• Aucun résultat trouvé

Les effets à long terme de la pandémie : indications tirées d’une enquête réalisée auprès de grandes

Dans le document Bulletin économique. Numéro 8 / 2020 (Page 80-84)

Évolutions des taux d’intérêt

6 Les effets à long terme de la pandémie : indications tirées d’une enquête réalisée auprès de grandes

entreprises

Eduardo Maqui et Richard Morris

Le présent encadré résume les conclusions d’une enquête ad hoc réalisée par la BCE auprès de grandes entreprises de la zone euro, qui examine les effets à long terme de la pandémie de coronavirus (COVID-19) sur l’économie.

La pandémie de COVID-19 a provoqué le plus fort recul à court terme de l’activité économique depuis des siècles, mais elle a également entraîné des changements dans la manière dont les entreprises exercent leur activité ainsi que dans le comportement des ménages, et certains de ces changements survivront probablement à la crise actuelle. Ils pourraient alors influer durablement sur des agrégats tels que la production, l’emploi et les prix – et sur la relation entre ces agrégats 51.

L’objet principal de cette enquête était d’identifier la manière dont de grandes entreprises de la zone euro perçoivent l’impact à long terme de la pandémie de COVID-19 sur leur activité. Pour les besoins de l’enquête, nous définissons la notion de long terme comme « une nouvelle normalité lorsque – par exemple – l’élaboration d’un vaccin et/ou d’un traitement plus efficace préservera l’économie de perturbations significatives et/ou d’un changement brutal en raison du virus ou des mesures nécessaires pour le contenir ». L’enquête a été divisée en trois parties.

Dans la première partie, il a été demandé aux entreprises participantes de citer les éventuels effets à long terme que la pandémie de COVID-19 pourrait avoir sur leur activité, du point de vue par exemple de l’organisation de leur activité ou des marchés sur lesquels elles opèrent. Dans la deuxième partie, il leur a été demandé d’indiquer si elles approuvaient ou désapprouvaient une série d’énoncés relatifs aux hypothèses de « nouvelle normalité » liée à la pandémie. La troisième partie interrogeait sur l’impact à long terme attendu sur des agrégats tels que les ventes, l’emploi et les prix. Des réponses ont été obtenues de 72 grandes sociétés non financières, réparties à respectivement 60 % et 40 % environ entre le secteur industriel et les services. Dans l’interprétation de ces résultats, il convient de garder à l’esprit que, du fait de leur taille et de la distribution de leurs activités,

ces entreprises sont très probablement mieux placées que d’autres sociétés pour relever les défis posés par la pandémie.

Le recours accru au travail à distance et l’accélération de la digitalisation ont été les effets d’offre à long terme de la pandémie les plus fréquemment cités.

Il a été demandé aux entreprises participant à l’enquête d’expliquer brièvement, par ordre d’importance, jusqu’à trois façons dont la pandémie aurait un impact à long terme sur leur activité, par exemple du point de vue de l’organisation de leur activité ou des marchés sur lesquels elles opèrent. Le graphique A synthétise les réponses

51 Pour une étude récente des effets à long terme des pandémies passées et une comparaison avec les périodes de guerre, cf. Jordà (Ò.), Singh (S.R.) et Taylor (A.M.), « The Longer-Run Economic Consequences of Pandemics », Federal Reserve Bank of San Francisco, Working Paper Series, n° 9, 2020.

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Les effets à long terme de la pandémie : indications tirées d’une enquête réalisée auprès de

grandes entreprises 80

reçues à cette question ouverte. Plus de 40 % des entreprises participantes ont cité le recours accru au télétravail, et presque autant ont déclaré que la pandémie les avait incitées à accélérer l’adoption de technologies numériques, qui modifieront durablement leur manière d’exercer leur activité. Environ un cinquième des

entreprises participantes ont cité une réduction durable des voyages d’affaires et/ou une augmentation des réunions virtuelles, et une proportion similaire ont signalé un accroissement du commerce électronique ou – dans les compartiments entreprise à entreprise – les « ventes virtuelles ». Environ un cinquième des entreprises

participantes ont souligné le fait que les mesures prises en réponse à la pandémie accroîtraient la capacité de résistance et/ou la flexibilité de leur activité sur le long terme.

