• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4 : Méthodologie de la recherche

B. OPERATIONNALISATION DU SCHEMA CONCEPTUEL DE REFERENCE

III. DEMARCHE DE RECHERCHE

La démarche type suivie dans chaque entité a été la suivante. A. PREMIERE ETAPE: CAMP AGNE INITIALE D'ENTRETIENS

Cette première campagne a concerné les acteurs en position clé de management.

Nous les avons choisi sur indication des acteurs déjà rencontrés, tout en s'assurant de critères de représentativité minimale (présence de représentants de chaque fonction, et de chaque niveau hiérarchique).

5 entretiens minimum ont été mené, à ce stade, dans chaque entité. Ces entretiens, de type semi-directif, étaient relativement longs (deux heures en moyenne). Ils ont donné lieu à prise de note pendant l'entretien, et retranscription informatique sur traitement de texte ensuite. Ils ont été complétés, chaque fois que cela était possible, par des sources secondaires telles que les organigrammes, les manuels de gestion, et tout type de document interne susceptible de nous renseigner à la fois sur la mission, l'activité et la structure de l'entité observée.

Cette première campagne d'entretien avait deux objectifs:

1 : mettre à jour lescaractéristiques générales du système étudié

2 : identifier leprojet spécifique qui allait être suivi de façon directe et longitudinale par la suite

1. Mise à iour des caractéristiques l!énérales du système étudié

Cet objectif recouvrait plusieurs sous-objectifs: l'enjeu était en effet de commencer à caractériser le système étudié (sa mission, la nature de son activité, son environnement), et les deux sous systèmes : le sous système technique et le sous système social.

Nous étions à ce stade autant intéressés par la caractérisation de la dimensionprescrite du dispositif: i.e. les règles du jeu de la production de l'innovation dans l'entité, que par un début de caractérisation de son fonctionnement effectif: i.e. caractérisation des stratégies

typiques développées par les acteurs. Une façon d'obtenir ces informations était

d'interroger les managers sur leur évaluation des succès, et des problèmes typiques rencontrés (analyse des incidents critiques), et de leur faire expliciter l'écart qu'ils percevaient entre ce qu'ils souhaiteraient et la réalité des logiques de production de l'innovation (cf.Annexe 3).

Ces acteurs ont joué le rôle de premiers informateurs sur le système étudié. Certains ont été ànouveau mobilisés dans le cours de l'observation.

2. Identification du oroiet spécifioue suivi

La sélection du projet suivi s'est faite, avec la collaboration directe du responsable de chaque entité, selon les critères suivants: le projet devait si possible débuter, ou au moins être cohérent à priori avec la temporalité de la thèse. L'enjeu de l'innovation devait, si possible, être plutôt de type radicale.

Il est cependant à remarquer que cette observation a été très largement dépendante des circonstances, et notamment des aléas de l'activité innovante dans chaque entité.

Nos choix méthodologiques d'analyse directe et longitudinale se sont, en effet, révélés relativement difficiles àmettre en œuvre. Ceci est lié au caractère extrêmement dynamique et mouvant de l'activité innovante .

• Tout d'abord, àun moment« t» donné: celui ou nous entrions dans une entité donnée, le portefeuille des projets en cours ne permettait pas toujours de prendre un projet au départ. Les projets pouvaient être ou trop avancés pour être véritablement intéressants pour nous (fin de processus), ou encore si peu avancés qu'il s'agissait plutôt d'une foule de micro initiatives .

• Par contre, lorsque le projet ou l'initiative en question correspondait à notre calendrier (i.e. était en phase de démarrage), alors il était par nature impossible, de s'assurer que l'initiative ou le projet choisi à son stade initial, serait effectivement innovant, développé et réalisé.

Les aléas étaient nombreux: contraintes de financement, changement d'orientation stratégique, arrêts de programmes, découverte dans un domaine concurrent, etc. Ainsi, afin d'avoir l'opportunité d'observer 3 projets, nous avons concrètement commencé à en observer 6, pendant une période plus ou moins longue. 3 projets ont finalement avorté en cours de processus pour cause de réorientation stratégique (changement de priorités). Cf.

Figure 31.

