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Diffusion de Metropolis et diffusion activ´ee

De nombreuses ´etudes (par exemple [72, 164] et r´ef´erences incluses) ont d´emon-tr´e que l’´emergence de motifs spatiotemporels complexes est particuli`erement sen-sible au choix du m´ecanisme de diffusion et, en particulier, `a l’influence des in-teractions lat´erales sur ce processus. Dans le cas pr´esent, puisque notre approche ´etait principalement illustrative, nous avons eu recours au cas (plus simple) d’une diffusion du type Metropolis, qui engendre des coefficients de diffusion constants. N´eanmoins, si nous d´esirons ´etendre ce type d’´etudes `a des syst`emes plus com-plexes et r´ealistes, nous devrions prendre en compte le fait qu’il existe de plus en plus de r´esultats exp´erimentaux indiquant que la diffusion de surface est un processus activ´e. Dans un tel cas, nous savons que la probabilit´e de saut fait inter-venir un facteur du type «Arrh´enius» kRR0

diff exp (−βU(R)) o`u ∆U(R) est la diff´erence d’´energie entre l’´etat activ´e et l’´etat initial de la particule effectuant la transition. Ceci engendre dans la limite continue des coefficients de diffusion

D(r) = D0eβ U(r) o`u U(r) est le potentiel d’interaction que subissent les parti-cules en diffusion (voir Chapitre 3, section 3). Dans le cas du mod`ele consid´er´e ici, les ´equations d’´evolution pour les recouvrements doivent ˆetre modifi´ees en

cons´equence : . θA = PA(1−θA)−ν0ew θCθAθB+D0 A∇ £eβ U(r)∇θA¤ +β D0 A∇ £eβ U(r)θA(1−θA)∇U(r)¤ (6.28) . θB = PB(1−θB)−ν0ew θAθB+DB2θB (6.29) . θC = D0C£eβ V(r)∇θC ¤ +β DC0 £eβ V(r)θC(1−θC)∇V(r)¤ (6.30) o`u tous les autres param`etres ont la mˆeme signification que pr´ec´edemment.

La stabilit´e lin´eaire des ´etats stationnaires (inchang´es) homog`enes (a, b, c) par rapport `a des perturbations spatiotemporelles est `a pr´esent modifi´ee par la d´ependance deDA, DC en les recouvrements. Si nous effectuons une analyse com-parable `a celle de la section 6.3, nous obtenons une matrice de lin´earisation ayant exactement la mˆeme forme, mais o`u DA et DC sont remplac´es, respectivement, par D0

A exp (−u0c) etD0

C exp (−u0a). Toutes les autres contributions provenant de la d´ependance spatiale des coefficients de diffusion r´esultent en effet en des termes non-lin´eaires. En cons´equence, le syst`eme pr´esentant une diffusion activ´ee est lui aussi caract´eris´e par la pr´esence (potentielle) d’une bifurcation de Turing lorsque ε2

c 1/[a(1−a)c(1−c)] : le m´ecanisme de diffusion ne modifie pas la localisation du point de bifurcation (a et c ne d´ependent pas des coefficients de diffusion), tout du moins dans la limite r0 ¿ 1. Par contre, la longueur d’onde critique λc2πpr0rArr

cin est diff´erente puisque nous avons (pour w= 0)

rcinArr = s

D0 Ae−u0c

2 (PA+ν0 b). (6.31) Une diff´erence marquante par rapport au cas de la diffusion de Metropolis est que, dans le cas d’un m´ecanisme du type Arrh´enius, la p´eriodicit´e des motifs form´es d´epend explicitement et fortement (de mani`ere exponentielle) du poten-tiel d’interaction. La longueur d’onde du premier mode instable est par exemple ind´ependante de u0 pour une diffusion de Metropolis, tandis que pour la diffusion activ´ee, les structures form´ees par des interactions attractives sont plus petites que celles form´ees en pr´esence de r´epulsion.

Toutes ces tendances ont ´et´e confirm´ees par int´egration num´erique des ´eqs. (6.28)-(6.30). Dans les Figures 6.11a et b par exemple, nous avons port´e les mo-tifs obtenus pour le cas sp´ecifique w = 0 pour une dynamique de Metropolis et d’Arrh´enius, avec des interactions attractives et r´epulsives respectivement. Nous pouvons observer que la longueur d’onde dans le cas de la diffusion activ´ee est effectivement plus petite que celle obtenue pour une diffusion non-activ´ee dans le cas d’interactions attractives (Figure 6.11a), tandis que la situation est invers´ee dans le cas d’interactions r´epulsives (Figure 6.11b). Les diff´erences entre ces

com-2 4 6 8 10 12 14 16 18 x 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 6 8 10 12 14 16 18 x 0 0,2 0,4 0,6 0,8 a b

Fig. 6.11. Recouvrement stationnaire pour le promoteurC dans le cas d’une diffusion du type Arrh´enius (courbes pleines) et du type Metropolis (courbes discontinues). Pour les deux figures, PA = 0,2, PB = 0,1, c = 0,3, r0 = 0,5, ν0 = 1 et w = 0. Pour a),

DA =D0

A = DB = D0

B = DC = D0

C = 10 et ε= 8, tandis que dans b), DA = D0 A =

DB=D0

B=DC =D0

C = 1 etε=8. Seule une fraction du syst`eme total (de taille 50) est montr´ee ici.

portements ´etant cons´equentes, nous ne pouvons que comprendre l’importance de la r´esolution exp´erimentale des m´ecanismes de diffusion.

