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Diagnostic biologique indirect

6. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE

6.6. Diagnostic biologique indirect

Pour un diagnostic étiologique d’une infection virale, on recherchera tout particulièrement une séroconversion (apparition d’anticorps, signant un contact viral et nécessitant deux sérums), la présence d’IgM spécifiques (infection récente ou active) ou une augmentation du taux des IgG (deux sérums nécessaires et classiquement une augmentation du titre ≥ 4). Actuellement, la recherche d’anticorps spécifiques (IgM ou IgG) de ZIKV repose essentiellement sur des techniques immuno-enzymatiques. Le principal inconvénient de la sérologie est l’existence de réactions croisées. Celles-ci représentent un obstacle majeur à la fiabilité du diagnostic sérologique et limite la réalisation de ces techniques aux laboratoires expérimentés en sérologie des flavivirus.

46Unité de dénombrement des virus viables, définie par la mise en évidence d'une plage de lyse visible dans un

Revue bibliographique Chapitre 6.Diagnostic biologique 6.6.1. Immunoanalyse

Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay (ELISA). L’ELISA est un test immuno-enzymatique. Elle consiste en la fixation des anticorps du patient sur des antigènes viraux (inactivés ou recombinants). Ces anticorps sont ensuite révélés par une antiglobuline anti-IgM ou anti-IgG marquée par une enzyme. Cette technique est rapide (quelques heures), peu coûteuse, sensible et hautement reproductible (automatisation possible) [74]. Plusieurs tests sont possibles : EIA (Enzyme Immuno Assay) indirect, test sandwich, test par compétition, immunocapture-ELISA [70]. Deux d’entre eux ont été développés pour le ZIKV [119].

 ELISA indirect. Dans cette méthode, les anticorps du patient se fixent aux antigènes de ZIKV (NS1) recouvrant les plaques d’ELISA (étapes 1 et 2). Ces anticorps sont ensuite révélés par un conjugué, ici des anticorps anti-IgG marqués par une enzyme (3). En présence de l’enzyme, le substrat ajouté se colore (4). L’intensité de la réaction colorimétrique est corrélée à la quantité d’anticorps présente dans le puits (Figure 35).

Figure 35. ELISA indirect pour la détection d’anticorps anti-ZIKV (adapté de [74])

Les numéros indiquent l’ordre des étapes.

Immunocapture-ELISA. À la fois simple et sensible, cette technique est particulièrement indiquée dans le diagnostic précoce des infections à ZIKV (détection des IgM) et est pour l’instant la plus employée. Elle a été conçue en vue de limiter les risques de faux positifs associés à la présence fréquente d’un auto-anticorps, le facteur rhumatoïde (IgM anti-IgG) [70]. Les différentes étapes de l’immunocapture-ELISA sont illustrées dans la Figure 36. L’immunocapture-ELISA consiste à piéger sur un support solide l’ensemble des anticorps de la classe IgM (1-2). La spécificité du test est alors conférée par l’ajout d’un antigène non-infectieux de ZIKV (E ou NS1) (3). Cet antigène

est ensuite détecté par addition d’anticorps anti-ZIKV marqués par une enzyme (4). Une réaction colorimétrique est générée par l’interaction de cet enzyme avec son substrat chromogénique (5). Comme pour l’ELISA indirect, l’intensité de la réaction colorimétrique est corrélée à la quantité d’anticorps présente dans le puits. Deux jours sont nécessaires pour mener à bien l’analyse [77].

Figure 36. Immunocapture-ELISA pour la détection d’IgM anti-ZIKV (adapté de [74])

Les numéros indiquent l’ordre des étapes.

Immunofluorescence indirecte (IFI). L’IFI consiste à fixer les anticorps du patient sur des cellules infectées puis de les révéler au moyen d’une antiglobuline anti-IgM ou anti-IgG marquée par un fluorophore [70]. Une lecture en microscopie en fluorescence permet de visualiser la présence de cellules fluorescentes (Figure 37). Cette technique est rapide [74].

Figure 37. Immunofluorescence indirecte pour la détection d’anticorps anti-ZIKV [52]

A gauche. Les cellules Vero E6 ont été inoculées avec des échantillons de tissus fœtaux infectés par ZIKV. Après les

avoir mises en contact avec un sérum convalescent humain, les IgG anti-ZIKV présents dans le sérum ont été révélé ZIKV

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au moyen d’un conjugué correspondant à une antiglobuine anti-IgG marqué par un fluorophore (ici l’isothiocyanate de fluorescéine).

