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Étude de l'expérience de la prise de décision substituée par des proches de patients en contexte de soins palliatifs

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Academic year: 2021

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© Pascale Bouchard, 2019

Étude de l’expérience de la prise de décision substituée

par des proches de patients en contexte de soins

palliatifs

Mémoire

Pascale Bouchard

Maîtrise en sciences infirmières - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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Étude de l’expérience de la prise de décision substituée

par des proches de patients en contexte de soins

palliatifs

Mémoire

Pascale Bouchard

Sous la direction de :

Patrick Martin, directeur de recherche

Mireille Lavoie, codirectrice de recherche

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Résumé

La philosophie des soins palliatifs place le respect de la personne et de son autonomie au cœur des préoccupations de la pratique clinique (Randall & Downie, 2006). Le processus décisionnel en fin de vie s’inscrit dans la mise en œuvre de ce droit à l’autonomie (Ho, 2008). Par contre, les patients gravement malades ne peuvent pas toujours prendre eux-mêmes les décisions. Les professionnels de la santé doivent dès lors compter sur le soutien des proches et s’enquérir de leurs perceptions pour prendre les décisions relatives aux soins et aux traitements du malade. Il est en fait admis que ces derniers sont les mieux placés pour prendre ces décisions puisque ce sont eux qui connaissent le mieux le patient et qui sont les plus habilités à les représenter et à défendre leurs intérêts (Meeker et Jezewski, 2004). Au sein de ce processus, il est important, autant de la part de la famille que des professionnels de la santé, de garder à l’esprit que le cœur des préoccupations doit demeurer le patient, avec l’intention de préserver son autonomie le plus longtemps possible.

Cependant, il y a lieu de se demander comment se vit l’expérience de prendre des décisions pour autrui du point de vue des proches des malades, de sorte à mieux comprendre le malaise et l’inconfort qu’ils peuvent vivre lors de la prise de décision. Ce malaise peut être d’autant plus présent lorsqu’il n’y a pas eu de discussion préalable entre les membres de la famille au sujet des soins de fin de vie désirés. Grâce à cette étude, nous avons dégagé certaines pistes de réflexion permettant aux infirmières de mieux soutenir les familles dans ces prises de décisions et suite au décès du patient. Dans cette optique, l’objectif de ce projet de recherche visait l’approfondissement des connaissances relatives à l’expérience des proches qui prennent part aux prises de décisions pour un des leurs, dans un contexte de soins palliatifs. Il s’avérait que les dimensions de cette expérience étaient encore peu explorées dans la littérature. En effet, quelques études avaient été réalisées de façon à mieux comprendre le processus de la prise de décision, mais jusqu’à maintenant notre compréhension de la façon dont les familles vivent cette expérience était particulièrement incomplète.

Au terme de cette étude, les résultats indiquent qu’au sein de notre société contemporaine, il y a encore une confusion quant à la façon dont l’expression « soins palliatifs » est utilisée, et les professionnels de la santé mobilisent souvent eux-mêmes le

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terme de façons erronées. De plus, une pénurie de moyens est observable au sein du système de santé québécois, cette dernière étant accentuée par un accès des plus complexes aux services et aux soins. À la lumière de nos résultats, l’expérience de prise de décision substituée serait également facilitée par : l’importance pour les infirmières de mettre une emphase sur le bien-être de la personne malade, le soutien de l’infirmière et des autres professionnels de la santé envers les proches, la connaissance préalable des directives anticipées ou des volontés de la personne malade, et enfin l’obtention par les proches aidants d’informations nécessaires à la prise de décision libre et éclairée.

Par contre, l’expérience de prise de décision peut être influencée par des éléments contraignants tels que par des conflits au sein de la famille, par une attitude peu empathique des professionnels de la santé et par la transmission insuffisante d’informations. Nos résultats indiquent également que les proches basent la majorité de leurs décisions sur le désir que leur être cher ne souffre pas. Plusieurs proches ont par ailleurs précisé avoir vécu un sentiment de culpabilité et s’être questionnés fréquemment à savoir s’ils avaient fait les bons choix. Malgré cette culpabilité et ces questionnements, tous les participants nous ont indiqué être maintenant en paix avec les décisions prises. Pour la plupart d’entre eux, malgré le décès de l’être cher, ils ont observé un impact positif dans leur vie.

Finalement, les résultats de cette étude indiquent que l’infirmière se doit d’offrir un accompagnement chaleureux, et ce, de par l’importance de considérer la personne malade comme un être humain jusqu’à la mort tout en restant attentive aux besoins des proches. De plus, cette dernière devrait être disponible pour communiquer, verbalement et par écrit, les informations nécessaires à la compréhension de la situation par les proches.

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Abstract

The philosophy of palliative care emphasizes the respect for persons and their autonomy (Ho, 2008) and is a main concern for clinical practice (Randall & Downie, 2006). The decision making process for patients at end-of-life falls within the implementation of people’s right to autonomy. Critically ill patients can’t always decide for themselves tough. Health professionnals must then depend on support from close family members and try to get their perceptions of the situation in order to decide for proper care and treatments for the patient. We have to admit that they are better positioned to take a decision since they know the patient well. Plus they are best suited to represent and defend their interests (Meeker & Jezewski, 2004). In this process, it’s important for both sides, family members and health professionnals, to keep in mind that the main focus here is the patient, with the intention of maintaining its autonomy as long as possible.

Although, we have to question ourselves as to how this experience is for family members, to better understand the emotion or discomfort they go through while deciding for a relative. It must be even more uncomfortable when no discussion has taken place prior or before, between relatives regarding end-of-life care. Thanks to this survey, we have come up with a number of possible approaches to help nurse support families having to decide for a relative and also following a patient’s death. The objective of this research project was to have a better understanding regarding relatives having to take decisions for a close family member, in the context of palliative care. It seems that we find hardly no data available in literature. In fact, only few surveys were realised to help better understand the decision-making process but up until now our understanding of how families go through this experience is incomplete.

In the end, results indicate that in our society, there is still confusion for the expression “ palliative care” as to how it is used by even health professionals themselves – the term is often mis-used. The lack of ressources is noticeable in our Quebec health system plus access to care and services is more complicated. With our results, the decision making process would be facilitated by: putting more emphasis for nurses and other health

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professionals towards relative, by having good knowledge of patient’s wishes and by getting, from care-givers, all the information needed in the decision making process.

Although this decision-making process could be influenced by some inconvenient such as conflicts within family, by a bad attitude by health professionals and by a lack of information. Our results also indicate that relatives based most of their decision on the hope that their loves-one do not suffer. Several close family members have experienced a sense of guilt and have often questioned themselves to figure out if they had made the right choice. All participants have indicated that despite the guilt and concerns, they are in peace with their decisions. For must of them, the death of a family members has had a positive impact in their life.

Finally, the results of this survey show that a nurse must offer a warn support by considering the patient as a human being until death, while respecting the needs of relatives. Furthermore, the nurse must be available to communicate, in writing or verbally, to close relatives, all information needed to understand the situation.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... v

Table des matières ... vii

Listes des tableaux ... xi

Liste des figures ... xii

Abréviations ... xiii

Remerciements ... xv

Introduction ... 1

Chapitre 1 : ... 3

Problématique de recherche ... 3

1.1 Définition des soins palliatifs ... 5

1.2 La prise de décision en soins palliatifs ... 6

1.2.2 La prise de décision substituée ... 8

1.3 Normes à utiliser lors de la prise de décision substituée ... 9

1.4 Clarifications en lien avec les directives anticipées ... 10

1.5 L’impact émotionnel lié à la prise de décision substituée ... 13

1.6 La place du soutien à la prise de décision en sciences infirmières ... 15

1.7 But ... 16

1.8 Questions de recherche ... 17

Chapitre 2 : ... 18

Recension des écrits ... 18

2.1 Les types de décision. ... 19

2.2 Les facteurs influençant la prise de décision. ... 20

2.3 Le processus de prise de décision substituée. ... 24

2.3.1 Première dimension : obtention de l’information requise ... 27

2.3.2 Deuxième dimension : remémoration de la perception du proche... 28

2.3.3 Troisième dimension : vers l’intégration d’une décision qui fait sens ... 29

2.4 Le processus de prise de décision et le rôle du proche ... 30

2.5 L’expérience vécue par les proches lors de la prise de décision. ... 32

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2.5.2 L’expérience dans un contexte catastrophique et inattendue ... 34

