• Aucun résultat trouvé

Le soutien social pendant la période périnatale : la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Le soutien social pendant la période périnatale : la perception de mères immigrantes de la ville de Québec"

Copied!
167
0
0

Texte intégral

(1)

LE SOUTIEN SOCIAL PENDANT LA PERIODE PERINATALE :

LA PERCEPTION DE MÈRES IMMIGRANTES DE LA VILLE DE QUÉBEC

Mémoire présenté à la

Faculté des études supérieures de l'Université Laval

dans le cadre du Programme de maîtrise en santé communautaire

pour l'obtention du grade de maître es sciences (M. Se.)

DEPARTEMENT DE MEDECINE SOCIALE ET PRÉVENTIVE

FACULTÉ DE MÉDECINE

UNIVERSITÉ LAVAL

QUÉBEC

2007

(2)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale : la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

Résumé

Avec une clientèle immigrante multiethnique, la santé publique est confrontée à certains défis : celui d'offrir des services préventifs adaptés à cette population et celui de favoriser son adaptation à la société d'accueil. Nombre d'études ont ainsi mis en relief la vulnérabilité d'une proportion significative de mères d'immigration récente, notamment en raison de leur isolement social. Or, les connaissances sur leur situation sont limitées, en particulier à Québec. La recherche exploratoire présentée ici avait pour objectif d'identifier leurs besoins en matière de soutien social pendant la période périnatale. Le recours à une approche qualitative nous a permis de constater que, chez les mères issues de sociétés traditionnelles, un soutien continu s'avère important en post-partum, période au cours de laquelle leur conjoint ne peut pallier l'absence de leur mère ni celle de leur famille. Le rôle de l'infirmière se révèle alors déterminant. Le développement de stratégies d'intervention appropriées devrait viser, selon nous, le renforcement des ressources informelles de soutien dans la communauté.

(3)

Remerciements

La recherche présentée ici est le fruit d'une précieuse collaboration. En tout premier lieu, je tiens à remercier les neuf femmes qui ont accepté de me rencontrer et de me confier leur témoignage.

Je désire exprimer toute ma reconnaissance à Louise Hamelin-Brabant, ma directrice de recherche, pour sa grande générosité, sa disponibilité et son encadrement, ainsi qu'à Maria De Koninck, ma codirectrice, dont le savoir et l'expertise ont enrichi ce travail. J'aimerais souligner qu'elles furent mes principales sources d'inspiration et que leur confiance a stimulé ma motivation.

Une pensée toute spéciale est destinée à Gisèle Groleau pour ses conseils et son encouragement tout au long de mon processus d'apprentissage, de même qu'à Margot Tremblay qui, malgré sa charge de travail, a accepté de commenter ce mémoire.

Mes remerciements vont aussi à Michelle Blouin qui m'a permis de mieux connaître le milieu des immigrants et des immigrantes de Québec, ainsi qu'aux infirmières en périnatalité qui ont collaboré au recrutement des participantes.

Je tiens également à remercier Andréa Rondon pour sa participation aux entrevues en tant qu'interprète, Gaston Rinfret pour le temps qu'il a consacré à l'amélioration linguistique du texte et Anne Levac qui a pris en charge la mise en page du document.

En terminant, tous mes remerciements à ma famille qui m'a accompagnée pendant ces années, mes parents, ma sœur et mes frères. Une attention spéciale à mes chères filles, Geneviève, Noémi et Rachel, qui ont su faire preuve de patience et de compréhension.

Toutes ces personnes m'ont permis de mener à terme un projet qui me tenait particulièrement à cœur, d'où ma gratitude la plus sincère.

(4)

Mémoire : iv Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

Table des matières

Page

Résumé ii

Remerciements Ni

Table des matières iv

Tableau et figure vii

Liste des sigles et des acronymes viii

Introduction 1

Chapitre 1 La problématique : migration et maternité 3 1.1 Contexte social de l'immigration 3 1.2 La périnatalité au Québec 6

1.2.1 Contexte historique de la périnatalité 6

1.2.2 Les services en périnatalité 9 1.3 Migration et maternité : une double adaptation 10

1.4 Questions et objectifs de la recherche 14

1.5 Pertinence du sujet à l'étude 16

Chapitre 2 Recension des écrits 17 2.1 Le soutien social : un construit socioculturel 17

2.1.1 Un concept multidimensionnel 17 2.1.2 La relation entre le soutien social et la santé 19

2.2 Soutien social, santé et périnatalité 22 2.2.1 Soutien social et mères occidentales 22

2.2.2 Soutien social et mères immigrantes 25 2.3 La relation entre la migration et la santé 27

2.3.1 Les concepts d'acculturation, d'adaptation et d'intégration... 28

2.3.2 L'expérience migratoire et son impact sur la santé 31 2.3.3 Les facteurs influant sur le processus d'adaptation des

immigrants et des réfugiés à la société d'accueil 32

(5)

Chapitre 3 Cadre de référence 37 3.1 Définition du soutien social 37

3.2 Les dimensions du soutien social et les concepts apparentés 39

3.2.1 Le réseau de soutien 40 3.2.2 Les formes de soutien 42 3.2.3 Les perceptions de soutien 44

Chapitre 4 Démarche méthodologique 4 6 4.1 Type de recherche 46 4.2 Caractéristiques de la population à l'étude 47

4.3 Procédure de collecte des données 48

4.3.1 Recrutement 48 4.3.2 Description de l'échantillon 49

4.3.3 Prise de connaissance du milieu 50 4.3.4 Technique et instrument d'enquête 51 4.3.5 Déroulement des entrevues 52 4.4 Traitement et analyse des données 53 4.5 Limites de l'étude et considérations éthiques 55

Chapitre 5 Description des résultats 57 5.1 Portrait des femmes interviewées 57

5.2 Le soutien social pendant la grossesse 61 5.2.1 Les services prénatals publics et communautaires 61

5.2.2 Les services d'accueil et d'intégration 67

5.2.3 L'entourage immédiat 68 5.2.4 Les milieux d'appartenance et de vie participative 72

5.3 Le soutien social pendant l'accouchement 75

5.3.1 Les services hospitaliers 76 5.3.2 Les organismes communautaires 80

5.3.3 L'entourage immédiat 81 5.4 Le soutien social pendant la période postnatale 82

5.4.1 Les services postnatals publics et communautaires 83

5.4.2 Les services d'accueil et d'intégration 89

5.4.3 L'entourage immédiat 91 5.4.4 Les milieux d'appartenance et de vie participative 98

5.4.5 Les sources d'aide matérielle 100

Chapitre 6 Interprétation du discours des femmes 101

6.1 Les réseaux de soutien 101 6.1.1 Description des réseaux de soutien 101

(6)

Mémoire : vi Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

6.2 Les formes de soutien social pendant la période périnatale 108

6.2.1 La grossesse et l'accouchement 108

6.2.2 Le post-partum 109

Conclusion et pistes de réflexion 115

Bibliographie 120

Références électroniques 127

Annexe 1 Fiche de recrutement pour les infirmières 128

Annexe 2 Portrait synthèse des participantes 130

Annexe 3 Schéma d'entrevue semi-dirigée 132

Annexe 4 Feuillets d'information et formulaire de consentement

(participantes) 139

Annexe 5 Liste des thèmes de codification sur NVivo 2.0 144

Annexe 6 Approbation du Comité d'éthique de la recherche 147

Annexe 7 Feuillets d'information et formulaire d'engagement à la

confidentialité (interprètes) 150

Annexe 8 Organismes communautaires de la région de Québec mentionnés

par les participantes* 155

(7)

Tableau et figure

Page

Tableau 1 : Dimensions du soutien social 38

(8)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

VIII

Liste des sigles et des acronymes

Agence... : Agence de la santé et des services sociaux

BRILC : Banque régionale d'interprètes linguistiques et culturels CEGEP : Collège d'enseignement général et professionnel CIFQ : Centre international des femmes de Québec CLSC : Centre local de services communautaires CMQ : Centre multiethnique de Québec

CPE : Centre de la petite enfance

CSSS : Centre de santé et de services sociaux

MCCI : Ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration MEI : Mieux-être des immigrants

MRCI : Ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration MSSS : Ministère de la Santé et des Services sociaux

NÉGS : Programme Naître égaux - Grandir en santé OLO : Programme Œufs-Lait-Oranges

PFSI : Programme fédéral de santé intérimaire PSJP : Programme de soutien aux jeunes parents RAMQ : Régie de l'assurance maladie du Québec

RRSSS : Régie régionale de la santé et des services sociaux

SAAI : Service d'aide à l'adaptation des immigrants et des immigrantes SONT : Services d'orientation et d'intégration des immigrants au travail

Immigrante ou immigrée?

