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4.2 Axe 1 : L’expérience de la PDS

4.2.3 Dépend des relations avec les autres

4.2.3.2 La famille et les proches

Le type de relation qu’entretiennent les membres d’une famille entre eux peut influer sur l’expérience de prise de décision substituée, soit positivement, lorsqu’elle est de l’ordre du soutien, ou soit négativement, lorsque les relations sont davantage conflictuelles. Les résultats de cette recherche démontrent que l’ensemble des participants se sont dits soutenus par les membres de leur famille. Certains désaccords avec les proches sont par ailleurs survenus chez quelques participants, mais, selon leurs dires, ceux-ci n’ont pas influencé négativement leur expérience.

Un Soutien essentiel

Dans la majorité des situations vécues par les participants, une personne était nommée explicitement ou implicitement pour prendre les décisions. Cette personne était le porte- parole de la famille auprès des professionnels de la santé. Comme indiqué par France (P6), puisqu’il s’agit d’une infirmière, il était évident à ses yeux et pour sa famille qu’elle devait occuper ce rôle de porte-parole. Ainsi, les membres de sa famille se fiaient sur elle pour qu’elle prenne les meilleures décisions. Toutefois, pour elle il était important de leur donner des informations et d’obtenir leur accord. En effet, au cours de l’entrevue, elle a parlé tout le temps au « nous » et non en utilisant le « je ». Pour Louise (P4), aucune personne n’a été mandatée pour prendre les décisions. En effet, les trois enfants se consultaient tout le temps et prenaient les décisions d’un commun accord. Comme l’a précisé Louise (P4), son frère, sa sœur et elle étaient tous au même diapason concernant les souhaits de leurs parents, car ils les avaient souvent entendu parler de leur désir de rester à la maison et de ne pas être un fardeau pour la famille.

Tous les participants ont reçu du soutien de la part des membres de leur famille (frère, sœur, conjoint, enfants). Ils ont clairement justifié l’importance de ce soutien dans leur expérience de prise de décision substituée. En ce sens, France (P6) s’exprimait ainsi : « j’ai senti que ma famille était derrière moi et derrière les décisions qu’on prenait. Parce que… ils voulaient tous que mon père arrête de souffrir ». Selon les résultats découlant de cette étude, le soutien des membres de la famille n’est pas uniquement présent lors de la prise de décision

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substituée, il l’est également dans d’autres circonstances de leur expérience. En effet, pour ce qui est d’Aline (P5), dans les derniers moments de vie de sa mère, les trois enfants étaient présents ensemble au chevet de leur mère à écouter sa musique préférée. Pour Nathalie (P3), ses filles ont été d’un grand soutien pour sa prise de décision et ont l’ont aidé tout au long de son expérience. Pour elles, il a été important de protéger leur mère en lui rappelant qu’elle ne pouvait pas toujours être présente auprès de ses parents. Ses filles sont même allées jusqu’à chercher Nathalie (P3) au CH pour être certaines qu’elle prenne du temps pour se reposer.

Une gestion des désaccords

Certains participants ont vécu des désaccords avec des membres de leur fratrie, mais aucun des participants n’a vécu de conflit majeur avec sa famille au point d’avoir affecté la prise de décision. Toutefois, ces désaccords ont alourdi, complexifié l’expérience des participants.

Nathalie (P3) a vécu un désaccord avec son frère, qui ne vivait pas dans la même ville qu’elle et leurs parents, concernant l’intention de ne pas traiter une pneumonie. Elle a précisé que cela n’a pas nui à sa prise de décision, mais cette situation a rendu l’expérience de la prise de décision substituée beaucoup plus difficile. Nathalie (P3) était consciente que son frère ne se serait jamais opposé à une de ces décisions, mais c’était important pour elle d’obtenir son accord.

Lui, il ne vient pas les voir… pis lui, il ne s’en occupe pas. Ça fait que des fois moi, j’étais rendue à des stades…mais écoute-là si elle a une pneumonie ou quoi que ce soit là… je ne la soigne pas la pneumonie, c’est fini là. On ne donne plus d’antibiotiques là. Mais là, lui, hein, on ne peut pas faire ça! Mais c’est parce qu’on va étirer combien de temps là? T’sais elle ne reconnait plus personne. Elle n’est pas bien. Elle pleure tout le temps. Elle crie. On fait quoi là? Il va falloir qu’elle meure de quelque chose là. On ne peut pas soigner une pneumonie… pis moi j’étais rendue là parce que je la voyais souffrir […], mais là, lui, il était comme pas prêt (Nathalie P3).

Une autre participante, Louise (P4), a elle aussi eu certains différends avec son frère et sa sœur. Par exemple, elle s’est aperçue que la présence de l’infirmière du CLSC serait pertinente au domicile pour évaluer leur père, son frère et sa sœur ne voulaient pas communiquer avec celle-ci, car leur père disait que tout allait bien. Lorsque Louise (P4) a

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fait les démarches, malgré leur désaccord, ceux-ci ont finalement été satisfaits en voyant les bénéfices de l’intervention de l’infirmière sur l’état de leur père. Dans une autre situation, Louise (P4) a constaté que de pouvoir bénéficier d’un lit d’hôpital, à la maison, serait vraiment aidant. Son frère trouvait que son père n’était pas rendu à ce stade. Encore une fois, Louise (P4) est allée de l’avant dans ses démarches, malgré la réticence de son frère. Lors de l’arrivée du lit d’hôpital, son frère n’a pu que constater les bienfaits, pour lui et pour son père, de l’utilisation de ce lit.

Pierre (P7) a été en désaccord avec sa sœur, médecin, relativement à certains des traitements proposés à leur mère. Tous deux n’avaient pas effectué le même cheminement par rapport à la situation de leur mère, c’est-à-dire que Pierre était davantage prêt à accepter sa mort tandis que sa sœur ne voulait pas anticiper cette possibilité. D’après Pierre (P7), s’il avait convaincu sa mère de ne pas de faire opérer et qu’elle était décédée dans les semaines suivantes, sa sœur lui en aurait beaucoup voulu.

J’ai ma sœur qui est médecin, mais elle était à l’extérieur… mais, elle, elle voulait garder [notre mère vivante le plus longtemps possible], elle ne voulait pas qu’on passe à travers toutes les étapes. Mais là c’était plus difficile [il n’y avait pas de] conflits là - mais il y avait des divergences d’opinions là. Au niveau familial là-dessus là. Parce que moi, je trouvais que c’était comme de l’acharnement.