2.5.3 L’expérience dans un contexte d’acceptation ou de refus de traitement ... 36

2.6 Proposition d’un cadre de référence réflexif ... 39

Chapitre 3 : ... 43

Considérations méthodologiques ... 43

3.1 Devis de recherche ... 44

3.2 Milieu de l’étude ... 45

3.3 Stratégie de recrutement et échantillon ... 45

3.3.1. Échantillonnage. ... 45

3.3.2 Critères de sélection. ... 47

3.4 Collecte de données ... 47

3.4.1 Les entrevues semi-structurées... 47

3.4.2 Le questionnaire sociodémographique ... 48

3.4.3 Le journal de terrain ... 49

3.5 Analyse des données ... 50

3.5.1 L’analyse thématique ... 50

3.6 Critères de rigueur scientifique ... 51

3.6.1 Crédibilité ... 51 3.6.2 Fiabilité ... 52 3.6.3 Confirmabilité ... 52 3.6.4 Transférabilité ... 52 3.7 Considérations éthiques ... 53 3.8 Diffusion et dissémination ... 54 Chapitre 4 : ... 55

Présentation des résultats ... 55

4.1 Profil sociodémographique des participants ... 57

4.2 Axe 1 : L’expérience de la PDS ... 60

4.2.1 Varie en fonction de l’organisation des soins et des services de santé ... 62

4.2.1.1 Les contraintes liées à la technobureaucratie ... 62

4.2.1.2 Impacts de l’accès aux services de santé ... 63

4.2.1.3 Signification des soins palliatifs ... 67

4.2.2 Sollicite des facteurs intrinsèques du proche aidant ... 68

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4.2.2.2 La quête d’information ... 71

4.2.2.3 L’affirmation des valeurs ... 72

4.2.2.4 L’attitude face à la mort et la souffrance ... 73

4.2.3 Dépend des relations avec les autres ... 75

4.2.3.1 Les professionnels de la santé ... 75

4.2.3.2 La famille et les proches ... 82

4.2.3.3 Le malade ... 84

4.2.4 S’exprime dans la recherche d’un idéal pour la personne malade ... 87

4.2.4.1 Le soulagement de la souffrance et de l’inconfort ... 87

4.2.4.2 Le respect et la dignité ... 89

4.2.4.3 Le transfert en soins palliatifs ... 90

4.2.4.4 Des soins et services correspondant aux besoins ... 92

4.2.5 S’accompagne de sentiments variés pendant et après le processus ... 93

4.2.5.1 Des sentiments émouvants ... 94

4.2.5.2 Des sentiments apaisants ... 98

4.2.6 Représente un don de soi ...100

4.2.7 Entraîne un impact positif dans sa propre vie ...101

4.3 Axe 2 : Pistes d’actions pour les infirmières ...103

4.3.1 Idéal normatif infirmier ...104

4.3.1.1 Un accompagnement respectueux ...104

4.3.1.2 Une communication à entretenir ...108

4.3.2 Idéal normatif institutionnel ...111

Chapitre 5: ...116

Discussion...116

5.1 Des convergences, des divergences et des contraintes ...118

5.1.1 Les convergences ...118

5.1.1.1 Les facteurs facilitants et contraignants ...119

5.1.1.2 Les sentiments vécus par le proche durant l’expérience de prise de décision. ...121

5.1.2 Les divergences ...122

5.1.2.1 Technobureaucratie ou organisation des soins et services de santé ...122

5.1.2.2 Temps ...123

5.1.3 Les contraintes ...124

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x

5.3 La relation soignante ...132

5.4 Recommandations pour la formation (continue et académique) ...134

5.5 Recommandations pour la recherche ...135

5.6 Limites de la recherche ...136

Conclusion ...137

Références...139

Annexe 1 : Formulaire d’information et de consentement ...147

Annexe 2 : Questionnaire sociodémographique ...155

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Listes des tableaux

Tableau 1 : Processus de prise de décision en contexte de soins intensifs selon cinq auteurs Tableau 2 : Profil sociodémographique des participants

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Liste des figures

Figure 1 : A) Concept traditionnel des soins palliatifs. B) Nouveau concept des soins palliatifs (Lynn, 2003).

Figure 2 : Axe 1 : L’expérience de la prise de décision substituée (PDS) Figure 3 : Axe 2 : Pistes d’action pour les infirmières

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Abréviations

APPA : Approche adaptée à la personne âgée AVC : Accident vasculaire cérébral

CH : Centre hospitalier

CHSLD : Centre d’hébergement en soins de longue durée CLSC : Centre local de services communautaires

DMA : Directives médicales anticipées

MSSS : Ministère de la Santé et des Services sociaux OMS : Organisation mondiale de la santé

PDS : Prise de décision substituée Per os : Par la bouche

RANQ : Regroupement des aidants naturels du Québec RCR : Réanimation cardio-respiratoire

RPCU : Regroupement provincial des comités des usagers

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xiv

À mon papa, qui est parti trop tôt, pour lire ce mémoire...

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Remerciements

C’est ici que se termine cette aventure, qui a débuté il y a déjà un petit moment. Je n’aurais pu imaginer que la rédaction de ce mémoire était un travail d’une telle ampleur, en plus de traverser autant d’émotions, par deux naissances, un décès et une séparation. Si j’ai réussi à mettre un point final à ce projet, c’est sans contredit parce que j’ai eu le soutien et les encouragements d’une multitude de personnes. La somme de nos expériences façonne qui nous sommes. Suite à ce projet, je peux affirmer que j’exerce ma profession différemment, mais qu’une influence s’est aussi observée dans ma vie de tous les jours.

J’ai eu la chance d’être accompagné par mon directeur Patrick Martin et par ma co-directrice Mireille Lavoie. Je vous remercie sincèrement pour vos encouragements, pour votre appui et surtout votre patience à mon égard. Patrick, tu as accepté de prendre le relai de mon projet au moment où Mireille acceptait de nouvelles responsabilités professionnelles. Tu m’as appris à développer ma pensée critique davantage en m’amenant à lire des auteurs de divers horizons. Tu as cru en moi dès le début, et ce jusqu’à la fin, là où certains n’y croyaient plus, et pour cela je ne te remercierai jamais assez. J’appréciais nos discussions sur la société, sur la gouvernance et celles sur Foucault. Grâce à ton expertise, mon mémoire a pris une nouvelle tournure, qui a demandé beaucoup de travail, mais qui au final m’apporte beaucoup de fierté. Finalement, merci pour tous les combats menés pour moi. Merci Patrick.

Mireille, c’est avec toi qu’est né ce projet de maitrise, c’est avec toi que j’ai appris l’humilité des études supérieures. Tu faisais si attention dans tes corrections de par le choix de tes mots et même des couleurs de stylo utilisées. Merci d’avoir choisi de poursuivre avec moi en codirection, j’apprécie réellement. Tu m’as appris à écrire tout en douceur comme une maman bienveillante. Ta vaste expérience m’a beaucoup aidé tout au long de la rédaction, mais particulièrement lors de la présentation des résultats. J’ai été très touché par ton soutien lors du décès de mon père. Merci Mireille.

Je tiens à remercier la gang de soins critiques de la FSI (Maria Cécilia, Sophie P., Michel, Samuel-Claude, Jean-François, Alexandra, Sophie B.). Vous m’avez constamment encouragé à persévérer. Merci Samuel-Claude, d’avoir partagé avec moi les hauts et les

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bas de la vie d’étudiants au 2e cycle. Sophie, tu fais partie de la gang de soins critiques,

mais tu mérites des remerciements particuliers. Nos chemins se sont croisés à la FSI, mais aussi dans la vie quotidienne par le biais de nos enfants. Tu n’as jamais douté une seule seconde que je pouvais réaliser ce mémoire. Tu ne peux savoir à quel point tes encouragements ont été aidants. Tu es une amie importante dans ma vie de par ton écoute, mais aussi par ton souci de vouloir m’aider. Cette aide offerte m’a été tellement précieuse et continue de l’être dans ma vie personnelle. Merci Sophie pour tout ce que tu fais pour rendre ma vie meilleure.