Immigrant, immigrante se dit de celui ou de celle qui entre dans un pays étranger pour s'y établir (De Villers, 1997). Immigré, immigrée se dit de toute personne venue de l'étranger (Robert, 1996). Le terme immigrant-e a été retenu dans ce document étant donné qu'il s'agit ici de personnes arrivées au Québec depuis moins de six ans.

Avis

Dans le présent document, le genre masculin désigne aussi bien les femmes que les hommes, sans discrimination à leur égard et dans le seul but d'alléger le texte.

(9)

Introduction

Le caractère multiethnique de la population canadienne, notamment celle de la province de Québec, va en s'accentuant depuis 1970 et les politiques migratoires ont haussé les quotas de l'immigration internationale au début des années 1990 (Langlois, 2004). Une étude nationale révèle que les immigrants, au moment de leur arrivée, sont, dans l'ensemble, en meilleure santé que les non-immigrants. Ce ne serait qu'après une trentaine d'années que leur état de santé tend à se rapprocher de celui de la population née au Canada (Pérez, 2002). Cependant, d'autres études ont mis en relief la vulnérabilité d'une grande proportion de femmes nouvellement arrivées au Québec, notamment en raison des conditions socioéconomiques précaires et de l'isolement associés à leur expérience migratoire. Cette situation représente un double enjeu : celui de maintenir l'état de santé des femmes d'immigration récente par des services préventifs accessibles et adaptés à leurs besoins particuliers; et celui de favoriser leur adaptation à leur nouvel environnement (Vissandjée et

al., 1998). Il s'agit d'un défi intéressant, entre autres pour la santé publique.

La maternité est une période de transition exigeante en elle-même, qui s'ajoute, pour les mères d'immigration récente, à leur adaptation à la société québécoise. Cette double adaptation a pour conséquence de fragiliser les mères immigrantes et leur enfant. En effet, ils sont considérés comme étant à risque sur le plan de la santé et le développement des compétences parentales peut aussi être affecté.

Le soutien social est un déterminant de la santé qui participe à la protection de la santé des individus et qui facilite également l'adaptation des nouveaux arrivants à la société d'accueil. Or, les besoins en matière de soutien des mères immigrantes sont peu connus, en particulier dans la région de Québec. Il nous paraissait donc important de mieux connaître le soutien dont bénéficient les mères d'immigration récente pendant leur maternité, et ce, dans le contexte plus spécifique de la Capitale-Nationale.

(10)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

2

La recherche présentée ici visait à documenter, d'après le témoignage de nouvelles mères, le soutien qu'elles avaient reçu pendant la période périnatale dans le but d'identifier leurs besoins et leurs attentes.

Le rapport comprend six chapitres. Le premier chapitre circonscrit la problématique de notre étude après avoir établi sommairement le contexte de l'immigration canadienne et québécoise et dressé un bref portrait de la perinatalite québécoise. Le deuxième chapitre présente une recension des écrits qui documente le concept du soutien social et son apport à la santé, le rôle du soutien social pendant la période périnatale ainsi que la relation entre la migration et la santé. Le troisième chapitre expose le cadre de référence et les différents concepts qui s'y rattachent auxquels nous avons fait appel pour structurer notre recherche, alors que le quatrième présente les aspects méthodologiques qui ont guidé sa réalisation. Dans le cinquième chapitre, un bref portrait des femmes interviewées est d'abord présenté, puis une analyse décrit l'aide reçue selon ses différentes sources et selon trois moments, soit celui de la grossesse, de l'accouchement et de la période postnatale. Le sixième chapitre propose une interprétation du discours des mères qui met en lumière les besoins et les attentes des femmes pour ce qui est de leurs réseaux de soutien et des formes de soutien social.

Une conclusion traite des principaux résultats de notre recherche ainsi que des pistes de réflexion qu'ils nous ont permis de formuler en vue d'orienter les activités de recherche et de promotion de la santé auprès d'une clientèle immigrante multiethnique.

(11)

Chapitre 1

La problématique : migration et maternité

Ce chapitre précise la problématique, après l'avoir située dans son contexte plus large. Il vise également à circonscrire la portée de notre étude et à en montrer tout l'intérêt pour la santé communautaire.

Nous aborderons tout d'abord l'importance du phénomène de l'immigration au Canada et au Québec de même que les structures d'accueil et d'intégration mises à la disposition des nouveaux arrivants dans la ville de Québec. Suivra un bref survol historique de la mise en place des services de périnatalité au Québec ainsi qu'une présentation sommaire de ceux-ci. Nous expliciterons, par la suite, la problématique dont il sera question tout au long de ce mémoire, soit celle du soutien des mères d'immigration récente face à la double adaptation à laquelle elles sont confrontées. Ce chapitre se termine en précisant les questions et objectifs de la recherche et en démontrant la pertinence de l'objet d'étude.

1.1 Contexte social de l'immigration

En 2002, le rapport des Nations Unies sur la migration internationale (United Nations, 2002) indiquait que le nombre de migrants a doublé depuis les années 1970. Au Canada, notamment au Québec, l'immigration avant cette date était essentiellement d'origine européenne et, depuis, s'est de plus en plus diversifiée sur les plans culturel et ethnique (Massé, 1995). À l'heure actuelle, presque la moitié des personnes immigrées au Québec appartiennent à une minorité visible (Conseil du statut de la femme, 2005). Devant la venue croissante d'immigrant-e-s et de réfugié-e-s provenant d'Asie, d'Amérique latine,

(12)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

A

des Antilles et d'Afrique, l'intervention interculturelle et l'adaptation des nouveaux arrivants se posent de façon accrue et ces défis reviennent, en partie, à la santé publique.

L'immigration au Québec est un phénomène qui prend de l'ampleur. Le Québec a accueilli plus de 29 000 nouveaux immigrants en 1999 alors qu'en 2003, ils étaient environ 39 500 à venir s'établir dans la province (MRCI, 2004). Pour les années 2005 à 2007, le gouvernement du Québec avait prévu une augmentation graduelle allant jusqu'à 48 000 admissions pour 2007 (Conseil du statut de la femme, 2005). De son côté, la Capitale-Nationale avait recensé 8 200 nouveaux immigrants entre 1991 et 2001, comparativement à près de 7 000 en quatre ans, soit entre 2001 et 2004. Actuellement, en moyenne, 1 700 immigrant-e-s s'établissent à Québec chaque année (Agence de la Capitale-Nationale, 2006). La ville de Québec désire consolider sa position de second pôle d'immigration de la province, après la région de Montréal; elle comptait, en 2001, près de 20 000 personnes immigrées, ce qui représente 2,8 % de sa population (MRCI, 2004). Québec rencontre toutefois un problème de rétention, car bon nombre d'immigrant-e-s repartent vers une autre ville de la province ou vont s'installer ailleurs au Canada (Ville de Québec, 2003a).

L'adaptation de l'immigrant et du réfugié dans un nouveau milieu de vie est largement influencée par la situation dans le pays d'accueil, dont les politiques d'immigration et l'infrastructure lui permettant de s'installer (Bertot et Jacob, 1991). Les orientations politiques en matière d'immigration au Canada sont conditionnées par les besoins économiques et démographiques (compenser la faible fécondité), bien que les politiques humanitaires favorisent également l'accueil des réfugiés. Les immigrant-e-s sont donc sélectionnés (santé, niveau d'éducation) pour répondre à ces objectifs (Gravel et Battaglini, 2000). Le Canada a défini trois catégories administratives pour les immigrants : la catégorie des indépendants, représentée par les travailleurs; la catégorie de la famille, qui favorise la réunification familiale (parrainage de parents); et celle des réfugiés (Massé, 1995; Gravel et Battaglini, 2000). Notons que lorsque des immigrants et des réfugiés arrivent au pays sans statut, ils sont alors requérants.

