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Chapitre 10. Modèle de Drude

10.1. Description du modèle

La figure 10.1 donne un schéma de description des métaux par le modèle de Drude. Selon ce schéma, chaque atome, de numéro atomiqueZ, c’est-à-dire avecZ électrons etZ protons, mettra un certain nombre de ses électrons, notéZc, à la disposition d’un gaz dit gaz d’électrons. Dans la figure 10.1,eest la charge du proton, opposée à celle de l’électron, soit environ1,6.10−19C.

Dans le modèle de Drude, un métal est donc formé d’un réseau d’ions et d’un gaz d’électrons.

Les électrons mis à la disposition du gaz par chaque atome sont au nombre deZc. Ce sont ceux situés sur les couches électroniques externes. Ils sont appelés électrons de conduction.

Par exemple, pour le sodiumN a, un seul électron est mis en commun (Zc = 1). La structure électronique deN aétant1s22s22p63s, seul l’électron de la couche3ssera mis en commun. Les ionsN a+ainsi formés auront la structure électronique1s22s22p6du NéonN eavec deux couches

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Figure 10.1. Description schématique du modèle de Drude

complètes. De la même façon, l’aluminiumAlmettra en commun trois électrons par atome, ceux de la coucheM. La structure électronique des ionsAl3+ainsi formés sera donc aussi celle du néon N e.

On peut facilement estimer le nombre d’électrons de conduction par unité de volume de métal.

En effet, une mole de matériau contient6,022.1023atomes (nombre d’Avogadro). Ainsi, siρest sa densité etAsa masse atomique, alors le nombrend’électrons de conduction par unité de volume du matériau est :

n= 6,022.1023.Zcρ A

On obtient par exemple à température ambiante2,65.1022électrons de conduction par centimètre cube dans le sodium (avec une valence de1), et18,1.1022dans l’aluminium (avec une valence de 3).

Dans le modèle de Drude, l’interaction d’un électron de conduction avec les autres électrons et avec les ions est négligée. Ainsi, en l’absence de champ externe, l’électron se déplace uniformément sur une ligne droite. Lors de l’application d’un champ extérieur, le mouvement de l’électron est obtenu en appliquant les lois classiques de la mécanique, en négligeant les champs additionnels produits par les autres électrons et les ions.

En fait, l’interaction de chacun des électrons de conduction avec les ions est schématisée par un potentiel attractif constant dans le métal, de sorte que les électrons sont piégés dans une boîte de potentiel (figure 10.2 et chapitre 2.2). Plus le potentiel servant à schématiser cette interaction sera grand (en valeur absolue), plus la probabilité de présence d’un électron à l’extérieur du métal sera faible. Dans ce modèle, on considère que le potentiel est suffisamment important pour que les électrons restent confinés dans le matériau. Les surfaces du métal constituent donc des parois rigides d’une boîte à intérieur de laquelle évoluent les électrons. Le fait de négliger les interactions électron-électron revient à se placer dans l’approximation des électron-électrons indépendants. Le fait de négliger les interactions électron-ion correspond à l’approximation des électrons libres.

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Figure 10.2. Description du matériau comme une boîte dans laquelle le gaz d’électrons évolue, d’après [QUÉ 88]

10.1.2. Les collisions

L’application directe des lois classiques de la mécanique à l’électron dans une boîte peut conduire à des résultats aberrants. En effet, si on considère par exemple l’application d’un champ électrique−→ E constant dans le temps, alors chaque électron est soumis à une force électrostatique−e−→

E, où−eest la charge (négative) de l’électron. Les lois de la mécanique conduisent à une accélération constante des électrons dans le sens opposé à ce champ, et donc à une vitesse croissant linéairement dans ce sens pour atteindre une valeur infinie. Ce simple raisonnement nous montre qu’il est nécessaire d’introduire dans le modèle de Drude une force de freinage des électrons. Cette force est schématisée par des collisions au sein du matériau.

Comme dans une théorie cinétique classique, des collisions sont donc considérées à l’intérieur de la boîte. Ce sont des événements instantanés qui modifient brutalement la vitesse des électrons. Ces collisions ont une probabilité de1/τ par unité de temps. Le termeτest appelé temps de relaxation.

Il joue un rôle fondamental dans la théorie de la conduction des métaux. Ce temps signifie qu’un électron sélectionné de façon aléatoire à un instant donné, d’une part voyagera en moyenne pendant un tempsτ avant d’avoir une collision, et d’autre part a en moyenne déjà voyagé pendant un temps τdepuis sa dernière collision.

Figure 10.3. Schématisation naïve des collisions dans le modèle de Drude, d’après [ASH 76]

Dans le modèle de Drude, le temps de relaxation est indépendant de la position et de la vitesse de l’électron. Une schématisation simpliste conduirait à imaginer que les collisions sont des chocs entre les électrons et les ions de la structure (figure 10.3), ce qui conduirait à un temps de relaxation τde l’ordre de grandeur du temps de déplacement d’un électron entre deux ions. Il faut à tout prix

éviter ce genre d’image. En effet, elle conduit à une estimation erronée de ce temps de relaxation.

Nous verrons dans le paragraphe suivant que des mesures de conductivité électrique peuvent donner une estimation deτ(de l’ordre de dix femto-secondes). Nous verrons dans le chapitre suivant que la vitesse des électrons dans le gaz peut atteindre environv = 106m/sà température ambiante. Ceci conduit à un libre parcours moyen des électronsl=vτ de l’ordre de100, qui n’est pas comparable avec la distance entre des ions dans un métal, elle-même plutôt de l’ordre de1. Il faut donc utiliser les collisions dans le modèle de Drude simplement comme un moyen de schématiser, par une force de freinage, le ralentissement des électrons de conduction.

Dans le modèle de Drude, les collisions sont également supposées être le seul mécanisme à participer à l’équilibre thermique du matériau. Après chaque collision, l’électron repart dans une direction aléatoire, indépendante de sa direction de déplacement avant la collision, et avec une vitesse correspondant à la température locale du matériau. Ainsi, plus la zone du matériau est chaude, plus l’électron repartira avec une vitesse importante de la collision.

10.2. Quelques propriétés physiques