La gang du 3e soins de l’IUCPQ particulièrement l’équipe de nuit. Vous m’avez

toujours encouragée à poursuivre ma maitrise. Vous avez toujours démontré un intérêt envers mon projet. Vous m’avez gardée bien ancrée dans la réalité pratique de la profession. Je remercie chacun de vous. Il est aussi important, pour moi, de souligner votre soutien lors du décès de mon père. Suzie, tu as aussi fait partie de cette équipe de nuit, mais tu as pris une plus grande place dans ma vie. Notre amitié s’est poursuivie au-delà des soins intensifs. Tu es toujours présente pour moi, pour m’écouter et pour m’encourager. Ta façon réaliste de voir la vie m’a appris à voir les épreuves de la vie sous un autre angle.

Catherine, nos chemins se sont croisés lors de nos cours de maitrise. Nous nous sommes impliquées ensemble dans l’association étudiante pour dynamiser la vie étudiante ou plutôt notre vie étudiante. Nous formons une super équipe lorsque nous travaillons ensemble, même si je suis de 10 ans ton ainée! Nous avons réinventé le monde des sciences infirmières des milliers de fois ensemble. Tu as toujours été là pour moi, pour m’encourager, pour me motiver à poursuivre, pour m’épauler dans les moments plus difficiles. Encore merci pour tout mon amie.

Plusieurs autres amies méritent des remerciements. Ginette et Anne-Marie, qui ont toujours su m’encourager et m’aider à persévérer. Pierre et Ginette, qui ne cessent de m’offrir leur aide et leurs encouragements. On va le boire notre champagne! Geneviève (Papaye) qui n’a jamais cessé de croire que je pouvais y arriver et qui m’épaule dans ma vie de tous les jours. Marie-Claude, une amie de longue date, que j’avais perdue de vue, mais qui m’a toujours soutenue et plus particulièrement dernièrement. Mes supers collègues de travail devenues des amies du CIUSSS (Isabelle, Catherine, Jessica L-N, Rebecca, Anne, Julie, Jessica R-L, Nancy, Pierre, Valérie et Sara-Louise), merci de votre

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soutien et de vos encouragements. Mes formidables collègues de la FSI, en particulier Diane, Paméla, Nathalie et Myriam, merci pour votre soutien constant et votre grande écoute. Vos conseils m’aident quotidiennement. Merci aux meilleures éducatrices du CPE Mille-Pattes pour vos encouragements constants.

Ma famille a été d’une aide inestimable. Je souhaite les remercier pour leur appui absolu. Merci à ma mère qui m’a soutenue et aidée tout au long de ce processus. Je la remercie de m’avoir inculqué cette valeur : « quand on commence quelque chose, on va jusqu’au bout » (même si parfois c’est long)! On va finir par aller manger au Hilton! Merci à Emanuelle, ma sœur, pour tes relectures, tes questionnements et tes commentaires. Merci Jean-Sébastien, mon jumeau, pour ton soutien précieux. Homme de peu de mots, je te sais derrière moi en tout temps.

Merci à mon père. Mon père qui m’a accompagnée dès le début de ce projet de par ces relectures, ses commentaires, mais aussi en s’investissant auprès de ses petits-enfants pour me permettre d’aller à mes cours. Merci de m’avoir légué ton esprit cartésien et scientifique. Merci d’avoir cru que je pourrais y arriver. Malheureusement, la vie a fait en sorte que tu nous as quittés subitement et que tu ne pourras pas assister à l’aboutissement de tout ce travail. Ce projet de maitrise a permis des discussions entre nous qui furent fort utiles lors de ton décès. Tu m’auras aidé jusqu’à la toute fin.

Un merci tout spécial à mes enfants, Etienne, Philippe et Elyse, qui sans le savoir ont été une grande source de motivation. Je veux leur démontrer qu’avec la persévérance nous pouvons atteindre les buts fixés malgré les embuches. Je veux que vous soyez fiers de votre maman qui a travaillé fort pour réussir ce mémoire et qui a parfois été moins présente auprès de vous.

Merci David.

Ce projet de recherche n’aurait pu voir le jour sans le soutien de nombreuses personnes et organismes. Merci à l’équipe de recherche de la Maison Michel-Sarrazin (ERMOS) de m’avoir intégré parmi vous, spécialement à François et Véronique. Merci

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madame Lisette Papineau pour la transcription. Merci au MELS de m’avoir octroyé une bourse d’un an.

Finalement, je ne pourrais pas passer sous silence la générosité des participants qui ont accepté de me partager leur expérience si difficile soit telle. Merci de votre implication, sans vous ce projet n’aurait pu voir le jour.

Merci à tous les autres qui de près ou de loin ont su faire une différence, si minime soit-elle dans la réalisation de cette grande aventure.

Un merci à vous tous, du plus profond de mon cœur, pour votre soutien. Pascale

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Introduction

Au cours des prochaines décennies, le vieillissement de la population au Québec laisse présager une augmentation importante du nombre de décès (Institut de la statistique du Québec, 2017). En effet, on prévoit un accroissement de 40% des décès d’ici 2020. Simultanément à cette augmentation, on observe une mutation du rapport à la mort dans notre société moderne. Ainsi, les individus cherchent de plus en plus à vivre sans vieillir par peur de la mort (Lafontaine, 2008). Les avancés du savoir biomédical exacerbe cette attitude de déni face à la mort. En effet, l’allongement continu de l’espérance de vie, qu’offre la médecine moderne, met en avant-plan cette notion d’immortalité. Cette dernière conduit même à une dévalorisation des personnes âgées voire à leur isolement social. En agissant ainsi, la société exprime l’importance qu’elle accorde à la productivité de ses citoyens. Malgré ce déni de la mort, celle-ci fera toujours partie de la vie et il importe aux individus de déterminer de quelle façon ils pourront combler ce vide existentiel. Les personnes malades et leurs proches pourront-ils se sentir accompagnés dans ce dernier droit de leur vie?

Les soins palliatifs apparaissent être une approche désignée pour répondre à cette problématique. Par ailleurs, le vieillissement de la population et les progrès médicaux ayant des impacts sur la vie provoquent des besoins accrus pour la prestation de soins palliatifs (Société canadienne du cancer, 2013). Malgré l’entrée en vigueur, en 2015, de la loi concernant les soins de fin de vie, il réside une inégalité, au Québec, dans l’accès aux soins palliatifs. En effet, les soins palliatifs seraient accessibles pour 20 à 60 % des personnes en ayant besoin, selon les régions (Société canadienne du cancer, 2013). De plus, la confusion régnant autour de la signification des soins palliatifs et de celle des soins de fin de vie n’aide en rien la dispensation de ses soins et services. En effet, les soins palliatifs sont fréquemment associés uniquement aux soins de fin de vie. La philosophie des soins palliatifs place le respect de la personne et de son autonomie au cœur des préoccupations de la pratique clinique (Randall & Downie, 2006). Ainsi, il demeure important que le patient prenne part activement aux décisions qui concernent sa santé et bien entendu sa mort. Il arrive dans certaines situations que la personne soit gravement malade et qu’elle

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ne puisse participer au processus décisionnel. Les professionnels de la santé se tournent, alors, vers les proches, tel que stipulé dans l’article 15 du Code civil du Québec (1991). Il est en fait admis que ces derniers sont les mieux placés pour prendre ces décisions puisque ce sont eux qui connaissent le mieux le patient et qui sont les plus habilités à les représenter et à défendre leurs intérêts (Meeker et Jezewski, 2004). Il est, cependant, légitime de se questionner quant à la façon dont les proches vivent cette expérience.

Afin de mieux comprendre l’expérience de la prise de décision substituée vécue par les proches, nous avons effectué une étude qui s’est articulée autour d’une question et d’une sous-question de recherche.

