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8 Le cadre d’analyse

8.1 Facteurs clés considérés et structure générale du cadre :

8.1.1 Opérationnalisation des concepts au cœur de la problématique de

recherche :

Le développement de notre cadre théorique et la synthèse de ses éléments clés ont permis l’opérationnalisation du problème de la « dépendance automobile structurelle », concept au cœur de notre problématique et de nos questions de recherche. À son tour, cette opérationnalisation nous a aidés à élaborer et déterminer l’architecture finale de notre cadre d’analyse.

Nos analyses théoriques nous ont amenés à considérer, fondamentalement, deux principaux types de facteurs qui interviennent dans le problème de la dépendance automobile structurelle (chapitre 2) :

• la distance entre l’origine et la destination des déplacements;

• les moyens (ou options) disponibles ainsi que les efforts requis (contexte du parcours) pour effectuer les déplacements.

Chacun de ces grands facteurs a pu par la suite être décomposé selon les principales dimensions de la forme urbaine (densité, mixité, etc.) et les éléments clés des transports urbains (niveau et nature de l’offre en transport, design des infrastructures, etc.).

Un niveau de sophistication supplémentaire a aussi été ajouté en considérant nos deux échelles fondamentales : métropolitaine et locale. Ces deux échelles ont non seulement des implications différentes au niveau des distances des déplacements, mais également en ce qui a trait aux motifs des déplacements. L’échelle métropolitaine implique la plupart du temps les déplacements quotidiens pour le travail ainsi que les déplacements, moins fréquents, vers les destinations métropolitaines majeures (ex. : centres commerciaux majeurs, pôles culturels et récréatifs, etc.). L’échelle locale implique essentiellement les déplacements fréquents liés aux services de proximité (ex. : commerces de nourriture, services de garde et écoles, parcs et équipements communautaires, etc.) et aussi, dans une moindre mesure, les déplacements pour le travail. Le tableau qui suit présente les facteurs et éléments clés ayant une influence sur

la dépendance automobile structurelle, suivant les deux échelles distinctes dont nous venons de discuter.

Tableau 8-1 : Facteurs fondamentaux de la dépendance automobile structurelle

Distance : Contexte du déplacement (options,

efforts) : Échelle métropolitaine

Déplacements : travail, loisirs, achats hebdomadaires, équipements métropolitains, etc.

Dimensions de forme urbaine impliquées :

Densité globale de la

forme métropolitaine (intensité dans l’utilisation du sol)

Continuité (compacité) ou

dispersion de la forme métropolitaine

Dispersion des principales

destinations VS leur

concentration dans certains pôles

Dimensions de forme urbaine et éléments de transport impliqués : • Niveau et nature de l’offre en

transports en commun (VS

l’offre en infrastructures pour l’automobile);

Intégration/concordance du réseau de transport en commun avec les principales origines/destinations (VS leur

intégration avec les

infrastructures pour l’automobile)

Échelle locale

Déplacements : atteindre le transport en commun, achats courants et services « de proximité », etc.

Dimensions de forme urbaine impliquées :

Densité de la forme

urbaine à l’échelle locale (quartier, voisinage); (particulièrement aux abords du transport en commun)

Mixité fonctionnelle à

l’échelle locale (quartier, voisinage); (Idem.)

Dimensions de forme urbaine et éléments de transport impliqués : • Convivialité/sécurité/attractivité

des infrastructures locales de transport et du cadre bâti pour

les modes « doux » (ou actifs) de transport (marche, vélo, etc.) (VS leur orientation envers

l’automobile).

(Éléments de design urbain et de design des infrastructures de transport)

En résumé, les facteurs fondamentaux et les dimensions clés de la forme urbaine et des transports ayant une incidence sur la dépendance automobile structurelle sont les suivants :

1. Distance entre origines et destinations

a. Compacité métropolitaine (1) : niveau de continuité de l’urbanisation

b. Compacité métropolitaine (2) : niveau de concentration dans certains pôles (« force » de la structure multipolaire)

c. Densité de l’urbanisation

d. Niveau de mixité fonctionnelle

e. Intégration ou concordance entre les principales origines et destinations et les réseaux primaires de transport

2. Contexte des déplacements (moyens/options, efforts/coûts) a. Nature de l’offre en transport

b. Caractéristiques physiques du milieu bâti : convivialité pour les transports actifs

Note : Ces facteurs sont, en théorie, tous indépendants et complémentaires les uns par rapport aux autres. Ils devraient donc tous faire partie d’un cadre d’analyse complet de l’intégration « forme urbaine – transports durables » (ou de la dépendance automobile). Une autre approche qui nous a guidés dans l’élaboration du cadre d’analyse a été l’opérationnalisation du paradigme d’aménagement de l’intégration « forme urbaine – transports durables », qui est en fait un concept opposé à celui de la dépendance automobile structurelle (chapitre 2). En nous basant sur les objectifs récurrents et communs à la grande majorité des politiques publiques récentes et des plans d’aménagement, nous nous sommes posés la question : que cherchent fondamentalement à accomplir les politiques et les plans qui véhiculent et supportent ledit paradigme d’aménagement?