A droite. IFI négative avec un sérum de contrôle IgG-

Micro immuno-fluorescence (MIF). Dans cette technique, le sérum du patient entraîne l’agglutination de particules recouvertes d’antigènes recombinants. Un MIF multiplexe a récemment été mis au point en utilisant différents antigènes recombinants anti-ZIKV (E, NS1 et NS5) et anti-DENV 1 à 4 (NS1) couplés à des microsphères de fluorescence distincte [77]. Si on se focalise sur la protéine E, cette technique présente une sensibilité équivalente voire supérieure à l’immunocapture-ELISA pour le diagnostic de ZIKV (grâce à la reconnaissance multiple des IgM, IgG et IgA). L’incorporation des protéines NS1 et NS5 a de plus permis d’améliorer la spécificité de l’analyse, et donc la précision du diagnostic. Enfin, cette technique est rapide (< 4h) (haut débit d'analyses possible), ne nécessite qu’un faible volume d’échantillon (10 µl) et est peu coûteuse (40 tests/µg de protéine recombinante).

6.6.2. Inhibition de l’hémagglutination et réaction de fixation du complément

Inhibition de l’hémagglutination (HAI). Le sérum du patient réagit avec les virus en suspension bloquant l’interaction virus-globules rouges (Figure 38). Ce test est peu coûteux et rapide (quelques heures), mais est moins sensible que l’ELISA, moins spécifique que le PRNT et ne permet pas de distinguer les IgM des IgG. De plus, les sérums contiennent des substances pouvant agglutiner non spécifiquement les hématies, ainsi que des inhibiteurs non spécifiques de l’hémagglutination. Ces deux substances interférentes doivent être éliminées.

Figure 38. Test d’inhibition de l’hémagglutination (adapté de [74])

La protéine E est capable d’agréger les érythrocytes aviaires en l’absence d’anticorps anti-E (puit de gauche). L’ajout de sérum immun entraîne une inhibition de l’hémagglutination (puit de droite).

Agglutination Absence

d’agglutination Agglutination d’agglutinationAbsence

Réaction de fixation du complément. Le sérum du patient réagit avec l’antigène et fixe le complément, inhibant sa fixation sur un système hémolytique. Cette technique est moins souvent réalisée car il est difficile d’obtenir des contrôles de qualité satisfaisants [74].

6.6.3. Séroneutralisation

Plaque Reduction Neutralization Test (PRNT). La technique de réduction des plages de lyse causées par le virus est la technique de référence pour le diagnostic sérologique des arbovirus. Elle permet de quantifier le taux d’anticorps neutralisants (principalement IgG). Elle fait partie des techniques de séroneutralisation, dont le principe est d’inhiber la multiplication du virus par incubation préalable à l’inoculation avec le sérum du patient [70]. En pratique, des dilutions en série du sérum du patient sont incubées pendant une heure à température ambiante au contact de particules infectieuses. La dose virale est calculée de sorte que les anticorps, s’ils sont présents, puissent se fixer au virus. Les mélanges sérum-virus sont ensuite inoculés sur des monocouches de cellules, puis recouvert d’un milieu semi-solide. Après une période d’incubation définie, les cultures sont fixées, colorées, et les plages de lyse dénombrées (Figure 39). Si les anticorps neutralisants sont présents, le virus infectieux sera neutralisé, et le nombre de plages de lyse diminué [122]. Le pourcentage d’inhibition des plages de lyse est souvent fixé à 90 % (PRNT 90). Cette technique est plus spécifique que l’ELISA et l’IF dans les infections primaires, mais elle est coûteuse, longue (jusqu’à 1 semaine d’exécution) [37] et délicate à mettre en œuvre. De plus, elle nécessite des réactifs standardisés souvent non disponibles et une maîtrise de la culture cellulaire. Elle est donc peu utilisée en routine et n’est actuellement pratiquée que par des laboratoires de référence ou des laboratoires de recherche. Étant donné que cette méthode repose sur la reconnaissance d’épitopes spécifiques et cross-réactants (protéine E), les réactions croisées et le phénomène de « péché antigénique originel » persistent et impactent tout autant l’interprétation des résultats sérologiques [68]. La comparaison entre différentes épreuves de neutralisation permet d’améliorer la spécificité de ce test, mais peut allonger la durée du procédé jusqu’à 3 à 4 semaines [122].

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Figure 39. Plaque reduction neutralization test pour le diagnostic d’infection à ZIKV [122] A. Sérum prélevé en phase aiguë. B. Sérum prélevé en phase convalescente.

Dans cet exemple, la dose virale a été fixée à 100 UFP et les monocouches cellulaires sont constituées de cellules Vero. Le titre neutralisant est exprimé par l’inverse de la dilution finale de sérum capable de protéger 90 % du tapis de cellules. Le titre pour les 2 sérums est de 160, indiquant une exposition à ZIKV, mais le moment de l’exposition n’a pu être déterminé.