Dans le cas de la r´eaction H2+O2 sur Rh (110) en pr´esence de potassium, il a ´et´e par exemple montr´e que la diffusion du potassium est un processus activ´e, tandis que l’influence du potentiel d’interaction sur la diffusion de H(ads) ou de O(ads) est en premi`ere approximation n´egligeable. En cons´equence, se basant sur un mod`ele av´er´e pour la r´eaction en absence de K(ads), des ´equations d’´evolution

«r´ealistes» peuvent dans ce cas ˆetre construites (voir [34] pour de plus amples d´etails) : . θH = ˜k1pH2(1−θH−α θO)2 +γk˜1pH2(1−θH)2−k3θ2 H 2k5θOθH+DH2θH (6.32) . θO = ˜k2pO2(1−θH−θO)2−k4θO2 −k5θOθH +DO2θO (6.33) . θK = (DKθK)− ∇ [β DKθK(1−θK)Eb∇θO] (6.34) Les deux premi`eres ´equations contiennent les ´etapes ´el´ementaires du m´ecanisme de Langmuir-Hinshelwood de la r´eaction, i. e. l’adsorption dissociative d’H2 sur des sites actifs ( ˜k1) et sur des d´efauts (γk˜1), la d´esorption de H2 (k3), l’adsorp-tion (k2) et la d´esorption (k4) de l’oxyg`ene et la formation d’eau (k5). Le facteurα

tient compte du fait que le blocage de l’adsorption de l’hydrog`ene par l’oxyg`ene est plus important que celui de l’adsorption de O2par H(ads). Pour les deux premi`eres ´equations, il est aussi tenu compte du fait que la diffusion de ces esp`eces n’est pas influenc´ee par les interactions lat´erales. Pour le potassium,DK =D0

K exp(−β Ediff) avecEdiff =E0 diff+θO(E00 diff−E0 diff),E0 diff etE00

diff repr´esentant les ´energies de diffu-sion sur une surface exempte et compl`etement remplie d’oxyg`ene, respectivement. Cette approche correspond `a un m´ecanisme de diffusion du type Arrh´enius avec une d´ependance lin´eaire de l’´energie d’activation en θO. Ceci justifie d’ailleurs le remplacement de ∇Ediff par −Eb∇θO = (E0

diff −E00

diff)∇θO dans la troisi`eme ´equation. Finalement, notons que l’observation exp´erimentale selon laquelle le po-tassium diminue le coefficient de collage de H2 est introduite par ˜k1 =k1 exp−δθK

o`uδ est un param`etre ajustable. Tous les autres param`etres sont directement ac-cessibles `a l’exp´erience. Ce mod`ele, d´evelopp´e par Imbihl et al, permet de

repro-1.2 1.0 0.8 0.6 0.4 0.2 0.0 Coverage [ML] 400 300 200 100 0 Horizontal Position [µm] θK θO θH x 250

Fig. 6.12. Structures stationnaires obtenues par int´egration num´erique du mod`ele r´ealiste pour la r´eaction H2+O2 sur Rh (110) en pr´esence de K (voir texte). Pour ce r´esultat, pH2 = 2,2×106 mbar, pO2 = 2,0×106 mbar et T = 518 K. La condition initiale correspond `a θH= 0, θO = 0,2 et θK= 0,1. Les valeurs des autres param`etres entrant dans les ´equations d’´evolution peuvent ˆetre trouv´ees dans [34].

duire des motifs pr´esentant des tailles et des compositions tr`es proches de celles observ´ees dans les exp´eriences (voir Figure 6.12).

Les structures obtenues par int´egration du mod`ele r´ealiste d’Imbihl et al sont qualitativement du mˆeme type que celles pr´edites par le mod`ele simple que nous avons ´etudi´e dans ce chapitre. Nous pouvons donc esp´erer que ce dernier capte

les ´el´ements essentiels associ´es aux observations exp´erimentales. L’´etude de ce mod`ele sch´ematique permet de plus de mettre en ´evidence certaines sp´ecificit´es des structures loin de la bifurcation de Turing. Puisque les concentrations va-rient de mani`ere p´eriodique dans l’espace dans cette zone param´etrique, nous devons nous attendre `a ce qu’il en soit de mˆeme pour la mobilit´e des adsorbats. Dans le cas d’une diffusion de Metropolis, la mobilit´e est par exemple proportion-nelle `a D θ(1−θ), tandis que pour la diffusion activ´ee, elle se comporte comme

D0θ(1−θ) exp(β U). Or, loin du point de bifurcation, les profils de concentration sont tels qu’une alternance de zones de tr`es hautes et tr`es basses concentrations apparaˆıt (comme nous l’avons vu dans la section pr´ec´edente). A cause de cela, la mobilit´e des particules peut devenir localement tr`es faible, voire quasiment nulle ; cet effet est d’ailleurs particuli`erement fort dans le cas d’une dynamique activ´ee du type Arrh´enius, puisque la mobilit´e d´epend de fa¸con exponentielle de la compo-sition locale. Dans de telles circonstances, la validit´e mˆeme de l’approximation du champ moyen et des sites ind´ependants devient douteuse : un recours aux simu-lations pourrait alors s’av´erer indispensable. R´eservant cette possible ´etude pour un travail ult´erieur, nous allons maintenant r´esumer nos observations et en tirer les principales conclusions.