1. À l’échelle métropolitaine : limiter la dispersion :

a. Limiter les « sauts-de-moutons » (et/ou la « rurbanisation » 40)

b. Viser une densité globale suffisamment élevée

c. Créer un réseau de corridors et/ou de pôles compacts et mixtes (en d’autres termes, concentrer le développement)

40 Nous entendons par « rurbanisation » le développement résidentiel qui prend place, à la pièce, dans les zones à caractère rural et de très faible densité situées dans les secteurs périphériques des régions métropolitaines. En sociologie, la rurbanisation se définit simplement comme étant le « phénomène de peuplement des villages en périphérie d’une grande ville par les personnes qui y travaillent » (Dictionnaire de la langue française,

2. À l’échelle métropolitaine : augmenter et améliorer l’offre en transport en commun (et gérer l’offre pour l’automobile)

3. À l’échelle locale : rapprocher les services des résidents et des travailleurs : a. Favoriser la mixité des fonctions (accessibilité pour les destinations locales) b. Viser une densité locale suffisamment élevée pour supporter la mixité

4. Enfin, assurer une coordination entre le développement urbain et celui des systèmes des transports durables pour l’ensemble de l’agglomération (grande accessibilité tant à l’échelle métropolitaine que locale) :

a. Viser une bonne couverture du réseau de transport en commun pour le plus grand nombre de résidents et de travailleurs

b. Viser une intégration spatiale entre les secteurs métropolitains « clés » (ex. : principaux pôles et destinations) et les réseaux de transport en commun c. Viser des densités et niveaux de mixité « adéquats » le long et à proximité

des principaux réseaux de transport en commun

d. À l’échelle locale : créer des milieux bâtis favorables aux transports actifs : i. Infrastructures pour la marche et le vélo

ii. Design urbain « de qualité »

iii. Gérer adéquatement les espaces dédiés à l’automobile

Ces deux perspectives nous été utiles pour la détermination de l’architecture finale de notre cadre d’analyse.

8.1.2 Organisation logique, structure générale du cadre :

La structure générale que prend notre cadre d’analyse est essentiellement celle d’une série de « dimensions clés » (incluant un niveau additionnel composé de « sous- dimensions »), elles mêmes composées d’une série d’indicateurs, complémentaires entre eux, lesquels sont finalement opérationnalisés par une série de mesures diverses (figure 8.1).

Figure 8-1 : Structure générale du cadre d’analyse : des facteurs clés aux mesures détaillées

La série de dimensions clés suit une organisation basée sur leur gradation (ou hiérarchisation) : des plus simples (unitaires), telles que la densité, la dispersion, l’offre en infrastructure de transport, etc., aux plus complexes (combinées), telles que l’accessibilité et l’intégration spatiale entre les pôles et transport en commun (figure 8.2).

Figure 8-2 : Structure générale du cadre d’analyse (2) : gradation des dimensions et intégration des deux échelles

D’autres considérations ont guidé l’architecture finale de notre cadre, avec comme préoccupation première la facilitation d’analyses spatiales complètes qui puissent nous aider à répondre aux questions de recherche.

Facteur

Dimension clé

Indicateur

Mesure/indice

Combinaison des deux

•Compacité/structure métropolitaine (continuité; multipolarité)

•Densités

•Mixité fonctionnelle

Systèmes de transport

•Offre en transport en commun •Offre en infrastructure automobile

Forme urbaine (distances)

•Accessibilités métropolitaines et locales

•Adéquation entre pôles/corridors et transport en commun

•Convivialité des milieux bâtis aux transports actifs

Du macro

(métrop.)

au micro

(quartier)

(Auteur : Michel Ouellet, 2011.)

Ainsi, guidés par notre préoccupation de combiner les regards « macros » et « micros », nous nous sommes assurés que certains des indicateurs utilisés portent sur l’ensemble du territoire métropolitain alors que d’autres ciblent certains secteurs spécifiques, souvent jugés « critiques » ou « stratégiques » (les aires à proximité des stations du réseau primaire de transport en commun, par exemple).

Similairement, nos indicateurs incluent le plus souvent une mesure « métropolitaine globale » (pondérée) ainsi qu’une série de mesures additionnelles qui déclinent littéralement l’indicateur en fonction de secteurs localisés à diverses distances du centre de l’agglomération. Cette stratégie a pour but de permettre un certain niveau d’analyse « centre – périphérie » (c’est-à-dire d’analyser comment l’indicateur se comporte en fonction de la distance du centre). Cela répond à notre intérêt initial exprimé dans nos questions de recherche, à savoir comment se manifeste et évolue la dépendance automobile structurelle dans les secteurs métropolitains périphériques (les banlieues) par rapport aux secteurs centraux ainsi qu’à l’ensemble de la région métropolitaine. Enfin, la structure de notre cadre permet une flexibilité dans les analyses. Elle permet en effet à la fois une analyse globale d’une ou de plusieurs agglomérations (c’est-à-dire toutes dimensions confondues, à l’aide notamment d’indices composites), ainsi que des analyses plus pointues portant sur chacune des dimensions clés ou chacun des indicateurs.