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B. Les conditions

3. L'absence d'une restriction de police

Même des restrictions graves du droit de propriété ne donnent pas droit à une indemnité pour expropriation matérielle lorsqu'elles sont fondées sur un motif de police37Tombent dans cette catégorie les mesures qui limitent l'usage de la propriété immobilière dans le but de sauvegarder l'ordre public au sens étroit, en particulier celles qui ont pour but de protéger la vie, la santé, la tranquillité et la sécurité publiques. A titre d'illustrations, relevons l'interdiction de construire une maison dans une zone exposée aux avalanches", ou celle d'exploiter une gravière sise à proximité d'un captage d'eau souterraine". Comme ces deux exemples le montrent, il importe peu que l'atteinte à l'ordre public provienne du propriétaire lui-même ou d'un fait de la nature. De même, le fait que le perturbateur soit la collectivité publique n'exclut pas la qualification de

35 AUER/MALINVERNl/HoTTELlER (n. 2) p. 402, nO 848.

36 Cf. infra V, A, 1.

37 Pour les restrictions de police, cf. BEATRICE WEBER-DÜRLER, « Der Grundsatz des entschadigungslosen Polizeieingriffs », ZBl1984 p. 289 ss; RIVA, Haltptfragen (n. 2) p. 320 ss.

38 ZB11971473 (TF, 17.02.1971), Cerneinde Landschaft Davos.

" ATF 96/1970 1 350, Frei Itnd Konsorten.

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restriction de police qui fait obstacle au versement d'une indemnisation pour expropriation matérielle. Tel est le cas lorsque les restrictions de la propriété ont pour but de protéger la santé du propriétaire ou des futurs habitants ou usagers du bien immobilier concerné. Le Tribunal fédéral s'est exprimé dans ce sens dans deux arrêts qui portent sur des nuisances sonores provenant, dans un cas, d'une route nationale". et dans l'autre, d'un aérodrome". Le premier arrêt indique que le refus de délivrer une autorisation de construire fondée sur l'article 22 de la loi sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE)" ne constitue en principe pas un cas d'expropriation matérielle". Dans le se·

cond arrêt, le Tribunal fédéral a relevé que le plan de zone en question se bornait à constater que les terrains, qui étaient ouverts au trafic aérien depuis longtemps avant l'adoption du plan litigieux, étaient totalement impropres à la construction. Dans ces conditions, les zones avaient pour but de protéger la santé du propriétaire ou des futurs habitants de la parcelle contre des nuisances préexistantes, ce qui excluait une indem-nité pour expropriation matérielle 44.

Un arrêt rendu le 5 septembre 2005 en relation avec les nuisances so-nores provenant de l'aéroport de Cointrin·Genève rend la portée de la jurisprudence antérieure moins claire. Dans un obiter dictllm, les juges de Mon Repos mentionnent en effet qu'il n'est pas nécessaire de déter-miner si «l'application des articles 22 LPE et 31 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB)" pourrait éven-tuellement justifier l'octroi d'une indemnité d'expropriation matérielle", une question qui aurait «également été laissée indécise dans d'autres arrêts»". Les juges fédéraux semblent donc avoir laissé la porte ouverte à la reconsidération ou la précision de leur jurisprudence dans un sens plus favorable aux propriétaires fonciers. Dans cet ordre d'idée, une opi-nion doctrinale propose, par exemple, de distinguer le cas où la parcelle

40 ATF 120/1994 lb 76, M.

41 ATF 122/1996 Il 17, ]eanneret II J.

41 RS 814.01.

43 ATF 120/1994 lb 76, 87 M.

44 ATF 122/1996 Il 17, 20,]eanneret III.

45 RS 814.41.

" ATF 132/2006 Il 475, 483, Etat de Genève.

est inconstrucrible en raison de nuisances préexistantes, d'une part, et l'hypothèse où elle le devient par la suite en raison de nouvelles im-missions sonores, résultant, par exemple, de l'ouverture d'une nouvelle route aérienne. Le principe de non-indemnisation, fondé sur la nature policière de la restriction ou l'inaptitude du terrain à la construction ne serait applicable qu'à la première constellation, mais non à la seconde".

