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Des lots vendus sous plis au premier prix

1.4 Les enchères de bois publiques en France

1.4.2 Des lots vendus sous plis au premier prix

L'Oce National des Forêts utilise un mécanisme d'enchère sous plis au premier prix. Dans un tel mécanisme, chaque acheteur fait une ore unique de manière privée et ano-nyme au vendeur. Celui-ci, après avoir reçu toutes les propositions d'achat, classe celles-ci en fonction de leur valeur et attribue le lot à l'agent ayant fait l'ore la plus élevée. Ce dernier remporte les bois ainsi mis en vente et paie un montant égale à celui qu'il a initialement oert.

Des enchères sous plis

L'une des premières particularités des enchères de l'Oce est leur nature statique : les acheteurs font une ore unique pour chaque lot qu'ils souhaitent acquérir. Ce type de mécanisme se distingue par la faible quantité d'informations qu'il divulgue sur les straté-gies d'achat suivies par les diérents agents engagés dans la vente. Cette caractéristique des enchères sous-plis devient particulièrement évidente si nous les comparons au mode de commercialisation qui les a précédé, à savoir les ventes au rabais ou enchères descen-dantes (encore appelées enchères allemandes, utilisées par l'ONF jusqu'en 2002). Dans un tel mécanisme, le vendeur commence par annoncer un prix de vente élevé puis propose successivement des prix de plus en plus faibles. La vente prend n lorsqu'un des acheteurs

accepte l'un des prix annoncés. Contrairement aux enchères sous pli, ce type de vente est par nature dynamique. En eet, à chaque pallier de prix annoncé par le vendeur, les agents qui participent à la vente ont la possibilité de réviser leur stratégie d'ore. Ainsi, pour un niveau de prix donné, si le lot n'a pas encore été cédé, chaque acheteur peut reconsidérer la probabilité que ce dernier soit de qualité élevée, sachant que personne ne s'en est encore porté acquéreur.

Si nous sommes dans le cas particulier d'enchères à valeurs privées, l'information sup-plémentaire fournie par un mécanisme dynamique n'a aucune incidence sur les stratégies d'achat (sous réserve que les acheteurs soient symétriques). En revanche, si nous sommes dans une situation à valeur commune, ce supplément informationnel modiera le com-portement des acheteurs. Dans ce cas, l'eet sur l'ecacité de la vente ainsi que sur le revenu du vendeur est ambigu. En eet, la révision des croyances autorisée par un système de vente dynamique permet à chacun d'évaluer plus précisément la parcelle vendue. La réduction de l'incertitude à laquelle sont soumis les acheteurs permet alors d'améliorer l'ecacité de la vente et accroît le revenu du vendeur. Cependant, l'information divulguée sur les stratégies des diérents agents permet à ces derniers de mieux se coordonner au détriment du vendeur et de la qualité de l'allocation.

Le mécanisme sous pli utilisé dorénavant par l'Oce est aujourd'hui mal vécu par la plupart des acheteurs. Ces derniers dénoncent un certain sentiment de loterie . Celui-ci est sans nul doute imputable à la nature statique de ce système de vente. En eet, l'impossibilité de réviser sa stratégie d'achat conjuguée à l'absence d'information sur le comportement de ses concurrents peut expliquer cette impression d'incertitude quant au résultat de la vente.

Des enchères au premier prix

Ce caractère hasardeux des ventes ONF dénoncé par l'aval peut également s'expliquer par l'usage d'un mécanisme premier prix. Comme nous l'avons précédemment signalé, le gagnant d'une vente de bois publique paie un montant égal à son ore. Dans un tel système, remporter l'enchère n'est pas nécessairement une bonne nouvelle pour l'acheteur concerné. En eet, ce dernier peut avoir des regrets une fois la vente terminée et la deuxième meilleure ore rendue publique. Par ailleurs, un agent ayant perdu l'enchère

1.4. LES ENCHÈRES DE BOIS PUBLIQUES EN FRANCE 39 peut également être sujet à des regrets si son échec est le fait d'une ore trop timorée (voir Engelbretch-Wiggans et Katok (2008)).

