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Démarche systémique et Système Régional d’Innovation

3.1 La démarche systémique outil opérationnel d’appréhension de la complexité

La complexité s’est d’abord imposée au cours de l’histoire moderne et contemporaine comme un paradigme transdisciplinaire (3.1.1). Les systèmes, généralement caractérisés comme objets complexes, définissent très souvent l’organisation des sociétés humaines ; dès lors, la systémique en tant que théorie, outil et démarche permet d’agir sur ceux-ci (3.1.2).

3.1.1 Complexité et sciences sociales

Il est intéressant d’observer comment s’est construit le paradigme de la complexité. La compréhension du monde est interprétée successivement selon la prise en compte des causalités linéaires puis circulaires (a), qui ont amené à appréhender la complexité pour faire progresser la connaissance, notamment dans les réponses apportées par la géographie (b).

-a- Le glissement d’une causalité linéaire { une causalité circulaire

Au cours des XVIIIème et XIXème siècles, c’est sur le rationalisme que se construit la pensée scientifique. La principale critique adressée au cartésianisme est la reconnaissance inéluctable d’une interaction entre sujet et objet (Damasio, 2010). La connaissance n’est non plus « un résultat mais un processus actif produisant un résultat » (Piaget, 1968, in Cambien, 2007, p.14). La causalité circulaire où objet et sujet se déterminent mutuellement remplace alors la causalité linaire où l’objet connaît son sujet. Dépasser le rationalisme c’est donc « se penser soi-même dans la complexité » (Morin, 1990).

géographie de l’innovation { un instant t, impose de prendre en compte plus d’éléments en interactions dynamiques. L’analyse de l’évolution des territoires de l’innovation dans un contexte de crise apparaît ainsi comme plus exigeante et nous l’étudierons de manière fine en tant que processus spatio-temporel et phénomène complexe.

Dès lors, dans un premier temps (3.1) nous verrons comment la complexité en tant que nouveau paradigme a émergé dans les sciences sociales (3.1.1) et dans quelle mesure la démarche systémique amène des solutions pour la décrypter (3.1.2). Nous transposerons ensuite la théorie des systèmes au processus d’innovation, afin de voir comment se sont construits les systèmes d’innovation (3.2.1). Enfin, nous verrons l’intérêt de l’échelle régionale et du concept de Système Régional d’Innovation pour mener notre étude (3.2.2).

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93 -b- Faire progresser la connaissance en appréhendant la complexité

L’étude des systèmes et des phénomènes complexes pourrait être née de la nécessité « de mettre de l’ordre et de la clarté dans le réel » (Morin, 1990, ed.2005, p.9). Après avoir contextualisé l’émergence des démarches interactives dans l’effritement progressif du rationalisme linéaire, nous présenterons la systémique en tant que méthode transdisciplinaire destinée { améliorer la connaissance de l’homme. Nous verrons ensuite comment la géographie s’est appropriée l’idée de phénomène complexe.

La complexité entre ordre et désordre

À l’époque de la prégnance du discours cartésien, le réductionnisme s’est avéré être une méthode indispensable à la science. « Il visait à réduire un ensemble de données en quelques énoncés et propositions fondamentales » (Dauphiné, 2003, p.25).

La complexité renvoie ainsi à « un tissu de constituants hétérogènes inséparablement associés et pose la question de l’un et du multiple […] un tissu d’évènements, actions, interactions, rétroactions, déterminations, aléas, qui constituent notre monde phénoménal » (Morin, 1990, ed.2005, p.21).

Deux paradoxes entourent ici le paradigme de la complexité. Le premier est que la complexité se situe entre l’ordre et le désordre. Un ordre organisationnel peut naître { partir d’un processus qui produit du désordre. L’acceptation de la complexité est donc contradictoire. Le second paradoxe est que la pensée complexe vue par Morin comme « une façon de civiliser notre connaissance » (Morin, 2005, p.25) nécessite de mettre de l’ordre dans les phénomènes, c'est-à-dire de clarifier, distinguer et hiérarchiser, au risque d’éliminer certains caractères relevant du complexe.

