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L’étude des différents indicateurs de santé illustre la double appartenance de la Guyane, politique et géographique, par la mise à l’épreuve du système de santé national dans un département inséré dans un monde en voie de développement. La notion de transition épidémiologique en permet une approche globale. L’exemple de l’épidémie du VIH/sida en donne un exemple particulièrement saillant. Nous entrerons ensuite plus avant dans le cœur de notre problématique : l’offre sanitaire.

Les indicateurs de santé42

L’espérance de vie à la naissance en Guyane en 1997, malgré une forte progression depuis le début des années 90, est plus brève de 4 ans pour les femmes (78,7 contre 82,1) et de 2 ans pour les hommes ((72,4 contre 74,2) que celle des habitants de la Métropole.

La mortalité (nombre de décès pour 1000 habitants) est de 3,8 en Guyane contre 9,2 en Métropole, mais la comparaison à âge équivalent révèle une surmortalité de 40% en Guyane. Les causes de mortalité par ordre décroissant sont les mêmes qu’en Métropole : pathologies cardio-vasculaires, tumeurs, traumatismes (violences (homicides, etc.), suicides et accidents de la route) et maladies infectieuses. Mais les pathologies cardio-vasculaires, les traumatismes et les maladies infectieuses, ainsi qu’en 6ème position, les pathologies endocriniennes, ont des taux comparatifs supérieurs en Guyane.

La Guyane cumule ainsi les causes de mortalité propres aux pays développés (cardio- vasculaires, tumeurs) et celles qui le sont aux pays en développement (traumatismes, maladies infectieuses). Ces dernières sont également les grandes responsables d’années potentielles de vie perdues (APVP) : traumatismes (accidents de la circulation surtout) et empoisonnements sont les premières causes d’APVP en 1993-1997 ; les maladies infectieuses et parasitaires arrivent en seconde position.

La mortalité infantile, en baisse depuis les années 70, s’est stabilisée dans les années 90, à un niveau deux fois supérieur au taux métropolitain43 et supérieur à celui des autres DOM, taux qui rapproche la Guyane des pays en voie de développement (surtout la composante périnatale).

Les 3 causes de sur morbidité sont la périnatalité (les accouchements représentent 25% des séjours hospitaliers, soit 3 fois plus qu’en Métropole), les traumatismes et les maladies

42 Ces données ont été recueillies dans les documents suivants : BAZELY & CATTEAU (2001) ; CONSEIL

NATIONAL DU SIDA (2003) ; DDASS (2001, a) ; DDASS (2001, b,) ; MEISSONIER & RODRIGO (1997).

43 La mortalité infantile est passée de 55 (décès de moins d’un an pour 1000 naissances vivantes) en 1971 à 11,1

en 1998 (contre 5,2 en Métropole).

La mortalité périnatale (nombre de mort-nés et de décès de moins de 7 jours pour 1000 naissances totales) est passée de 29,8 en 1987 à 19,5 en 1997 (Métropole, respectivement 9,9 à 7).

La mortalité maternelle (nombre de décès pour 100 000 naissances) a progressé, passant de 64,6 en 1987-90 à 79,3 en 1993-97 (9,5 en Métropole en 1987-1990).

Les éléments pouvant expliquer l’importance de la mortalité infantile sont les suivantes : accouchement en France de femmes étrangères (surinamiennes, brésiliennes) ne s’étant pas faites suivre en cours de grossesse, hygiène et alimentation du nourrisson de mauvaise qualité (éducation sanitaire insuffisante, déficit

d’équipement : pas d’eau courante, pas de réfrigérateur car pas d’électricité), difficultés d’accès aux soins et à la prévention (distance à parcourir pour accéder aux soins dans l’intérieur, etc.). L’enquête périnatale de l’Inserm de 1998 révèle en outre que 28% des femmes enceintes vivent seules (contre 7% en métropole).

infectieuses44. Ces 3 sur-morbidités sont caractéristiques des pays en voie de développement. La Guyane est le seul département français où l’on voit encore des kwashiorkors (sur les fleuves en particulier).

De nouveaux problèmes sanitaires sont apparus ces dernières années en Guyane : l’alcoolisme et la toxicomanie. 20% des jeunes consomment de la drogue, peu par injections intra- veineuses, en revanche le crack représente 70% des drogues consommées.

L’équipement sanitaire individuel en eau et assainissement reste insatisfaisant45, en particulier

dans les communes isolées et les concentrations humaines plus ou moins spontanées péri urbaines, exposant à des risques d’épidémies de diarrhées infectieuses (typhoïde, gastro- entérite). Ces risques sont également présents chez les populations qui ne consomment pas l’eau potable à laquelle elles ont accès, lui préférant l’eau du fleuve.