(13)

La politique canadienne en est une de multiculturalisme, en ce sens qu'elle favorise le maintien des différences entre les communautés ethnoculturelles, alors que, de son côté, le Québec a adopté un modèle d'intégration interculturaliste qui reconnaît les cultures d'origine, encourage les échanges entre les groupes tout en valorisant la culture québécoise (Bourque et al., 1999). Les politiques fédérale et provinciale visent toutes deux la participation pleine et entière des groupes ethniques1 à la société d'accueil (MCCI, 1990;

MRCI, 2004). Au Québec, « les priorités sont désormais l'intégration des immigrants sur le marché du travail, leur francisation et l'adaptation des institutions à la réalité pluriethnique » (Massé, 1995, p. 400).

Les structures d'accueil et d'intégration mises à la disposition des nouveaux arrivants relèvent des municipalités et du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration (MRCI). La Ville de Québec compte divers organismes communautaires et institutions d'enseignement, ainsi que de nombreuses associations de communautés ethnoculturelles offrant un ensemble de services à la clientèle immigrante. Brièvement, ces services concernent l'accès aux soins de santé et services psychosociaux, les programmes de formation (dont la francisation), la recherche d'un logement et d'un emploi, de même que les jumelages interculturels et les services d'interprétariat (Ville de Québec, 2003b).

Au recensement canadien de 2001, la population immigrée se chiffrait à 5 448 480 individus, ce qui représente 18,4 % de la population du pays. Au Québec, elle représentait 9,9% de la population avec ses 706 965 personnes, soit un Québécois sur 10 (MRCI, 2004). Selon Statistique Canada (2006, référence électronique), les immigrants concourent de plus en plus au renouvellement de la population canadienne. Au cours des cinq dernières années, environ les deux tiers de la croissance démographique du pays sont attribués à l'immigration.

De plus, des données démographiques récentes montrent qu'au Québec les familles immigrées contribuent de plus en plus à la natalité. En 2004, 19% des naissances de

1 Le concept de groupe ethnique (ou ethnoculturel) repose sur une identité partagée entre individus, qui peut comprendre les valeurs, les traditions, les apparences, une langue ou des antécédents historiques (Gravel et Battaglini, 2000).

(14)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

G

l'année étaient issues de mères nées à l'étranger. Celles-ci sont relativement plus nombreuses que les Québécoises à avoir au moins trois enfants d'âge mineur (Conseil du statut de la femme, 2005). La majorité des immigré-e-s du Québec (88 % en 2001) vivent dans la région métropolitaine de Montréal (MRCI, 2004), ce qui explique que, pour la période de 2000 à 2002, 45,8 % des naissances de la ville de Montréal venaient de mères nées à l'extérieur du Canada (Agence de Montréal, 2005, référence électronique).

Sans avoir acquis l'expertise montréalaise due à la forte concentration des immigrant-e-s, la région de Québec est maintenant sensibilisée et porte un intérêt croissant envers sa population immigrante. Concernant les femmes issues des communautés ethnoculturelles, le Plan d'action régional en santé des femmes 2004-2007 (Agence de la Capitale-Nationale, 2004) a comme objectif général d'améliorer la qualité des services qui leur sont offerts. Il précise que de récentes études révèlent la forte connotation sociale des questions relatives à la santé mentale des immigrantes, d'où l'importance de diminuer l'isolement social de ces femmes. De son côté, le Plan d'action 2004-2007 du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration accorde une place importante aux femmes immigrantes en prévoyant une mesure particulière pour joindre celles qui vivent isolées (MRCI, 2004). De plus, le Plan d'action régional 2006-2009 vise la mise en place de différentes mesures favorisant l'accessibilité et l'adaptation des services de santé et des services sociaux et psychosociaux aux personnes issues des communautés ethnoculturelles de la région de Québec (Agence de la Capitale-Nationale, 2006).

1.2 La périnatalité au Québec

1.2.1 Contexte historique de la périnatalité

Au début du XXe siècle, le Québec présentait des taux de mortalité infantile

plus élevés qu'ailleurs au Canada. Cette constatation a ouvert la voie à une médicalisation croissante de la maternité (Baillargeon, 2004). C'est à partir des années 1920 qu'on assiste au Québec à une généralisation des consultations médicales pour les femmes enceintes, mais

(15)

elles ne deviennent systématiques qu'à partir des années 1950-60. Le suivi médical se consolide avec l'entrée en vigueur de l'assurance-hospitalisation en 1961, alors que se confirme l'hôpital comme lieu privilégié, puis pratiquement exclusif, de l'accouchement. À cette époque, le Québec n'avait pas encore comblé l'écart qui le séparait du reste du Canada, en matière de mortalité infantile, et concentrait ses efforts sur la lutte à la prématurité (Turmel et Hamelin, 1995). C'est dans ce courant de médicalisation de la périnatalité que s'inscrit, en 1973, la première Politique de périnatalité du gouvernement du Québec, axée sur la prévention et la contribution de l'intervention médicale. Cette politique visait principalement la diminution du nombre de décès chez les mères et les bébés. La politique proposait également des mesures éducatives qui se sont concrétisées par la mise sur pied de cours prénatals, lesquels constituent le principal programme d'information au public instauré par l'État (Valentini, 1987). Ce programme d'éducation sanitaire visait en particulier les femmes de milieux défavorisés.

C'est en réaction à la médicalisation des soins entourant la grossesse et l'accouchement que le mouvement d'humanisation de la naissance prend son essor dans les années 1970. Il faudra cependant attendre les années 1980 pour que les chambres de naissance apparaissent en milieu hospitalier (Savard, 1987). À cette période, le programme de santé publique Œufs-Lait-Oranges (OLO) se développe pour rejoindre les femmes enceintes vivant en situation de pauvreté et les adolescentes, lesquelles fréquentent peu les cours prénatals (O'Neill et al., 1990). C'est à partir de 1993 que les maisons de naissance voient le jour et que les sages-femmes sont de nouveau autorisées à exercer, leur profession étant devenue illégale dans le processus de l'évolution de la prise en charge médicale de la naissance (Collectif « Les Accompagnantes », 2005).

À cette même époque, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS, 1993) présentait sa nouvelle politique de périnatalité2 entièrement remaniée, sous le

titre Protéger la naissance, soutenir les parents : un engagement collectif. Cette politique faisait suite à une série d'études significatives portant sur la périnatalité au Québec, publiées en 1989 (O'Neill et al., 1990).

(16)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

H

Elle définit la perinatalite comme étant à la fois une période de vie et un domaine d'intervention qui « débute lors de la prise de décision d'avoir un enfant ou lors de sa conception et s'étend jusqu'à ce que l'enfant ait au moins un an. La perinatalite s'intéresse à la santé globale des personnes qui traversent la période périnatale, soit les femmes enceintes, les mères, les pères et les nourrissons » (p. 15-16). La Politique de perinatalite (MSSS, 1993) s'appuie « sur la conviction que la grossesse, l'accouchement, la naissance et l'allaitement constituent un processus physiologique naturel et une réalité multidimensionnelle; que les mères et les pères sont compétents pour s'occuper de leurs enfants, une responsabilité qu'ils assumeront d'autant mieux qu'ils se sentiront reconnus socialement et soutenus dans leur rôle » (p. 3).

La concrétisation de cette politique est toutefois touchée par le virage ambulatoire du milieu hospitalier amorcé au milieu des années 1990. Cette restructuration du système de santé bouscule les pratiques en perinatalite, notamment en réduisant les hospitalisations préventives dans le cas des grossesses à risque et en réduisant le temps d'hospitalisation lors de l'accouchement. En conséquence, des femmes ont estimé ne pas avoir le soutien escompté de l'infirmière lors de leur séjour hospitalier ni bénéficier des services postnatals à domicile dans les délais recommandés par le MSSS (Goulet et al., 2001). Bref, cet événement a eu et a encore un impact majeur sur la demande et sur l'offre des services en perinatalite, notamment en regard des services de soutien aux nouveaux parents. Ceci amène les centres de santé et de services sociaux (CSSS) à jouer un rôle important au niveau des services préventifs et promotionnels. La Fédération des CLSC du Québec mentionnait, en 1996, que :

Pour répondre aux besoins des parents et des enfants dans le cadre du virage ambulatoire en perinatalite, les CLSC devront offrir une gamme élargie de services préventifs à toutes les familles durant la période périnatale et intensifier les services pour les clientèles les plus vulnérables. Ces services devront y être développés en partenariat avec les différents établissements concernés, les médecins en cabinet privé et les organismes communautaires (p. 97).

