. ajoutent par ailleurs que « Le rôle de la NAO peut être principalement de soutenir (plus que de mettre en œuvre) la coordination du réseau de sorte que ce modèle peut co-exister avec l’un des deux autres » (Provan et al., 2007 ; 504).

Ils identifient quatre contingences structurelles et relationnelles clés permettant d’identifier le mode de gouvernance qui favorise l’efficacité du réseau : (i) la densité de la confiance entre les membres, (ii) le nombre de membres (taille du réseau), (iii) le niveau de consensus sur l’objectif(s) commun(s) et (iii) la nature de la tâche (il précise notamment le besoin de compétences spécifiques au niveau du réseau) (Provan et Kenis, 2008 ; 237). Il propose un tableau de synthèse des prédicteurs clés de l’efficacité de chaque mode de gouvernance. Le tableau 10 en est une reproduction :

Tableau 10 : « prédicteurs clés de l'efficacité des formes de Gouvernance en réseau ». (source : Extrait de Provan et Kenis, (2008, p237)

Ces deux grilles d’analyses n’ont pas le même statut, mais peuvent être complémentaires. Les mécanismes de coordination et sociaux se combinent et, en les abordant parallèlement, permettent d’approcher de différentes manières un même réseau.