Figure 31 - Les projets avortés dans les dispositifs étudiés

1. LUDO

2. HP/ENSD

3. Xerox/RXCE

• La planète des singes • Hippi 6400 1NT Cluster

Il

• Réorientation stratégique • Réorientation stratégique

B. DEUXIEME ETAPE: SUIVI DES PROJETS D'INNOVATION &CARACTERISATION DU DISPOSITIF GENERAL

1. Suivi des nroiets

L'observation directe et en temps réel des projets sélectionnés s'est faite en organisant des sessions d'entretiens semi-directifs avec l'ensemble des acteurs engagés directement sur le projet, selon une fréquence d'environ tous les 2à3 mois (cf. Figure 32).

Figure 32- Les 3 projets observés dans les 3 entités

1. Ludo Prospective 3.000 2. HP / ENSD Prospero

3. Xerox / RXCE XTRAS

8 8 6

Les questions posées lors de ces entretiens semi-directifs étaient identiques pour tous les acteurs et récurrentes : c'est à dire que la même grille de question était administrée lors de chaque nouvelle rencontre avec les acteurs (cf.Annexe 4).

L'objectif de chaque session était de demander individuellement à l'ensemble des acteurs participant directement au projet: où en était le projet (i.e. le processus d'innovation); quels étaient les éléments qui avaient avancés depuis la fois précédentes ; quels étaient ceux qui posaient problèmes; où se situaient les motifs d'incertitude majeur; où étaient les points de conflits potentiels et réels, et avec qui.

Cette démarche nous permettait, à l'issue de chaque seSSIon, de dresser une «cartographie» d'avancement du processus d'innovation, de ses zones relativement stabilisées, de ses zones de conflits et de ses zones d'incertitudes.

Lorsque cela a été possible, ces campagnes d'entretiens étaient complétés par l'observation de réunions (lorsqu'il y avait coïncidence entre notre venue et la tenue d'une réunion, et

accord des acteurs). Ces occasions ont été très fréquentes à ENSD, relativement fréquentes àLudo, et absentesàXRCE (pour cause de non autorisation).

Ces occasions d'observation étaient particulièrement intéressantes parce qu'elles donnaient une idée de la « réalité commune ou partagée» par les acteurs, et montraient, en situation, les jeux que les acteurs jouaient les uns visàvis des autres.

Par rapport aux entretiens (basés seulement sur du déclaratif), l'observation des réunions était un moyen d'observer les acteurs en action, mettant en œuvre des stratégies: i.e. d'observer des actes (et pas seulement des discours).

En outre, lorsque cela était possible, les campagnes d'entretiens et l'observation des réunions ont été complétées par des «démonstrations visuelles ». Lorsque la disponibilité des acteurs, les règles de confidentialité, et la nature du produit développé le permettaient, je demandais en effet aux acteurs de me montrer où en était le produit: cela était possible notamment avec les «interfaces utilisateurs », c'est à dire la partie du logiciel qui représente les fonctions offertes à l'utilisateur. Ce procédé a été très largement utilisé à Ludo, où la nature du nouveau produit: un jeu vidéo, se prêtait très bien à ces démonstrations visuelles successives. Il a aussi été utilisé chez XRCE. Il n'a pas été utilisé chez ENSD : l'interface étant très limitée (produit destiné à être intégré dans une offre plus globale), et les problèmes de confidentialité importants.

L'enjeu général de cette démarche d'observation était de dresser un tableau précis de la logique d'avancement des processus d'innovation: c'est à dire de décrire à la fois les stratégies suivies par chaque individus, et les logiques collectives.

Le récit détaillé du suivi d'un projet est présenté en Annexe 7.

2. Entretiens« S!énéraux »

En parallèle du suivi des projets d'innovation stricto sensu, d'autres acteurs du dispositifs ont été rencontrés (ou rencontrés une deuxième fois lorsqu'ils faisaient partie des acteurs interviewés initialement). Il s'agissait de progresser dans la caractérisation de la configuration structurelle prescrite (description des règles, des principes en vigueur), et des effets typiques de cette configuration: i.e. les stratégies individuelles et collectives typiques qui s'y développaient. Ces individus étaient contactés soit à notre initiative (lorsqu'ils étaient perçus comme ayant une fonction critique, par exemple), ou sur recommandation d'acteurs tiers de l'entité (cf. Figure 33)

Figure 33- Acteurs interviewés dans chaque dispositif

Acteurs interviewés, sur un point de vue Nombre total d'acteurs interviewés

« général» sur l'entité dans l'entité

Ludo 8 15

HP 1ENSD 13 21

c.