À l'heure actuelle, les objectifs de santé publique en perinatalite cherchent à réduire, d'ici 2012, à moins de 15 pour 1000 le taux de grossesse chez les adolescentes, à réduire le taux de prématurité et le taux d'insuffisance de poids à la naissance, à augmenter le

(17)

nombre d'enfants qui naissent sans anomalie congénitale grave ou autres problèmes graves de santé (MSSS, 2003).

1.2.2 Les services en périnatalité

S'inscrivant dans l'optique de la Politique de périnatalité (MSSS, 1993), les programmes et services mis en place dans les CSSS mettent l'accent sur la santé globale des membres de la famille au cours de la période périnatale et visent autant la prévention des problèmes de santé que des problèmes sociaux.

Le programme universel offre des rencontres prénatales au CSSS et des visites postnatales à domicile. Les rencontres prénatales —auxquelles il faut maintenant ajouter de nombreux cours privés — sont devenues, selon Valentini (1987), « un lieu privilégié de socialisation aux rôles parentaux, dans notre contexte social où les réseaux familiaux d'apprentissage, déjà réduits, sont peu valorisés par rapport au discours scientifique et où de nombreuses étapes de la vie sont médicalisées » (p. 343). Dès le retour à la maison de la mère et de l'enfant, les visites à domicile de l'infirmière débutent dans les trois jours et sont complétées par des rencontres individuelles et de groupes au CSSS.

Des programmes intégrés de prévention en périnatalité offrent un soutien accru aux familles en situation de vulnérabilité, et ce, sur les plans social, psychologique et sanitaire. La clientèle est composée de familles issues des milieux défavorisés, d'adolescentes, de familles monoparentales, d'immigrantes et d'autochtones (MSSS, 1993). Ces programmes couvrent toute la période périnatale et visent à prévenir l'apparition de problèmes spécifiques comme l'insuffisance de poids à la naissance, la prématurité, les problèmes d'attachement mère-enfant, les retards de développement de l'enfant, la négligence et l'abus envers les enfants, la violence conjugale et familiale. Globalement, ils offrent une évaluation et des conseils nutritionnels, des suppléments alimentaires, un suivi de santé, de l'éducation sanitaire, une assistance psychosociale, un soutien au développement de la relation parents-enfant, de l'aide à domicile et du soutien matériel. Des équipes multidisciplinaires assurent ces services dans les CSSS, en collaboration avec les organismes communautaires oeuvrant auprès de ces familles (MSSS, 1993; Battaglini et al., 2002).

(18)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

10

Le programme OLO, mentionné précédemment, s'inspire de l'intervention nutritionnelle du dispensaire diététique de Montréal. Il est implanté dans la majorité des CSSS du Québec. Trois autres programmes mis en place dans les années 1990 privilégient une intervention intensive auprès d'une clientèle en grand besoin. Il s'agit du programme Naître égaux - Grandir en santé (NÉGS) qui vise les femmes vivant en milieu d'extrême pauvreté (Martin et Boyer, 1995); du Programme de soutien aux jeunes parents (PSJP) qui s'adresse aux mères primipares de moins de 20 ans; et du programme de soutien éducatif précoce qui cible les enfants de deux à cinq ans issus de milieux défavorisés. Ces trois programmes ont été fusionnés récemment de manière à offrir des services continus jusqu'à la période préscolaire et à favoriser le développement de l'enfant. Le nouveau programme, issu d'une approche écologique, s'intitule : « Les services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance à l'intention des familles vivant en contexte de vulnérabilité » (MSSS, 2004). Dans la région de Québec, il n'est implanté que de façon partielle (Agence de la Capitale-Nationale, 2004).

Divers organismes communautaires complètent l'offre des services en périnatalité, que ce soit pour de l'accompagnement pendant la grossesse et l'accouchement, pour du soutien à l'allaitement ou à l'adaptation au rôle parental ou, encore, pour du répit en période de relevailles.

1.3 Migration et maternité : une double adaptation

La naissance d'un enfant est, de façon générale, vécue par les mères et les pères comme l'un des plus grands événements de leur vie. La grossesse et l'arrivée de l'enfant provoquent dans chaque famille des modifications sur les plans affectif, social et économique. Il s'agit d'une période de transition exigeant une adaptation qui, souvent, est associée à une plus grande vulnérabilité des familles (MSSS, 1993; Lee, 1997). De plus, la naissance représente, partout dans le monde, un rite de passage potentiellement dangereux pour la mère et l'enfant (Groleau, 1990) et est considérée comme un événement stressant pouvant mener jusqu'à l'apparition de symptômes dépressifs (Cutrona, 1984). Les parents s'interrogent sur leurs capacités à mettre au monde et à élever un enfant, ils ont besoin

(19)

d'être informés, encouragés et soutenus pour assumer pleinement leur rôle (MSSS, 1993). Selon Lepage et al. (1989), la relation conjugale pourrait même être affectée par l'arrivée de l'enfant, étant donné qu'il s'agit d'une période d'ajustement qui augmente les risques de conflits.

L'expérience de la migration est l'une des plus marquantes qui soient dans la vie d'un individu. Le fait « d'émigrer », de quitter des personnes significatives (parents et amis) ainsi qu'un environnement social, physique et culturel familier, constitue un ensemble de deuils à réaliser. « Immigrer » correspond à se rebâtir une vie dans un nouvel environnement où tout est à découvrir. La migration est donc une expérience stressante qui suppose une adaptation importante et on peut mettre en cause ses effets sur la santé des migrants (Massé, 1995). Les réseaux sociaux et professionnels sont à reconstruire et de nombreuses études soulignent l'isolement des immigrant-e-s, qui serait causé essentiellement par l'absence partielle ou totale des réseaux de soutien traditionnels, soit la famille immédiate et élargie (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995; Battaglini et al., 2000). Le contexte postmigratoire entraîne une restructuration de la famille et des rôles des parents (Battaglini et al., 2000; Hernandez, 2002; Bérubé, 2004). L'issue de la renégociation des rôles dans le couple est bien souvent la séparation et le divorce (Juteau, 1991). En effet, l'adoption des valeurs de la société d'accueil (rôles homme-femme, émancipation de la femme) par les conjoints ne s'effectue pas forcément au même rythme et peut être responsable de conflits susceptibles de menacer la cohésion conjugale (Bertot et Jacob, 1991; Massé, 1995; Battaglini et al., 2000). De plus, la moitié des couples ne réussiraient pas à intégrer le marché du travail dans les cinq premières années suivant leur arrivée (Legault et Fortin, 1996).

Ainsi, « les mères immigrantes vivent deux expériences fondatrices presque simultanément, celles de l'immigration et de la maternité. Elles accueillent un nouvel enfant dans leur vie tout en ayant elles-mêmes à s'intégrer à une nouvelle société » (Battaglini et

al., 2002, p. 41). Ces mères sont donc confrontées à de multiples adaptations et soumises à

(20)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

12

soutien social lors de cette période de bouleversements. En conséquence, toujours selon Battaglini et al. (2002) :

La vulnérabilité des mères immigrantes au cours des premières années de leur installation est comparable à celle des mères considérées comme étant à risque en général, c'est-à-dire des femmes qui risquent de donner naissance à des bébés prématurés ou de poids insuffisant ou de connaître des difficultés d'attachement envers leur enfant. Ces risques se manifestent par des difficultés d'ordre psychosocial, par la précarité financière, la détresse psychologique ou encore l'isolement (p. 37).