La jurisprudence sur les restrictions policières s'est déjà montrée sen-sible aux intérêts des propriétaires fonciers en soulignant que la notion de mesure de police doit être interprétée d'une "façon restrictive. Elle ne comprend, d'une part, que les mesures nécessaires à écarter des dangers concrets, sérieux et imminents". En d'autres termes, sont exclues les mesures qui ne sont pas proportionnées par rapport à l'objectif men-tionné, ou qui ont pour but de prévenir un danger de principe, général et abstrait. D'autre part, la notion de police au sens strict n'englobe pas les mesures qui poursuivent une double finalité, à moins que l'objec-tif de police ne soit prépondérant par rapport à l'objectif non policier.

Le fait qu'une mesure principalement inspirée par des considérations d'aménagement du territoire vise accessoirement la pro[Cction des eaux souterraines ne suffit, par exemple, pas pour exclure une indemnisation pour expropriation matérielle".

La jurisprudence a de surcroît admis certaines exceptions au principe selon lequel les mesures de police au sens étroit ne donnent pas lieu à indemnisation 50. Lorsque la restriction consiste à corriger des erreurs d'aménagements, entraîne le déclassement d'un terrain sis en zone à bâ-tir et muni de l'équipement de base, ou interdit une utilisation du sol auparavant licite, une indemnité pour expropriation matérielle5I n'est pas exclue.

47 SIGRIST (n. 9) p. 163.

.. ATF 96/1970 1 350, 359, Frei und Konsorten; ATF 10511979 la 330, 335, Meier c. commune de Zhers.

" Ibid.

,. ATF 10611980 lb 336, 339, Aarberg und Staat Bern; ATF 106/1980 lb 330, 335, Gebrüder Thomann; voir ZEN-RuFFINEN/Guy-EcABE.RT (n. 2) p. 626.

SI Lorsque la mesure de police vise à proréger le propriétaire en corrigeant des erreurs de planification, par exemple par l'interdiccion de construire sur un terrain exposé aux avalanches, l'indemnisation se fonde sur la responsabilité de la collectivité publique et non sur l'expropriation matérielle (voir ATF 106/1980 lb 336, 339, Aarberg und Staal Bern).

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V. Concrétisation de la notion d'expropriation matérielle

Comme la section précédente l'a montré, la définition jurisprudentielle de l'expropriation matérielle contient beaucoup de notions juridiques indéterminées dont certaines doivent être appréciées à l'aune d'un en-semble de facteurs. En tranchant des situations de fait récurrentes, la ju-risprudence permet cependant de mieux cerner les restrictions à l'usage de la propriété donnant lieu à indemnisation. Dans le but de concrétiser la notion d'expropriation matérielle, nous a borderons successivement deux grandes catégories de mesures, celles qui entraînent la suppression totale de la faculté de construire (A) et celles qui se limitent à restreindre l'usage du bien immobilier (B).

A. La suppression de la faculté de construire

Alors que la suppression totale de la faculté de construire constitue au sens courant du terme sans doute une restriction grave du droit de pro-priété, elle a jusqu'à présent rarement donné droit à une indemnité pour expropriation matérielle. Ce fait s'explique en grande partie par la dis-tinction jurisprudentielle entre deux types de mesures: celles qui consti-tuent un simple non-classement (refus de classer, Nichteitlzotlutlg)" et celles qualifiées de déclassement (Auszotlutlg) 53.

1. La distitlctiotl etltre tlotl-classemetlt et déclassement a. Finalité

La distinction établie par le Tribunal fédéral entre non-classement et déclassement se situe dans le sillage de l'arrêt Meier c. Commu7le de Zizers". Rappelons que les juges fédéraux y ont souligné le risque que les considérations d'ordre financier fassent échec à la réalisation des objectifs liés à l'aménagement du territoire. Pour faciliter la mise en œuvre de la LAT, la jurisprudence a posé le principe selon lequel toute

52 Sur cette notion, voir ACKER ET (n. 18).

5.3 Pour la distinction entre non-classement et déclassement, voir p. ex.

ZEN-RUFFINEN/GUy-EcABERT (n. 2) p. 596 SS; HXNNI (n. 2) p. 595 ss; RIVA, Com-mentaire LAT (n. 2) n°S 145 ss et 161 55.

" ATF 105/1979 la 330, Meier; voir supra III, B.