La pensée complexe en géographie : formes et acceptations

Alors que la géographie a longtemps étudié les relations entre la nature et les sociétés, elle s’est progressivement intéressée { l’étude des actions des sociétés humaines sur la nature, sous la forme de boucle d’interaction dans les relations entre les sociétés humaines et leur environnement et des lois d’organisation de l’espace qui visent { comprendre les organisations territoriales sous quatre formes différentes.

Dauphiné distingue en effet la complexité structurelle, de la complexité d’échelle, de celle de réseau et enfin de celle des systèmes non linéaires. La première renvoie non pas au nombre de composants présents dans un phénomène, mais à leurs interactions (connexité entre un territoire de savane et de forêt par exemple). La seconde présente une complexité dans l’imbrication de plusieurs niveaux spatiaux. C’est par exemple la géographie régionale, qui étudie l’unité fonctionnelle et spatiale d’une région, puis de ses sous-espaces et leurs interactions, avant de décrire les liens entre la région et les régions proches ou lointaines. La troisième décrit une complexité { un niveau d’organisation et nécessite de connaître les niveaux inférieurs et supérieurs. Cette dernière implique l’émergence d’éléments micro au niveau global par exemple. La quatrième forme de

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94 complexité provient de l’imprévisible. Donnadieu et Karsky vont plus loin en différenciant la complexité spatiale, imprévisible et dynamique (Donnadieu et Karsky, 2002).

Nous nous situerons plus dans ce dernier schéma d’analyse, plus adaptable au contexte de crise étudié, complexe, car difficilement prévisible, dynamique, car lié au temps et relié { l’espace via les imbrications entre compétitivités des entreprises et des territoires. Trois principes peuvent dès lors être utiles pour appréhender la complexité en sciences humaines et en géographie. On compte la dialogique c'est-à-dire le fait que l’ordre et le désordre collaborent pour créer de la complexité ; la récursion organisationnelle c'est-à-dire la référence à des processus récursifs à la fois produit et effet ; le principe hologrammatique c'est-à-dire l’enrichissement de la connaissance des parties par le tout et inversement. Le géographe ou lescientifique, doit ainsi opter pour un méta point de vue s’il veut éclaircir la complexité de façon précise (Morin, 1990). En plus de l’infiniment petit et de l’infiniment grand, il est donc nécessaire de tenir compte de l’infiniment complexe (Moine, 2014).

3.1.2 La systémique comme outil scientifique et pluridisciplinaire novateur

Ici, nous présenterons les théories et méthodologies systémiques qui permettent de dépasser les problèmes posés par les cas complexes. Ainsi, nous montrerons d’abord les principaux traits de la systémique au regard de son émergence, de ses différentes approches et théories (a), mais aussi en tant que méthode fondée sur l’étude des systèmes, dans ce que cela recouvre comme outils, particulièrement mobilisés par certains courants de la géographie qui abordent les phénomènes complexes (b). Vue comme une théorie et un outil, la systémique nous permet de nous familiariser avec la notion de système, trait majeur de la géographie de l’innovation dans l’économie de la connaissance et de voir de quelles étapes d’analyse nous pouvons nous inspirer pour décrire au mieux son organisation complexe.

-a- Du système à la systémique : la construction d’une théorie

L’émergence de la systémique

Pendant longtemps, la structure d’un objet déterminait ses fonctions. Or, avec le XIXème une transition s’est opérée vers une dialectique structure-évolution exposant que la structure d’un objet influe sur son évolution (Le Moigne, 1994). Ainsi, fonctionnement et évolution de l’objet deviennent contingents/simultanés. « La pensée scientifique du XIXème siècle s’oppose ainsi au point de vue qui voulait qu’en science les découvertes soient faites par des dissections microscopiques des objets. Elle introduit une alternative dans laquelle le centre d’intérêt passe des entités établies par l’analyse classique, aux qualités possédées par le système considéré comme un tout qui ne peut pas être décomposé » (Eddington, 1958, in Le Moigne 1994, p.53). Dès lors, la systémique se

