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Les droits et libertés justifiés par la moralité politique pluraliste 102

Chapitre 3. La réconciliation des droits et libertés et du pluralisme 96

A. La promotion d’un contenu moral pluraliste 97

2. Les droits et libertés justifiés par la moralité politique pluraliste 102

La concomitance entre le libéralisme et le pluralisme des valeurs n’établit pas nécessairement la prévalence du constitutionnalisme libéral. L’enchâssement des droits et libertés au sein de la Constitution demeure un exercice conférant un poids supplémentaire à des considérations particulières lors de la résolution d’une problématique légale. Il faut cependant que le projet libéral s’inscrive sous le couvert d’une moralité politique caractérisée par le pluralisme des valeurs pour se prévaloir d’une quelconque légitimité.

496 Ibid à la p 364.

497 Wojciech Sadurski, Moral Pluralism and Legal Neutrality, Dordrecht, Kluwer Academic Publishers, 1990 à la p 89.

Effectivement, rappelons que le droit sous le couvert de l’herméneutique juridique s’entend d’une pratique sociale caractérisée par son entreprise politique, soit la justification du pouvoir coercitif de l’État. 499 Selon Dworkin, chaque société fait montre d’une moralité d’arrière-plan (ou « background morality ») justifiant et établissant les fondements du droit en son sein.500 L’herméneutique juridique justifie ainsi la légitimité des considérations sous-jacentes aux droits et libertés en raison de la moralité politique propre à un système juridique donné.501 L’interprétation légale des droits doit donc trouver appui dans la moralité politique afin de faire montre d’une justification appropriée.

Les droits et libertés doivent donc être justifiés au regard de la moralité politique informée par la pluralité et l’incommensurabilité des valeurs. L’auteur Luc B. Tremblay souligne que la référence à une théorie substantielle de la morale politique ne suffit pas à accommoder les sociétés démocratiques pluralistes et multiculturelles.502 La présupposition d’une conception

substantielle supérieure nuit à la conciliation entre les droits et libertés et le pluralisme des valeurs.

La critique pluraliste rejette ainsi l’importance donnée à une moralité politique restreinte à un arrangement prédéterminé, car le pluralisme des valeurs rend nulle la prétention d’une supériorité rationnelle propre à un modèle particulier. La conclusion qu’une forme d’organisation politique particulière puisse accommoder le pluralisme par la promotion de certaines valeurs institutionnalisées est donc remise en question.503 Les modèles libéraux ou antilibéraux représenteraient donc simplement des conceptions particulières du bien, incapables de prétendre à une quelconque supériorité sur la base du pluralisme des valeurs. Selon Gray, la promotion des droits et libertés ne serait en rien plus prometteuse que la promotion de valeurs plus traditionnelles. Au contraire, il avance que le respect du pluralisme des valeurs vient de pair avec

499 Ronald Dworkin, Law’s Empire, supra note 138 à la p 47.

500 Ronald Dworkin, Taking Rights Seriously, supra note 24 à la p 22. 501 François Du Bois, supra note 473 à la p 164.

502 Luc B. Tremblay, « Le principe de proportionnalité », supra note 288 à la p 435. 503 John Gray, Two Faces of Liberalism, supra note 32 à la p 32.

la reconnaissance des valeurs communes locales d’une société, quelles qu’elles soient, car elles s’inscriraient dans une culture et un contexte particulier.504

Cependant, le pluralisme des valeurs tel que soutenu par les propos de Gray semble aller bien au- delà de la théorie de Berlin. Le pluralisme moral n’est pas une doctrine qui justifie l’incommensurabilité des différentes cultures politiques. L’imposition d’un paradigme moral issu des traditions locales rejetant toutes autres avenues possibles irait certainement à l’encontre du pluralisme moral et une telle doctrine politique devrait être évitée. La moralité politique doit rendre compte de la réalité morale des individus, et par conséquent donner place à une pluralité de valeurs et de buts marquant la vie humaine.