MAYA HERTIG RANDALL

interdiction de construire frappant une parcelle située dans une zone non conforme aux exigences de la LAT doit être qualifiée comme un simple refus de classer, qui ne constitue en principe pas un cas d'expro-priation matérielle. Par contre, l'inconstructibilité d'un terrain décou-lant d'une modification d'une planification conforme à la LAT constitue un cas de déclassement et fonde en principe un droit à l'indemnisation pour expropriation matérielle".

On est toujours en présence d'un non-classement lorsqu'un terrain de-vient inconstructible en raison de la première 'adaptation du plan d'af-fectation cantonal à la législation fédérale en matière d'aménagement du territoire; pour les changements ultérieurs du plan, il y a une présomp-tion en faveur du déclassement qui peut toutefois être renversée, le cri-tère déterminant étant la conformité tant matérielle que procédurale"

du plan cantonal aux exigences de la LAT57.

b. Fondements dogmatiques

D'un point de vue dogmatique, la distinction entre non-classement et déclassement peut être rattachée tant à la première condition (atteinte particulièrement grave), qu'à la deuxième (usage futur prévisible) posée dans l'arrêt Barret. Envisagée sous l'angle de la gravité de l'atteinte, elle concrétise la jurisprudence Meier c. commu1Ie de Zizers", en conférant à la différenciation entre des mesures restreignant le droit de propriété et celles se limitant à définir son contenu toute sa pertinence pratique.

En effet, le Tribunal fédéral a considéré que les prescriptions de la LAT ne font que concrétiser le contenu de la propriété au lieu de lui apporter des limites. Par conséquent, le non-classement ne constitue, à la diffé-rence du déclassement, pas une restriction de la garantie de la propriété,

55 Pour la distinction entre le non-classement comme unc simple détermination de l'étendue de la propriété et le déclassement comme privation d'une faculté essen-tielle découlant du droit de propriété, voir par exemple ATF 112/1986 lb 105, lB, Commugny.

56 Le critère de la conformité procédurale, qui exige que le plan cantonal soit adopté selon la procédure prescrite par la LAT, a pour conséquence que seuls des plans adoptés postérieurement à la LAT remplissent cette exigence; voir par exemple ATF 120/1994 lb 76, 86, Altendorf.

57 ZEN-RuFFINEN/Guv-EcABERT (n. 2) p. 597 SS, n° 1436.

" ATF 105/1979 la 330, Meier. Voir supra III, B.

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et, a fortiori, pas une atteinte d'une gravité particulière. Ce raisonne-ment implique, pour la deuxième condition de la formule Barret, que l'accent soit mis sur les facteurs juridiques au lieu des facteurs factuels pour nier la constructibilité du terrain sis dans une zone non conforme aux exigences de la LAT".

c. Précision de la distinction

Comme déjà relevé, le critère essentiel pour qualifier une mesure de non-classement ou de déclassement est la conformité aux principes de la LAT. Ce critère peut être interprété plus ou moins largement, élargissant ou réduisant le champ d'application de l'une des deux types de mesures au détriment ou en faveur de l'autre.

La jurisprudence récente du Tribunal fédéral se montre soucieuse de la sécurité juridique et de la stabilité des plans, refusant de remettre continuellement en question la conformité des mesures de planification à la LAT et de subordonner les intérêts des propriétaires aux objectifs de l'aménagement du territoire. Dans un arrêt concernant la commune zurichoise de Wetzikon, par exemple, le Tribunal fédéral a considéré que la réduction des zones à bâtir initialement conformes à la LAT mais devenues surdimensionnées par la suite (par exemple en raison de l'évolution démographique ou du progrès technique permettant une utilisation plus rationnelle du sol) était constitutive d'un déclassement et non d'un refus de classer. Les juges fédéraux sont parvenus à cette conclusion tout en admettant que la distinction entre les zones à bâtir d'emblée surdimensionnées, dont la réduction constitue un cas évident d'un non-classement'" et celles ne le devenant que par la suite n'est pas aisée. Le fait que les collectivités publiques soient ans les deux cas obli-gées, en vertu de l'article 15 LAT, à procéder à une réduction des zones

59 Voir supra IV, n, 2.

60 En effet, une zone à bâtir d'emblée surdimensionnée implique que la législation cantonale de mise en œuvre de la LAT soit clairement non conforme à la défini-tion de la zone à bâtir de l'art. 15, let. b LAT. Cette disposition définit comme zone à bâtir les zones" probablement nécessaires à la construction dans les quinze ans à venir.» Sur la définition de la zone à bâtir, cf. ALEXANDRE FLOCKIGER,

«ad art. 15 », in: AEMlSEGGER/KuTTLER/MoOR/RuCH (éd.), Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Zurich, 1999; sur la réduction des zones à bâtir surdimensionnées, avec des références jurisprudentielles, cf.