1) Comment est vécue l’expérience de cette prise de décision substituée en tenant compte du contexte de la situation, des facteurs facilitants ou contraignants cette prise de décision, des sentiments vécus par le proche et de l’impact du décès sur ce dernier?

a) De quelle façon, les infirmières peuvent-elles apporter un soutien au proche expérimentant cette prise de décision substituée?

Le premier chapitre de ce mémoire vise à décrire la problématique et présenter les différents éléments justifiant la pertinence de notre étude. Le deuxième chapitre présente une recension des écrits sur la prise de décision substituée vécue par les proches de personnes inaptes. Il permet de mettre de l’avant ce qui est absent dans les écrits et de préciser comment notre étude contribue à l’amélioration des connaissances à ce sujet. Par la suite, le troisième chapitre présente et justifie les choix méthodologiques qui ont été faits dans le cadre de cette étude qualitative descriptive. Le quatrième chapitre met en lumière les résultats de l’étude. Finalement, une discussion relative à ces résultats de même que des recommandations sont consignées au cinquième chapitre de ce mémoire, ce dernier étant suivi d’une brève conclusion.

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Chapitre 1 :

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Selon Statistiques Canada (2015), 243 651 personnes sont décédées au Canada en 2011-2012. De ces décès, 29 % sont dû à des cancers et 33,2 % à d’autres maladies chroniques (maladies cardiaques, pulmonaires, rénales, diabète et Alzheimer). On estime enfin qu’il y aura une augmentation de 40 % des décès, chaque année, d’ici 2020.

Parallèlement à cette augmentation des décès, nous devrons faire face à une autre réalité relative à la mort. En effet, une grande majorité de la population adopte une attitude de « déni » envers la mort, comme si cette réalité demeurait taboue au sein de notre société contemporaine. Cette position est renforcée par le sentiment de sécurité que procure la médecine moderne. En effet, les avancées médicales permettent de maintenir les patients en vie au-delà des capacités humaines naturellement attendues. Les interventions technologiques sont de plus en plus sophistiquées et de plus en plus efficaces; elles en viennent ainsi à changer la nature de la fin de vie (Eliott & Olver, 2008; Meeker, 2010; Meeker & Jezewski, 2004).

Il est donc pertinent de se questionner à savoir comment meurent et mourront les gens dans les années à venir. Dans quel état psychologique et physique les personnes malades se retrouvent-elles avant leur mort? Que peut-on offrir aux personnes malades et à leur famille comme accompagnement dans les dernières étapes de leur vie? Est-ce aux soignants à prendre les décisions relatives aux traitements et soins appropriés ou est-ce plutôt aux malades et à leur famille de prendre ces décisions qui se révèlent des plus importantes? Un partage des responsabilités en ce sens est-il possible et les décisions qui en découleront peuvent-elles toujours être prises en accord avec les volontés des personnes malades en fin de vie?

Les soins palliatifs apparaissent être l’approche la plus appropriée pour soutenir et accompagner ces personnes et leur famille. On fait souvent référence aux soins palliatifs lorsque les personnes malades en fin de vie sont atteintes de cancer, toutefois, cette approche demeure tout aussi pertinente pour des personnes atteintes de maladies chroniques ou de toute autre pathologie, et ce, sans égard à l’âge que peuvent avoir ces personnes. Cette approche implique également une démarche centrée sur la personne et sa famille, qui fait partie intégrante de l’équipe de soins et qui, dès lors, occupe une part active dans le processus des diverses prises de décisions associé à la fin de vie.

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Dans le cours de ce chapitre consacré à la problématique de recherche, il sera notamment question de définir les soins palliatifs, la notion de prise de décision dans un contexte de soins palliatifs et la notion de prise de décision substituée. Par la suite, les normes à utiliser pour guider ces prises de décision et le concept de directives anticipées seront mis en perspective. Finalement, l’impact de la prise de décision substituée sur les proches sera précisé. Suite aux discussions amorcées par la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité ainsi que l’augmentation prévue du nombre de décès, il importe de bien se positionner lorsqu’on parle de prise de décision, des décisions que l’on peut aisément qualifier de vitales.

1.1 Définition des soins palliatifs

Une multitude de définitions de ce que signifient les soins palliatifs existent, mais dans le cadre de ce mémoire nous retiendrons celle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (dans World Health Organization, 2007). Les soins palliatifs y sont définis comme « une approche visant à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’une maladie mortelle et de leurs proches par la prévention et le soulagement de la souffrance, de la douleur et d’autres problèmes d’ordre physique, psychosocial et spirituel. Pouvant être parfois offerts de concert avec des traitements plus actifs, ils sont dispensés par une équipe interdisciplinaire permettant de répondre aux besoins et d’offrir un soutien permettant d’aider les patients à vivre aussi activement que possible jusqu’à la fin » (trad. libre, p. 84).

Figure 1 : A) concept traditionnel des soins palliatifs. B) nouveau concept des soins palliatifs (Lynn, 2003).

Comme l’indique l’OMS, les soins palliatifs méritent d’être envisagés avec une vision nouvelle. Ils ne doivent plus être offerts seulement lors de l’échec des traitements

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curatifs (Figure 1 A), mais de façon parallèle, tout au long du continuum de la maladie. De plus, ils se poursuivent même au-delà de la mort du malade afin d’accompagner et de soutenir ses proches (Figure 1 B). Pendant toute la durée des soins, une attention particulière est mise sur les personnes significatives entourant la personne malade. L’Association canadienne de soins palliatifs, par le biais de leur modèle de soins palliatifs (2002; 2013) et le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) (2010), dans sa Politique des soins palliatifs en fin de vie, mettent eux aussi l’emphase sur l’importance à accorder tout le soutien nécessaire aux proches pendant la phase palliative.

Nous constatons de la sorte que les soins palliatifs privilégient une approche très centrée sur le patient et ses proches. Ceux-ci sont en effet au cœur de toutes les préoccupations et particulièrement lors de prises de décision. De ce fait, celles-ci sont une des pierres angulaires lorsque vient le temps de faire des choix par rapport aux soins, aux traitements ou encore lorsque l’approche palliative doit prendre davantage de place au profit de l’approche curative. Ainsi, il devient essentiel de bien comprendre ce qu’implique la prise de décision en soins palliatifs.

1.2 La prise de décision en soins palliatifs

Dans la culture nord-américaine, l’autonomie est une valeur qui devient de plus en plus importante (Beauchamp & Childress, 2008; Groupe d'experts de la Société royale du Canada, 2011; Meeker & Jezewski, 2004). En effet, de façon générale, la population a délaissé la vision paternaliste selon laquelle ce serait au médecin et à l’infirmière de décider ce qu’ils considèrent être le mieux pour le patient en ce qui concerne, entre autres, son expérience de santé. Or, les soins palliatifs se sont toujours inscrits dans cette perspective. Effectivement, leur philosophie place le respect de la personne et de son autonomie au cœur des préoccupations de la pratique clinique (Randall & Downie, 2006). De plus, le processus décisionnel en fin de vie réside dans la mise en œuvre de ce droit à l’autonomie (Ho, 2008).

Par contre, les patients gravement malades ne peuvent pas toujours prendre eux-mêmes les décisions inhérentes à la fin de leur propre vie ou sont parfois incapables d’exprimer clairement leurs souhaits, leurs préférences ou leurs désirs en ce sens. Les

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professionnels de la santé doivent dès lors compter sur le soutien des proches et considérer leur point de vue avant de prendre les décisions relatives aux soins et aux traitements à donner au patient. Il est en fait admis que ces derniers sont les mieux placés pour prendre ces décisions puisque c’est eux qui connaissent le mieux le patient et qui sont les mieux positionnés pour défendre ses intérêts (Beauchamp & Childress, 2008; 2009; Emanuel & Emanuel, 1992; Jacob, 1998; Larsen, 1999; Meeker & Jezewski, 2004; Tilden, Tolle, Nelson, & Fields, 2001). En effet, selon Mecker (2004), la famille a un rôle pivot dans toutes les prises de décision au sujet de la santé. Elle joue un rôle central dans l’initiation, la discussion et la finalisation des étapes du processus de prise de décision (Haley et al., 2002). C’est à elle que revient la fonction de donner de l’importance au respect de l’autonomie du patient (Ho, 2008). En effet, le rôle de la famille est de faire en sorte que l’on prenne en compte les souhaits exprimés précédemment par le patient, ou s’il est apte, que l’on considère ce qu’il veut réellement.

