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des crises volcaniques à La Réunion : simple

1.1.4. Faits marquants des années 2000

Tableau 16 - Phénoménologie synthétique de l'éruption d'avril 1998 au Piton de la Fournaise (source principale : [Bachèlery 1999])

Date Evénement

07 mars Après 6 ans d’inactivité, une crise sismique débute à la Fournaise.

08 - 09 mars Dans la nuit, une série de détonations et séismes sont violemment ressentis au gîte du volcan [Gérente 2001].

09 mars Une éruption débute vers 2150 m sur le flanc nord du Dolomieu à 15h05.

09 mars - 04 août L’activité éruptive est variable, des regains d’activité succédant à des périodes d’accalmie, pendant lesquelles la lave s’écoule parfois en tunnels. Les coulées progressent par à-coups dans le Grand Brûlé.

04 août Les coulées s’immobilisent à 2,50 m de la RN2.

A partir du 07 août L’OVPF enregistre une migration du trémor du cratère Kapor, situé à la base Nord-Est du cône terminal, au Nez Coupé de Sainte-Rose.

09 août Une fissure d’un km de long s’ouvre à 1700 m d’altitude le long du rempart de Bois-Blanc, 6 km environ au-dessus du hameau. Le mauvais temps ne permet pas d’observation directe jusqu’au 12 août. 12 août L’hélicoptère de la gendarmerie permet de constater l’arrêt de l’activité hors-Enclos.

du 13 au 14 août L’activité reprend de nuit dans la zone. 15 août Quatre coulées hors-Enclos sont observées.

du 20 au 22 août Plusieurs bras de coulée s’épanchent dans le rempart à 1540 m d’altitude, retournant dans l’Enclos alors qu’ils n’étaient qu’à 4 km des premières habitations.

22 août - 14 sept D’autres bras de coulée progressent faiblement vers l’aval. 14 septembre Arrêt du trémor hors-Enclos.

21 septembre Le trémor au Kapor cesse : l’éruption est considérée comme terminée.

1.1.4. Faits marquants des années 2000

2002 : l’évacuation de Bois Blanc et des mesures d’interdiction étendues

Tableau 17 - Phénoménologie synthétique de l'éruption de janvier 2002 au Piton de la Fournaise

Date Evénement

05 janvier Dans l’après-midi, l’OVPF détecte une migration du magma dans la rift-zone nord-est.

Vers 23h, après une période de pré-alerte volcanique de 10 semaines, quatre fissures s’ouvrent sur le flanc nord-est au pied du Nez Coupé de Sainte-Rose vers 1850 m d’altitude.

du 05 au 12 janvier Le magma poursuit son transit depuis le sommet vers la zone hors Enclos, tandis que l’activité décline. 12 janvier Une recrudescence d’activité se produit dans la nuit. Une fissure s’ouvre à 1050 m dans le rempart, la

lave cascade de l’extérieur vers l’intérieur de l’Enclos [Villeneuve et Bachèlery 2006]. 14 janvier Les coulées coupent la RN2 à 11h au lieu-dit la Vierge au Parasol, puis arrivent en mer.

15 janvier L’OVPF détecte une forte sismicité dans le secteur de Bois-Blanc, laissant craindre une activité hors Enclos

16 janvier Vers 17h, l’éruption s’arrête brutalement.

La sortie de la lave dans l’Enclos, le 5 janvier, est un soulagement pour les autorités, car la migration du magma laissait craindre une éruption hors-Enclos à basse altitude. Cette possibilité reste toutefois d’actualité. L’Enclos est fermé au Pas de Bellecombe à partir de 20h30. Des dizaines de randonneurs affluent pour observer l’éruption depuis le Nez Coupé de Sainte-Rose, mais le sentier est à son tour fermé le 6 janvier en raison de risques d’éboulement (bulletin OVPF sur l’éruption de 2002). L’activité déclinante, du 5 au 12, conduit au rétablissement de l’accès à l’Enclos, annulé seulement quelques heures après du fait de la recrudescence d’activité. A partir du 15 janvier, le dispositif opérationnel se renforce pour faire face à une éventuelle sortie hors-Enclos en lien avec la sismicité observée en zone habitée. Dans la matinée, les gendarmes obligent tous les curieux venus sur le site à battre en retraite, multipliant les