En outre, le mercure rejeté par les activités d’orpaillage contamine les fleuves (le Maroni surtout), y est absorbé par les poissons, exposant les populations fluviales qui consomment les produits de la pêche (les Amérindiens en particulier) à un risque de toxicité neurologique. Une transitions épidémiologique inachevée

La notion de transition démographique se réfère au passage, en trois phases, d’une situation de mortalité élevée et de fécondité élevée à une situation de mortalité faible (d’abord) et fécondité faible (ensuite). La baisse de mortalité a été enclenchée par les développements économiques en Europe, alors qu’elle les précède dans les pays en voie de développement. La transition démographique n’est pas achevée en Guyane : la baisse de la mortalité ne s’est pas suivie d’une baisse de fécondité aussi importante qu’ailleurs. Le taux de natalité augmente en effet en Guyane alors qu’il baisse dans les autres DOM, traduisant la forte migration issue de pays moins avancés dans la transition démographique.

Le modèle d’évolution sanitaire proposé par Omran (1971), la transition épidémiologique, se déroule également en trois phases : à la suite du déclin des maladies infectieuses et parasitaires (MIP) et de la famine parmi les premières causes de mortalité, l’espérance de vie s’allonge, la population s’accroît, les maladies dégénératives et les sociopathies apparaissent46.

44 Les maladies infectieuses les plus problématiques sont les suivantes :

- Le paludisme : 4056 cas autochtones en 1999, dont 90% dans la région du Maroni, chimiorésistance élevée aux antipaludéens

- La dengue et la fièvre jaune : menaces permanentes

- Les maladies sexuellement transmissibles et le sida (cf. ci-dessous) : considérable augmentation de la prévalence ces dernières années

- La tuberculose : 2/3 des malades sont étrangers - La lèpre : reste présente même si décroît

45 Seuls 79% de la population sont approvisionnés par une eau de bonne qualité, 1,4% le sont par une eau de très

mauvaise qualité.

46 Si en Occident la transition a débuté au 18ème siècle (baisse de la fertilité liée au développement économique)

et s’est terminée au début du 20ème siècle, elle n’a débuté ailleurs qu’après la 2ème guerre mondiale :

- Au Japon ou à Hong Kong, elle est beaucoup plus rapide : bouclée en 25 ans

- Dans le Tiers Monde, la baisse de mortalité est liée à des programmes sanitaires allochtones et non à l’amélioration des conditions de vie ; dans les villes, la mortalité est due à la fois à des maladies infectieuses et dégénératives ; pas de baisse de la fécondité.

Au regard de la transition épidémiologique, la Guyane présente là aussi une figure originale, à mi-chemin entre son appartenance au continent sud-américain et son identité de département français. BOURGAREL (1994) retrace l’évolution de cette transition et en propose l’interprétation suivante.

Au lendemain de la départementalisation, la lutte contre le paludisme réalise l’amorce du processus de transition épidémiologique : comme dans l’ensemble des pays en voie de développement, la mortalité commence à diminuer à la suite de l’introduction d’innovations médicales (sous la forme, en Guyane et comme ailleurs dans le monde tropical de l’Amérique latine, des premières campagnes de pulvérisation de DDT) et avant le développement socio- économique (qui enclenche le processus dans les pays développés, par amélioration de l’alimentation et de l’hygiène domestique)47. La fermeture du bagne, dont la population payait un lourd tribut aux MIP, accélère le processus.

La baisse du taux de mortalité par MIP se répercute sur le taux de mortalité globale qui devient alors pour la première fois inférieur à celui de la natalité. Depuis, la croissance démographique a été ininterrompue, portée conjointement par les taux de natalité (d’autant plus élevés que la population est jeune) et l’immigration (accrue ces trente dernières années). Le taux de mortalité par MIP et respiratoires reste cependant élevé, signant un faible avancement au sein de la transition épidémiologique et plaçant la Guyane, à cet égard, derrière les trois autres DOM et dans le groupe des pays les moins avancés d’Amérique du latine.

Simultanément, la Guyane ne fait plus partie de ce groupe pour ce qui est de l’écart de mortalité hommes/femmes (plus l’écart est grand (au profit des femmes) et plus le pays est dans une phase avancée de la transition), se situant même parmi les pays les plus avancés dans la transition. Surinam et Guyana se trouvent sur ce point parmi les pays peu avancés : pas d’écart hommes/femmes (voire avantage aux hommes)48.

