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Robin Buckle, directeur des programmes des sciences au Medical Research Council (MRC). Le MRC est le principe organisme de recherche

médicale au Royaume-Uni. Trois agences de régulation coexistent: la Human Fertilisation and Embryology Authority (HFEA); la Human Tissue Authority (HTA) et la Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency (MHRA)

La réglementation au Royaume-Uni interdit d’entreprendre des modifications des cellules germinales. Il est important, d’un point de vue scientifique, de faire la distinction entre l’utilisation des gamètes modifiés, qui mène à l’embryon, et la modification des cellules somatiques.

Par exemple, la recherche en Chine pourrait mener à l’utilisation de cellules qui pourraient être modifiées puis transplantées sur des embryons. Au Royaume-Uni, à moins qu’il n’y ait un changement dans la législation, cela est interdit.

Donc, si la science atteint un niveau de maturité suffisant, un débat pourrait naître au sein de la société britannique et si cette dernière devient prête, elle pourrait soumettre ce sujet au parlement. Dès lors, on pourrait examiner la question. Pour cela, il faudra d’abord que la technologie CRISPR-Cas9 ait fait ses preuves en ce qui concerne les exigences de sûreté et d’efficacité sur le plan clinique.

Sur toutes ces questions (cellules souches, transfert mitochondrial…), il y a eu une communication très étroite entre les scientifiques, la société et le monde politique pour arriver à des décisions ou à des autorisations.

Récemment, une autorisation de recherche a été délivrée à l’Institut Francis Crick pour utiliser la nouvelle technique de la modification ciblée du génome (genome editing) dénommée CRISPR-Cas9. L’étude portera sur les changements lors de la toute première étape de la fertilisation.

Notre législation permet que des recherches spécifiques sur l’embryon soient autorisées grâce à une autorisation spéciale et pour une durée de vie maximum de l’embryon de quatorze jours. Au-delà de ces quatorze jours, cela n’est plus possible et, en l’espèce, le maximum est fixé à sept jours.

Dans les déclarations du MRC pour clarifier la recherche en cours, il est dit que les voies qui existent actuellement au Royaume-Uni sont assez robustes pour pouvoir permettre les recherches sur l’embryon.

Cette technologie CRISPR-Cas9 est prometteuse pour les cellules somatiques, donc sur le recours aux cellules adultes. Je pense que les conséquences sur le plan clinique se font déjà ressentir, néanmoins il n’existe pas de problèmes juridiques puisqu’il s’agit de travaux de la Human Fertilisation and Embryology Authority (HFEA).

Avec les différentes agences régulatrices dans ce domaine, nous avons mené une consultation qui a débouché sur le changement de la législation en 2008.

Cette dernière a mené la voie vers la fertilité de l’embryon. En amont, il y a eu une consultation de près de six mois dans les régions, écoles et média ce qui a permis de tester l’opinion du public et de produire différents rapports. L’exercice fut concluant.

Le groupe Hinxton a discuté de la question de la modification ciblée du génome (genome editing), il y a un an de cela, et a publié une déclaration rassemblant l’avis de cliniciens, d’experts sociaux, etc. (Consensus statement on genome editing technologies and human germline genetic modification, 3-4 septembre 2015). Au sein de ce groupe, il n’y avait pas qu’un seul avis, mais une multitude. Il ne faut pas exclure le débat de cette question.

En effet le fait de traiter une maladie qui est causée par un seul gène et provoque une mort prématurée est accepté par un grand nombre de chercheur, mais pas par tous. Certains accepteront le recours à un guidage génétique (gene

drive) pour éradiquer certaines maladies dont les moustiques sont porteurs, tandis que d’autres chercheurs refuseront.

En ce qui concerne la modification de certaines caractéristiques chez l’homme grâce à de telles technologies, je pense que cela ne serait pas acceptable, mais il est important que la société puisse se faire un avis à la lumière de ce que la technologie est en mesure de faire.

Face aux capacités de cette technologie, la question de savoir si elle aura des conséquences pour les diagnostics préimplantatoires (DPI) parait alors secondaire.

Les effets hors cibles de CRISPR-Cas9 seront surmontés par des recherches très approfondies et détaillées dans le milieu thérapeutique basé sur les cellules somatiques, tout en continuant en parallèle les travaux sur le milieu germinal. À cette fin, le MRC soutient toutes ces recherches. Néanmoins pour le moment, il n’y a pas encore de controverse sur l’utilisation des techniques évoquées.

La technologie génétique génère des positions très diversifiées. Mais CRISPR-Cas9 ne constitue pas vraiment un nouveau départ, malgré le fait qu’il y ait des essais en cours concernant la thérapie basée sur la technique CRISPR-Cas9 qu’on ne pourrait pas faire sans cela sur la lignée germinale. C’est une technologie qui rend plus accessible une certaine technique à un grand nombre de chercheur, c’est ce point-là qui provoquera une discussion. Cependant, à partir des années 1980, avec la thérapie génique, un débat s’était ouvert et qui demeure similaire au débat actuel.

À l’avenir, la société devra avoir un débat, réfléchir sur cette question.

Aux États-Unis, ou même au Royaume-Uni, il existe des bons systèmes règlementaires, mais ces systèmes ne fonctionneraient pas nécessairement bien dans d’autres pays. Le système américain est totalement différent du système britannique et ne serait pas adapté à notre pays. Il faudra alors voir ce qui est applicable et bon selon chaque pays.