Ces résultats rejoignent ceux de la littérature qui mentionnent que les principaux problèmes rencontrés par les femmes immigrantes sont l'anxiété, la nervosité, le stress, la fatigue, la dépression, de même que l'isolement et le manque d'aide et de soutien de la parenté (Duval, 1992; Legault et Lafrenière, 1992; Guberman, 1993; Heneman étal., 1994). Ce qui distingue les mères immigrantes des autres mères vulnérables, c'est la source de leurs difficultés qui est ancrée dans leur expérience migratoire (Battaglini et al., 2000).

Il apparaît donc que les circonstances migratoires peuvent avoir des répercussions sur les conditions parentales. De fait, il semble qu'elles soient susceptibles d'entraîner un isolement social dont la principale conséquence serait le manque de socialisation de l'enfant (Alvarado et Gravel, 1991; Heneman et al., 1994), une pauvreté circonstancielle ayant un impact important sur l'organisation familiale et les rôles traditionnels homme-femme (Dinh et

al., 1990) et une plus grande fragilité psychologique des mères en post-partum qui peut

avoir des conséquences sur le maternage et la disponibilité de la mère à l'égard de son enfant (Stork, 1989).

Selon les données les plus récentes dont nous disposons, les consultations médicales périnatales et pédiatriques sont aussi importantes dans la population immigrante que dans la population en général (Institut de la statistique du Québec, 2002). Toutefois, les personnes immigrantes recourent moins fréquemment que les Québécois d'origine aux services sociaux et de santé (Santé Québec, 1994; Institut de la statistique du Québec, 2002). Ainsi, les femmes enceintes immigrantes participent moins aux cours prénatals que

(21)

les femmes nées au Québec (32% versus 57%, dans Doucet et al., 1996; Lazure et Benazera, 2006). Chez les immigrant-e-s, les facteurs susceptibles de limiter l'utilisation de ces services relèvent « de la méconnaissance des ressources disponibles, de problèmes linguistiques et de communication, de la perception des services véhiculée au sein de la communauté, des difficultés dites objectives (économique, géographique et administrative) et, finalement, de la non-adaptation de certains services ou programmes à la différence culturelle et aux besoins particuliers émergeant de l'expérience migratoire » (Gravel et Battaglini, 2000, p. 90; Allen et Gagnon, 1994). De plus, des mères immigrantes ne seraient pas référées aux programmes intégrés de soins en périnatalité parce que les critères usuels de sélection tiennent peu compte de la réalité migratoire et que, par conséquent, les intervenant-e-s seraient mal outillés pour déceler leur vulnérabilité. Malgré tout, il appert que les professionnels du réseau de la santé contribuent largement à la formation des réseaux des mères immigrantes. Non seulement ils pallient l'absence de la famille, mais ils favorisent l'insertion dans la société d'accueil (Battaglini et al., 2000).

Faisant suite aux lectures qui précèdent, il semble que la migration peut affecter tant la relation maritale que le réseau familial, rendant difficile l'accès à du soutien pour ces mères. Cet isolement ressort comme l'une des principales vulnérabilités des mères immigrantes dans la mesure où il frappe la grande majorité d'entre elles durant les premières années de leur installation. Non seulement l'isolement de ces femmes les fragilise sur le plan émotionnel et affecte leur rôle parental (Battaglini et al., 2000, 2002), mais il retarde de manière significative leur intégration dans la société d'accueil (Bertot et Jacob, 1991).

En somme, les femmes d'immigration récente connaissent souvent des difficultés d'adaptation à la société d'accueil, que ce soit à cause de la précarité financière, de la méconnaissance de la langue et des services ou de l'isolement attribuable à la perte du soutien de la famille. Ces facteurs, cumulés aux exigences qu'engendre l'arrivée d'un enfant, nous font réaliser la vulnérabilité de ces mères et l'importance d'offrir à ces familles des services adaptés, tant sur le plan culturel que migratoire.

(22)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

14

Avec une clientèle immigrante pluriethnique, la ville de Québec a avantage à développer les connaissances qui permettent de mieux comprendre la réalité migratoire pour guider l'adaptation de ses programmes et activités. Cette approche nous semble plus adéquate que l'approche culturelle qui vise l'élaboration d'un répertoire de cultures. Cette dernière approche est limitative en ce sens qu'elle ne tient pas compte de la diversité à l'intérieur de chaque groupe ethnoculturel et des changements liés au processus d'acculturation. De plus, les intervenant-e-s ne peuvent connaître les valeurs et les croyances de tous les groupes ethniques avec lesquels ils travaillent (Bourque et al., 1999).

1.4 Questions et objectifs de la recherche

Comme nous l'avons vu dans la problématique, l'expérience migratoire et celle de la maternité exposent toutes deux les mères à des stress d'adaptation qui les rendent plus vulnérables aux problèmes de santé. Le soutien social étant considéré comme un facteur de protection dont dispose l'individu dans sa communauté pour gérer le stress, l'on peut se demander de quel soutien bénéficient les mères en contexte postmigratoire.

La question générale de recherche peut s'énoncer ainsi : comment des mères d'immigration récente non occidentales de la ville de Québec perçoivent-elles le soutien social qu'elles reçoivent pendant la période périnatale?

L'objectif général de notre étude est d'identifier, auprès des mères immigrantes, leurs besoins et leurs attentes en matière de soutien pendant la grossesse, au moment de l'accouchement et jusqu'à un an après la naissance.

La définition de la périnatalité retenue aux fins de notre recherche (citée à la page 8 du présent document) est celle proposée par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS, 1993) De plus, il est ici question des besoins perçus, tels que définis par Mayer et al. (2000), soit « ceux que la population cible ressent et qui peuvent ne pas faire

(23)

partie des besoins objectivement définis » (p. 260) par les experts ou les professionnels; ceux-ci correspondent aux besoins normatifs (Mayer et Ouellet, 1991).

Les objectifs spécifiques sont les suivants :

Réseaux de soutien

1) Décrire les réseaux de soutien (formel et informel) des mères immigrantes.

2) Explorer les principales difficultés rencontrées au cours du processus d'adaptation à la société d'accueil et les conditions sociales qui se sont avérées favorables.

Formes de soutien

3) Identifier les formes de soutien qu'elles reçoivent, en considérant six formes de soutien social.

4) Déterminer les formes de soutien dont elles sont satisfaites et celles qui présentent des lacunes.

La formulation de ces objectifs nous a permis d'explorer les questions suivantes : ■ Vers qui se tournent les mères immigrantes quand elles ont besoin d'aide et de

soutien? Qui remplace les aidantes naturelles? Ces personnes sont-elles disponibles en cas de besoin? Ces réseaux sont-ils suffisants? Quels sont les services les plus utilisés, les moins utilisés?

■ Quelles sont les principales difficultés que rencontrent les mères sur leur parcours? Quelles sont les ressources qui les ont aidées à s'adapter? Quelles sont les plus importantes sources de leur isolement éventuel?

■ Les mères reçoivent-elles le soutien attendu? Le soutien offert est-il adéquat? De quelles formes de soutien ont-elles davantage besoin? Et ce, à quel moment de la période périnatale?

(24)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

1(i

1.5 Pertinence du sujet à l'étude

Le soutien social est considéré comme un important déterminant de la santé. La place d'une personne dans un réseau détermine largement son accès à des ressources et à du soutien. Or, la période périnatale est une période au cours de laquelle les besoins sont grandissants alors que les mères immigrantes apprivoisent leur nouvel environnement. Il devient donc pertinent d'explorer la situation des mères immigrantes pendant la période périnatale afin d'identifier leurs besoins en matière de soutien. Très peu d'écrits portent sur ce sujet particulier, contrairement aux aspects culturels de la périnatalité qui sont mieux documentés.

Malgré le fait que la ville de Québec accueille annuellement un nombre croissant d'immigrant-é-s et de réfugié-e-s en provenance de divers pays, les besoins des mères immigrantes non occidentales demeurent peu connus. Notre étude visait à développer les connaissances concernant cette clientèle multiethnique afin de leur offrir un soutien adéquat. De telles connaissances sont susceptibles de guider l'adaptation des services qui leur sont offerts dans la Capitale-Nationale, d'en accroître éventuellement l'accès, d'orienter le développement d'actions facilitant leur processus d'adaptation et de sensibiliser les intervenant-e-s aux particularités qui distinguent les mères immigrantes des mères québécoises en période périnatale.

