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Adsorption et d´esorption de monom`eres

3.2 Adsorption et d´esorption

3.2.1 Adsorption et d´esorption de monom`eres

o`u νads est la mol´ecularit´e de l’adsorption et θ la fraction de sites vides. Les r´esultats exp´erimentaux disponibles tendent aussi `a montrer que le coefficient de collage varie tr`es peu avec la temp´erature, en d’autres termes que l’adsorption est un processus qui n’est pas (ou tr`es faiblement) activ´e thermiquement. Pour ce qui est de la d´esorption par contre, la constante cin´etique associ´ee est le plus souvent estim´ee par le biais de l’´equation de Wigner-Polanyi

kdes(θ, T) =k0

des exp (−β Edes)

qui assimile la d´esorption `a un processus activ´e, d´ependant donc fortement de la temp´erature, dont la fr´equence fondamentale k0

des et l’´energie d’activation Edes

sont en g´en´eral fonctions de la composition de la surface.

D´eterminons `a pr´esent les probabilit´es de transition correspondant `a ces pro-cessus. Nous porterons tout d’abord notre attention sur l’adsorption mol´eculaire sous forme de monom`eres, puis sur l’adsorption dissociative sous forme de dim`eres, qui forment les situations les plus courantes en chimie physique des surfaces.

3.2.1 Adsorption et d´esorption de monom`eres

Consid´erons dans un premier temps l’adsorption mol´eculaire de particules d’une esp`ece A en phase gazeuse sur un site actif unique. Nous imposerons que l’adsorption ne peut avoir lieu que si la mol´ecule du gaz rencontre un site actif vide lors de sa collision avec la surface :

A(g) +­A(ads). (3.4)

Nous supposons ici que tous les sites actifs sont ´equivalents ; des situations plus complexes existent bien entendu et demandent des approches plus sophistiqu´ees [119, 121]. En adoptant ce point de vue, nous tenons compte de l’imp´en´etrabilit´e des mol´ecules, mais n´egligeons le rˆole d’´etats pr´ecurseurs et la possibilit´e de forma-tion de multicouches ainsi que tout m´ecanisme du type«adsorption chaude»[11, 118]. La probabilit´e d’adsorption prend donc la forme g´en´erale

wadsR (n n0, t) =kRadsn∗(R, t) (3.5) o`u kads repr´esente la probabilit´e par unit´e de temps qu’une collision entre une particule A en phase gazeuse et le site actif consid´er´e soit efficace, c’est-`a-dire qu’elle m`ene effectivement `a une adsorption. Cette grandeur d´epend en g´en´eral de

la configuration microscopique de la surface. La probabilit´e de d´esorption, quant `a elle, peut ˆetre mod´elis´ee comme

wR

des(nn0, t) =kR

desnA(R, t). (3.6) Dans cette ´equation,kdes est indicateur de la probabilit´e par unit´e de temps que le lien entre le site actif et la mol´ecule adsorb´ee se brise, qui peut elle aussi d´ependre de la configuration.

Pour pouvoir poser correctement le probl`eme et d´eriver des ´equations d’´evolu-tion de l’´equad’´evolu-tion maˆıtresse, il nous faut encore d´eterminer la forme explicite des constantes kads et kdes, en particulier leur d´ependance en la configuration superficielle 2. Comme nous l’avons mentionn´e pr´ec´edemment, nous utiliserons pour nous aider dans cette tˆache la contrainte du bilan d´etaill´e. Celle-ci nous impose pour le ph´enom`ene concern´e la condition

wR

ads(n n0,´eq)

wR

des(n0 n,´eq) = exp [−β(H(n

0)−H(n))] exp [β(µ(n0)−µ(n))] (3.7) avec n = nA(1)... nA(R) = 0...nA(N0) et n0 = nA(1)... nA(R) = 1...nA(N0). L’Hamiltonien d’une configuration n donn´ee est la somme des contributions in-ternes des particules adsorb´ees et des termes d’interactions interparticulaires. De mani`ere g´en´erale, nous pouvons ´ecrire

H(n) =X

R

uAnA(R) + X

R,R0

uAA(R0−R) nA(R)nA(R0) +...

o`u uA est l’´energie par particule adsorb´ee et uAA est le potentiel d’interaction de paire (les interactions triples peuvent ˆetre ais´ement incorpor´ees dans cette ´ecriture). Notons que uA contient des contributions li´ees aux degr´es de libert´e internes de l’adsorbat par le biais de la fonction de partition des mol´ecules ad-sorb´ees. Au vu de cette forme de l’Hamiltonien, il vient que

H(n0)−H(n) = uA+X

R0

uAA(R0−R)nα(R0) +...≡UA(R).