D’autres auteurs ont proposé une 4ème étape : recul des sociopathies (baisse des maladies cardio-vasculaires) par

modification des comportements, les maladies dégénératives restant prépondérantes. (BOURGAREL (1994))

47 Même si l’amélioration des structures de soins et du niveau de vie, avec la départementalisation, ont

certainement contribué eux aussi à l’amorce de la transition en Guyane.

48 On peut comparer la Guyane avec :

- L’Etat du Parà (Brésil du Nord), le Surinam et le Guyana : caractéristiques environnementales et climatique proches de celles de la Guyane

o taux de natalité : idem

o taux de mortalité : inférieur en Guyane, mais plus de mortalité par MIP - Les autres DOM : régime politique commun

o taux de natalité : supérieur en Guyane

o taux de mortalité : inférieur en Guyane, mais supérieur pour l’infantile ; plus de mortalité par MIP

o espérance de vie : plus faible en Guyane

o population plus jeune en Guyane, comprenant plus d’étrangers

L’évolution des causes de mortalité se passe globalement de la même façon en Guyane que dans les autres DOM, mais :

- les MIP diminuent moins vite (ont baissé puis augmenté, en partie à cause du sida et dans une moindre mesure du paludisme qui augmente lui aussi, en raison des résistances chez le vecteur et chez le parasite)

- les maladies circulatoires et les tumeurs augmentent moins vite (car plus d’immigrés, moins de moyens techniques de diagnostic), avec beaucoup de cancers de la peau (comme dans les autres DOM : ensoleillement) et du col utérin (comportements sexuels, etc.)

BOURGAREL explique cette mortalité élevée par MIP par la faible maîtrise par l’homme de l’espace guyanais, ancienne49 et responsable de la faiblesse de l’agriculture, de l’importance de la surface forestière (90% du territoire) mais aussi de la survie de nombreux systèmes pathogènes tels que la leishmaniose ou le paludisme. Le faible avancement dans la transition reflète également la migration importante que connaît la Guyane depuis les années 70, issue de pays peu avancés à cet égard, même si les immigrés vivent surtout en zone urbaine, alors les MIP sévissent plus dans les zones rurales. La transition est en effet moins avancée dans l’intérieur du département que sur son littoral : la mortalité infantile et la mortalité par MIP y sont plus élevées dans l’intérieur (défaut d’équipement (sanitaire, d’eau courante, de réfrigérateur), d’éducation, distances à parcourir pour accéder aux soins, difficultés linguistiques), tandis que celle par maladies de l’appareil circulatoire y est moindre. Les nouveaux modes de vie, d’habitat, d’organisation familiale ou d’alimentation diffusent à partir de Cayenne (Kourou est européanisée mais repliée sur elle-même).

Au total, la notion de transition épidémiologique permet d’appréhender une nouvelle fois la double appartenance géographique et politique de la Guyane.

Le système sanitaire de la Guyane bénéficie de l’application du système de protection sociale national et de moyens financiers importants. Mais le milieu guyanais est sensiblement différent du métropolitain, tant par ses composantes naturelles (anthropisation limitée) que populationnelles (immigration issue de l’aire caraïbe et d’Amérique du Sud).

De cette confrontation naissent des indicateurs mitigés : d’un point de vue sanitaire, la Guyane ne s’apparente pleinement ni à un pays développé, ni à un pays en voie de développement.

49 A l’époque précolombienne, les Amérindiens sont disséminés (occupation lacunaire) sur un territoire

immense, les techniques agricoles sont trop peu productives pour permettre une forte densité humaine, les nombreuses langues différentes retreignent les possibilités de relations entre les groupes. Résultat, le paysage est peu modelé par l’homme

La colonisation est difficile (ex : expédition de Kourou), valant à la Guyane son appellation de « cimetière des Européens ». Les premières tentatives de socialisation de l’espace (assèchement des marais par installation de polders) sont interrompues à la fin du 18ème siècle, quand les gouvernements se désintéressent de la Guyane au

profit des Antilles. Cette absence de politique volontariste d’organisation de l’espace contraste avec la situation du Surinam et du Guyana, alors colonies hollandaises. La Hollande s’intéresse beaucoup à ces colonies (ses seules dans la région), y investit des hommes (dix fois plus nombreux au Surinam qu’en Guyane) et des moyens (beaucoup de polders, qui permettent de réduire la prévalence du paludisme).