Il faut déterminer dans quelle mesure les droits et libertés permettent de donner libre cours au pluralisme des valeurs. Il ne suffit pas de reconnaître que tous les arrangements constitutionnels sont équivalents, encore faut-il considérer leur capacité à laisser se réaliser diverses conceptions du bien en leur sein. La moralité politique doit devenir un cadre permettant l’épanouissement de différentes valeurs et conceptions de la vie bonne.505 À notre avis, les droits et libertés sont constitutifs d’une société libérale autonomiste, égalitaire et tolérante capable de respecter les impératifs de la moralité politique pluraliste.

Tout d’abord, la moralité politique pluraliste requiert de laisser libre cours aux différentes conceptions de la vie bonne et aux choix individuels, dans la mesure du possible. Selon Weinstock, les sociétés libérales seraient plus aptes à réaliser l’importance du pluralisme des valeurs contrairement à des sociétés aveugles à l’autonomie de l’individu et la diversité en résultant.506 Les sociétés libérales encouragent la possibilité de faire des choix entre différentes valeurs, contrairement à des sociétés plus traditionnelles ou conservatrices.

Le projet libéral de Berlin forme un mode d’organisation politique plus propice à la reconnaissance du pluralisme des valeurs. Effectivement, la reconnaissance du fait pluraliste

504 John Gray, Two Faces of Liberalism, supra note 32 à la p 72. 505 Infra ch 1, sect A.3.

requiert la possibilité pour l’individu de choisir entre différentes avenues.507 La liberté négative relève donc d’une importance accrue, car elle ouvre un plus grand champ de possibilités aux individus, par la reconnaissance d’un espace libre d’intervention extérieure.508 La liberté négative laisse donc libre cours à la réalisation de choix entre des biens en conflit perpétuel.

Cependant, bien que Berlin reconnaisse l’importance de la liberté négative et des prétentions du libéralisme, il ne se concerne pas d’une conception libérale substantielle. Comme le souligne John Gray, Berlin s’éloigne du libéralisme classique en refusant de se prononcer sur une structure singulière de la moralité.509 Au contraire, Berlin reconnaît les conflits inhérents de la liberté et l’absence d’un schème harmonieux. À notre avis, le libéralisme de Berlin s’entend davantage d’un effort structurel plutôt que substantif, visant à assurer la conciliation des différentes demandes morales reconnues par le pluralisme des valeurs.

Le pluralisme des valeurs serait en fait plus fidèlement encadré par un libéralisme caractérisé par une autonomie formelle. Dans cette mire, les droits et libertés seraient en fait des instruments essentiels afin d’assurer la poursuite de sa propre conception du bien par chacun. Les droits et libertés sont donc fondés sur le statut des agents moraux comme individus autonomes, bénéficiant d’une sphère de liberté exempte de l’interférence de l’État.510 Les droits représentent la somme des conditions pour que chacun soit libre de faire ses propres choix.511 Ainsi, le contenu indépendant dont sont porteurs les droits et libertés constituerait le cadre nécessaire assurant le respect du pluralisme.

De plus, le pluralisme des valeurs appelle à un certain degré d’égalité et d’impartialité dans la prise de décisions publiques afin d’éviter la priorisation d’une conception de la vie bonne particulière. Les sociétés pluralistes et multiculturelles doivent donc respecter l’égalité des agents

507 Daniel Weinstock, « Fausse route » supra note 9 à la p 194. 508 Isaiah Berlin, « Introduction » supra note 52 à la p 48. 509 John Gray, Two Faces of Liberalism, supra note 32 à la p 95. 510 Horacio Spector, supra note 474 à la p 829.

moraux.512 L’égale considération morale des personnes serait en fait le fondement de la légitimité du droit en tant qu’instance impartiale.

L’association des droits et libertés à l’égalité n’est certes pas nouvelle. Notamment, pour Dworkin l’égalité de considération et de respect pour chacun constitue le principe directeur de la moralité politique.513 Le contenu des droits constitutionnels bénéficierait d’un statut particulier en raison de leur lien particulier avec ce principe de dignité et d’égalité. 514 Les considérations mises de l’avant par le biais de l’interprétation des droits et libertés seraient ainsi justifiées, car elles serviraient le principe de l’égalité au fondement de la moralité politique défendue.