La diff´erence de potentiel chimique peut, elle aussi, ˆetre estim´ee :

µ(n0)−µ(n) = µA(R)−µ(R) = µA(g)

puisque nous sommes `a l’´equilibre et o`u, selon la m´ecanique statistique

µA(g) =kBT ln µ

NAλ3ξg V

2Notons que dans le cas de l’adsorption-d´esorption de monom`eres, il est possible d’obtenir

dans certaines situations une forme explicite des probabilit´es de transition `a partir des ´equations fondamentales de la m´ecanique quantique [148].

avecNA le nombre de particulesA en phase gazeuse, V le volume de cette mˆeme phase, λ = h/(2πmAkBT)(1/2) la longueur thermique et ξg la fonction de parti-tion interne de la particule en phase gazeuse. Finalement, nous obtenons pour la condition de bilan d´etaill´e que

kR ads kR des =ξg pAλ3 kBT e −β UA(R) (3.8)

Remarquons que cette condition particuli`ere, comme nous pouvions nous y at-tendre, ne nous fournit pas la forme absolue des probabilit´es de transition mais seulement leur rapport `a l’´equilibre.

Comme sugg´er´e plus tˆot, la forme explicite des probabilit´es de transition peut ˆetre obtenue en identifiant la dynamique stochastique macroscopique aux lois em-piriques correspondantes. Au vu des probabilit´es de transition, l’´evolution de l’oc-cupation moyenne locale est donn´ee par

d

dt hnA(R, t)i= ­

kadsR n∗(R, t)®­kdesR nA(R, t)®. (3.9) D’un autre cˆot´e, pour une adsorption-d´esorption du type «Langmuir» d’un mo-nom`ere, il vient selon l’´equation (3.3) que le recouvrement suit une loi d’´evolution du type d dtθA(t) =pA a 2π mAkBT S 0 (t)−k0 dese−β EdesθA(t). (3.10) Si nous imposons que les ´eqs. (3.9) et (3.10) deviennent ´equivalentes dans la limite d’un syst`eme bien m´elang´e, il vient finalement que

kR ads = pA a 2π mAkBT S 0 A≡k0 adspA (3.11) kdesR = SA0 kBT a λ3ξg2π mAkBT e −β Edes(R)≡kdes0 eβ UA(R). (3.12)

Nous avons utilis´e dans ces relations le fait que, si l’adsorption n’est pas activ´ee,

Edes = −UA. Notons bien que le bilan d´etaill´e a pour cons´equence que les fac-teurs cin´etiques des probabilit´es de transition sont inter-d´ependants. Ainsi, le fait que nous consid´erons un coefficient de collage proportionnel au site vide a pour cons´equence que le facteur pr´e-exponentielk0

desest ind´ependant de la configuration superficielle.

Malgr´e l’ind´ependance de k0

ads et k0

des en la composition de la surface, les ´equations d’´evolution g´en´er´ees pour les moments ne sont en g´en´eral pas solubles exactement. Ceci est dˆu `a la pr´esence de corr´elations entre les particules, induites

par le terme exponentiel d’interaction. Ainsi, pour l’occupation locale moyenne, nous avons dans le cas d’interactions paires :

d dt hnA(R, t)i = k 0 adspA(1− hnA(R, t)i)−k0 des ­ eβ UA(R)nA(R, t)® = kads0 pA(1− hnA(R, t)i) −k0 deseβ uA * nA(R)Y R0 h 1 + (eβ uAA(R0−R)1)nA(R0)i + . (3.13) Cette ´equation fait intervenir des probabilit´es d’occupation multiples, telles que

hnA(R)nA(R0)i, pond´er´ees par la valeur du potentiel uAA et dont les ´evolutions font elles-mˆemes intervenir des triplets, et ainsi de suite pour les moments d’ordre sup´erieur, de sorte qu’il n’existe pas de solution g´en´erale connue pour l’´eq. (3.13). Dans ces conditions, il est illustratif de consid´erer certaines situations limites trai-tables analytiquement.