(25)

Chapitre 2

Recension des écrits

L'objectif de cette recension des écrits est de documenter le soutien social, considéré comme un important déterminant de la santé. Sans avoir la prétention d'être exhaustive, elle vise une meilleure compréhension des différents volets de notre sujet de recherche.

En premier lieu, nous présenterons le concept de soutien social, puis nous soulignerons les liens qui ont été démontrés entre le soutien social et la santé dans la littérature. Par la suite, nous aborderons l'importance du soutien pendant la période périnatale pour prévenir les problèmes de santé de la mère et de l'enfant. Enfin, nous verrons les facteurs qui influencent le processus d'adaptation des immigrants et des réfugiés à la société d'accueil, selon les auteurs consultés.

2.1 Le soutien social : un construit socioculturel

2.1.1 Un concept multidimensionnel

Le soutien social, dans la conception populaire, fait référence à l'aide offerte par les proches. Ce concept trouve ses origines dans les études de Cooley (1909) sur le groupe primaire et celles de Bowlby (1971) sur l'attachement. Cette orientation est centrée sur les liens intimes qui favorisent le bien-être émotionnel et procurent un sentiment de sécurité (cités dans Carpentier et White, 2001).

Dans les années 1980, Bozzini et Tessier (1985) définissent « le support social comme étant un répertoire de liens, autour d'un individu, susceptible de lui procurer diverses

(26)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

18

formes d'aide, c'est-à-dire une variété de ressources utilisables pour faire face aux difficultés de la vie » (p. 908) alors que pour Renaud (1987), il s'agit du « résultat de l'intégration de l'individu dans différents réseaux qui lui fournissent un appui cognitif, normatif, affectif, et matériel » (p. 13).

Puis Maguire (1991) définit le soutien social en soulignant les réseaux de provenance, ainsi il « correspond aux interactions bénéfiques d'une personne avec le système social qui l'entoure. Ce système social comprend des membres du réseau social informel (amis, famille) et formel (par exemple les professionnels de la santé) » (Boucher et Laprise, 2001, p. 122). Par la suite, le concept s'est étendu pour tenir compte des structures sociales. Orford (1992) présente le soutien social comme une caractéristique des réseaux sociaux ou des communautés; il devient « un facteur environnemental, présent dans les différents systèmes sociaux dans lesquels les individus s'inscrivent, et qui interagit avec eux pour leur fournir force, confiance et un sentiment d'appartenance » (Boucher et Laprise, 2001, p. 123). De ce fait, en plus des individus, des groupes ou des milieux tout entiers peuvent représenter des sources potentielles d'aide, par exemple le quartier ou les organismes communautaires.

Gottlieb (1994) définit le soutien social comme « un processus d'interactions sociales qui augmente les stratégies d'adaptation (coping), l'estime de soi, le sentiment d'appartenance et la compétence, à travers l'échange effectif (réel) ou prévisible de ressources pratiques ou psychosociales » (Boucher et Laprise, 2001, p. 123); le soutien issu des liens sociaux est ici réel ou potentiel. De son côté, Massé (1995) considère qu'un « individu jouit d'un soutien social adéquat s'il est bien intégré dans divers types de réseaux (famille, monde du travail, du loisir, etc.) qui lui fournissent de l'aide sur divers plans (cognitif, émotif, normatif, ou autre) » (p. 92). Il souligne que ce phénomène est relié à deux autres facteurs, soit l'intégration sociale (le degré d'identification à la société) et la participation sociale. Cette dernière correspond, selon l'auteur, à l'engagement actif des personnes dans diverses institutions telles que la famille, le travail, la politique, l'église et autres.

Le soutien social, tout comme l'isolement (qui correspond à une faible intégration), est un construit socioculturel dans sa nature et ses effets. D'abord social parce que, d'une part, les groupes définissent différemment leurs rapports sociaux et l'acceptabilité

(27)

du soutien et, d'autre part, parce que l'environnement social influence les effets de l'isolement sur l'individu; culturel ensuite, parce que la satisfaction d'un individu par rapport au soutien reçu et la perception qu'il se fait de l'ampleur de son réseau, entre autres, diffèrent d'une culture à une autre (Massé, 1995).

En somme, l'abondante littérature sur le soutien social fait ressortir les multiples dimensions attribuées à ce concept. Les différentes définitions formulées précédemment nous permettent de constater l'évolution du concept de soutien social dont les sources concernent maintenant autant le réseau primaire (informel), secondaire (formel) que tertiaire (les structures sociales). Ces réseaux procurent ou sont susceptibles de procurer diverses formes d'aide. Cette aide peut intervenir sur les plans cognitif, normatif, affectif, matériel ou autre. De plus, l'intégration sociale (reflétée par le sentiment d'appartenance) apparaît comme une dimension importante du concept.

2.1.2 La relation entre le soutien social et la santé

Cette section a pour but de dégager les grands constats qui émergent des principaux travaux empiriques réalisés sur le soutien social afin de mieux saisir de quelle manière il opère. Après avoir fait état des liens qui ont été démontrés dans la littérature entre le soutien social et la santé, nous aborderons les modèles explicatifs des effets bénéfiques du soutien social sur la santé.

Les travaux empiriques

À partir du milieu des années 1970, le concept de soutien social a été l'objet d'un nombre impressionnant de publications scientifiques portant sur la santé et le bien-être. En 1976, à la suite d'une recension des études sur le soutien social, Cassel suggère son effet modérateur contre le stress et, par extension, contre la maladie (Massé, 1995). Dans les années 1980, Broadhead et al. (1983) effectuent un bilan des recherches qui démontre l'existence d'un rapport de causalité entre le soutien social et la santé. De plus, de nombreuses revues de littérature et enquêtes d'envergure ont alors reconnu la contribution du soutien social au maintien de la santé physique, sociale et surtout mentale (Cohen et Syme,

(28)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

20

1985; Bozzini et Tessier, 1985; Barrera, 1986; cités dans Massé, 1995).

Les individus bien intégrés dans la société (notamment par l'appartenance à un réseau de proches ou la participation au marché du travail) présentent des taux de mortalité inférieurs à ceux qui sont isolés socialement (Bozzini et Tessier, 1985). La présence de liens sociaux significatifs s'avère capitale pour la santé des individus. Les travaux de Bowlby (1969) mettaient en relief l'importance d'établir des relations intimes tôt dans la vie pour la santé présente et future des individus (cité dans Boucher et Laprise, 2001). Le noyau familial intime serait la source la plus significative de soutien émotionnel, lequel serait directement associé à une meilleure santé mentale et physique (Carpentier et White, 2001). À l'opposé, un grand nombre de recherches ont intégré l'isolement social comme variable explicative d'une série de problèmes de santé (Massé, 1995).

Concernant les personnes immigrantes, Rumbaut (1985) a constaté un taux plus élevé de dépression, au bout d'un an, chez les réfugiés qui sont séparés de leur famille et ne sont pas entourés d'amis de même origine. L'isolement social semble être l'élément déclencheur de problèmes de santé mentale qui affecteraient le processus d'insertion dans la société d'accueil (cité dans Bertot et Jacob, 1991).

Les recherches dans ce domaine ont toutes le même postulat : l'être humain dépend de son réseau de soutien pour satisfaire ses besoins fondamentaux (affectifs, matériels, cognitifs, normatifs, informatifs et autres). De plus, les difficultés qu'il rencontre dans la satisfaction de ses besoins engendrent du stress. Face à ce stress, le soutien social joue un rôle immunitaire en lui permettant de satisfaire ses besoins et de relativiser l'importance de ses problèmes, en plus de lui fournir des moyens ou des solutions pour les résoudre (Bozzini et Tessier, 1985; Massé, 1995; Boucher et Laprise, 2001).

Les chercheurs ont mis en évidence l'influence de l'environnement social sur la santé et la maladie et ont orienté l'intervention préventive vers le renforcement du soutien social des individus (Boucher et Laprise, 2001). On considère maintenant l'isolement social comme un facteur de risque et le soutien comme un facteur de protection. Pour la santé communautaire, il s'agit d'un important déterminant de la santé (Massé, 1995).