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95 construit sur trois grands courants unificateurs : le structuralisme, l’information et la communication et la cybernétique (Durand, 2013). Dans le premier, l’objet est observé dans sa totalité et en évolution par un système de transformation (Piaget, 1968). Le structuralisme apporte { la systémique l’intelligibilité des phénomènes et de bonnes possibilités de formalisation, notamment en termes de construction structurelle à travers un processus, ou un constat d’équilibration ou d’autorégulation. La communication et l’auto-organisation s’intéressent quant { elle { l’ouverture et à l’échange de l’organisation avec son environnement (Durand, 2013). Enfin, dans le cas de la cybernétique, les efforts sont principalement menés sur le comportement des systèmes par les régulations de fonctionnement (Wiener, 1961). Née dans les années 1940, elle se fonde sur les boucles de rétroactions présentes dans les systèmes physiologiques et techniques. Elle pointe les faiblesses du structuralisme en tentant de comprendre l’objet étudié dans une dimension plus globale, au-delà de son propre fonctionnement, mais également au travers de sa situation d’interface avec un environnement perçu (Simon, 1969).

Ainsi, on perçoit deux appréhensions de la systémique : la systémique fondatrice des années 1950, très structurelle, et celle ayant émergé depuis les années 1980 plus orientée sur la communication et l’auto-organisation (Durand, 2013). On observe dans le deuxième cas une dynamique des systèmes, qui s’oppose aux systèmes statiques et qui donne la priorité à l’étude des facteurs de changements, soit une démarche où interviennent des fonctions non linéaires (Cambien, 2007). Il est alors utile de voir en quoi la systémique nourrit une approche transdisciplinaire.

La systémique : approches et théories

L’approche systémique répond { « la nécessité de se doter d’un système de représentation capable de développer une intelligibilité constructive de la complexité » (Donnadieu et Karsky, 2002). Elle vise la description et la compréhension de la complexité organisée, dans la mesure où l’objet étudié forme « un ensemble d’éléments en interaction dynamique organisés en fonction d’un but » (De Rosnay, 1975). Pumain dit en ce sens que la systémique traite des « entités à forte irrégularité (Pumain, 2003, p.4). » Le système représente dès lors une véritable avancée pour la connaissance dans la mesure où il est « pour les sciences sociales, un remarquable langage qui donne des contours à une réalité en soi floue, fuyante et fugitive » (Orain, 2001, p.59).

Ainsi, si l’on considère l’approche systémique selon la théorie générale des systèmes, elle correspond à une volonté transdisciplinaire de dégager des caractéristiques, des lois et schémas { l’ensemble des systèmes rencontrés. En résumé, l’approche systémique prend donc en considération quatre paramètres universels à chaque système : « la présence de systèmes ouverts et fermés sur leur environnement, la rétroaction servant au fonctionnement et { l’évolution d’un système, la causalité par l’interaction entre les éléments avec un état final et une organisation qui va caractériser la totalité, la croissance ou la différenciation au sein d’un système » (Von Bertalanffy, 1973).

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96 -b- La démarche systémique : fonctionnement et outils d’analyse

Le système : définition, composition et fonctionnement

Un système, du grec sustêma signifie initialement « un ensemble cohérent » (Donnadieu- Karsky, 2002), mais aussi « un ensemble d’éléments en interaction dynamique, organisés en fonction d’un but » (De Rosnay, 1975). L’interaction insinue ainsi que la variation d’un élément entraîne la variation du tout. C’est un premier élément de complexité. Le but évoque le fait que le système peut atteindre un état de stabilité dynamique, peut connaître des oscillations périodiques ou ne jamais atteindre une stabilité. Enfin, un système se situe par rapport à son environnement, c'est-à-dire dans le milieu intérieur (relations { l’intérieur du système), dans le milieu extérieur (relations avec son environnement) et dans le milieu englobant, soit l’ouverture ou non sur l’environnement au sens le plus large (Donnadieu et Karsky, 2002). On tient également compte d’un environnement passif, celui sur lequel agît le système, d’un environnement actif, celui qui l’influence.