Au Québec, selon le Curateur public (2002), environ 30 000 personnes majeures sont représentées par un tiers, et 60 % d’entre elles le sont par un proche ou un parent. De plus, selon l’article 15 du Code civil (Ministère de la Justice, 1991), « Lorsque l'inaptitude d'un majeur à consentir aux soins requis par son état de santé est constatée » et que la personne n’a ni mandataire, tuteur ou curateur, « le consentement est donné par le conjoint, qu'il soit marié, en union civile ou en union de fait, ou, à défaut de conjoint ou en cas d'empêchement de celui-ci, par un proche parent ou par une personne qui démontre pour le majeur un intérêt particulier ». C’est donc dire que de nombreuses personnes peuvent être appelées à se prononcer à la place d’une personne gravement malade. En juin 2014, le gouvernement du Québec adoptait la Loi concernant les soins de fin de vie qui désirait notamment mettre de l’avant le droit, de chaque personne en fin de vie ou non, d’exprimer ses volontés de soins en cas d’inaptitude à consentir à des soins. Ainsi, la mise en place d’un registre sur les directives médicales anticipées (DMA) offre une alternative supplémentaire pour exprimer ses volontés à celles déjà présentes (le testament, le mandat de protection, une discussion avec son médecin, une discussion avec ses proches). De ce fait, les personnes majeures peuvent, de façon libre et éclairée, enregistrer leurs volontés sur les soins médicaux qu’elles désirent ou refusent advenant le cas qu’elles seraient inaptes à consentir aux soins.

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Dans un contexte de fin de vie, l’inaptitude à consentir aux soins peut être de diverses origines. En effet, la progression de la maladie peut agir sur la capacité des personnes malades à participer aux décisions les concernant. Par ailleurs, on sait qu’entre 58,8 % à 88 % des patients peuvent être atteints de délirium (Hosie, 2012). De plus, dans la population canadienne, environ 8 % souffrent d'une certaine forme de démence, mais sa prévalence augmente considérablement avec l'âge (Groupe de travail de l'étude canadienne sur la santé et le vieillissement, 1994). Aussi, bien que nous ne pouvons déterminer le nombre exact de proches qui prennent des décisions au nom du patient dans le contexte plus large des soins palliatifs, il est possible d’estimer qu’approximativement 70 % des adultes de plus de 60 ans perdront leur capacité d’autonomie décisionnelle à la fin de leur vie (Silveira, Kim, & Langa, 2010). Ce constat est ainsi révélateur de l’importance de mieux comprendre les enjeux liés aux décisions devant être prises par les proches à la place du malade en fin de vie.

1.2.2 La prise de décision substituée

On comprend dès lors que le fait d’une personne qui prend une décision pour autrui correspond plus précisément à la notion de prise de décision « substituée ». Cette personne est clairement autorisée à prendre des décisions à la place de son proche qui est malade et qui n’est plus en mesure de choisir ou de refuser un traitement (Beauchamp & Childress, 2008; Portail canadien en soins palliatifs, 2011). Elle peut être nommée de façon légale, c’est-à-dire à titre de mandataire, tuteur ou curateur, ou non tel que précisé par l’article 15 du Code civil du Québec (1991). Prenant en compte que chaque individu est autonome et qu’il a le droit de faire des choix, le ou les décideurs de substitution peuvent s’appuyer sur des normes pour soutenir leurs décisions lorsque leur proche en devient incapable.

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1.3 Normes à utiliser lors de la prise de décision

substituée

Beauchamp et Childress (2008) énoncent quatre principes moraux qui peuvent servir de lignes directrices dans l’éthique professionnelle, et qui peuvent tout aussi bien guider toute personne appelée à prendre une décision pour autrui. Ces principes sont le respect de l’autonomie, la non-malfaisance, la bienfaisance et la justice. Ainsi, sur la base de ces quatre principes moraux, de nombreux auteurs (Chambers-Evans, 2005 ; Hayes, 2003; Robinson, 2001; Jacob, 1998; Braun, 2009; Shalowitz, 2006; Beauchamp, 2008; Pruchno, 2006; Jiménez, 2013) énoncent deux normes qui doivent servir de base lors de la prise de décision substituée. Ces deux normes sont celles du jugement substitué, qui découle du principe d’autonomie, et celles des meilleurs intérêts, qui est issue du principe de bienfaisance :

1. La norme du jugement substitué : il s’agit d’une norme d’autonomie qui invite à vérifier si le patient a exprimé antérieurement sa volonté de façon explicite (écrite ou verbale). Si tel est le cas, le respect de cette volonté s’impose (Durand, 1999; Jiménez, 2013). Pour le preneur de décision1 substituée, cela permet de réduire le

poids des responsabilités associé à la prise de décision. Cette norme est considérée comme « faible » parce que, dans ce cas, il ne s’agit pas d’une véritable prise de décision substituée, mais plutôt d’une communication ou d’un rapport des préférences du patient.

2. La norme des meilleurs intérêts : s’il n’y a pas d’instructions explicites énoncées antérieurement par le proche, le décideur doit se baser sur sa connaissance générale du patient et de ses valeurs, par exemple par rapport aux traitements en cours ou proposés. Il est important de prendre en considération le pronostic, la qualité de vie et le degré de souffrance. Aussi, c’est dans ces circonstances que l’on peut véritablement parler de prise de décision substituée.

1 L’expression « preneur de décision » inclut le terme mandataire qui signifie celui qui a été désigné de façon légale.

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Selon tous ces auteurs, la « véritable » prise de décision substituée s’applique donc seulement lorsqu’il n’y a pas eu d’expression préalable des volontés de la personne. Le proche est donc ici en présence de l’application de la norme des meilleurs intérêts.

Or, la consultation de travaux de recherche (Jiménez, 2013; Chambers-Evans, 2005; Jacob, 1998) sur ce sujet met en évidence que les auteurs ne tiennent pas compte de ces normes concernant la prise de décision substituée; il peut y avoir ou ne pas y avoir la présence de directives anticipées (écrites ou verbales). Les auteurs n’excluent pas les proches qui connaissaient les directives anticipées du malade et plusieurs d’entre eux disent même que la présence de ces directives aide les proches dans la prise de décision substituée. Il va sans dire que cet état de fait induit une confusion. Cette situation peut cependant s’expliquer par le fait qu’il est fort probable que la personne malade n’a pu anticiper toutes les situations possibles, et les choix de traitements et de soins disponibles lors de l’expression de ses directives de fin de vie. De toute évidence, la norme des meilleurs intérêts devient celle qui est la plus communément employée et privilégiée.

1.4 Clarifications en lien avec les directives

anticipées

Tout d’abord, il importe d’apporter quelques précisions relativement aux directives anticipées (DA) et aux directives médicales anticipées (DMA). Dans la littérature, nous ne retrouvons aucune distinction entre ces deux outils permettant d’exprimer à l’avance ce que l’on désire ou non. L’appellation DMA existe uniquement au Québec. Dans le cadre de cette étude, les DMA correspondent aux directives médicales anticipées qu’il est possible d’enregistrer au niveau du registre québécois administré par la régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ). Cet outil permet aux personnes de plus de 18 ans d’exprimer, via un formulaire préétabli, leur volonté d’accepter ou de refuser certains soins (cinq interventions) s’il devenait inapte. Concernant les DA, il s’agit, dans cette étude, des décisions et des volontés, écrites ou verbales, que la personne a pu exprimer avant d’être inapte à la prise de décision.

