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Examen des projets de plans budgétaires pour 2021 en période de crise de la COVID-19

Dans le document Bulletin économique. Numéro 8 / 2020 (Page 88-92)

Évolutions des taux d’intérêt

8 Examen des projets de plans budgétaires pour 2021 en période de crise de la COVID-19

Stephan Haroutunian, Sebastian Hauptmeier et Steffen Osterloh Le 18 novembre 2020, la Commission européenne a publié ses avis sur les projets de plans budgétaires nationaux des États de la zone euro pour 2021.

Contrairement aux années précédentes, et dans le contexte de la pandémie de coronavirus (COVID-19), l’évaluation de la Commission européenne a été de nature qualitative et ne s’est pas concentrée sur le respect des règles budgétaires chiffrées cette année. Cela s’explique par l’activation de la clause dérogatoire générale 58, qui autorise les États membres à s’écarter des exigences d’ajustement du Pacte de stabilité et de croissance dans certaines situations spécifiques bien définies, telles qu’une grave récession économique affectant la zone euro ou l’ensemble de l’Union.

À la place, l’examen de la Commission s’est fondé sur les recommandations

budgétaires par pays adoptées par le Conseil le 20 juillet 2020 et sur les orientations qu’elle a publiées en septembre sous la forme de lettres adressées à tous les États membres, indiquant que la clause dérogatoire générale resterait active en 2021 afin d’assurer le soutien nécessaire des politiques budgétaires. La Commission a également précisé dans son évaluation que, lorsque les conditions économiques le permettront, les États membres devraient conduire des politiques budgétaires visant à parvenir à des positions budgétaires prudentes à moyen terme et à garantir la soutenabilité de la dette, tout en stimulant les investissements. Afin de concilier la nécessité de fournir une stabilisation macroéconomique avec la préservation de la soutenabilité budgétaire à moyen terme, la Commission a déclaré que les mesures de soutien devraient être ciblées et temporaires, car des mesures permanentes qui ne sont pas financées par des mesures compensatoires peuvent affecter la soutenabilité budgétaire à moyen terme.

Les projets de plans budgétaires suggèrent un glissement des dispositions d’urgence vers des mesures de redressement en 2021, mais ils ne reflètent pas encore complètement le soutien du fonds Next Generation EU (NGEU).

Selon la Commission européenne, les États membres ont pris d’importantes mesures budgétaires en réponse à la pandémie, lesquelles s’élèveraient à 4,2 % du PIB en 2020 et à 2,4 % du PIB en 2021. En 2020, les programmes budgétaires ont majoritairement consisté en des dispositions d’urgence visant à atténuer les effets immédiats de la crise, c’est-à-dire à faire face à la situation de santé publique et à limiter les séquelles économiques. D’après l’évaluation de la Commission, ces dispositions d’urgence ont représenté environ 80 % des programmes budgétaires adoptés en 2020 au niveau agrégé de la zone euro. À partir de 2021, les mesures liées à la fourniture d’aides urgentes devraient s’éteindre graduellement pour laisser la place à des mesures soutenant la reprise. L’examen par la Commission

58 Cette clause a été introduite dans le cadre de la réforme « six-pack » du Pacte de stabilité et de croissance en 2011. Elle peut être activée en cas de circonstance inhabituelle indépendante de la volonté de l’État membre concerné et ayant un impact majeur sur la situation financière des administrations publiques, ou en période de grave récession économique affectant la zone euro ou l’ensemble de l’Union. Lorsqu’elle est invoquée, elle permet aux États membres de s’écarter temporairement de l’ajustement budgétaire requis dans le cadre tant du volet préventif que du volet correctif du Pacte, à condition que cela ne mette pas en péril la soutenabilité budgétaire à moyen terme.

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Examen des projets de plans budgétaires pour 2021 en période de crise de la COVID-19 88 européenne des projets de plans budgétaires donne à penser que les mesures de redressement, telles que des allégements de la fiscalité indirecte et un

accroissement des investissements publics, devraient constituer plus de 60 % des mesures budgétaires en 2021. La mise en œuvre du plan NGEU, et plus

particulièrement de la facilité pour la reprise et la résilience, qui en est le pilier central, devrait commencer en 2021. Cependant, compte tenu de l’état d’avancement des travaux préparatoires, surtout en ce qui concerne les plans nationaux pour la reprise et la résilience, seule une faible part des recettes et des dépenses liées à cette facilité est prise en considération dans les prévisions d’automne de la Commission européenne et dans certains des projets de plans budgétaires.

La Commission européenne a indiqué que les projets de plans budgétaires pour 2021 sont globalement conformes à la recommandation en matière de politique budgétaire adoptée par le Conseil, mais elle a mis en évidence des risques lorsque des mesures permanentes sont prévues. Elle a estimé que, dans la majorité des pays de la zone euro, les mesures prévues pour 2021 sont (pour la plupart) temporaires. Seuls les plans de la France, de l’Italie, de la Lituanie 59 et de la Slovaquie comportent des mesures qui ne semblent pas temporaires ni accompagnées de mesures de compensation. Pour la Belgique, la France, la Grèce, l’Italie, le Portugal et l’Espagne, la Commission européenne a souligné que « compte tenu du niveau élevé qu’atteignait déjà leur dette publique [...], avec les importants défis que cela pose en matière de soutenabilité à moyen terme, il importe de veiller à ce que les mesures budgétaires de soutien adoptées préservent la viabilité des finances publiques à moyen terme ». Le contexte de grande incertitude rend l’évaluation des mesures délicate, d’autant plus que les mesures temporaires et les mesures plus structurelles ne peuvent pas toujours être distinguées, étant donné que les pays prennent des dispositions face à l’évolution par vagues de la crise.