Une part significative d’entreprises participantes considère la demande réduite et/ou les modifications de la structure de la demande comme étant

particulièrement préoccupantes. Près de 30 % ont cité la baisse de la demande pour leurs produits ou services comme étant l’une des principales conséquences à long terme de la pandémie sur leur activité, et plus de 20 % ont fait état de

changements durables dans la structure de la demande. Cela semble refléter, dans une large mesure, l’opinion selon laquelle certains changements dans les habitudes de vie et de travail du fait de la pandémie, en particulier la part accrue de l’activité des entreprises et de la consommation s’effectuant en ligne et la diminution en conséquence des voyages, vont s’ancrer dans les comportements.

Graphique A

Principaux effets à long terme de la pandémie cités par de grandes entreprises

(en pourcentage des entreprises participantes)

Notes : La question de l’enquête posée aux entreprises participantes était formulée ainsi : « Quels effets à long terme, le cas échéant, pensez-vous que la pandémie de COVID-19 aura sur votre activité (du point de vue, par exemple, de l’organisation de votre activité ou des marchés sur lesquels vous intervenez) ? Énumérez jusqu’à trois effets par ordre d’importance ». Les réponses ont ensuite été regroupées par catégorie.

Plus des trois quarts des entreprises participantes ont estimé que leur activité serait plus efficiente et plus résistante à la suite de la pandémie. Le graphique B synthétise les réponses des entreprises participantes à la question leur demandant d’approuver ou de désapprouver une série d’énoncés destinés à tester certaines hypothèses relatives à la « nouvelle normalité » résultant de la pandémie. Plus de 75 % sont d’accord avec le fait que les enseignements tirés durant la pandémie rendraient leur activité plus efficiente et que les changements intervenus

0 10 20 30 40 50

Localisation/démondialisation Accélération de la transition énergétique Une plus grande concentration/plus de sorties du marché Mesures sanitaires et de sécurité accrues Augmentation des ventes virtuelles/du commerce électronique Modification de la structure de la demande Capacité de résistance/flexibilité accrue Moins de voyages d’affaires/plus de réunions virtuelles Demande réduite Accélération de la digitalisation Plus de travail à distance/télétravail

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Les effets à long terme de la pandémie : indications tirées d’une enquête réalisée auprès de

grandes entreprises 81

renforceraient leur capacité de résistance. Neuf entreprises sur dix ont confirmé qu’elles avaient accéléré l’adoption des technologies numériques et/ou de l’automatisation, et plus des trois quarts ont reconnu qu’une part nettement plus élevée de leurs effectifs continuerait à travailler à distance. Près de 60 % ont répondu par la négative à la question leur demandant si l’augmentation du travail à distance réduirait leur productivité, contre seulement 20 % d’accord avec cet énoncé. À cet égard, alors que la baisse d’interaction informelle, personnelle est considérée comme un inconvénient, de nombreux avantages sont également perçus, notamment une moindre perte de temps dans les transports entre maison et lieu de travail, la possibilité de mieux concilier vie personnelle et engagements professionnels, et une connectivité accrue 52.

Graphique B

Hypothèses test relatives aux effets à long terme de la pandémie

(en pourcentage des entreprises participantes)

Notes : La question de l’enquête posée aux entreprises participantes était formulée ainsi : « Veuillez indiquer si vous êtes d’accord ou non avec les énoncés suivants concernant les effets à long terme de la pandémie de COVID-19 ». Les entreprises participantes avaient le choix entre a) d’accord, b) pas d’accord ou c) pas d’opinion ou non concerné. Dans le graphique, un score de 1 est attribué à la réponse « d’accord » et un score de – 1 à la réponse « pas d’accord ».

Il a été jugé que la pandémie modifierait le comportement des consommateurs sur le long terme et qu’elle pourrait aboutir à une concentration accrue du marché, mais qu’elle aurait un impact beaucoup moins grand sur les chaînes d’approvisionnement. Les trois quarts des entreprises participantes ont reconnu que les modifications du comportement des consommateurs résultant de la

pandémie affecteraient la demande pour leur produit ou service principal sur le long terme. Plus de la moitié considèrent qu’il y aurait une concentration accrue du marché dans leur secteur (contre un quart en désaccord avec cette affirmation), et que les fusions joueraient probablement un plus grand rôle que les sorties

d’entreprises. À la question concernant l’effet à long terme de la pandémie sur les

52 Il a été souligné, par exemple, qu’en raison du travail à distance, les collaborateurs étaient désormais joignables pratiquement en permanence, ce qui n’était pas le cas par le passé en raison des déplacements entre la maison et le lieu de travail ou des voyages d’affaires. Il a également été fait remarquer que certaines fonctions, telles que les ventes, étaient devenues beaucoup plus productives lorsqu’elles étaient réalisées virtuellement.