Cependant, les droits et libertés ne doivent pas se limiter à une théorie substantielle des droits fondée sur l’égalité sous peine de faire les frais de la critique pluraliste. L’égalité ne peut constituer la base de résolution de tous les conflits entre droits ou intérêts divergents. Effectivement, selon Joseph Raz, réduire la moralité politique à l’égalitarisme négligerait l’existence des différents biens au profit d’une simple allocation de ressources.515 Il souligne

notamment que la référence au principe égalitaire ne suffit pas à assouvir les différents intérêts de l’individu, qui peuvent reposer sur des valeurs incommensurables.

Il faut donc éviter d’imposer une théorie substantielle des droits fondée sur l’égalité. À ce propos, l’auteur François Du Bois souligne que l’égalité de respect et de considérations pour chacun restreint indûment le rôle des droits et libertés.516 L’auteur reconnaît l’importance de l’égalité, mais souligne que cette seule considération ne suffit pas à satisfaire les besoins d’une société pluraliste. L’auteur milite en faveur d’une conception des droits et libertés capable de reconnaître la diversité et la tolérance afin d’optimiser les intérêts de chacun.517 Les droits et libertés doivent certes considérer chacun comme des agents moraux égaux dans le processus décisionnel, mais en faveur du développement d’une société pluraliste et multiculturelle.

512 Luc B. Tremblay, «L’émergence d’un constitutionnalisme pluraliste» supra note 18 à la p 23. 513 Ronald Dworkin, Taking Rights Seriously, supra note 24 à la p 180.

514 Ibid à la p 205.

515 Joseph Raz, The Morality of Freedom, supra note 46 à la p 234. 516 François Du Bois, supra note 473 à la p 173.

Le pluralisme des valeurs appelle à une égale considération de chacun dans la prise de décision, plutôt qu’à une théorie substantielle des droits sur le fondement égalitaire. L’engagement des sociétés pluralistes envers l’égalité morale des personnes se traduit par l’abstention de l’imposition d’un paradigme donné. Il faut plutôt laisser place à la reconnaissance des conceptions subjectives des personnes aux prises avec une problématique légale.518 Selon l’auteur Luc B. Tremblay, le pluralisme des valeurs demande une opérationnalisation du principe de l’égalité morale, de manière à rendre compte des différentes considérations au sein du raisonnement légal. 519 Les sociétés pluralistes seraient ainsi mieux desservies par une interprétation des droits traitant chacun de manière impartiale avec considération et respect.

Enfin, le fait du pluralisme ne saurait être accommodé par la simple prétention autonomiste et égalitariste. Effectivement, le fait du pluralisme implique une politique de la diversité et de la tolérance. 520 La liberté de choix inhérente au discours pluraliste suppose la coexistence de

différentes conceptions du bien, et non l’imposition d’un modèle unique.521 L’adéquation de ces

philosophies libérales reconnaît l’importance des droits et libertés afin de consacrer l’importance tant des choix individuels que des manières de vivre non individuelles.522 L’organisation politique doit donc pouvoir accommoder la plus grande diversité possible, sujette à certaines contraintes.

Le libéralisme s’accommode plus facilement au pluralisme des valeurs, car il requiert une certaine tolérance de l’autre, soit l’abstention de causer du mal en raison des différences découlant du fait du pluralisme.523 Le projet libéral refuse l’imposition d’une conception particulière et supporte au contraire l’existence d’une structure capable d’accommoder différents groupes ou individus.524 Le libéralisme suppose un certain degré de tolérance vis-à-vis des conceptions de la vie bonne d’autrui. Il nous faut donc concevoir les droits et libertés comme des instruments capables d’accommoder la diversité.

518 Luc B. Tremblay, « Le principe de proportionnalité », supra note 288 à la p 462. 519 Ibid à la p 461.

520 George Crowder, supra note 15 à la p 138 ; William A. Galston, supra note 42 à la p 5. 521 William A. Galston, supra note 42 à la p 20.

522 Ibid à la p 126.

523 Joseph Raz, The Morality of Freedom, supra note 46 à la p 402. 524 William A. Galston, supra note 42 aux pp 119 et 126.