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Selon Beauchamp et Childress (2008), les directives anticipées découlent du respect de l’autonomie. Elles permettent à une personne qui est encore capable de jugement de rédiger des directives destinées aux professionnels de la santé qui doivent prendre des décisions sur les soins et traitements à prodiguer durant les périodes où elle ne serait pas capable de le faire elle-même. Ces directives peuvent être rédigées de façon légale, par le biais d’un mandat de protection, d’un testament ou encore par le registre DMA, mais peuvent également être explicitées de façon non officielle par le biais de discussions avec ses proches concernant ses propres volontés.

Depuis avril 1990, le mandat de protection, nommé mandat en cas d’inaptitude lors de sa création, est devenu un document légal (Curateur public, 2002; Ministère de la Justice, 1991). Le Québec a ainsi emboîté le pas aux États-Unis qui, en 1990, ont adopté le

Patient Self-determination Act (Duke, Yarbrough, & Pang, 2009). Ce mandat est utilisé

pour nommer un mandataire et pour faire part, par écrit, des soins et traitements que la personne désire recevoir ou non si elle devenait inapte. Le mandat de protection tâche ainsi de favoriser au mieux le respect du principe d’autonomie. La personne majeure peut alors confier à une ou plusieurs autres personnes la responsabilité de prendre soin d’elle (ou d’administrer ses biens) si elle devient incapable de le faire. C’est donc la volonté de la personne qui prédomine sur tout autre arrangement que pourrait faire son entourage.

Nous pourrions supposer que si une personne désigne un tel mandataire, c’est qu’il y aurait eu, au préalable, une discussion entre cette dernière et le mandataire au sujet de ce qui est souhaité ou non en fin de vie (Curateur public, 2002). Il apparaît toutefois que ce n’est pas nécessairement ce qui se produit au sein de notre société; ce que nombre d’études sur ce sujet confirment (Haley, et al., 2002; Larsen, 1999; Tilden, et al., 2001; Wilson, 2011). Les discussions relatives à la fin de vie seraient ainsi très rares, ce qui aurait pour effet d’engendrer un stress chez les proches désignés comme mandataires qui bien souvent doivent décider en l’absence de toutes directives, voire parfois sans même savoir qu’ils avaient été désignés pour assumer ce rôle. On peut donc imaginer que les proches n’ayant eu aucune information au préalable, aucune directive – donc aucun mandat, peuvent vivre des moments difficiles et chargés d’émotions lorsqu’elles sont confrontées à l’assignation de ce rôle.

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Une autre difficulté vécue avec les directives anticipées réside dans le fait qu’il s’avère laborieux, voire impossible de tout y inclure, c’est-à-dire de tout anticiper ce qui pourrait arriver devant l’inconnu associé à l’état de santé de la personne malade en fin de vie. De plus, leur manque de précision ajoute une complexité supplémentaire aux familles qui ont de la difficulté à les interpréter (Gessert, Forbes, & Bern-Klug, 2001). On peut par exemple penser à la directive suivante : « je souhaite que les professionnels de la santé n’emploient pas de mesures extraordinaires à la fin de ma vie ». Que veut dire, pour cette personne, l’expression « mesures extraordinaires »? La signification de cette expression peut être fort différente d’une personne à l’autre. Les difficultés émergent ainsi dès lors qu’il s’agit d’interpréter, pour une autre personne, le sens à y attribuer.

Par ailleurs, malgré la connaissance de leur rôle à titre de mandataire, quelques auteurs ont découvert qu’il y avait une surestimation de la connaissance des souhaits du patient, autant par ses proches que par le mandataire (Hines, et al., 2001; Pruchno, et al., 2006; Vig, et al., 2006). Par contre, la revue systématique réalisée par Shalowitz et collaborateurs (2006) suggère que les mandataires prennent des décisions plus similaires aux souhaits du patient dans la vie réelle qu’avec les scénarios hypothétiques utilisés dans les études. Il est possible de croire que le stress et l’incertitude sur l’état de santé du patient que l’on vit dans le réel puissent affecter positivement la concordance entre les souhaits du patient et ceux des proches lors de la prise de décision. Malgré que les demandes de la personne malade soient connues, il n’en demeure pas moins que ces décisions soient difficiles à prendre et que la composante émotive demeure très grande, surtout lorsqu’il s’agit de cesser un traitement (Kirchhoff et al., 2002; Vig, Starks, Taylor, Hopley, & Fryer-Edwards, 2007).

Il apparait cependant justifié de s’interroger relativement à l’utilisation réelle des directives anticipées, mais également en ce qui a trait à leur utilité. Souvent, elles ne sont pas utilisées par les proches puisqu’elles ne sont pas disponibles au moment opportun ou parce qu’elles vont à l’encontre de ce que les proches veulent ou croient être appropriées pour le patient. De plus, l’utilisation de directives anticipées dans la pratique, notamment en centre hospitalier – demeure rarissime. C’est donc dire que la plupart du temps, les

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l’instauration du registre DMA permettra une plus grande utilisation des directives anticipées par les proches, mais aussi par les professionnels de la santé.

1.5 L’impact émotionnel lié à la prise de décision

substituée

Au sein de ce processus, il est essentiel, autant de la part de la famille que des professionnels de la santé, de garder à l’esprit que le cœur des préoccupations doit demeurer le patient et l’intention de préserver son autonomie le plus longtemps possible. Cette prémisse fait même partie du Code civil du Québec (1991). On peut en effet y lire que la personne qui consent ou refuse des soins pour autrui doit le faire en ayant les intérêts du malade en tête et en tenant compte des volontés qu’il a pu exprimer (article 12).

Néanmoins, le proche qui prend une décision pour autrui et qui, par le fait même, sait que cela aura un impact sur sa trajectoire de vie y voit plusieurs difficultés. En effet, la prise de décision en fin de vie est la chose la plus difficile que les proches ont à faire puisqu’ils sont peu préparés à prendre ce genre de décision (Hashemi, Irajpour & Taleghani, 2017; Hansen, Archbold, & Stewart, 2004; Tilden, et al., 2001; Tilden, et al., 1999). Effectivement, la dégradation de la situation de santé du malade qui arrive rapidement ou de manière plus lente (état chronique) influence le degré de préparation des proches à la prise de décision. De plus, la prise de décision revêt un côté émotif important puisqu’il est important pour les proches de faire la bonne chose, de prendre la bonne décision (Chambers-Evans & Carnevale, 2005; Gessert, et al., 2001; Hansen, et al., 2004; Kirchhoff, et al., 2002; Larsen, 1999; Swigart, Lidz, Butterworth, & Arnold, 1996), d’autant plus qu’il s’agira souvent de décisions qui auront un impact sur la trajectoire de santé-maladie du patient.

Chambers-Evans et Carnevale (2005) soulignent que l’impact émotionnel perturbe l’habileté à reconnaître et à accepter ce qui est en train de se passer, et donc à prendre des décisions. Les difficultés liées à la prise de décision et les émotions vécues peuvent amener les proches à vivre une détresse qui demeure relativement présente jusqu’à six mois suivant

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la mort du malade (Tilden, et al., 2001) et elle peut parfois être ressentie jusqu’à plus d’un an suivant le décès (Kirchhoff, et al., 2002).

À la lumière de la littérature consultée, la majorité des études portant sur le processus de prise de décision ou sur l’expérience de la prise de décision a lieu dans des unités de soins intensifs. Or, cette expérience est peut-être vécue différemment dans un contexte de maladie chronique, ou de soins de longue durée. Serait-il possible que l’expérience de prise de décision substituée soit différente lorsque les décisions à prendre sont moins inattendues ou urgentes, lorsqu’elles ne portent pas toujours sur des questions de fin de vie imminente? Serait-il possible que l’expérience de la prise de décision substituée soit différente selon la gravité de la situation?

La prise de décision substituée repose rarement sur l’expression de directives anticipées de la part du patient. La prise de décision substituée se révèle par ailleurs être une expérience par laquelle les proches vivent beaucoup de stress et d’émotions avec lesquelles il est difficile de conjuguer (ex. : doute, culpabilité, détresse, souffrance émotionnelle, symptômes post-traumatiques). Par ailleurs, si les études que nous avons répertoriées et auxquelles nous venons de faire référence permettent de mieux saisir l’impact émotif associé à la prise de décision substituée, ce qui ne constitue qu’une facette de ce phénomène, on en sait encore très peu sur l’ensemble de cette expérience. Effectivement, peu de chercheurs ont tenté d’appréhender ce phénomène globalement. On constate, dans la littérature, que lorsqu’il est question de l’expérience de la prise de décision substituée, on ne fait généralement référence qu’au processus de prise de décision lui-même ainsi qu’à des facteurs qui l’influencent. Pourtant, il apparait que l’expérience que vivent les proches prenant une décision pour une personne malade ne se résume pas uniquement à ces éléments.

