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S ECTION 2 : S PECIFICITE DU PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT LOCAL POUR COMPRENDRE LES

FIGURE 10: MODELE DE KLINE ET ROSENBERG,

A) I DENTIFIER ET CAPITALISER SUR DES CONNAISSANCES REPARTIES GEOGRAPHIQUEMENT

Les travaux que nous allons aborder parlent de connaissance de manière générique, mais s’intéressent surtout à des connaissances dites scientifiques et technologiques. Nous reviendrons par la suite sur cette question de la connaissance en discutant les connaissances dites de marché qui sont également essentielles au processus d’innovation, mais moins étudiées par ces auteurs. Pour être compétitives,

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les FMNs doivent être en mesure d’acquérir des connaissances réparties sur l’ensemble des continents et dans de très nombreux pays. Les FMNs et les entreprises en général doivent donc réussir à intégrer des connaissances provenant de l’extérieur de la firme (Katila & Ahuja, 2002; Rigby & Zook, 2002). L’idée centrale ici est de voir que les FMNs, par nature acteurs multinationaux, peuvent organiser et modifier leurs stratégies d’acquisition de connaissances de telle sorte qu’elles vont profiter de différents systèmes d’innovation nationaux (Patel & Vega, 1999). On entend par système national d’innovation les facteurs spécifiques à un pays ou une région qui créent un avantage national d’un point de vue technologique du fait du marché local, du système financier, et du système de formation et de recherche. La résultante de cet accès à différents systèmes d’innovation est in fine l’accroissement de la performance des FMNs et en particulier pour les activités liées à l’innovation (Kafouros, Buckley, Sharp, & Wang, 2008).

Les FMNs à travers leurs filiales vont donc aller « chercher » de nouvelles connaissances ou technologies qui, en fonction de leur capacité à absorber ces connaissances, vont faciliter l’émergence d’innovations (Escribano, Fosfuri, & Tribó, 2009). Les FMNs ont donc développé certaines compétences ou stratégies pour aller chercher ces connaissances « extérieures » à leurs frontières géographiques et organisationnelles (Rosenkopf & Nerkar, 2001). En s’organisant de la sorte, les FMNs permettent à leurs filiales de créer de nouvelles compétences et non plus seulement d’exploiter celles créées par le siège (Cantwell & Mudambi, 2011, 2005).

Les FMNs, pour bénéficier de ces connaissances, vont donc mettre en place des stratégies d’implantation locale d’unités capables d’accomplir cette mission. La première approche pour profiter des différents systèmes nationaux d’innovation et pour résoudre le problème de captation de connaissances locales a été de construire des centres de R&D ou des « centres d’innovation ». La mise en place de centres de R&D est principalement orientée vers l’accès et le soutien à des marchés locaux (différents du pays d’origine de la FMN) et l’accès à des connaissances scientifiques

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et technologiques développées ou maîtrisées localement (Von Zedtwitz & Gassmann, 2002). Différents types de centres ont été distingués en fonction des besoins de colocaliser ou non la partie recherche et la partie développement (Chiesa, 2000) pour réussir ces deux missions (R&D). Néanmoins, ces stratégies d’implantation dites « en dur » (brick and mortar) de centres de recherche dans différents pays sont coûteuses et parfois inefficaces. D’autres stratégies ont été développées en fonction du type et de la forme des connaissances afin de rendre plus flexible l’empreinte de l’innovation —

innovation footrpint. Cette notion d’empreinte peut être comprise comme la

description des modalités d’implantation des centres de R&D. En d’autres termes, cela représente la tension entre les besoins de dispersion géographique des centres de R&D et les coûts engendrés liés aux moyens qu’il faut mettre en œuvre pour ce dessein (emplacements, personnes, bâtiments, unités, etc.) (Doz & Wilson, 2012; Doz, Santos, & Williamson, 2004), voir schéma n° 11.

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L’accent est donc mis depuis plusieurs années sur cet enjeu d’acquisition de connaissances développées à l’extérieur de la firme et aux modalités qui le permettent. Cela a été particulièrement étudié derrière l’idée d’innovation ouverte (Chesbrough, Vanhaverbeke, & West, 2006; West & Bogers, 2014). L’innovation ouverte est le fait pour une entreprise, de manière systématique et régulière, de faire entrer ou sortir de ses frontières une innovation avec ou non une rétribution financière à la clé (Dahlander & Gann, 2010). Cette transformation de la façon d’appréhender l’innovation d’une vision fermée à une vision ouverte a modifié le processus d’innovation des entreprises. Cela leur a permis d’intégrer des connaissances, des technologies, des innovations voire des startups provenant de l’extérieur (Monteiro, Mol, & Birkinshaw, 2017) et d’améliorer leurs performances en matière d’innovation (Laursen & Salter, 2006). L’accès à des connaissances extérieures est un levier utilisé par les entreprises afin d’augmenter le champ des possibles pour innover malgré le fait qu’il existe encore de nombreuses tensions pour gérer cette intégration à la fois en interne et en externe de l’entreprise (Corbel, Chomienne, & Serfati, 2011). Cela se traduit donc, comme on l’a vu, par une modification du processus d’innovation.

Les FMNs sont donc capables aujourd’hui de mettre en place différentes modalités d’acquisition et d’absorption de connaissances. Cela leur permet à la fois d’augmenter les chances de repérer et de mobiliser des connaissances critiques, mais aussi d’optimiser leur empreinte d’innovation. C’est un continuum entre l’implantation locale d’un centre d’innovation (experiencing), des déplacements réguliers pour « capter » la connaissance in situ ou en action (foraying) et l’attraction de connaissances à distance (attracting). La stratégie de mise en place de scouting

units3 a été une des plus développées, car permettant en effet d’acquérir efficacement

des connaissances extérieures (Monteiro & Birkinshaw, 2017). Ces connaissances accessibles sont donc de plus en plus nombreuses, mais aussi de formes très variées.

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Définition : A scouting unit is “established by the MNC with the specific mandate (Birkinshaw, 1996; Birkinshaw & Hood, 1998) to scout for global knowledge-sourcing opportunities to be proposed to decision makers in business units at the MNC’s headquarters”. (Monteiro, 2015, p2)

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