-100 -50 0 50 100

La pandémie nous a incités à accélérer l’adoption des technologies numériques

Notre activité sera plus efficiente grâce aux enseignements tirés durant la pandémie

Les changements auxquels nous avons procédé augmenteront la capacité de résistance de notre activité Une part nettement plus élevée de nos effectifs travaillera à

distance

Les changements de comportement du consommateur affecteront la demande pour nos principaux produits/services

Il y aura une plus grande concentration du marché (via des fusions par exemple)

Les sorties d’entreprises augmenteront significativement dans notre secteur

Notre chaîne d’approvisionnement sera plus diversifiée Notre chaîne d’approvisionnement sera plus localisée L’augmentation du travail à distance fait baisser la productivité

des effectifs

Nous internaliserons en partie notre chaîne d’approvisionnement

Approuve Désapprouve

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

Les effets à long terme de la pandémie : indications tirées d’une enquête réalisée auprès de

grandes entreprises 82

chaînes d’approvisionnement, parmi les entreprises concernées, une majorité a déclaré qu’elles n’envisageaient pas une plus grande diversification ou localisation de leur chaîne d’approvisionnement, la très grande majorité considérant que leur activité ne chercherait pas à internaliser une plus grande partie de la chaîne d’approvisionnement.

La plupart des entreprises participantes ont considéré que la pandémie aurait une incidence positive à long terme sur la productivité mais un impact négatif sur l’emploi. À la question d’évaluer l’effet global à long terme sur une sélection d’agrégats, 60 % des entreprises interrogées ont répondu que la productivité de leur activité ou de leur secteur augmenterait et pratiquement aucune n’envisageait de baisse de la productivité comme conséquence à long terme de la pandémie.

À l’inverse, 55 % des entreprises anticipent un impact négatif à long terme sur l’emploi, contre 10 % environ prévoyant un impact positif. Cela semblerait refléter le fait que les entreprises ont appris à maintenir leur production en dépit des

restrictions pesant sur le facteur travail du fait de la distanciation sociale et qu’elles ont identifié des gains d’efficience liés à cette situation. Dans le même temps, les entreprises sont relativement peu nombreuses à considérer que la pandémie aura un effet à long terme sur leur stock de capital. L’effet à long terme anticipé de la pandémie sur les ventes (volumes), les prix et les coûts est légèrement négatif, au total, mais la plupart des entreprises participantes ont indiqué qu’elles

n’anticipaient aucun effet à long terme – ou n’étaient pas certaines qu’il y en aurait.

Graphique C

Effet à long terme de la pandémie attendu par les entreprises sur leurs agrégats

(en pourcentage des entreprises participantes)

Notes : La question de l’enquête posée aux entreprises participantes était formulée ainsi : « Concernant plus particulièrement votre activité/secteur, comment évalueriez-vous globalement les effets à long terme de la pandémie de COVID-19 sur les agrégats suivants ? » Les entreprises participantes avaient le choix entre a) hausse, b) baisse, c) pas de changement et d) ne sait pas.

Dans le graphique, un score de 1 est attribué à la réponse « hausse » et un score de – 1 à la réponse « baisse ».

-60 -40 -20 0 20 40 60 80

Ventes

(volumes) Emploi Stock

de capital Productivité Salaires Autres coûts

(unitaires) Prix Hausse

Baisse

Bulletin économique de la BCE, n° 8 / 2020 – Encadrés

L’évaluation de la dynamique des salaires durant la pandémie de COVID-19 : quel apport

des données relatives aux salaires négociés ? 83

7 L’évaluation de la dynamique des salaires durant la

Dans le document Bulletin économique. Numéro 8 / 2020 (Page 80-84)

Documents relatifs