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3- Discussion des résultats

3.3 Des formations théoriques appréciées des internes

a- Les séminaires

Les séminaires sont généralement appréciés car ils se rapprochent de l’enseignement

connu des années précédentes, permettent l’apprentissage de nouvelles connaissances et des

échanges constructifs avec l’enseignant, répondant aux attentes des étudiants. Au final, très

peu de points négatifs ou de propositions d’amélioration ressortaient et certains ont déjà été

modifiés (ouverture en fonction des semestres, flexibilité sur les obligations de formation,

accessibilité avec des séminaires délocalisés), le reste relevant plus du détail inhérent au

ressenti subjectif de chacun (thèmes, méthodes pédagogiques), hormis les points détaillés ci-

dessous.

La demande d’être formé par des spécialistes d’autres spécialités que la MG peut

s’avérer bénéfique mais peut aussi, à l’inverse être non pertinent dans la formation d’un

médecin généraliste. Le souhait des internes était de rencontrer ces intervenants pour avoir

des conduites à tenir simples en cabinet libéral de MG et notamment savoir quand adresser le

patient au spécialiste. Ainsi formulée, la demande semble adaptée et appropriée, mais la mise

en place d’un tel système demande une certaine vigilance pour que ces médecins se mettent

bien à la place du généraliste et ne restent pas dans leur pratique professionnelle, de sorte que

l’enseignement reste enrichissant. Une personne avait proposé de faire réaliser des cours par

un binôme généraliste-spécialiste, avec préparation en amont, permettant ainsi d’avoir un

discours adapté à la médecine générale avec nos problématiques propres. À Amiens en 2015,

les internes étaient également désireux de recevoir une formation par des spécialistes non MG

(28).

La réticence du DMG au recours à des spécialistes n’est pas propre à Grenoble. Géraldine

BLOY, sociologue, dans un travail auprès des internes de médecine générale de plusieurs

facultés , écrivait : “Les cours magistraux sont correctement accueillis à condition d’y faire la

preuve d’un vrai savoir expert (la formule d’un binôme généraliste-spécialiste, qui n’est plus

tellement en vigueur, aurait ainsi la faveur de pas mal d’étudiants). L’idée d’un monopole de

principe des généralistes sur les cours passe mal et renvoie pour les internes à une lutte de

territoire dépassée dont ils seraient un des instruments.” (29). Cette notion de “guerre de

territoire” ou de “guerre d’ego” a pu être évoquée dans nos entretiens et semble lasser les

internes.

La demande de formations pratiques aux gestes courants en médecine générale,

notamment gynécologiques (frottis, pose de stérilet et d’implant), infiltrations ou ponctions et

petite chirurgie (suture, biopsie cutanée), paraît légitime mais en pratique difficile à mettre en

œuvre de part notre effectif posant un problème de moyens humains (peu d’enseignants et

faible pertinence de composer des groupes trop importants) et matériels (mannequins, petit

matériel). Ceux n’ayant pas eu la chance d’être formés en stage sur ces techniques se

restreignent dans leur activité de généraliste. La demande d’un apprentissage plus pratique et

la mise en situation clinique en cabinet de MG étaient un leitmotiv fréquent lors de nos

entretiens, comme dans plusieurs études (28,30).

Par rapport aux séminaires administratifs, il paraît utopique d’avoir un suivi après

l’internat. La mise en place d’un tel système est compliquée du fait du nombre important

d’étudiants, la situation deviendrait vite ingérable. Les maîtres de stage d’UPL et surtout de

SASPAS ont ici toute leur place : souvent, un contact est maintenu au-delà de l’internat et ce

lien privilégié permet d’exposer et d’obtenir des réponses face aux difficultés administratives

que nous rencontrons. Peut-être faudrait-il plus inciter les internes à venir s’informer

davantage à cette partie de notre exercice professionnel lors de leur SASPAS, et les MSU à

partager avec l’interne cet aspect de notre métier.

Enfin, un biais sur l’accessibilité des séminaires était présent dans notre étude, du fait

d’un oubli de la scolarité de prévenir une partie des internes de la dernière promotion

interrogée de l’ouverture des inscriptions aux séminaires sur un semestre. Ces derniers n’ont

ainsi pas pu s’inscrire car les places étaient déjà prises lorsqu’ils en ont été informé.

Il existe quelques thèses évaluant un séminaire spécifique (séminaire installation (31),

de rentrée (32) et introductif à la recherche (33)) et une seule qui les étudiait dans leur

ensemble, réalisée à Besançon en 2017 (34) avec un avis positif sur les séminaires et comme

piste d’amélioration un travail à réaliser avant la formation par les internes comme par les

enseignants. Cette idée de préparer quelque chose en amont des séminaires était également

soulevée par les anciens internes grenoblois.

Dans les thèses sur l’enseignement théorique global, la perception des séminaires était assez

mitigée. Ainsi, à Rouen, en 2011 (35), il était déploré le manque d’apport de connaissance

théorique -en lien avec le changement de paradigme-, l’insuffisance d’enseignement sur des

thèmes précis et la technique des jeux de rôle était contestée.

À Besançon, une autre étude s’intéressant à la promotion ayant validé en 2013 (36) montrait

qu’ils étaient plutôt appréciés avec comme proposition d’amélioration des demandes de

formations pratiques ainsi que sur la gestion et la fiscalité du cabinet.