MARCHAND-THEBAULT (1987) rappelle que jusqu’à la fin du 18ème, les colons français firent l’erreur de

penser que les terres hautes étaient plus salubres que les basses, infestées de moustiques, alors que les premières sont les plus exposées au paludisme. Les colons hollandais du Surinam l’avaient compris dès le début du 17ème

siècle.

L’abolition de l’esclavage (1848) voit se substituer à l’habitation collective du colon (avec ses esclaves) celles de familles nucléaires disséminées ; la technique des polders est abandonnée, on revient à la culture sur brûlis. A l’inverse, les Hollandais trouvent facilement de la main d’œuvre de remplacement sur leurs plantations, qui prospèrent, contrairement aux guyanaises qui périclitent.

Avec la ruée vers l’or, l’agriculture est délaissée au profit du commerce et de services.

La mortalité des bagnards est très élevée en raison non seulement de leurs conditions de vie (alimentation, hygiène et moyens sanitaires déplorables) mais aussi de la méconnaissance du milieu : au lieu d’aménager quelques grands centres bénéficiant de travaux d’assainissement, l’administration pénitentiaire envoie les bagnards dans de petits pénitenciers isolés dans la forêt et insalubres, tant pour protéger la population locale et punir les bagnards, que pour donner l’impression que la présence européenne a fait reculer les frontières de la forêt.

Enfin la départementalisation (1946) contribue à isoler la Guyane de son contexte géographique. (BOUGAREL, 1994))

L’épidémie de VIH

L’offre sanitaire, bien meilleure en Guyane que dans ses pays voisins, avec notamment l’accès gratuit à la trithérapie, se trouve pourtant confrontée à de graves difficultés, tant le profil de l’épidémie départementale est étroitement déterminé à un niveau régional. Ce profil épidémique singulier de la Guyane, au sein de la France comme de l’ensemble des DOM, est souligné en 2003 par le Conseil national du sida (CNS) qui relève la prévalence élevée et les facteurs socio-économiques constitutifs d’obstacles à la maîtrise de l’épidémie. Pour le CNS, les faiblesses de la politique de lutte contre le VIH/sida mettent en évidence les lacunes du système de santé guyanais dans son ensemble. Ainsi le CNS, pour améliorer la gestion de l’épidémie de VIH/sida, recommande la mise en œuvre d’un plan général sanitaire et social en Guyane, au-delà des considérations propres à la maladie, avec notamment éducation générale à la santé (en milieu scolaire et dans les médias) et création de structures d’accueil nécessaires à la prise en charge sociale des patients. (CONSEIL NATIONAL DU SIDA (2003))

Le plan gouvernemental de lutte contre le sida 2001-2004 inclut les DFA parmi les cibles prioritaires pour les actions de prévention.

Reprenons les principales caractéristiques de cette épidémie en Guyane50.

Taux

L’épidémie de VIH est nettement plus grave dans les DOM qu’en Métropole, et la Guyane est le DOM le plus touché.

- Incidence : entre le 1er avril 2001 et le 31 mars 2002, la Guyane a enregistré en moyenne 43,9 nouveaux cas de sida pour 100 000 habitants, contre 2,5 en Métropole, 3,4 à la Réunion, 6,3 en Martinique et 14,9 en Guadeloupe.

- Prévalence : en 2002, les cas de sida cumulés depuis 1978 pour 100 000 habitants sont de 558 en Guyane, contre 88 en Métropole, 38 à la Réunion, 144 en Martinique et 240 en Guadeloupe. La Guyane se rapproche ainsi de l’Ile de France, département le plus touché, avec un taux de 572 (alors que l’incidence est 4 fois supérieure en Guyane en 2001-2002).

- Personnes vivant avec le sida : au 30 septembre 2002, 439 personnes vivent avec le sida en Guyane, contre 128 à la Réunion, 235 en Martinique et 462 en Guadeloupe (dont la population est 3 fois supérieure à la guyanaise). En Guyane naissent 2/3 des enfants séropositifs recensés dans les DOM.

Au 31 décembre 2001, un millier de séropositifs vivraient en Guyane.

La proportion de tests positifs dans les CDAG, de 4,7 pour mille au niveau national, atteint 16,3 à la CDAG de Cayenne et 20 à celle de Saint Laurent.

Modes de contamination et sex ratio

La part des contaminations hétérosexuelles a toujours été plus importante dans les DOM (67% au 30 septembre 2002) qu’en Métropole (22%), et elle est la plus importante en Guyane (82%). La Guyane connaît également la part la plus importante de contamination mère- enfant (7%) (taux élevé de séropositivité chez les femmes en âge de procréer, taux élevé de fécondité, suivi incomplet des grossesses), tandis que les parts des contaminations par injection de drogue intraveineuse (2%) et homo-bisexuelles (4%) y sont les plus faibles.