FERTILISATION CROISEE ENTRE LES DEUX DEMARCHES

Ces deux démarches: la caractérisation du dispositif général (1), et le suivi d'un projet particulier (2) n'étaient bien sur pas étanches. La première (1), basée sur la rencontre ponctuelle d'acteurs clés de l'entité, et la deuxième (2), basée sur des rencontres régulières des acteurs du projet étaient largement complémentaires. Elles ont permis une forme de fertilisation croisée particulièrement utile (cf. Figure 34).

Figure 34- Logique de fertilisation croisée des deux démarches

Démarche 1 Démarche 2

~\

••

!

..,!\O\

~ ~

Cette stratégie a tout d'abord permis d'échapper aux limites du seul déclaratif. Etant donné que nous étions en mesure de référer les perceptions livrées par les acteurs, à la « réalité» du déroulement du processus, et aux points de vues des autres acteurs sur ces questions, cela nous donnait les moyens d'une posture contradictoire par rapport à ce que nous disaient les acteurs. Nous étions en mesure de mieux analyser le discours des acteurs, de leur apporter la contradiction, ce afin de les encourager à élaborer leur point de vue et à l'étayer d'exemples.

En outre, nous avons pu exploiter les synergies entre les deux démarches : il pouvait ainsi nous arriver d'interviewer un manager, en tant qu'intervenant sur le projet, mais aussi en tant que porteur d'un point de vue plus général sur l'entité. A l'inverse, ce qui se passait sur le projet observé, servait «d'incident critique» à discuter avec d'autres acteurs dans l'entité. Ainsi, les acteurs rencontrés avaient souvent un point de vue pertinent sur les deux niveaux de réalités qui nous intéressaient (i.e. le général, et le particulier).

La double démarche que nous avons adoptée, a finalement permis d'éviter les écueils et les limites de chaque approche et surtout, en les confrontant, des les renforcer chacune. Si nous nous étions limité à l'analyse de premier niveau (caractérisation du dispositif général et de ses effets typiques), il aurait été difficile de discriminer ce qui relevait du fonctionnement réel du dispositif, de ce qui relevait de la vision officielle de la façon dont

il fonctionnait. Autrement dit, il aurait été difficile de différencier ce qui relevait du fonctionnement objectif, de la perception et du discours dominant des acteurs. Ce danger était d'autant plus réel que l'innovation donne souvent lieu à une valorisation importante de la part des acteurs (l'innovation est tout sauf un sujet neutre dans les organisations). Par contre, si nous nous étions limité à l'analyse d'un seul processus, il aurait été alors délicat de démêler ce qui relevait de l'exception, du hasard, de ce qui relevait des effets « typiques ou réguliers» de la configuration structurelle analysée.

An sein de chaque entité, nous étions en mesure de mettre en regard, ce que disaient les acteurs du fonctionnement typique ou « courant» du dispositif, avec ce que l'on observait concrètement sur un processus particulier. Cette observation d'un projet particulier, soulevait des questions, posait des problèmes qui, en retour, permettaient d'identifier de nouvelles dimensions, et de faire parler les acteurs sur elles. Cette double stratégie a ainsi donné lieu à une fertilisation réciproque, à un renforcement croisé des deux niveaux de démarche.

Les 3 systèmes dédiés à l'innovation, étudiés dans cette recherche, sont présentés sous forme de 3 monographies dans le chapitre 5 (Cas Ludo), 6 (Cas ENSD) et 7 (cas XRCE). Dans chaque entité, nous avons demandé à 2 acteurs clés (généralement le responsable de l'entité et le chef de projet) de valider cette analyse.

Nous référant à ce que Glaser et Strauss envisagent de la fonction d'une telle étude pour les acteurs de l'entité étudiée :

« Whenpeople (...) of the population who have been studied read the paper or

monograph, they do not read it as theory, but either as a more or less accurate description of what's been happening to themselves and others of their

acquaintance, or as a new way of seeing»394.

Nous avons demandé à ces acteurs clés: 1 de valider l'exactitude des informations

2 de se prononcer sur la pertinence et l'intérêt de la description et de l'analyse 3 de signaler des oublis, ou erreurs de compréhension majeures

Les conditions méthodologiques précises de l'observation de chaque cas sont consignées dans : Annexe 5 pour le cas Ludo, Annexe 8 pour le cas ENSD et Annexe 10 pour le cas XRCE.