Les facteurs influant sur le processus d'adaptation des immigrants et des réfugiés à la société d'accueil

Après avoir défini les concepts reliés à l'expérience migratoire et établi la cause de ses effets sur la santé, nous abordons les facteurs qui sont les plus susceptibles d'influer sur le processus d'adaptation au nouvel environnement.

Les facteurs associés au processus d'adaptation5 que nous avons recensés

dans la littérature (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995; Battaglini et al., 2000) sont d'autant plus importants qu'ils sont susceptibles d'avoir des conséquences sur les conditions parentales pendant la période périnatale (Battaglini et al., 2000). Ils contribuent à un environnement favorable —ou non— pour l'expérience de la maternité. Il s'agit des conditions de départ, de certaines caractéristiques propres à la société d'accueil, des conditions de la vie quotidienne et des caractéristiques sociodémographiques et culturelles. Nous les présentons ici selon les contextes prémigratoire et postmigratoire.

Les facteurs du contexte prémigratoire

Tout d'abord, l'origine ethnique aurait une incidence sur le processus d'adaptation, en ce sens que, plus l'écart entre la culture de la société d'accueil et celle de l'immigrant est grand, plus grand serait le stress vécu par celui-ci. De plus, le recours aux services diffère d'une culture à une autre (Massé, 1995). La maîtrise de la langue du pays d'accueil joue un rôle essentiel, car elle facilite la communication et l'établissement de relations avec les citoyens, alors que la méconnaissance de celle-ci influence l'accessibilité aux services (Battaglini et al., 2000) et ferme les portes du marché du travail (Bertot et Jacob, 1991). Quant au niveau de scolarité, plus il est élevé, plus les difficultés d'adaptation sont grandes sur le plan émotif. En effet, comme la reconnaissance des formations étrangères est difficile à obtenir, elle empêche bien souvent les immigrants de trouver un emploi correspondant à celui qu'ils avaient dans leur pays (Bertot et Jacob, 1991). À l'opposé, une faible scolarité serait aussi un handicap à l'insertion économique, puisqu'elle rend difficile l'accès à un emploi convenable (Battaglini et al., 2000).

Le motif du départ, que reflète la catégorie d'admission (indépendant, famille, réfugié, requérant de statut), est une dimension particulièrement déterminante dans le processus d'intégration. Les personnes qui ont volontairement choisi d'émigrer sont moins affectées par le stress que celles qui ont été obligées de quitter leur pays. Les réfugiés et les requérants de statut constituent une population plus vulnérable, car en raison de leur exil

5 Ces facteurs sont nommés différemment selon les auteurs. Ils sont considérés comme des facteurs de protection et de fragilisation influant sur le stress d'adaptation et la santé des immigrants par Massé (1995), comme des variables influant sur le processus d'insertion dans la société d'accueil par Bertot et Jacob (1991) et comme des facteurs de vulnérabilité pour les mères immigrantes par l'équipe de Battaglini (2000).

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

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involontaire et de leur lourd passé, ils sont plus exposés à des difficultés d'adaptation (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995; Battaglini et al., 2000). De plus, les requérants de statut, dont la situation est illégale, risquent l'expulsion au bout de longues procédures pendant lesquelles leur accès aux services est limité (Bertot et Jacob, 1991). La situation familiale a également une importance significative. Émigrer avec un ou des enfants est bien souvent une réponse à un problème plutôt qu'un projet longuement planifié. De plus, les séparations familiales (enfants, conjoint) sont mal vécues par les immigrants et les réfugiés (Bertot et Jacob, 1991; Battaglini et al., 2000). Finalement, les immigrants qui sont parrainés par un membre de leur famille, ceux qui sont chrétiens et ceux qui ont des amis de même origine déjà installés dans le pays d'accueil, sont habituellement considérés comme favorisés, car ils sont accueillis à leur arrivée et bénéficient de support social (Bertot et Jacob, 1991). L'incidence des facteurs du contexte prémigratoire sur le processus d'adaptation peut être modifiée par le contexte existant dans la société d'accueil, soit le contexte postmigratoire.