Depuis le début de l’épidémie, les proportions de femmes parmi les malades ont été plus élevées dans les DOM qu’en Métropole, même si les hommes étaient toujours majoritaires51. Mais en 2001, et contrairement à la Métropole et aux autres DOM, un sida a été diagnostiqué en Guyane chez plus de femmes que d’hommes (sex ratio de 0,76), ce qui peut s’expliquer par la forte prévalence du VIH chez les femmes enceintes des pays voisins. On l’estime par exemple à 5 à 10% chez les femmes enceintes au Guyana, qui sont nombreuses à venir accoucher en Guyane (où le taux est de 1,7%).

Répartition par âges

Les cas de sida chez les personnes âgées de plus de 50 ans sont proportionnellement plus nombreux dans les DOM (19% au 30 septembre 2002) qu’en métropole (12% à Paris) ; il en est de même pour les moins de 20 ans (5 contre 1% à Paris), ce qui est à mettre en rapport avec les taux de transmission mère-enfant.

Facteurs de risque

Les facteurs identifiés en Guyane sont les suivants.

Le multipartenariat sexuel est le fait d’une prostitution professionnelle52 ou domestique53. Il concerne également la tranche des plus de 60 ans, d’où leur taux élevé de contamination. Les comportement pro-natalistes sont un frein à l’utilisation des préservatifs. Le taux élevé de IST (infections sexuellement transmissibles) accroît le risque de contamination par le VIH.

Surtout, est en cause la précarité. Celle-ci concerne avant tout les immigrés (plus de la moitié des patients suivis en 2001 sont étrangers, dont 31% d’Haïtiens et 10% de Surinamiens (BUTON, 2002)), issus de pays pauvres et durement touchés par l’épidémie alors que l’accès au traitement est loin d’y être généralisé54 (République dominicaine, Surinam, Guyana et bien sûr Haïti ont les taux les plus élevés des pays de la Caraïbe, elle-même région du monde la plus touchée après l’Afrique sub-saharienne55).

51 Les proportions de femmes en métropole tendent cependant à progresser, se rapprochant de celles des DOM,

par augmentation de la part des contaminations hétérosexuelles.

52 La demande masculine de prostitution féminine est sept fois plus fréquente en Guyane qu’en France

métropolitaine. La prostitution est le lot notamment des femmes immigrées (Brésil, Guyana, Saint Domingue). (rapport Delfraissy 2002)

53 La société guyanaise est matrifocale (prédominance de la figure maternelle dans la famille), mais les femmes

sont très dépendantes financièrement des hommes. Nombreuses sont les femmes qui se font « entretenir » par plusieurs hommes en échange de services sexuels, hors conditions de grande précarité. Il leur est difficile d’imposer le port du préservatif.

54 Au Surinam par exemple, seule la prophylaxie par Bactrim était disponible jusqu’à il y a peu. 55 Guyana : 46% des prostituées de la capitale seraient contaminées

Surinam : 267 cas nouveaux cas de sida ont été dépistés en 1999 (pour une population d’environ 425 000, soit un taux de 628 pour 1000 habitants)

Haïti : prévalence de 5 à 6% depuis la fin des années 80

République dominicaine : prévalence de 2,3%, pouvant atteindre 12% chez les prostituées (en dehors de la capitale, où sont réalisés des efforts de prévention).

(FEDERATION HOSPITALIERE DE FRANCE, MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES (2002), ROMEL (2004))

Prise en charge

Elle est réalisée dans l’un des trois principaux établissements de santé (hôpitaux de Cayenne et Saint Laurent et centre médico-chirurgical de Kourou). BUTON (2002) évoque un « Cayenno-centrisme », par homologie entre le sentiment d’isolement des acteurs guyanais vis à vis de la métropole et celui des acteurs de Saint Laurent et des autres communes vis à vis de Cayenne, résultant d’un déséquilibre des moyens alloués alors que la dynamique de l’épidémie est la plus intense dans l’Ouest guyanais. L’auteur rapporte en outre un témoignage selon lequel la prise en charge fonctionnerait plus par le fait « de personnes que de structures », c’est à dire que le départ d’un médecin à tel endroit pourrait suffire à la compromettre.

Les médecins de ville sont rares à accepter ces suivis (toujours de toutes façon en collaboration avec l’hôpital), pour des raisons de compétence (ils ne sont pas suffisamment formés) et de prise en charge sociale (la plupart des patients bénéficient, quand ils sont