(29)

De ces écrits, nous retenons qu'en tant que ressource sociale mobilisable pour contrer les impacts négatifs du stress, le soutien social est susceptible de procurer des effets bénéfiques pour la santé physique, mentale et sociale, en permettant à l'individu de satisfaire ses besoins fondamentaux et de résoudre ses problèmes.

Les modèles théoriques

Différents modèles théoriques rendent compte de l'effet bénéfique du soutien social sur la santé. Le premier modèle est issu des travaux qui s'inscrivent dans la perspective fonctionnaliste de Durkheim, qui soutient que les individus privés de soutien social (ayant une faible intégration sociale) ont tendance à avoir un niveau de bien-être inférieur à celui des individus bien intégrés (Carpentier et White, 2001). Il s'agit du modèle de l'effet protecteur direct du soutien social, qui postule une relation directe entre le soutien social et la santé, peu importe que les individus vivent ou non du stress. Le fait de disposer d'un large réseau de soutien produit chez l'individu des effets bénéfiques qu'on peut observer sur le plan de la santé. La dimension du soutien social soulignée ici est celle de l'intégration sociale (Massé, 1995; Boucher et Laprise, 2001).

Le deuxième modèle est celui de l'effet indirect du soutien social ou d'effet tampon contre le stress. Il a été proposé par Cassel (1976) et « postule que la présence ou l'absence d'un soutien social n'a d'effet que lorsque l'individu est exposé à un fort stress » (Massé, 1995, p. 94). Le soutien social atténue l'impact négatif du stress sur la santé, il s'agit de son aspect fonctionnel. Cet effet protecteur du soutien social contre le stress serait déterminé par le contexte dans lequel il agit et varierait d'un milieu socioculturel à un autre (Massé, 1995).

Cohen et Ashby Wills (1985), qui avaient fait un bilan des travaux effectués sur le sujet, ont conclu que les deux hypothèses sont davantage complémentaires qu'antagonistes. Selon eux, l'intégration sociale nourrit un sentiment de stabilité et d'estime de soi, tandis que le soutien social fonctionnel atténue les effets du stress, ce qui, dans les deux cas, influence le bien-être des individus (cités dans Massé, 1995).

(30)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

2?

Depuis lors, des approches systémiques ont fait place à ces deux modèles. Ces modèles alternatifs sont issus de l'écologie sociale qui postule l'existence d'une relation réciproque entre l'individu et son environnement. Les modèles proposés tiennent compte des relations mutuelles entre le stress, les ressources personnelles, le soutien social et la santé (Boucher et Laprise, 2001).

En résumé, le soutien social est un construit qui comporte plusieurs dimensions pouvant avoir des conséquences différentes sur l'état de santé. L'effet protecteur du soutien, qu'il soit direct (l'intégration sociale) ou indirect (l'aspect fonctionnel), est déterminé par le contexte social et culturel dans lequel il agit et varie d'un milieu à un autre.

La définition du soutien social adoptée aux fins de notre recherche, ainsi que ses composantes, seront présentées au chapitre 3, lequel traite du cadre de référence.

2.2 Soutien social, santé et périnatalité

Dans cette section, nous rendons compte de recherches effectuées sur le rôle du soutien social en périnatalité dans la prévention des problèmes de santé et des difficultés d'adaptation parentale. Plusieurs des recherches présentées ici ont été menées auprès de femmes défavorisées occidentales qui constituent, tout comme les femmes immigrantes, une clientèle souvent isolée et confrontée à bien des difficultés. Nous terminerons en abordant plus spécifiquement des études réalisées auprès de mères immigrantes.

2.2.1 Soutien social et mères occidentales

Les effets positifs du soutien social pendant la grossesse, l'accouchement et après la naissance sont désormais reconnus. Ils concernent tant la santé de la mère et du nouveau-né que l'adaptation des parents à leur nouveau rôle et le développement de l'enfant.

Faisant suite à l'évaluation du programme de prévention en périnatalité Naître

(31)

étal. (1998) rapportent que le soutien fourni par l'intervenante a des impacts sur le

déroulement et le vécu de la grossesse. Le soutien contribue à rassurer et à valoriser les mères; il serait responsable de nombreux apprentissages et de l'adoption de saines habitudes de vie en plus de les encourager à une plus grande utilisation des ressources communautaires.

Des recherches ont montré que les facteurs de stress psychosociaux et l'absence de soutien de l'entourage familial peuvent affecter l'issue de la grossesse (Turner et

al., 1990; Orr et al, 1996; Herrera et al., 1997). Les interventions offrant aux femmes

enceintes vulnérables un soutien social adéquat (soins médicaux, suivi nutritionnel et services psychosociaux) ont permis de réduire les taux d'insuffisance pondérale (Norbeck et al, 1996) et de prématurité (Olds et Kitzman, 1993) en plus d'améliorer la qualité des soins à l'enfant (Olds, et al, 1997). (Auteurs cités dans Beaudoin et al, 1999).

Oakley, Rajan et Grant (1990) ont fait une étude portant sur un programme d'intervention de suivi effectué par une sage-femme pendant la grossesse auprès de femmes à risque de donner naissance à des bébés de faible poids. Les résultats ont montré que les mères et les bébés du groupe ayant bénéficié d'un tel soutien étaient significativement plus en santé dans les premières semaines que ceux du groupe contrôle (rapports de santé physique et psychosociale, utilisation de services de santé). Les programmes de suivi à domicile effectué par des infirmières auprès de clientèles vulnérables, pendant la grossesse et jusqu'à ce que l'enfant ait atteint l'âge de deux ans, ont montré des résultats intéressants quant à l'issue de la grossesse, la santé et le développement de l'enfant, de même que sur l'autonomie financière de la famille (Olds et al, 1999).

Pendant le travail et l'accouchement en milieu hospitalier, le support émotionnel offert aux parturientes par la sage-femme, soit son suivi et ses encouragements, est relié à une expérience positive et moins douloureuse de la naissance (Tarkka et Paunonen, 1996).

Par ailleurs, l'étude de Klaus, Kennel et Klaus (1993) a montré l'efficacité du soutien d'une accompagnante (« doula ») dans la réduction de la durée du travail, des

(32)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

24

demandes d'anesthésie et des naissances par césarienne. De plus, les parturientes qui accouchent en maison de naissance et qui bénéficient du suivi d'une sage-femme se sentent plus compétentes et autonomes que celles qui accouchent en milieu hospitalier, ce qui favorise une image positive d'elles-mêmes lors de la naissance (Lachapelle, 2005).

Le réseau de soutien constitue un important facteur de protection face au stress entourant l'arrivée du nouveau-né. La possibilité de souffrir d'une dépression postnatale se trouve réduite chez les mères à risque (les mères de prématurés par exemple) lorsqu'elles peuvent compter sur un réseau de soutien adéquat (Younger et al., 1997; Beaudoin et al., 1999 ). Cutrona (1984) nous renseigne sur l'importance, pour les mères, de pouvoir compter sur d'autres pour recevoir l'aide dont elles ont besoin dans n'importe quelle circonstance. L'auteure appelle cette forme de soutien « reliable alliance » (les alliances fiables); elle contribuerait à prévenir la dépression des mères après la naissance. Ainsi, une mère qui bénéficie d'un réseau de soutien sera moins stressée après la naissance de l'enfant et plus compétente en tant que parent (Bozzini et Tessier, 1985).

Des études ont rapporté que le soutien fourni par le conjoint pendant la grossesse et après la naissance est particulièrement important et que son absence serait associée à la dépression postnatale et au stress de la mère (Séguin et Cossette, 1991; Bernazzani, 1995; Lee, 1997). Durant la période périnatale, la présence du père est vue comme un facteur de protection pour la mère, lorsque la relation est satisfaisante et de qualité, car il est généralement la personne la plus proche et la plus disponible pour elle (Berthiaume

et al., 1996; Lacharitéet Robidoux, 1996).

Les résultats des études de Collins et al. (1993) et de Lee (1997) révèlent que les soutiens instrumental (pratique) et émotionnel apparaissent comme les formes de soutien les plus importantes pour les nouvelles mères. En effet, les symptômes dépressifs en post-partum sont significativement liés à la satisfaction envers ces deux formes de soutien. Collins

et al. (1993) rapportent que le support instrumental prime sur le support émotionnel. En

diminuant la charge de travail de la mère, il favorise son bien-être en réduisant les sources de stress (Lee, 1997). Chez les mères vivant en milieu défavorisé, selon Perreault et al. (1998), le soutien informatif viendrait au premier rang, suivi du soutien émotionnel puis du soutien

(33)

instrumental.