À Montpellier, en 2016 (37), les jeux de rôle étaient aussi décriés par peur du jugement de ses

compétences et les internes souhaitaient un enseignement ‘à la carte’ pour une formation plus

individualisée (comme cela est le cas à Grenoble).

variabilité inter-enseignant, et jugés de manière négative par 61% des participants à leur

étude.

La plupart des critiques effectuées et des améliorations proposées dans ces études concordent

avec nos résultats.

b- Les GEP

La HAS a défini les groupes d’analyse de pratiques entre pairs, s’adressant plutôt aux

médecins exerçants, mais dont l’enseignement s’inspire. Il s’agit d’un groupe de “plusieurs

médecins d’une même spécialité (idéalement entre 6 et 10)” qui “se réunit à un rythme

régulier”, permettant aux médecins “de présenter à tour de rôle les problèmes soulevés lors

de la prise en charge des patients” et de réaliser des “analyses de pratiques sur les données

référencées” (39).

Les modalités de cette méthode pédagogique sont assez variables d’une faculté à

l’autre. Ainsi, le nom de l’enseignement n’est pas identique dans toutes les facultés (40) :

groupe de pairs à Brest et Limoges, GAP (Groupe d’apprentissage de pratiques) à Caen,

GEASP (Groupe d'entraînement à l’analyse de situations professionnelles) à Clermont-

Ferrand et à Nice, GEP à Dijon, Grenoble, Lyon, Paris, Rouen, Saint-Etienne et Tours, UPL

(Unité d'échange de pratiques) à Lille, GEPT (Groupe d'échange de pratiques tuteuré) à

Montpellier, RSCA tuteurés à Nantes, GEAPI (Groupe d’échange et d’analyse de pratiques

entre internes) à Poitiers, AEP (Atelier d’échange de pratique) à Toulouse et ECM (Entretiens

collectifs monitorés) à Versailles. Les principales différences des méthodes entre elles et avec

celle utilisée à Grenoble sont :

- des groupes identiques sur les trois ans avec le même animateur, permettant une

meilleure connaissance de chacun dans le groupe, demandé par nos participants. Ce système,

bien que répondant à une attente des jeunes médecins, serait difficile à organiser à Grenoble

de part la grandeur du territoire, ce qui obligerait certains internes à de longs trajets pour

assister aux GEP ;

- animation du groupe par le tuteur, qui poserait également un problème de distance

pour certains étudiants ;

- la préparation d’un cas obligatoire, qui est facultatif à Grenoble et généralement non

fait par les étudiants à part lorsqu’un cas a posé problème ;

- une thématique par séance, décidée à l’avance ;

- des RSCA à rédiger après le groupe, à partir des pistes de réflexion établies pendant

la discussion en les complétant par des recherches bibliographiques, ce que faisaient certains

internes grenoblois pour leurs traces d’apprentissage.

Nous avons déjà établi l’intérêt de cet enseignement dans le cadre de l’apprentissage

de compétences en médecine générale. De nombreuses thèses dans d’autres villes avaient

pour but d’évaluer la pertinence de cet enseignement dans la formation initiale des médecins

généralistes. Malgré les différences pédagogiques, toutes ces études s’accordent sur son

apport bénéfique pour la pratique future en facilitant l’apprentissage des compétences.

Ce sont toujours les mêmes points positifs qui sont mis en valeur, identiques à ceux que nous

avons pu retrouver : la réflexion, la remise en question, le partage d’expérience, l’interactivité

et les échanges, l’initiation aux groupes de pairs, le bien-être psychologique et la réassurance

(thèses de Lyon (41), Montpellier (42), Nantes (43), Poitiers (44) et Tours (45)).

Deux études, réalisées à Versailles en 2011 (46) et 2016 (47), comparaient les ressentis des

internes par année pour en arriver à la même conclusion que les médecins interrogés dans

notre étude : évolution du ressenti au fur et à mesure de l’avancement dans le cursus, avec en

première année des étudiants ne comprenant pas les objectifs et ne percevant pas d’utilité de

cet enseignement ; en deuxième année des avis mitigés et enfin en troisième année une

adhésion à la méthode.

L’animateur était décrit comme très variable d’un GEP à l’autre et surtout l’intérêt du

GEP dépendait de ce dernier selon nos participants ; il a un rôle de modérateur et doit, comme

décrit précédemment dans le paradigme de l’apprentissage par compétences, favoriser la

réflexion et guider les questionnements des internes. Il devrait donc être neutre. Un enseignant

trop professoral diminuerait la convivialité du groupe et par conséquent les internes seraient

moins enclins à débattre par manque de motivation et peur du jugement.

Dans plusieurs thèses, pour confirmer le ressenti des jeunes médecins, l’animateur était mis au

centre de cet enseignement, décrit comme un guide garant de la qualité du groupe (études de

Lille (48), Lyon (41), Tours (40) et Versailles (46,47)). Les avis négatifs recueillis lors de ces

études transparaissaient lorsque l’animateur n’était pas perçu comme étant à la mesure de son

rôle.

L’autre facteur influençant sur l’intérêt des GAC était le groupe. En effet, une bonne

dynamique de groupe favorise les échanges et permet donc aux étudiants de développer toutes

les qualités attendues dans cet enseignement. Des étudiants démotivés, malgré un bon

animateur ne produiront pas grand-chose d’intéressant. Une convivialité était alors appréciée

et la connaissance un minimum des participants était nécessaire pour faciliter les discussions.