Pour ces raisons, le recours à un mécanisme d'enchères au second prix peut s'avérer pro-table aussi bien pour le vendeur que pour l'aval. Dans ce type de mécanisme, le gagnant de la vente paie un montant non pas égal à son ore, mais à celle de son meilleur concur-rent. Ainsi, les regrets précédemment identiés n'aectent plus les acteurs de la demande. En outre, un système de vente au second prix présente un certain nombre d'avantages pour le vendeur, si les biens vendus sont complémentaires. Or c'est précisément le cas des lots en blocs et sur pieds qui, comme nous l'avons indiqué ci-avant, permettent la réali-sation d'économies d'échelle lors du processus d'exploitation. Ces avantages font l'objet d'une analyse théorique et expérimentale présentée dans le chapitre 4.

Le timing des ventes

Lors des enchères de l'Oce National des Forêts, les lots sont vendus les uns après les autres. L'agenda de vente, tout comme les caractéristiques des parcelles, sont divulgués ex ante par l'intermédiaire des cahiers de vente de l'Oce. Si l'ordre de commercialisation est déterministe, le lot par lequel commence la vente est déni aléatoirement.

Bien que le mécanisme d'enchère en lui-même soit statique et ne divulgue pas d'in-formation quant aux stratégies suivies par les acheteurs, une connaissance partielle de celles-ci ltre toutefois lors de la séquence de vente. En eet, à la n de chaque enchère l'Oce communique un certain nombre d'éléments : le statut du lot (vendu ou invendu), le prix payé par le gagnant et son identité ainsi que celles des acheteurs actifs sur ce lot. L'ONF révèle également, sous réserve de respecter l'anonymat, les deuxième et troisième ores non retenues.

Pour les mêmes raisons que celles que nous avons précédemment exposées, ces éléments informationnels n'ont pas ou peu d'impact sur les stratégies d'ore des acheteurs, dans une situation à valeur privée. En revanche, ils sont plus susceptibles d'entraîner une mo-dication du comportement des agents si leurs valeurs sont communes (ou partiellement communes). Dans un tel cas, les principaux eets sur le revenu du vendeur ainsi que sur la qualité de l'allocation sont identiques à ceux exposés ci-avant.

séquentielles (les lots sont mis en vente les uns après les autres), les ventes elles-mêmes le sont aussi : les ventes d'automne succèdent aux ventes de printemps. . . Par conséquent, les diérentes critiques et recommandations concernant le timing des enchères, qui font l'objet des chapitres 2 et 3, peuvent dans une certaine mesure s'appliquer à l'organisation des ventes au cours de l'année.

Prix de retrait secret et révélation des ores non retenues

Au cours de ventes organisées par l'Oce, les vendeurs (ONF et communes) xent un prix minimum au-dessous duquel le lot considéré ne sera pas cédé. Ces prix de retrait ont la particularité d'être secrets : ils ne sont pas annoncés publiquement avant le début de la vente. Cette dissimulation des prix de réserve est particulièrement mal vécu par l'aval selon qui, une telle pratique nuit à l'ecience des allocations. Sur ce point la théorie économique leur donne partiellement raison.

En eet, parce qu'elle accroît le degré d'information des acheteurs, la révélation ex ante du prix de réserve permet à ces derniers de mieux évaluer la parcelle concernée et améliore de ce fait la qualité de l'allocation. Ceci n'est cependant vrai que si nous nous trouvons dans une situation à valeur commune (ou encore une fois, partiellement commune). En eet, à travers ce prix minimum, le vendeur transmet un certain nombre de croyances quant à la qualité de la ressource, son volume. . . La communication de ces informations, ore à l'aval, la possibilité d'aner sa stratégie d'achat au prot de l'ensemble de la lière. Cependant, un prix de réserve public facilite une possible coordination des acheteurs au détriment du vendeur. Il est eectivement plus délicat pour l'aval de se coordonner si celui-ci n'est pas communiqué. Dans une telle situation l'élaboration tacite d'une stratégie commune est particulièrement périlleuse. An de s'entendre, les acheteurs doivent en eet échanger leurs croyances sur la valeur du prix de réserve. De tels échanges informationnels facilitent une éventuelle détection de la part de l'autorité de la concurrence et fragilise de ce fait la stabilité, et avec elle l'intérêt, de l'entente (voir MacAfee MacMillan (1992)). Pour cette raison, la non-communication du prix de retrait peut s'avérer une option pertinente pour l'amont, bien qu'elle lui attire par ailleurs les foudres de l'aval.

Le caractère secret des prix de réserve est également critiqué par les acteurs de la de-mande pour une autre raison que celle précédemment évoquée. Les acheteurs soupçonnent

1.5. DISCUSSION 41