Cependant, il faut se garder d’encourager la diversité de toutes formes de vie et de valeurs sans prendre en compte leur rencontre potentielle. Cette diversité doit s’accomplir de manière à ce que la poursuite en parallèle de ces différentes valeurs soit possible. Pour ce faire, un certain degré de cohérence est nécessaire afin d’assurer la présence de différentes conceptions du bien dans une même société.525 Effectivement, un complet laissez-faire de modes de vie hétérogènes sans mesure d’encadrement donnerait lieu à des collisions dangereuses pour le tissu social.

L’institutionnalisation du contenu moral des droits et libertés aurait également pour objet de concevoir un cadre conceptuel capable d’accommoder la diversité des modes de vie. Effectivement, les droits et libertés créent l’espace adéquat afin de permettre la poursuite d’une multitude de valeurs et de conceptions de la vie bonne, mais plus encore, ils établissent les frontières auxquelles doivent faire face ces conceptions.526 Les droits et libertés offrent donc un

cadre adéquat au développement cohérent de ces différentes manières de vivre.527 L’absence

d’un tel cadre aurait pour effet de laisser libre cours à des conceptions conflictuelles dont les rencontres pourraient mener à des conflits coûteux pour le tissu social. Ainsi, dans les affaires publiques il peut être justifié d’importer une certaine cohérence dans le processus décisionnel par le biais des droits individuels.

Afin d’illustrer notre point, il nous faut souligner que le pluralisme constitue une considération importante et une préoccupation demeure omniprésente dans la jurisprudence canadienne.528 L’exemple le plus flagrant de cette évolution pluraliste de l’interprétation constitutionnelle se retrouve certainement dans l’interprétation de la liberté de conscience et de religion.529 Effectivement, l’interprétation des tribunaux en matière de liberté de religion semble répondre à

525 George Crowder, supra note 15 aux pp 138 à 140; John Gray, Two Faces of Liberalism, supra note 32 à la p 138.

526 George Crowder, supra note 15 à la p 154. 527 Ibid à la p 146.

528 La liberté d’expression fait également grande cas du caractère pluraliste de la société et de la diversité des opinions, tel que le souligne la Cour suprême : Irwin Toy Ltd c Québec (PG), [1989] 1 RCS 927 à la 927 [Irwin Toy Ltd].

529 Chamberlain c Surrey School District No. 36, [2002] 4 RCS 710 au para 128; Université Trinity Western c British Columbia College of Teachers, [2001] 1 RCS 772 au para 13.

une moralité politique intrinsèquement pluraliste, défendant non seulement l’autonomie individuelle, mais également l’égale considération des croyances et leur tolérance.

Dès les premières années de la Charte, la Cour suprême s’est penchée sur la liberté de religion dans le cadre de l’arrêt Big M Drug Mart susmentionné, affirmant que cette liberté était fondée sur l’autonomie individuelle, soit la liberté d’avoir et de manifester les croyances et les opinions dictées par sa conscience, dans les limites de la liberté d’autrui.530 L’intimée dans ce pourvoi faisait valoir que la Loi sur le dimanche violait la liberté de religion en forçant la fermeture de son entreprise pour le sabbat chrétien.531 La Cour est d’avis que la liberté de religion comprend le droit de ne pas être soumis à l’observance religieuse puisque la Charte reconnaît à chacun le droit de déterminer ses obligations religieuses et refuse à l’état le pouvoir de prescrire de telles obligations.532 Ainsi, dans les premières années de la Charte, la Cour semblait consacrer une protection à l’autonomie individuelle en raison des croyances sincères des individus.533 La

défense de l’autonomie individuelle s’entend certainement d’un projet à caractère pluraliste.