La technologie CRISPR-Cas9 présente des avantages. En effet elle permettra le contrôle des OGM et leur libération dans la nature. En outre, la modification ciblée du génome (genome editing) est possible déjà en ce qui concerne les moustiques, mais grâce à CRISPR-Cas9 comme je l’ai déjà évoqué, il sera possible de réduire leur nuisibilité dans l’environnement.

Cependant une difficulté se présentera pour la détection des modifications.

Tout dépendra de leur ampleur, une seule modification sera difficile à détecter, de plus il existe des modifications naturelles du génome qu’il faudra alors distinguer des autres. La technique CRISPR-Cas9 permet d’accélérer ce que la nature fait.

Mais si ça n’a jamais existé naturellement, c’est différent, la détection sera alors unique.

Je crois que les agences de financement, publiques comme les privées, sont d’accord pour dire qu’il doit y avoir la possibilité, d’une manière ou d’une autre, d’assurer la traçabilité des produits modifiés de cette façon, grâce une réglementation. Pour un produit commercial, il sera difficile de l’imaginer de manière visible, puisque si c’est une utilisation nuisible biologique, elle pourrait ne pas être détectable.

Commercialement, qu’il s’agisse d’agriculture ou d’utilisation clinique, la technologie rend les interventions moins chères, plus efficaces et plus ciblée ; c’est alors perçu comme un examen de dépistage. C’est pour toutes ces raisons que tous les laboratoires peuvent utiliser CRISPR-Cas9, c’est devenu accessible, et cela a également rendu le processus de commercialisation moins couteux.

Cependant d’autres techniques verront le jour, CRISPR-Cas9 n’est pas un point final. Il s’agit d’une des techniques de modification ciblée du génome (genome editing) parmi d’autres. C’est pourquoi, comme je l’ai déjà évoqué, CRISPR-Cas9 ne nécessite pas une modification de la réglementation, tout comme les autres techniques.

Au Royaume-Uni, le domaine des sciences de la vie est très réactif, si une bonne idée apparaît, s’il est jugé utile de faire de la recherche à ce sujet, on obtient alors des financements, la plupart des mécénats fonctionnent ainsi. Il peut alors y avoir des financements ciblés.

De manière générale, tant que les propositions de recherche s’adaptent à l’éthique générale, quelque chose qui n’avait pas été fait auparavant peut obtenir un financement.

Le MRC finance pour deux tiers des recherches précliniques et une grande majorité des recherches qui seront financées au cours des cinq prochaines années utiliseront CRISPR-Cas9 en laboratoire. Cet outil est appelé à se généraliser.

Mme Sophia Abassi, directeur des programmes au Biotechnology and Biological Science Research Council (BBSRC). Le BBSRC est le deuxième organisme de recherche du Royaume-Uni, il est financé de la même façon que le MRC. Le BBSRC soutient recherche non médicale qui touche à la science du vivant incluant le végétal, l’animal. L’édition du génome intéresse le BBSRC pour une application sur l’animal ou le végétal, un peu sur l’humain, mais seulement si cela peut aider dans les recherches sur l’animal ou le végétal.

Pour les plantes et les animaux, le BBSRC finance des recherches sur CRISPR-Cas9, en particulier la recherche fondamentale.

Depuis la découverte de cette technologie, on se demande comment on va recourir à cet outil dans un cadre de recherche, afin de mieux comprendre la biologie fondamentale pour les animaux. En effet, pour les animaux, une autre technique de modification ciblée du génome (genome editing) est déjà utilisée : TALEN. Elle a permis de créer le « cochon 26 ».

Cependant, TALEN est aujourd’hui dépassé face à la technologie CRISPR-Cas9, et on pense utiliser cette dernière afin d’éradiquer la maladie africaine des cochons. On pense aussi utiliser CRISPR-Cas9 dans le cadre de la reproduction des animaux pour améliorer certaines caractéristiques des animaux.

Pour les animaux, il faut tenir compte de leur bien-être et de tous les aspects déontologiques en ce qui concerne leur utilisation à des fins de recherches ou d’agriculture.

Cependant je ne pense pas que la technologie CRISPR-Cas9 soit une technologie vraiment nouvelle, mais qu’il s’agit plutôt d’une modification.

Le Royaume-Uni a actuellement le meilleur système règlementaire en Europe concernant l’utilisation de ces technologies. On se préoccupe du processus utilisé pour un certain produit et on ne se focalise pas sur le produit lui-même, ses qualités, ses caractéristiques, etc. Il s’agit surtout d’une question de sécurité.

Concernant les OGM, la réglementation européenne pose problème.

Cependant les problèmes d’éthiques posés suite à l’édition génomique ne sont pas réellement nouveaux. Mais il est vrai qu’il y aura des conséquences pour les animaux et les plantes, parce que l’édition génomique va peut-être devenir très ciblée et difficile à identifier par la suite. Il faudra peut-être étiqueter les produits modifiés grâce à ces technologies, pour le consommateur.

Le BBSRC bénéficie de financements spéciaux pour le développement de la technologie. Il serait donc possible, par exemple, de financer l’adaptation de CRISPR-Cas9 au niveau moléculaire pour le rendre plus utilisable à ce niveau.

Cependant le BBSRC ne financerait pas un projet seulement parce qu’il utilise CRISPR-Cas9.

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M. Peter Border, Parliamentary Office for Science and Technology

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