Ainsi, malgré toutes les études disponibles, il persiste un doute à savoir si l’on comprend réellement l’expérience globale que vivent ces personnes. Comme le laissent présager les études de Hayes (2003) et Jeffers (1998), l’expérience de la prise de décision substituée ne semble pas se terminer lors du décès de la personne malade; elle se poursuivrait donc bien au-delà de la prise de décision. Ainsi comme le mentionne Webb et Guarino (2011), la détresse que vivent ceux ayant pris une décision substituée diminue avec le temps, mais ne s’efface pas. Quand est-il par exemple des relations avec les proches

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suite à la prise de décision, malgré un consensus obtenu entre eux lors de cette prise de décision?

1.6 La place du soutien à la prise de décision en

sciences infirmières

De tous les professionnels de la santé, l’infirmière, de part sa présence constante et sa proximité au chevet du patient, occupe une place de choix pour offrir un soutien aux proches lors de la prise de décision substituée. En effet, cette proximité permet à l’infirmière de développer une relation de confiance avec les proches et d’être plus en mesure d’évaluer leurs besoins, ce qui lui permet ainsi d’aider les membres de la famille à évoluer à travers le processus de prise de décision (Limerick, 2007).

Adams, Bailey Jr, Anderson et Sharron (2011) spécifient que le rôle infirmier dans la prise de décision en fin de vie, dans un contexte de soins intensifs, est de trois ordres; soit celui de courtier d’information, d’« advocate » et de soutien. Pour prendre une décision, les proches ont besoin de comprendre la situation en obtenant des informations claires et véridiques, sans jugement, leur permettant d’obtenir un portrait réaliste de la situation. L’infirmière accompagne les proches dans la prise de décision cohérente avec leurs valeurs en développant, avec eux, une relation de confiance par des attitudes empreintes d’empathie.

Toujours dans un contexte de soins intensifs, la revue systémique de Hinkle, Bosslet et Torke (2015) démontre que la présence d’empathie augmente la satisfaction des familles dans les soins de fin de vie. Tel que précisé par Torbey et Garcia (2013), la famille se sent soutenue dans les prises de décision difficile lorsque les professionnels de la santé valorisent et apprécient ses dires, reconnaissent ses émotions, l’écoutent activement et l’invitent à poser des questions. Ainsi, ces mêmes auteurs concluent que la collaboration, en faisant appel à la reconnaissance de l’expertise de la famille, favorise la prise de décision.

Somme toute, il est mis en évidence que l’infirmière se doit d’offrir des soins centrés sur la personne/famille pour soutenir la prise de décision. Pour ce faire, le guide des bonnes pratiques de l’Association des infirmières de l’Ontario (RNAO) (2015)

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recommande, entre autres, un engagement avec la personne dans un modèle participatif de prise de décision. Ce guide suggère l’utilisation d’outils d’aide à la décision puisque ces derniers fournissent une structure au processus de prise de décision. Les infirmières guident les patients et/ou leurs proches tout au long du processus de prise de décision et l’utilisation de ses outils permet notamment de cibler l’information nécessaire. De plus, les patients et leurs proches exposés aux outils d’aide à la décision sont mieux informés, plus au fait de leurs valeurs et participe probablement plus activement dans la prise de décision (Stacey, Légaré, Lewis, Barry, Bennett, Eden, Holmes-Rovner, Llewellyn-Thomas, Lyddiatt, Thomson &Trevena, 2015).

On constate en somme à ce jour que la prise de décision substituée par des proches de la personne malade a principalement été étudiée de sorte à mettre en évidence les types de décision, les facteurs impliqués et les différentes phases de ce processus. Force est de constater que les dimensions de l’expérience de la prise de décision pour un proche – ce que signifie et représente cette expérience pour la personne qui décide, sont encore peu explorées dans la littérature tant au sein de la discipline infirmière que d’autres disciplines. De plus, la littérature décrit plus amplement cette expérience dans un contexte de soins intensifs. Aussi, un questionnement réside à savoir si cette expérience de prise de décision substituée par un proche pourrait s’avérer similaire si elle est vécue dans un autre contexte, tel que celui des soins palliatifs.

1.7 But

À la lueur de la problématique de recherche que nous venons d’esquisser, il apparait pertinent de se demander comment se vit l’expérience de prendre des décisions pour autrui du point de vue des proches des malades dans son ensemble, de sorte, par exemple, à mieux comprendre l’origine des malaises et de l’inconfort qu’ils peuvent vivre. Ces difficultés sont-elles éprouvées du seul fait de l’absence de directives anticipées? Peuvent-elles être exacerbées par des pressions de la part de professionnels de la santé et de membres de la famille? Ces difficultés, ces malaises sont-ils d’autant plus présents lorsqu’il n’y a pas eu de discussion préalable entre les membres de la famille au sujet des soins de fin de vie désirés par la personne malade. Grâce à cette recherche, nous souhaitons ainsi démystifier

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ces éléments de façon à ce que les infirmières puissent éventuellement mieux soutenir les personnes (et leurs familles) lors des prises de décisions et éventuellement suite au décès du patient. Dans cette optique et de façon plus précise, le but de cette étude vise à mettre en lumière et approfondir les dimensions de l’expérience de la prise de décision substituée par les proches d’une personne dans un contexte de soins palliatifs.

1.8 Questions de recherche

Du point de vue subjectif de proches ayant pris une décision substituée pour une personne malade inapte dans un contexte de soins palliatifs :

1. Comment est vécue l’expérience de cette prise de décision substituée en tenant compte du contexte de la situation, des facteurs facilitants ou contraignants cette prise de décision, des sentiments vécus par le proche et de l’impact du décès sur ce dernier?

a. De quelle façon, les infirmières peuvent-elles apporter un soutien au proche expérimentant cette prise de décision substituée?

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Chapitre 2 :

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Cette section présente une recension critique sommaire des écrits permettant de mieux saisir le phénomène à l’étude, soit l’expérience de la prise de décision substituée. Cette recension des écrits s’articule selon quatre thèmes principaux qui se détaillent ainsi : les différents types de décisions prises par les proches, les facteurs influençant le processus de prise de décision, le processus de prise de décision et, finalement, l’état des connaissances sur l’expérience de la prise de décision substituée.

2.1 Les types de décision.

Peu d’auteurs font une distinction entre les différents types de décision que les proches ont à prendre vers la fin de vie. Effectivement, Mick, Medvene et Strunk (2003) sont les seuls à faire clairement cette distinction. Ils parlent de deux types de décision. La première, celle qu’ils déterminent comme étant la plus commune, consiste à décider de débuter ou non, ou de cesser toutes mesures de maintien en vie, par exemple la réanimation cardiorespiratoire (RCR) ou la ventilation mécanique. La seconde fait plutôt référence aux décisions de soins journaliers, comme de débuter ou poursuivre un gavage et ajuster l’administration d’analgésiques.