Adsorption et d´esorption dans un syst`eme id´eal

Consid´erons tout d’abord le cas d’un adsorbat tr`es dilu´e, ou pr´esentant de tr`es faibles interactions. Dans les deux situations, le terme exponentiel prenant en compte les interactions lat´erales tend vers une constante, de sorte que les probabilit´es de transition sont donn´ees respectivement par wR

ads(n n0, t) =

k0

adspA(1 −nA(R)) et wR

des(n n0, t) = kdesnA(R) o`u kdes = k0

des exp(β uA). Cette forme simple a pour principale cons´equence une ind´ependance statistique entre les sites, puisque les probabilit´es de transition locales ne d´ependent pas du reste de la configuration superficielle. Nous pouvons dans une telle situation faci-lement r´esoudre l’´equation locale (3.13) :

hnA(R, t)i= k 0 adspA k0 adspA+kdes · k0 adspA k0 adspA+kdes − hnA(R,0)i ¸ e−(k0 adspA+kdes)t.

Celle-ci met en ´evidence que les ´evolutions des probabilit´es d’occupation des diff´erents sites sont ind´ependantes. Ceci nous permet de tirer facilement des conclu-sions quant aux propri´et´es statistiques associ´ees au recouvrement global θA dans le cas d’un remplissage al´eatoire initial. En effet, il nous est dans ce cas permis de factoriser la probabilit´e d’avoir NA particules adsorb´ees en probabilit´es d’occupa-tions locales :

P(NA, t) = P(θA, t) = N0!

NA! (N0−NA)! hnA(t)i

o`u nous avons utilis´e l’invariance par translation hnA(R, t)i=hnA(t)iet o`uNA=

θAN0. Le facteur combinatoire tient compte du nombre d’arrangements possibles deNA particules adsorb´ees surN0 sites actifs.

Connaissant explicitement la distribution de probabilit´e pour le recouvrement en tout temps, il nous est possible d’extraire l’´evolution temporelle des diff´erents moments associ´es `a la variable stochastique θA, nous permettant de caract´eriser le comportement macroscopique du syst`eme. Ainsi, le recouvrement moyen est ind´ependant de la taille du syst`eme et ´evolue selonA(t)i=hnA(t)i,tendant vers un ´etat stationnaire (qui est aussi l’´etat d’´equilibre) connu sous le nom d’isotherme de Langmuir (voir aussi Figure 3.1) :

A(´eq.)i= k0adspA k0 adspA+kdes = K pA 1 +K pA. (3.15) o`uK =k0

ads/kdes. Quelques exemples d’isothermes de ce type sont donn´es dans la Figure 3.1. L’isotherme de Langmuir nous indique que l’occupation moyenne de la surface croˆıt avec la pression de la phase gazeuse environnante : cette croissance est lin´eaire pour de faibles pressions et sature pour des pressions plus ´elev´ees puisque le mod`ele ne consid`ere pas la possibilit´e de couches multiples. L’expression (3.15) forme encore souvent, malgr´e la force des hypoth`eses qui la sous-tendent, une bonne base pour l’analyse des isothermes exp´erimentaux, dont les valeurs de k0

ads etkdes peuvent ˆetre extraites.

0 10 20 30 40 pA 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 θA(eq.)>

Fig. 3.1. Quelques exemples d’isothermes de Langmuir obtenus pour K = 1 (courbe pleine), 0,2 (courbe pointill´ee) et 0,01 (courbe discontinue), respectivement, correspon-dant `a des temp´eratures de plus en plus ´elev´ees.

noter que la variance associ´ee ­ θ2 A(t)®− hθA(t)i2 = 1 N0 £ A(t)i − hθA(t)i2¤,

repr´esentative de l’amplitude des fluctuations autour de cette moyenne, d´ecroˆıt avec le nombre de sites actifs. Puisque ce syst`eme ne pr´esente aucune criticalit´e, la limite macroscopique d´eterministe, caract´eris´ee par l’absence de fluctuations, est atteinte lorsque N0 → ∞. L’approche de la limite macroscopique se ressent non seulement au niveau de l’amplitude des fluctuations, mais aussi au niveau de la distribution de probabilit´e totale. Dans la limite de N0 grand, il faut en effet noter que la distribution binomiale (3.14) peut s’approximer sous la forme

P(θA, t) = hnA(t)i NA

NA! e

hnA(t)i

c’est-`a-dire une Poissonienne. Si N0 → ∞, la distribution Poissonienne tend alors vers une Gaussienne, en accord avec le th´eor`eme central limite. Cette gradation progressive de la distribution est int´eressante dans le sens o`u, bien souvent, la dy-namique stochastique des syst`emes fluctuants est analys´ee sur base d’une ´equation de Langevin consid`erant que la cin´etique d´eterministe est perturb´ee par des fluc-tuations distribu´ees de mani`ere Gaussienne autour de la trajectoire moyenne. Dans le cas d’un syst`eme lin´eaire comme celui ´etudi´e ici, cette approche n’est semble-t-il valable que pour des syst`emes de grande taille et pourrait ˆetre g´en´eralis´ee en consid´erant une distribution Poissonienne ou binomiale des fluctuations.