ZEN-RUFFINEN/Guv-EcABERT (n. 2) p. 599 ss.

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surdimensionnées ne justifie pas non plus une approche différente. Qua-lifier une réduction d'une zone à bâtir devenue surdimensionnée suite à l'établissement du premier plan cantonal respectant les prescriptions de la LAT comme un non-classement, qui ne justifie une indemnisation que dans des circonstances exceptionnelles, entraînerait, selon le Tribunal fédéral, une restriction excessive de la garantie de la propriété.

Le Tribunal fédéral a également refusé d'interpréter la notion de dé-classement de façon restrictive dans un arrêt concernant des parcelles classées dans la zone protégée suite à l'adoption de la loi sur la pro-tection générale et l'aménagement des rives de l'Arve du 4 mai 1995 (LPRArve/GE) 61. " . Il n'a pas suivi l'argument des autorités genevoises selon lesquelles la loi de 1995 constituait la première mise en œuvre des principes de la LAT. Les juges fédéraux ont relevé que les parcelles concernées avaient été classées dans la zone à bâtir déjà en vertu d'un plan de zones de construction annexé à la loi sur les constructions et les installations diverses du 25 mars 1961 (aLCI/GE)". Ce plan avait été repris tel quel en 1987 par la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT/GE)", qui avait pour but de mettre en œuvre les principes de la LAT dans le canton de Genève. Le fait que le plan de zone n'ait pas été modifié à cette occasion n'y changeait rien".

Selon le Tribunal fédéral, la qualification de la LPRArve/GE comme une mesure de déclassement n'était pas en contradiction avec l'apprécia-tion juridique des interdictions de construire résultant de la législation

61 RS/GE L 4 16.

62 SJ 2005 1 6 (TF, 29.03.04); pour un résumé et un bref commentaire, cf. JEAN-BAPTISTE ZUFFEREY, DC 2005 p. 143.

63 Abrogée et remplacée par la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI/GE; RS/GE L 505).

" RS/GE L 1 30.

6S Voir à cet égard aussi ATF 129/2003 JJ 225,229 ss, République et canton de Ge-nève, dans lequel le Tribunal fédéral a également considéré que 13 confirmation, par J'adoption de la La LAT/GE, d'un plan antérieur ne peut pas être comprise comme une volonté de ne pas mettre en œuvre les principes de l'aménagemem du territoire. Les juges fédéraux y relèvent la situation spécifique du canton de Ge-nève, étant donné que les autorités avaient déjà pris des mesures en yue de limiter les zones à bâtir bien avant l'adoption de la législation fédérale. Par conséquem, lors de l'entrée en yigueur de la LAT, les anciennes zones à bâtir n'étaient en géné-ral pas surdimensionnées.

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protectrice des rives du Rhône que le Tribunal fédéral avait qualifiée de non-classement". La différence résidait dans le fait que la loi générale sur la protection des rives du Rhône avait été adoptée en 1989 (LPR-Rhône/GE)", donc presque en même temps que la LaLAT/GE et dans le but de mettre en œuvre la législation fédérale en matière d'aménagement du territoire. En d'autres termes, le facteur temps joue en faveur des propriétaires. Etant donné que le délai fixé aux cantons pour se doter d'un plan d'affectation conforme à la LAT a échu le 1" janvier 1988", le Tribunal fédéral admettra de plus en plus restrictive ment l'argument tiré de la non-conformité des plans cantonaux aux principes en matière de l'aménagement du territoire, privilégiant ainsi la sécurité juridique et la stabilité des plans.