D’autres auteurs ne font pas toujours cette distinction sur les types de décision au début de leur étude. Celle-ci émerge plutôt lors de la présentation des résultats. Ainsi, suite à son étude auprès de membres de famille d’un patient qui doivent décider d’un statut de RCR, Larsen (1999) met en lumière que ces prises de décisions sont plus claires et plus faciles à prendre que d’autres, par exemple l’utilisation du gavage. Livingston et collaborateurs (2010) valident en quelque sorte les propos de Larsen (1999) à l’effet que les décisions entourant l’alimentation artificielle sont plus difficiles et plus complexes. Dans un contexte de maladie chronique (démence), les proches savent pertinemment que le malade ne reviendra pas à un état de santé et que la maladie progressera au fil du temps. Ainsi, la complexité de ce type de décisions est liée à la qualité de vie de la personne atteinte de maladie chronique. Les proches se questionnent à savoir si l’introduction de l’alimentation artificielle, entre autres, aura un effet bénéfique sur sa qualité de vie. Si la personne malade arrive dans un état d’arrêt cardiorespiratoire, il est plus clair pour les

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proches que la qualité de vie sera grandement diminuée ou que c’est une grande diminution de la qualité de vie qui a provoqué cet état. Gessert, Forbes et Bern-Klug (2001) indiquent que leurs participants se questionnent sur l’alimentation artificielle en utilisant les termes « prolongation de la vie » ou « prolongation de la mort ». Ainsi, si certaines décisions sont plus difficiles à prendre que d’autres, il est certain qu’il y aura une différence dans l’expérience que vivent les proches en fonction du type de décisions. De plus, la littérature met en lumière que plusieurs facteurs peuvent influencer la prise de décision, et ce autant de façon négative que positive.

2.2 Les facteurs influençant la prise de décision.

Les diverses études recensées, en majorité de nature qualitatives, permettent de déterminer plusieurs facteurs qui peuvent avoir un impact sur le processus de prise de décision. Malgré la multitude de ces facteurs, ceux-ci peuvent être regroupés à l’intérieur de catégories similaires puisqu’ils correspondent aux mêmes concepts. Nous retrouvons ainsi les facteurs liés à la connaissance préalable du patient, la relation avec les professionnels de la santé, la relation avec les autres membres de la famille, la qualité de vie, les croyances, valeurs et caractéristiques personnelles du proche, ainsi que d’autres facteurs variés.

La notion de la connaissance préalable du patient concerne avant tout les conversations que le proche a eues avec celui-ci, les expériences partagées ainsi que les valeurs communes (Vig, et al., 2006). Ainsi, plusieurs auteurs indiquent la pertinence de connaître les directives anticipées, autant verbales qu’écrites, et les souhaits de fin de vie de la personne malade. Ces mêmes auteurs font état de l’importance de connaître les expériences de vie du patient qui favorisent ainsi la connaissance de qui il était, de ses valeurs et de ses croyances (Meeker & Jezewski, 2004; Tilden, Tolle, Garland, & Nelson, 1995; Tilden, et al., 2001; Vig, et al., 2007; Vig, et al., 2006; Wilson, 2011). Les auteurs précisent que ce partage représente une aide à la prise de décision et qu’il s’agit en fait du facteur qui a le plus d’impact sur le processus de prise de décision, tel qu’identifié dans l’étude de Tilden et collaborateurs (2001). De plus, tous comme les auteurs précédemment

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nommés, Wilson (2011) reconnait qu’il est plus facilitant, lors d’une prise de décision substituée, d’avoir eu une discussion sur les souhaits de fin de vie que d’avoir seulement un document écrit. Meeker et Jezewski (2004) affirment que cette discussion doit même avoir lieu au plus tôt dans la trajectoire de maladie du patient.

La relation, et donc la communication, entre le proche du patient et les professionnels de la santé est un autre facteur contribuant fortement à la prise de décision. Lorsque cette relation est absente, insuffisante ou non satisfaisante, elle a même un impact négatif sur la prise de décision substituée. En effet, Kirchhoff et collaborateurs (2002) font état que le meilleur antidote face à l’incertitude entourant l’expérience des proches lors d’une prise de décision substituée, ici dans le contexte d’une unité de soins intensifs, est d’avoir une communication efficace avec les professionnels de la santé. Dans le même ordre d’idée, Tilden et collaborateurs (1995) concluent leur étude réalisée auprès de familles dans ce même contexte que ce qui fait la différence entre une expérience positive ou négative est leur niveau de collaboration avec les professionnels de la santé, à savoir si les proches se sont sentis inclus dans les soins et dans les prises de décisions. De plus, dans sa revue systématique Hinkle et coll (2015) spécifie qu’une communication satisfaisante contribue à la satisfaction des soins de fin de vie. Meeker et Jezewski (2004), qui ont demandé à des proches de personnes atteintes du cancer de définir leurs besoins liés à leur rôle de mandataire, ont identifié que ceux-ci veulent que les professionnels de la santé soient présents et sensibles à ce qu’ils vivent, sans être engagés dans leur drame. Ainsi, ils apprécient la présence des professionnels de la santé, le soutien qu’ils peuvent leur offrir tout en conservant une distance professionnelle par rapport à leur situation. Suite à leur étude auprès de membres de famille ayant un proche atteint de démence au stade terminal, Caron, Griffith et Arcand (2005a) mettent eux aussi l’accent sur l’importance, pour ces personnes, d’avoir une relation personnalisée; c’est-à-dire que l’équipe de soins comprenne les besoins spécifiques à leur situation et qu’elle soit empathique. La relation personnalisée est donc un élément facilitant l’établissement d’une relation de confiance entre le professionnel de la santé et les proches du malade inapte. Cette relation de confiance est primordiale puisqu’il est souhaitable qu’elle soit efficace lors de la prise de décision, et ce, pour favoriser une expérience plus satisfaisante.

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Pour les proches, l’évaluation de leur relation avec les professionnels de la santé se base sur l’information qu’ils reçoivent de ces derniers, tant au niveau de la quantité que de la qualité de ces informations. Or, dans plusieurs cas, les proches trouvent qu’ils n’ont pas assez d’informations sur la maladie, la trajectoire de la maladie, le pronostic et les autres options disponibles (Vig, 2007; Wilson, 2011; Meeker, 2004; Chambers-Evans, 2005; Caron, 2005; Tilden, 1995; Mick, 2003; Livingston, 2010; Gutierrez, 2012) .

Les relations entre les membres de la famille ont également un impact important dans la prise de décision (Larsen, 1999; Livingston, et al., 2010; Mick, et al., 2003; Tilden, et al., 1995; Vig, et al., 2007; Wilson, 2011). En effet, lorsque la personne qui prend la décision a l’impression qu’elle peut compter sur le soutien et l’opinion préconisée par les autres membres de sa famille, cela diminue son stress et sa souffrance (Larsen, 1999). Parallèlement, le fait d’avoir un consensus au sein de la famille et/ou des proches concernant la décision prise apporte plus de satisfaction au niveau de leur expérience (Tilden, et al., 1995). Par ailleurs, il est évident que tout conflit dans la cellule familiale augmente le stress de la personne qui prend une décision substituée (Livingston, et al., 2010). Durant cette période, le besoin d’obtenir l’approbation de la famille, plus spécifiquement pour le preneur de décision, est particulièrement important, puisque le sentiment de doute lié à ce type de décision est parfois très grand (Chambers-Evans & Carnevale, 2005).

La qualité de vie de la personne malade est un autre facteur prioritaire qui affecte le processus de la prise de décision substituée (Abrahamson, Bernard, Magnabosco, Nazir & Unroe, 2016; Caron, Griffith, & Arcand, 2005b; Livingston, et al., 2010; Tilden, et al., 1995; Tilden, et al., 2001; Wilson, 2011). D’après Caron, Griffith et Arcand (2005b) ainsi que Livingston et collaborateurs (2010), la qualité de vie de la personne atteinte de démence est une dimension centrale lors du processus de prise de décision par les proches puisqu’elle est intimement liée à l’état de santé du patient ainsi qu’au stade de la maladie qui lui est associé. Le preneur de décision prendra ainsi en considération, dans la majorité des cas, la qualité de vie du malade pour juger de la pertinence des traitements. À un certain moment, avec l’évolution de la démence et la diminution des échanges, le preneur de décision en viendra à se questionner sur la pertinence des traitements. Il réalisera que la

Figure

Figure  1 :  A)  concept  traditionnel  des  soins  palliatifs.  B)  nouveau  concept  des  soins  palliatifs (Lynn, 2003)
Tableau 1 : Processus de prise de décision en contexte de soins intensifs selon cinq auteursAuteur Swigart, Lidz,
Tableau 2: Profil sociodémographique des participants
Figure 3 : Axe 2 : Pistes d’action pour les infirmières

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