barrages filtrants. En parallèle, les écoles de Sainte-Rose sont transformées en centres d’hébergement soit 150 lits disponibles. La Plaine-des-Palmistes et Saint-Benoît sont susceptibles d’accueillir 4 000 personnes. Le plan ORSEC est lancé à 16h au PC avancé de Piton-Sainte-Rose dans l’optique d’une évacuation des 800 habitants Bois-Blanc. Devant le maintien de l’activité sismique, l’évacuation est ordonnée vers 18h30. Le Maire de Sainte-Rose avertit ses administrés par mégaphone depuis une voiture, aidé de patrouilles de gendarmerie. Huit bus sont réquisitionnés par la sous-préfecture de Saint-Benoit pour emmener les habitants. La plupart ont préféré rejoindre de la famille par leurs propres moyens. Certains, qui refusent de partir par peur des vols ou pour s’occuper des animaux, doivent laisser leur numéro de téléphone aux gendarmes et signer une décharge. Les forces de l’ordre surveillent le site 24h/24 (JIR, 16/01/02). La plupart des habitants regagnent Bois-Blanc le 16, après l’arrêt de l’activité éruptive. Le plan ORSEC prend fin le 17 à 16 h. Opérée « à titre préventif et de façon méthodique », cette évacuation a été moins traumatisante que celles de 1977 ou 1986 décidées « dans la confusion à mesure de l’apparition des coulées ». Même si elle a été décidée « pour rien », elle « montre l’étendue des avancées obtenues en une vingtaine d’années d’existence de l’observatoire volcanologique » selon un article du JIR daté du 11/01/02

(in [Souvet et Dorr 2012]). L’OVPF tempère toutefois cette vision, précisant qu’il n’a pas été consulté pour

décider de l’évacuation (T. Staudacher, com. pers.).

En décembre 2002, une importante crise sismique sous le Dolomieu fait craindre une explosion phréatique de grande ampleur. L’Enclos est interdit d’accès, mesure dont le respect est facilité par la pose d’un portail cadenassé au pas de Bellecombe en novembre, remplaçant la traditionnelle pancarte en travers du sentier [Martel-Asselin 2010]. Cette mesure aurait été prise pour éviter aux gendarmes d’avoir à mobiliser du personnel pour faire respecter les arrêtés à chaque éruption. A la mi-décembre, l’interdiction d’accès est étendue à la Plaine des Sables dans son ensemble et le gîte du volcan est évacué. La crise sismique s’achève finalement sans conséquences [Gérente 2012b].

De l’accident de 2003 à la révision du PSS Volcan

Fin août 2003, une nouvelle éruption donne lieu à la formation du Piton Payanké dans l’Enclos, à proximité du Pas de Bellecombe. Sa facilité d’accès entraîne une ouverture rapide de l’Enclos et un afflux de visiteurs peu commun pour l’époque [Gérente 2012b]. Le 27 août, une heure avant la fin de l’éruption, un étudiant réunionnais cherchant à photographier l’éruption chute dans une fissure où il meurt asphyxié et brûlé [Ubyrisk-Consultant 2011]. La famille engage un procès contre l’Etat, selon elle responsable d’un balisage défectueux, procès toujours en cours en 2011. Bien qu’il marque les consciences, l’événement n’entraîne pas de durcissement immédiat de la politique d’accès aux sites éruptifs. L’évolution de cette politique semble essentiellement corrélée à la vision plus ou moins souple des décideurs en place. En 2004, les autorités permettent ainsi à 40 000 personnes d’assister à l’entrée des coulées en mer, faisant rapidement aménager par l’ONF des sentiers d’accès et plateformes d’observation. Suite à cette éruption, un réseau de 14 km de sentiers forestiers est tracé le long du littoral entre le Tremblet et Bois Blanc, avec des pistes transversales permettant un accès rapide depuis la RN2. Il est inauguré en octobre 2005.

Le même mois, paraît également la nouvelle version du PSS Volcan79 [Préfecture de La Réunion 2005]. Il a été entièrement révisé sous la double influence de la politique nationale de modernisation de la protection civile80 et des apprentissages tirés des dernières éruptions. Dans ce nouveau document de 71 pages, la « préalerte » devient « vigilance volcanique », et son déclenchement fait désormais faire l’objet d’un

79 Arrêté n° 2740 du 7 octobre 2005.

La g es tio n d es c ris es v ol ca ni qu es à L a R éu ni on : s im pl e f or m al ité o u c as se -tê te ?