L’évaluation de la Commission doit être considérée à la lumière de l’incidence significative et divergente que la gravité du choc provoqué par la COVID-19 ainsi que les mesures de soutien budgétaire exercent sur les finances publiques, mais également dans le contexte de la profonde incertitude actuelle. En moyenne, quelque 30 % de la dégradation budgétaire prévue en 2020 devrait être annulée en 2021, avec des ratios de déficit restant supérieurs au seuil de 3 % du PIB dans l’ensemble des pays de la zone euro, à l’exception du Luxembourg et de Chypre (cf. graphique A). L’Espagne, la France, l’Italie et la Slovaquie afficheraient les déficits les plus importants, de plus de 7,5 % du PIB en 2021. À politique inchangée, les déficits demeureraient au-delà du seuil de 3 % dans treize États membres de la zone euro en 2022. De plus, de nombreux pays ayant abordé la crise avec des ratios de dette élevés, de quelque 100 % et plus, seraient les plus lourdement affectés par le choc de la COVID-19, en termes d’endettement croissant (cf. graphique B). Seuls cinq pays de la zone euro maintiendraient en 2022 leur ratio de dette en deçà de la valeur de référence de 60 % du PIB définie par le

59 La Lituanie a soumis un projet de plan budgétaire fondé sur un scénario de politique inchangée.

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Examen des projets de plans budgétaires pour 2021 en période de crise de la COVID-19 89 traité de Maastricht, à savoir l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg et Malte.

Graphique A

Soldes budgétaires des administrations publiques, 2020-2022

(en pourcentage du PIB)

Sources : Commission européenne (base de données AMECO) et calculs de la BCE.

Graphique B

Dette brute des administrations publiques, 2019-2022

(en pourcentage du PIB)

Sources : Commission européenne (base de données AMECO) et calculs de la BCE.

La Commission européenne n’envisage pas, à ce stade, de procéder à

l’ouverture de procédures de déficit excessif en réaction à des infractions par rapport à la valeur de référence de 3 % du PIB et à la règle de la dette.

Actuellement, seule la Roumanie est soumise à une procédure de déficit excessif (PDE), depuis avril 2020. Dans son plan de novembre, la Commission a déclaré que, « compte tenu de l’incertitude exceptionnelle engendrée par la pandémie de COVID-19 et de ses répercussions hors normes sur le plan macroéconomique et budgétaire, notamment pour la conception d’une trajectoire crédible pour la politique budgétaire, …il n’y avait pas lieu de décider de soumettre les États membres à la procédure concernant les déficits excessifs ». Suivant le même raisonnement,

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Variation du ratio de dette 2019-2022 Ratio de dette 2019 (échelle de droite)

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Examen des projets de plans budgétaires pour 2021 en période de crise de la COVID-19 90 la Commission a signalé qu’aucune décision portant sur des étapes supplémentaires de la PDE relative à la Roumanie ‒ qui avait été lancée en avril 2020 sur la base du déficit budgétaire de 2019 ‒ ne pouvait être prise à ce stade. Elle a néanmoins estimé qu’en Roumanie, « d’importants facteurs sous-jacents de la situation budgétaire, déjà présents avant le début de la pandémie en 2020, n’ont pas été modifiés ». La Commission réexaminera l’ouverture de PDE supplémentaires au printemps 2021, sur la base des données validées pour 2020 et de ses prévisions du printemps 2021.

Compte tenu de la contraction sensible de l’économie de la zone euro, une orientation budgétaire ambitieuse et coordonnée demeure essentielle jusqu’à ce qu’une reprise durable se soit installée, qui permette de reconstituer des positions budgétaires prudentes à moyen terme. Après une orientation budgétaire très expansive en 2020, les prévisions d’automne 2020 de la

Commission européenne font état d’une sortie progressive des mesures d’urgence ; les aides budgétaires devraient toutefois rester significatives avec l’adoption de nouvelles mesures axées sur le soutien à la reprise. Aussi longtemps que l’urgence sanitaire persistera et que la reprise ne sera pas autonome, il importera de prolonger les mesures temporaires afin d’éviter des effets de rupture brutale. Cela étant, il est primordial que les mesures conservent un caractère rapide, temporaire et ciblé afin d’apporter le soutien budgétaire le plus efficace possible, tout en ne créant pas d’effets persistants sur les positions budgétaires dans la période post-COVID et en garantissant ainsi la soutenabilité budgétaire. Dès que les conditions

épidémiologiques et économiques le permettront, l’attention devrait davantage se porter sur la conduite de politiques budgétaires visant à parvenir à des positions budgétaires prudentes à moyen terme, tout en stimulant les investissements.

Le fonds NGEU offre, dans ce cadre, une opportunité de soutenir les investissements et de contribuer à une reprise durable.

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Articles

Le mécanisme de change européen (MCE II), phase préparatoire en vue de l’adoption de

l’euro – les cas de la Bulgarie et de la Croatie 91

Articles

1 Le mécanisme de change européen (MCE II), phase

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