Les facteurs du contexte postmigratoire

Plusieurs facteurs, influant sur l'adaptation des nouveaux arrivés, découlent des politiques nationales d'immigration. Il est ici question des démarches administratives à effectuer, des services offerts pour l'accueil des immigrants et l'apprentissage du français, des règlements concernant les équivalences d'études et la reconnaissance de l'expérience de travail, de même que des politiques d'insertion au travail (Bertot et Jacob, 1991). Ces politiques vont largement déterminer les conditions concrètes d'existence de l'immigrant (Massé, 1995).

La qualité de l'appui offert aux immigrants par la collectivité d'accueil est reconnue comme un facteur déterminant de leur adaptation et de leur santé. Par collectivité « soutenante », il faut comprendre un groupe ou un réseau d'individus capables d'apporter un soutien assidu au nouvel arrivant. Les groupes de parrainage, les réseaux de voisins ou d'intervenants peuvent fournir du soutien sur les plans affectif, matériel et technique. Diverses institutions sont ici concernées, soit les services de santé et de soutien psychosocial ainsi que les services d'accueil et d'intégration. Ces derniers offrent de l'accompagnement, des informations, des services d'interprétariat, de l'aide pour la recherche d'un emploi, etc. Le fait

d'être chrétien permet à l'immigrant de trouver un important milieu d'identification qui lui offre du soutien moral (Bertot et Jacob, 1991). De plus, les attitudes de la population d'accueil envers les immigrants et réfugiés jouent un rôle important, puisque la discrimination et le racisme nuisent au processus d'adaptation et accentuent l'isolement (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995). Enfin, les échanges avec les Québécois permettent aux immigrants de se familiariser progressivement à la culture québécoise (Susnjar, 1992).

Le groupe (ou communauté) d'appartenance ethnique jouerait un rôle d'intermédiaire en facilitant l'adaptation, préliminaire à toute intégration. La réinsertion dans un groupe de compatriotes est particulièrement bénéfique pour le nouvel arrivant, car il trouve parmi ses pairs un milieu d'identification, de même que le soutien nécessaire face au stress d'adaptation. Les individus qui ne bénéficient pas d'un tel milieu courent plus de risques sociaux et psychosociaux (Bertot et Jacob, 1991). Cependant, pour jouer son rôle, le groupe ethnique de référence se doit d'être structuré et organisé, c'est-à-dire en mesure d'offrir divers services d'aide à l'adaptation au moyen de ses associations et organisations (Massé, 1995).

La situation socioéconomique des immigrants a une incidence sur le processus d'adaptation et la santé, car elle détermine les conditions de vie (Massé, 1995). La déqualification professionnelle, qui se traduit par une baisse du statut social, est une source majeure d'insatisfaction et de dévalorisation, car elle ne permet pas de trouver un emploi comparable à celui du pays d'origine (Bertot et Jacob, 1991; Battaglini et al., 2000). La situation d'emploi — et donc de revenus — des immigrants influe sur leur capacité de soutenir et de faire venir les membres de la famille dont ils sont séparés, le niveau de revenus étant, en effet, une condition de parrainage (Bertot et Jacob, 1991). Mentionnons que la situation socioéconomique des familles immigrantes s'améliore progressivement avec les années (Battaglini et al., 2000).

Les auteurs consultés (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995; Battaglini et al., 2000) mettent l'accent sur l'importance significative du groupe ethnique d'appartenance, la qualité du support apporté par la collectivité d'accueil, les situations familiale et socioéconomique et, enfin, la maîtrise de la langue du pays d'accueil. Tous ces facteurs peuvent concourir à accentuer l'isolement social et permettent donc d'en identifier les causes.

Mémoire : 36 Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

Ces facteurs ont été retenus pour l'analyse des données dans le but de mieux comprendre la situation et les besoins des femmes. Certains d'entre eux représentent des ressources, personnelles ou externes, pour faire face au stress d'adaptation. Dans le cadre de notre recherche, nous nous sommes tout particulièrement intéressée aux ressources offertes par la société d'accueil.