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CHAPITRE 2 – OBJECTIFS DE LA RECHERCHE

II. EXPLICATION DES CHOIX MÉTHODOLOGIQUES – LA THÉORIE COMME MÉTHODOLOGIE

7. La durée du training

La conception d’un programme de rééducation implique de faire des choix quant à sa durée, son intensité et sa fréquence (très variables d’une étude à une autre). Une étude s’intéressant aux facteurs qui permettent d’améliorer le bénéfice d’une rééducation montre l’importance de la durée du training chez des patients avec pathologies psychiatriques (Choi & Medalia, 2005). Leur training comprenait 26 sessions d’une heure réparties de manière variable selon les groupes. Un groupe bénéficiait d’un training de haute intensité (d’une durée de quatre mois) et un groupe bénéficiant d’un training de basse intensité (26 sessions en plus de quatre mois). Les auteurs montrent qu’un training doit être intensif pour être efficace, en effet, les patients du groupe « haute intensité » ont obtenu une amélioration de leurs performances cognitives bien plus importante que le groupe « basse intensité ». Leur étude met en évidence l’existence d’un seuil à partir duquel le training ne montre plus de bénéfice. Par conséquent, ils concluent que ce n’est pas la durée du training qui conditionne son efficacité mais plutôt son intensité. De ce fait, il semble inutile de faire durer un training sur une période de temps trop longue.

D’après les recommandations cliniques de Sohlberg et al. (2003), un training attentionnel serait efficace s’il compte au moins une session de training par semaine. Cette revue de littérature montre que la durée et la fréquence des interventions sont variables d’une étude à l’autre : la durée d’une tâche de rééducation attentionnelle varie entre 5 et 10 minutes, la durée d’une session de training de 30 à 120 minutes, le nombre de sessions peut aller d’une par jour à deux par semaine et enfin le training en entier peut durer de 4 à 9 semaines

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(Sohlberg, et al., 2003). Beaucoup d’études choisissent a priori la durée et le nombre de sessions de l’intervention, sans réellement le justifier. Cependant, certains auteurs se sont intéressés spécifiquement au training sur simulateur de conduite (auprès de patients avec accident vasculaire cérébral) et ont montré que dix heures de training constitueraient une durée suffisante pour obtenir des bénéfices (Akinwuntan, et al., 2007).

En prenant en considération ces différentes recherches, nous avons choisi pour notre étude de privilégier l’intensité du training et non la durée. C’est ainsi que nous avons constitué un training de trois semaines, à raison de trois sessions d’une heure par semaine. Chaque tâche d’un training attentionnel efficace doit fournir une répétition suffisante pour stimuler l’amélioration du processus attentionnel (Michel & Mateer, 2006).

8. Le feedback comme partie intégrante du training

Le feedback est un retour sur les expériences et performances du participant. Selon Sohlberg (2003), une des principales caractéristiques d’un training attentionnel réussi est d’intégrer conjointement une dimension métacognitive au training (feedback, self-monitoring, stratégie). C’est pourquoi un entraînement de l’attention est encore plus bénéfique si l’on fait prendre conscience au patient de ses problèmes cognitifs.

Par conséquent, nous avons utilisé un feedback cognitif pour permettre aux participants de prendre conscience de leurs erreurs et d’améliorer leurs performances d’une séance à l’autre. Le feedback du groupe simulateur était principalement verbal et s’effectuait au début de la session qui suivait (après traitement des données informatiques) alors que le feedback du groupe ordinateur était visuel et automatiquement généré par le logiciel CogniPlus® en fin de session (graphique des temps de réponse et pourcentage d’erreurs).

9. Expérimentation en double aveugle

L'étude avec répartition aléatoire en double aveugle, est la démarche expérimentale la plus utilisée en recherche médicale et pharmaceutique. Le rôle d'un tel protocole, relativement lourd à mettre en place, est de réduire au mieux l'influence sur la ou les variables mesurées que pourrait avoir la connaissance d'une information (utilisation d'un produit actif ou d'un placebo, par exemple) à la fois sur le patient (premier « aveugle ») et sur l'examinateur (deuxième « aveugle »). C'est la base de la médecine fondée sur les faits.

Dans notre cas, les personnes qui réalisaient l’évaluation pré et post-training concernant les tests neuropsychologiques et l’évaluation sur route, n’étaient pas au courant du groupe d’appartenance du sujet (type de training réalisé), et l’expérimentateur qui effectuait le training n’était pas au fait des résultats obtenus à l’évaluation pré-training (tests neuropsychologiques et test sur route). Ainsi, nous n’avons pas participé à ces pré-tests, d’une part pour ne pas être influencé par les résultats lors du training, et d’autre part nous n’avons pas participé à ces post-tests pour éviter l’influence des résultats du training sur l’évaluation. C’est donc un moniteur d’auto-école et un neuropsychologue qui effectuaient l’évaluation seuls, sans savoir de quel type de training bénéficiait le participant. De ce fait, ils ne pouvaient avantager ni le groupe simulateur, ni le groupe ordinateur. La méthode du double aveugle a ainsi écarté la subjectivité de l’expérimentateur au profit de l’étude des seuls faits. En revanche, cette méthode n’a pu être appliquée pour l’évaluation pré et post-training sur simulateur de conduite. En effet, nous ne pouvions ignorer le groupe auquel appartenait le patient en raison de notre double statut : expérimentateur lors de l’évaluation sur simulateur de conduite et lors du training. Cependant, l’utilisation du simulateur comme outil de mesure présente l’intérêt de recueillir des mesures objectives, il s’agit donc de mesures fermées, qui

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devraient réduire l’impact subjectif de l’expérimentateur sur sa façon d’évaluer les participants sur simulateur de conduite. À l’inverse, notre implication dans le trainingn’aurait pas été naïve si nous avions pris connaissance des difficultés des patients lors de la conduite sur route et/ou du bilan neuropsychologique.

10. Inclusion des patients avec traumatisme crânien

Les personnes ayant été victimes d’un traumatisme crânien léger souffrent aussi de trouble de l’attention, au même titre que les patients traumatisés crâniens modérés et sévères. Cependant, leurs troubles attentionnels paraissent beaucoup plus subtils et ne se manifestent que dans les conditions les plus complexes (Allain, Aubin, & Le Gall, 2004). De plus, les troubles ne concernent pas toutes les dimensions de l’attention (sélectivité et intensité) et sont difficilement mis en évidence. Dans la plupart des cas, il s’agit de plaintes subjectives, difficilement objectivables à l’aide des tests neuropsychologiques classiques.

De ce fait, nous pensons qu’il est difficile d’observer les effets bénéfiques d’un training si les tests neuropsychologiques utilisés en baseline ne permettent pas de mettre en évidence des troubles attentionnels discrets chez cette population spécifique de patients traumatisés crâniens (effet plafond). Ainsi, seuls les patients avec traumatisme crânien modéré et sévère ont été inclus, soit un score à l’échelle de Glasgow inférieur à huit.

Nous avons pris la décision de commencer à inclure les patients traumatisés crâniens à partir du moment où ils n’étaient plus en phase aigüe (soit quatre semaines après le traumatisme crânien) car la récupération cognitive spontanée s’observe principalement durant cette période. Par conséquent, les preuves seraient insuffisantes pour distinguer l’effet spécifique du training attentionnel de la récupération spontanée. Ainsi, des interventions spécifiques de l’attention pendant la période de recouvrement aigu ne sont pas recommandées (Cicerone, et al., 2000).

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