à-connaissance des médias et du public alors qu’il était jusque-là restreint aux services de l’Etat. A quelques évacuations de zones habitées près, la gestion des crises à la Fournaise réside essentiellement dans la gestion des flux de visiteurs via des autorisations ou interdictions d’accès par les autorités préfectorales. La gestion de l’accès aux sites éruptifs fait donc désormais l’objet d’un chapitre à part entière, afin de « permettre à la population de bénéficier du spectacle de son volcan dans des conditions de sécurité maîtrisées associées à une véritable démarche d’information et de responsabilisation des visiteurs sur les sites éruptifs » [Préfecture de La Réunion 2005]. Il définit les modalités d’accès à l’Enclos et les mesures à prendre pour « la gestion des grands rassemblements et de la circulation en cas de coupure de la RN2 par la lave (sur la base des enseignements tirés des éruptions d’août 2004 et de février 2005) ou lorsque l’éruption est visible depuis le Pas de Bellecombe (mars 1998) ». Ces évolutions se basent donc sur le RETEX des crises éruptives passées. A côté du portail du Pas de Bellecombe (ouvert ou fermé) sont affichés, sur simple papier sous pochette plastique, les arrêtés préfectoraux mentionnant les différentes interdictions (notamment celle, permanente, de s’éloigner des sentiers balisés), et une présentation des lieux par le directeur de l’OVPF. Pendant les périodes de fermeture, les gendarmes verbalisent les contrevenants via des timbres-amendes.

1.2. M

ODALITES DE GESTION DE CRISE A L

AUBE DE L

ERUPTION DE

2007

1.2.1. Surveillance et prévision des crises volcaniques

L’Observatoire Volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPF) dépend de l'Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP), auquel a été confiée la surveillance des volcans actifs français (décret n° 90-269 du 21 mars 1990). Créé en 1980, l’OVPF est aujourd’hui doté de quatre réseaux qui fonctionnent en continu, 24h/24 et 365 jours par an : réseau sismologique, de mesure des déformations, magnétique et radon. Au total une centaine d’instruments de surveillance est répartie sur 35 sites sur le massif de la Fournaise (Figure 38). A cela s’ajoutent des campagnes de mesures ponctuelles (thermiques, GPS, acoustiques, électriques, etc.). Le réseau est entretenu et perfectionné quotidiennement par le personnel de l’OVPF. Une dizaine de personnes se relaient, aidées d’étudiants et de chercheurs de passage [com. pers. OVPF]. En plus d’être un des volcans les plus actifs au monde, la Fournaise est ainsi l’un des mieux instrumentés. Les observations régulières qui en découlent font progresser les techniques de surveillance, les connaissances fondamentales et les capacités opérationnelles de gestion de crise. Depuis sa mise en place, l’OVPF a prévu 100% des éruptions survenues à la Fournaise. Trois problèmes se posent toutefois. Premièrement, la durée exceptionnellement courte des crises sismiques précédant les éruptions [Aki et Ferrazzini 2000 ; Di

Muro et al. 2012] rend parfois impossible la diffusion de l’alerte et la prise de précautions par les autorités

avant le déclenchement de l’éruption81. Deuxièmement, de nombreuses crises intrusives ne débouchent pas sur une éruption, tout en ayant les mêmes caractéristiques géophysiques, périodes de sismicité croissante, et parfois de déformations, que celles débouchant sur une éruption. Cela entraîne la diffusion d’un nombre important de fausses alertes. Enfin, la signature sismique des éruptions hors-Enclos est très faible, ce qui peut les rendre difficilement détectables. Pour pallier cette faiblesse, l’OVPF a développé un réseau inclinométrique hors-Enclos et opère une localisation systématique du trémor en temps réel. Il dispose également de sismographes mobiles qu’il peut implanter hors-Enclos en quelques heures en cas de nécessité.

81 Les éruptions ont lieu de 20 à 150 minutes après le début de la crise sismique pour les éruptions sommitales [Di Muro et al. 2012], huit heures pour les éruptions les plus distales [Roult et al. 2012].

Figure 38 - Réseau de surveillance du Piton de la Fournaise (modifié d'après données Intranet OVPF consulté le 23/09/2011)