Un système possède également une structure et un fonctionnement (Cambien, 2007). Par structure on entend sa frontière ou sa limite avec son environnement : les éléments qui le composent qui peuvent être dénombrés et assemblés en catégories, mais qui sont surtout susceptibles d’entrer en interaction, les réservoirs dans lesquels les éléments peuvent être rassemblés et un réseau de communication. Par fonctionnement, on entend les flux qui circulent entre les réservoirs, les vannes qui contrôlent les débits des différents flux, les délais et les boucles de rétroaction qui soit accélèrent le changement d’un système (boucles positives) ou le régulent (boucles négatives).

Le lien { l’environnement est également formalisé selon le système en boîte noire (Mélèse, 1979 ; Durand, 2013) (Figure 10, P.97). Cette représentation montre le système comme un transformateur de variables d’entrée en variables de sortie. Les entrées résultent de l’influence de l’environnement sur le système et les sorties de l’action du système sur l’environnement. Ces deux parties sont séparées par une durée qui est le temps de l’action, illustré par des variables de flux, soit un écoulement de grandeur et par des variables d’état qui indiquent une situation instantanée. Le principe de rétroaction est un autre élément essentiel, c'est-à-dire le fait que des informations sur les résultats d’une transformation sont renvoyées { l’entrée d’un système sous forme de données. Si ces nouvelles données contribuent à accélérer la transformation dans le même sens (naissances qui nourrissent la croissance démographique par exemple), on est en présence d’une boucle positive, tandis que si les nouvelles données agissent en sens inverse, on parle de boucles négatives qui stabilisent le système.

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97 Figure 10. Le système en boîte noire. D'après Durand, 2013.

De cette façon, « le comportement du système doit être évalué selon une chronique des transitions entre des états provisoirement permanents » (Le Moigne, 1994). Par ailleurs, parmi les éléments qui composent le système étudié on peut observer des sous- systèmes plus simples. Ces deux derniers éléments rejoignent encore notre thématique de recherche, par l’organisation en sous-système du potentiel de l’organisation innovante, ainsi que par l’évolution de l’organisation territoriale innovante en temps de crise.

Dans notre casd’études, il s’agira d’identifier les différents éléments générant de l’action au sein du système (acteurs et mécanismes de construction de l’innovation), les paramètres d’entrées soit le but de notre système (innovation, développement économique, performance), les effets/résultats, les éléments de stabilisation ou d’accroissement du mécanisme systémique (politique publique ou stratégie d’entreprises) et enfin d’évaluer les différents environnements dans lesquels s’intègre notre système dont l’évènement de crise. Par ailleurs, il sera déterminant de montrer quels sous-systèmes et quelle organisation sont en place entre les acteurs de l’innovation au sein même du système, mais surtout en évaluant la cohérence de l’ensemble, de confirmer ou d’infirmer l’existence d’un système.

La démarche systémique : quels outils ?

Il est important de tester le système face { une situation de crise, car il n’existe pas de changements réels sans crise. Il faut identifier des objectifs qui permettraient de corriger les écarts en cours d’action plutôt que d’effectuer une programmation détaillée

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98 pouvant être paralysante. Enfin, il est important de respecter les temps de réponse du système au sens où l’idée de durée est inhérente { un système. Ici, dans le cas où nous confirmons l’existence d’un système d’innovation, il s’agira en plus d’identifier l’ensemble des acteurs, de repérer les interactions qui les unissent et de les hiérarchiser, de voir comment les mesures développées par les acteurs publics ou privés peuvent orienter le système, d’évaluer les contraintes qui freinent la performance du système, d’établir ce qui justifie la dynamique d’innovation, mais aussi de tester notre système dans un contexte de bouleversement.

Dès lors, plusieurs étapes de la démarche systémique permettent d’appréhender les systèmes selon toutes ces contraintes et impératifs :

- l’analyse de système. C’est une méthode qui comprend l’étude des éléments, celle des structures (structure fonctionnelle avec la relation entre les variables, structure spatiale) et la dynamique du système c'est-à-dire les relations avec son environnement. L’objectif ici est de proposer une analyse qualitative du système en définissant les limites, l’architecture interne, les interactions entre les éléments les plus importants, les variables de flux, d’état, les boucles de rétroaction, la polarité et les délais éventuels. C’est la première étape qui correspond { un état des lieux du système.