Le développement des compétences parentales serait favorisé par la présence de modèles parentaux (Cochran et Brassard, 1979). Frenette (1983) a observé que les adultes ayant des enfants peuvent servir de modèles aux nouveaux parents en facilitant ou en orientant l'apprentissage de leur rôle. Selon Hoffman (1978), les parents ont besoin de support idéologique pour faciliter ou renforcer les changements d'attitude requis par leur nouveau rôle. L'arrivée du nouveau-né engendrerait des besoins spécifiques chez les parents, comme celui d'avoir la possibilité de se comparer socialement et de se sécuriser en partageant les mêmes normes que d'autres (Wandersman et al., 1980). (Auteurs cités dans Lepage et al., 1989).

2.2.2 Soutien social et mères immigrantes

Comme la population étudiée dans le cadre de cette recherche est non occidentale — soit originaire de sociétés dites traditionnelles3 — et que la société d'accueil est

occidentale — ou moderne —, mentionnons tout d'abord quelques distinctions entre ces deux types de sociétés.

Les études relevées par Power et Parke (1984) montraient que la provenance des personnes qui fournissent le soutien en période postnatale varie en fonction de l'idéologie de la mère. En effet, les mères « traditionnelles » reçoivent cette aide de leur parenté, alors que les mères « modernes » s'entourent d'amies et de relations de travail. Cette distinction s'explique par le fait que, dans l'idéologie traditionnelle, la maternité est une culture féminine dont le savoir est transmis par les aînées; la mère fait ainsi figure d'experte. La tradition est « tout ce qui, du passé, est transmis dans le présent et accepté par les hommes qui, à leur tour, le transmettront à la génération suivante» (Lakehal, 2003, p. 194). Dans la pensée moderne, ce savoir est institutionnalisé et s'appuie sur la science occidentale (Horton, 1990); les professionnels de la santé possèdent donc ici l'expertise propre à la périnatalité.

3 « Par opposition aux sociétés modernes (les sociétés industrielles), on qualifie les autres de « sociétés traditionnelles », car elles se réfèrent à la tradition pour justifier leur ordre social » (Lakehal, 2003, p. 194). Afin de poursuivre cette réflexion, nous vous proposons l'article de Loiselle et Hernandez (2004) qui aborde les caractéristiques propres à ces sociétés : « L'homme immigrant de société « collectiviste » : dilemmes, tensions, besoins et propositions d'intervention ». Le travail social et les pratiques interculturelles,

(34)

Mémoire :

Le soutien social pendant la période périnatale :

la perception de mères immigrantes de la ville de Québec

26

Soulignons également que dans les sociétés traditionnelles, la notion de famille réfère à la famille élargie, comprenant le père, la mère, les enfants, les grands-parents, les oncles et les tantes, plutôt qu'à la famille dite nucléaire, soit les parents et leurs enfants (Lafrenière, 1992).

L'étude ethnographique longitudinale de Clark (2001), menée aux États-Unis auprès de 28 mères immigrantes mexicaines, rapporte deux formes de soutien non comblées durant la période périnatale, soit le besoin d'aide pour les tâches quotidiennes et le besoin d'amour et de compréhension. Elle souligne l'absence de la famille et le fait que les mères ont besoin de pouvoir compter sur d'autres. De plus, près de la moitié des répondantes ont mentionné avoir un réseau social non soutenant ou contraignant.

Une autre étude américaine portant sur 911 femmes enceintes d'origine mexicaine (Zambrana et al., 1997) met en évidence la diminution, avec le temps d'immigration, des facteurs de protection spécifiques à leur culture liés à la qualité de l'environnement social dans lequel elles vivaient.

En France, Moro (2004) insiste sur l'importance, pour les mères immigrantes, de recevoir ce qu'elle appelle le « Holding culturel » et qu'elle définit comme le soutien social et l'accès aux manières de penser et de faire de leur groupe ethnique pour leur adaptation parentale, ceci afin de leur offrir des modèles parentaux issus de leur culture. Selon cette auteure, les mères privées de cet avantage présenteraient une vulnérabilité spécifique au cous de la période périnatale.

Au Québec, les principales recherches dont nous disposons sur la situation des femmes immigrantes pendant la période périnatale sont les suivantes.

L'étude de Gravel (1993) rapporte que les facteurs de risque chez les femmes, pendant la période périnatale, diffèrent selon qu'elles sont nord-américaines ou immigrantes. Chez les nord-américaines, le manque de soutien social proviendrait de l'absence du conjoint et de l'isolement, tandis que chez les femmes immigrantes, il serait causé par l'absence de la famille élargie de même que par l'absence du réseau féminin.

(35)

À Montréal, l'équipe de Battaglini (2000) a mené une recherche exploratoire de nature qualitative auprès de 91 mères immigrantes et de 19 intervenantes issues de quatre CLSC. Elle révèle que l'absence du réseau féminin, celle de la famille immédiate et du conjoint (ou le non-ajustement de ses comportements parentaux), seraient des facteurs de risque importants chez les mères immigrantes. Il apparaît également que les soutiens instrumental et moral sont les plus importants pour les mères pendant la période périnatale.

L'étude de Landry (2004) portait sur 196 femmes ayant été suivies dans le cadre du programme OLO, dont 82 étaient immigrantes; elles provenaient de différentes régions du Québec. Les résultats révèlent que le soutien social s'avère déterminant dans l'apparition de symptômes dépressifs en période post-partum, particulièrement chez les femmes immigrantes.

À Québec, Lazure et Benazera (2006) ont réalisé une recherche auprès de 40 familles immigrantes afin de connaître leur situation pendant la période périnatale. Cette étude documente notamment les circonstances migratoires, le soutien parental et les réseaux formel et informel d'aide. Les auteures constatent que les immigrantes sont privées du réseau familial féminin qui les soutenait dans leur pays d'origine et que les infirmières en périnatalité jouent alors auprès d'elles un rôle déterminant.

Tel que décrit dans la littérature, le soutien social joue un rôle important durant le processus d'adaptation à la maternité. Pendant la période périnatale, le réseau de soutien procure un sentiment de sécurité aux femmes et leur permet de composer avec les événements stressants. Ce réseau contribue ainsi à réduire les problèmes de santé de la mère et de l'enfant en plus de favoriser le développement des compétences parentales.

2.3 La relation entre la migration et la santé

Nous abordons, dans cette partie du chapitre, le rapport santé-migration. Après avoir défini les concepts qui s'y rattachent, soit les concepts d'acculturation, d'adaptation et d'intégration, nous soulignerons l'impact de la migration sur la santé des nouveaux arrivants.

Références

Documents relatifs

pensaient à la compétence générale du médecin avec comme préoccupation une intégration communautaire. Par contre on peut à juste titre questionner les résultats.

Il faut signaler, en outre, que chez les deux locuteurs, dans les registres grave et médium, les transitions des consonnes dévoisées sont positives (configuration

En cela, la ville ne doit plus être considérée comme un objet géographique, suivant en cela le principe relationnel, mais elle doit plutôt être comprise comme une entité ou un être

To evaluate the sensitivity and the specificity of the method in patients with bladder tumors, a four-quadrant random biopsy of the normal bladder mucosa was performed

de maltraitement vécu par l'enfant. a) les mères des enfants violentés et négligés perceveront qu'elles ont reçu moins d'affection de la part de leurs parents

L’accès à ce site Web et l’utilisation de son contenu sont assujettis aux conditions présentées dans le site LISEZ CES CONDITIONS ATTENTIVEMENT AVANT D’UTILISER CE SITE WEB.

Further work will include the acquisition of more data in order to obtain a larger and more balanced dataset, and the identification of the most relevant gait descriptors and

Hypogée collectif, fouillé en 1968 par Nassib Saliby, qui lui attribue la lettre D, puis à nouveau dégagé en 2009 par Siba Omran et une équipe du Service des Antiquités de