Relevons toutefois que ni l'arrêt portant sur le canton de Genève, ni celui concernant la commune de Wetzikon n'ont débouché sur une indem-nisation des propriétaires concernés. Dans le premier cas, les autorités genevoises ont, suite à l'arrêt du Tribunal fédéral, décidé de procéder à une modification des plans pour éviter de devoir verser des indemnités de 12 millions de francs". Dans le deuxième cas, le Tribunal adminis-tratif zurichois a de nouveau refusé le versement d'une indemnité pour le motif que le terrain ne disposait pas d'un accès routier suffisant et que les propriétaires n'auraient pas eu la possibilité de se le procurer par leur propre initiative, étant donné qu'aucune servitude sur le fonds voi-sin n'avait été constituée en faveur de la parcelle concernée. En d'autres termes, la deuxième condition de la formule Barret (celle de l'usage fu-tur prévisible) faisait défaut car le terrain n'était pas constructible. Le Tribunal fédéral a confirmé l'argumentation des juges administratifs zurichois par arrêt du 4 juin 20077

°.

66 ATF du 29 janvier 1998 (1A.267/1997).

67 RS/GE L 4 13.

68 Art. 35, al. 1, let. b LAT.

69 Cette manière de procéder a reçu l'aval du Tribunal administratif genevois, qui n'a pas accueilli le grief de la violation de la protection de la bonne foi (voir infra VI, C). En effet, la recourante avait mis en exergue le comportement contradic-toire des autorités genevoises, qui avaient allégué, tout au long de la procédure, que la législation cantonale n'était pas conforme à la LAT de sorte que le classe-ment des parcelles concernées était constitutif de non-classeclasse-ment, mais changèrent d'opinion face à l'appréciation contraire du TF (ATA/GE du 27 novembre 2007 [ATA/580/2007J).

70 ATF du 4 juin 2007 (1A.19312006).

2. Pertinence de la distinction

Le dernier arrêt montre que la distinction entre non-classement et dé-classement n'est pas toujours pertinente pour l'issue d'un litige 71. En d'autres termes, l'affirmation selon laquelle le déclassement justifie en principe une indemnisation pour expropriation matérielle, alors que tel n'est généralement pas le cas pour le refus de classer est simplificatrice et réductrice n. Il convient de la nuancer pour mieux cerner la portée de cette règle et ses exceptions.

A la lumière du critère permettant de distinguer le non-classement du déclassement, qui repose sur la première mise en œuvre des prescriptions fédérales en matière d"aménagement du territoire, il n'est pas étonnant que la jurisprudence rendue dans le sillage de l'adoption de la LAT ait principalement porté sur des refus de classer. Dans le but de favoriser la mise en œuvre de principes de l'aménagement du territoire, le Tribunal fédéral a limité l'indemnisation en cas de non-classement à des circons-tances spécifiques. Bien qu'elles doivent être appréciées, en conformité avec la formule Barret, de façon globale, à la lumière de toutes les condi-tions juridiques et factuelles du cas concret, ces circonstances spécifiques peuvent être groupées en trois exceptions au principe selon lequel le non-classement ne constitue pas un cas d'expropriation matérielle".

La première exception se rattache à la deuxième condition posée par la jurisprudence Barret, selon laquelle une restriction particulièrement

71 Dans son arrêt du 4 juin 2007, le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir si une mesure étatique, qualifiée de déclassement, et qui ne remplit pas les conditions de l'expropriation matérielle, justifierait dans certaÎns cas le versement d'une indemnité si la mesure était qualifiée de non-dassemem et examinée sous cet angle. Il a estimé que les conditions exceptionnelles donnant droit à une indemni-sation en cas d'un non-classement n'étaient manifestement pas remplies en l'espèce (c. 5.1. ss).

n La nature peu précise de la règle selon laquelle le non-classement ne constitue en général pas un cas d'expropriation matérielle alors que le déclassement remplit en principe cette condition est mise en exergue par KAPPELER (n. 2) p. 30 ss;

dans le même ordre d'idée, ACKERET considère, dans une érude consacrée au oon-classement, que ce critère de distinction n'a que peu de percinence (~~ wenig

QUSSQ-gekriiftig.) et manque de précision (ACKERET (n. 18) p. 112).

7J Cf. ZEN·RuFFINEN/GUy·EcABERT (n. 2) p. 602 ss, et HANNI (n. 2) p. 597·598, avec des références jurisprudentielles détaillées. Le Tribunal fédéral insiste sur le fait que

7J Cf. ZEN·RuFFINEN/GUy·EcABERT (n. 2) p. 602 ss, et HANNI (n. 2) p. 597·598, avec des références jurisprudentielles détaillées. Le Tribunal fédéral insiste sur le fait que