- la modélisation qualitative. C’est la construction d’une représentation qui met en

évidence la structure et le fonctionnement du système. « Modéliser c’est concevoir puis dessiner une image { la ressemblance de l’objet » (Le Moigne, 1994). L’objectif ici est de dégager une représentation schématique du système étudié de manière à pouvoir observer les rouages organisationnels de l’objet de façon { rendre intelligible le comportement du système.

- la modélisation dynamique ou simulation. Ici est introduite la variable temps, pour voir

comment évolue le système sur un plus ou moins long terme. Il est donc déterminant de quantifier le système. Selon le degré de perfectionnement du système, il est également possible de tester le système en y insérant des paramètres spécifiques, susceptibles de faire évoluer son équilibre. Cette étape peut jouer une importance cruciale dans la prévision de phénomènes en tant qu’outil de prospective.

Dans notre cas, nous remplirons les deux premières étapes de la démarche systémique à savoir l’analyse de système et la modélisation qualitative. Notre recherche étant majoritairement qualitative, la modélisation dynamique ne paraît pas pertinente, dans la mesure où nous n’ambitionnons pas de faire de la prospective. Après avoir identifié l’ensemble des éléments relatifs au système régional d’innovation et proposé un schéma résumant les différentes interconnexions entre les acteurs et l’environnement (fonctions linéaires), nous observerons les facteurs de changement au travers de l’insertion de la fonction non linéaire qui agit sur le système : la crise économique de 2007-2008.

La systémique est donc une démarche globalisante dans la mesure où elle est théorie, démarche et outil (Figure 11, P.99). Théorie, parce qu’elle définît des règles générales aux différents systèmes pouvant être rencontrés dans la nature ou dans les sociétés humaines ; démarche, car elle permet d’appréhender un système selon plusieurs étapes

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99 de compréhension ; outil, puisqu’elle constitue une modalité d’action sur le système, via la compréhension de son fonctionnement présent et la prévision de ses futures attitudes. C’est donc une théorie opérationnelle précieuse dans un contexte de complexification du monde mondialisé.

Figure 11. La démarche systémique. D'après Durand, 2013.

Pour maximiser son utilisation, il convient toutefois de tenir compte de ses usages en géographie et de certaines de ses limites.

Système et démarche systémique en géographie

Systémique et complexité s’imbriquent déj{ en géographie au milieu du XXème siècle dans la mesure où Cholley évoque la théorie des milieux et régions géographiques comme des« combinaisons uniques de facteurs complexes et entrelacés » (Cholley 1942, in Orain, 2001, p.26). Selon Orain, ce n’est cependant que dans les années 1970-1980 que « les géographes, ont trouvé dans l’idée de système un appareil conceptuel permettant { la fois de penser l’intégration de l’hétérogène et d’apporter une légitimité scientifique { l’étude de la région » (Orain, 2001, p.29). Dès lors, plusieurs géographes ont amené différents apports aux travaux systémiques en géographie, même si le plus grand d’entre eux fût celui de système spatial qui « intègre les différents éléments de structures spatiales » (Brunet, 1979). Pinchemel évoque par exemple un systémisme des formes spatiales (Pinchemel, 1988), pendant qu’Auriac et Durand-Dastès cherchent à justifier pourquoi un phénomène se rencontre dans un lieu spécifique plutôt que dans un autre (Auriac, Durand d’Astès, 1981). La thèse de ce dernier « Système économique et espace » est d’ailleursdevenu un « classique » de la géographie contemporaine.

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100 Si Guermond dit { juste titre que « toute analyse géographie est d’essence systémique, car elle insiste sur l’importance des interactions » (Guermond, 1984, in Orain, 2001, p.42), la géographie a toutefois connu ses plus grandes progressions autour d’outils complexes développés et/ou utilisés par des auteurs quantitativistes. En effet, ces derniers ont beaucoup travaillé sur les mécanismes élémentaires de la complexité en géographie à savoir la croissance, la diffusion et le transport.

Plusieurs phénomènes géographiques ont pu être appréhendés grâce à la systémique, comme les discontinuités spatiales qui sont le changement topologique de phase d’un