La Cour suprême ne s’est cependant pas arrêtée à la reconnaissance d’une autonomie individuelle et s’est prononcée également sur le degré de tolérance requis par la liberté de religion. Dans l’arrêt L. (S.) c Commission scolaire des Chênes534, les appelants contestaient la décision de la commission scolaire de refuser une exemption d’un cours sur l’éthique et la culture religieuse (« ÉCR ») aux enfants d’un groupe religieux catholique. Les appelants soutenaient que l’approche relativiste dudit cours entrait en conflit avec leur obligation morale de transmettre leur foi à leurs enfants.535 La Cour souligne que pour établir une atteinte à la liberté de religion, il faut que soit démontrée une croyance sincère d’une pratique particulière en lien avec la religion selon un critère subjectif, mais également l’existence objective d’un acte entravant la liberté de religion.536

530 Big M Drug Mart, supra note 339 au para 123. 531 Ibid au para 124.

532 Ibid auxpara 135.

533 Richard Moon, « Freedom of Conscience and Religion » dans Errol Mendes & Stéphane Beaulac, dir, supra note 17, 339 à la p 340.

534 [2012] 1 RCS 235 [L. (S.)] 535 Ibid au para 29.

La Cour reconnaît la croyance sincère des appelants à l’obligation de transmettre leur foi en la religion catholique, mais ne conclut pas le cours de ÉCR constituait une entrave à une telle pratique.537 Les appelants arguaient que le programme du cours n’était pas neutre en soi, mais plutôt relativiste, car il enseignait aux élèves que toutes les religions étaient égales.538 L’examen du programme par la Cour révèle que ce dernier était neutre, car il ne favorisait ou ne défavorisait aucune conviction ou vision particulière de la religion et qu’il n’y avait donc pas d’atteinte objective à la croyance religieuse des appelants.539 L’approche de la Cour suprême en la matière s’entend d’un appel à l’égalité et la tolérance, que la Cour exprime dans les termes suivants : « respecter toutes les positions à l’égard de la religion, y compris celle de n’en avoir aucune, tout en prenant en considération les droits constitutionnels concurrents des personnes affectées »540.

Les appelants ont également soutenu que l’exposition à la pluralité des religions pourrait nuire au développement de l’enfant.541 La Cour suprême reprend à ce propos les termes de la juge

McLachlin dans l’arrêt Chamberlain c Surrey School District No. 36542 sur l’hétérogénéité et la

diversité de la société. Selon la Cour, les dissonances cognitives font partie du développement de l’enfant et de l’apprentissage de la tolérance, soit le respect des droits et valeurs d’autrui.543 La Cour poursuit en indiquant que la pluralité des croyances demeure un fait social propre au multiculturalisme canadien.544 Ainsi, la Cour conclut que le programme ne porte pas atteinte à la liberté de religion des appelants. Les enseignements de la Cour suprême en la matière illustrent donc bien l’importance du pluralisme des valeurs et des conceptions de la vie bonne, mais également les impératifs de tolérance et de respect face à la diversité.

Les arrêts Big M Drug Mart, L. (S.) et Chamberlain font ainsi montre de la moralité politique pluraliste sous-jacente à l’interprétation des droits et libertés. En effet, la jurisprudence montre une approche fondée sur la liberté et l’autonomie, mais également une sur l’égalité et 537 Ibid au para 26 et 27. 538 Ibid au para 28. 539 Ibid au para 37. 540 Ibid au para 32. 541 Ibid au para 38. 542 [2002] 4 RCS 710 [Chamberlain] 543 Ibid, au para 65 et 66.

l’impartialité.545 À notre avis, ces deux approches permettent de démontrer que l’interprétation de la Charte reconnaît le caractère diversifié de la société et la nécessité de respecter l’autonomie et de favoriser la tolérance. L’interprétation constitutionnelle des droits et libertés serait donc un moyen d’assurer l’accommodation du fait pluraliste.

En conclusion, l’interprétation légale informée par la moralité doit donc refléter les ramifications politiques du fait pluraliste. Tel que mentionné plus tôt, la moralité politique, fière des acquis du pluralisme, requiert le respect de la diversité des conceptions de la vie bonne et le respect de la sphère d’autonomie des individus. Il n’en résulte pas une conception subjective de la morale politique, mais bien la reconnaissance d’une pluralité de principes et de valeurs à mettre en balance. Dans cette optique, l’interprétation légale doit se révéler un instrument flexible capable de permettre la réalisation de différentes conceptions de la vie bonne, ainsi que leur conciliation.