Adsorption et d´esorption de particules en interaction

Bien que des r´esultats exacts peuvent ˆetre obtenus dans la limite des sph`eres dures, une description plus r´ealiste de l’adsorption et la d´esorption doit prendre en compte l’effet d’interactions lat´erales entre les adsorbats. A cause des corr´elations que ces interactions induisent, dans bien des situations seule l’approximation des sites ind´ependants est tenable d’un point de vue analytique [79, 120]. Si nous l’appliquons dans le cas d’un syst`eme pr´esentant des interactions de paire, il vient que, s’il y a invariance par translation (hnA(t)i=hθA(t)i),

d dt A(t)i = k 0 adspA(1− hθA(t)i)−k0 deseβhUAi A(t)i (3.16) o`u hUAi = uA+hnA(t)iX R0 uAA(R0R) uA+c u0 A(t)i. (3.17)

avec c la coordinance du r´eseau. Il est possible de mettre en ´evidence dans cette approximation un effet fondamental des interactions : la pr´esence potentielle d’une transition de phase.

En effet, l’´equation (3.16) peut admettre soit un seul ´etat stationnaire ho-mog`ene (`a haute temp´erature) soit trois ´etats si

T ≤Tc=c u0

4kB.

Ces trois ´etats distincts correspondent, pour une pression donn´ee, `a une une phase dilu´ee (gaz de surface) et une phase dense (liquide superficiel) stables, s´epar´ees par un ´etat interm´ediaire instable. En d’autres termes, un tel mod`ele de gaz sur r´eseau admet des transitions de phase de premier ordre en pr´esence d’interactions attractives (u0 <0). La pr´esence d’une telle transition influence bien entendu la physionomie des isothermes correspondants qui, en-de¸c`a de la temp´erature cri-tique, se caract´erisent par une discontinuit´e associ´ee `a la transition gaz-liquide (voir Figure 3.2). 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 <θA(eq.)> 0 0.5 1 1.5 pA

Fig. 3.2. Isothermes obtenus dans l’approximation des sites ind´ependants pour des adsorbats pr´esentant des interactions telles quec u0/kB =200. Les temp´eratures sont alors respectivement de 65 (courbe discontinue), 50 (courbe pointill´ee - il s’agit de la temp´erature critique) et 35 (courbe pleine).

Il faut noter toutefois que l’approximation du champ moyen est dans ce cas particuli`erement rude et n’est a priori valable que si les interactions s’´etendent sur des distances grandes par rapport `a la taille des adsorbats. Lorsque des interactions de courte port´ee existent, son domaine de validit´e s’en trouve fortement r´eduit : dans le cas d’interactions entre premiers voisins uniquement, cette approximation pr´evoit ainsi l’existence de transitions pour des syst`emes unidimensionnels alors

que la solution exacte obtenue par la m´ecanique statistique d’´equilibre et les simu-lations r´ev`elent que ceci est impossible. De mˆeme, `a deux ou trois dimensions, les pr´evisions dans cette approximation sont qualitativement correctes, mais quantita-tivement faibles. Ce n’est qu’au-del`a d’une dimension spatiale critique de 4 que le champ moyen offre des r´esultats pleinement satisfaisants dans le cas d’interactions entre premiers voisins.

Ces limites du champ moyen peuvent se r´ev´eler d’une importance primordiale pour les r´eactions de surface, puisque souvent les interactions lat´erales y sont de courte port´ee. Des arrangements complexes d’adsorbats en phases ordonn´ees ont d’ailleurs souvent ´et´e observ´es et peuvent ˆetre attribu´es `a de telles interactions. L’´etude de la structure et de la formation de ces phases forme d´esormais un do-maine de recherche `a part enti`ere.

Apr`es le probl`eme, relativement simple, de l’adsorption de monom`eres, penchons-nous `a pr´esent sur le cas de l’adsorption dissociative.