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4. PROBLÉMATIQUE, HYPOTHÈSE DU RÉÉCHELONNEMENT DE LA CITOYENNETÉ ET MÉTHODOLOGIE

4.3 O BSERVER LE RÉÉCHELONNEMENT DE LA CITOYENNETÉ

4.3.2 Démarche et stratégie de choix des cas

L’hypothèse de la thèse repose sur l’idée de changement. La thèse s’inscrit dans une longue lignée de travaux étudiant les « grands processus » (Tilly 1984). Il s’agit de montrer que, dans des pays présentant des contextes au sein desquels se déroulent des processus de rééchelonnement de l’État, la citoyenneté se rééchelonne.

La position adoptée ici est de tirer les enseignements des travaux en politique comparée relatifs à la généralisation à partir de la comparaison approfondie d’un petit nombre de cas. Il existe un débat dans le champ de la politique comparée qui porte sur cette question. A. Lijphart, dans un article célèbre, note qu’il existe plusieurs méthodes pour établir des généralisations (Lijphart 1971 : 682). La méthode expérimentale est celle qui permet les généralisations les plus fondées car elle peut contrôler les variables dont on ne veut pas étudier l’impact (Lijphart 1971 : 683). La méthode comparative, comme la méthode statistique, permet d’établir des généralisations mais ne peut appliquer la clause ceteri paribus (« toutes choses égales par ailleurs »). En outre, la comparaison, à la différence de la méthode statistique, n’utilise qu’un petit nombre de cas et ne peut donc contrôler la validité des généralisations au moyen de corrélations partielles (Lijphart 1971 : 684). De nombreuses critiques provenant de comparatistes utilisant de nombreux cas, notamment les auteurs du courant lié au choix rationnel et/ou utilisant des méthodes statistiques, mettent ainsi l’accent sur la faible capacité de généralisation à partir de « small n studies » (Skocpol 2003 : 413).

14 J. Agnew définit la notion d’échelle géographique de la façon suivante : « (…) geographical scale is the

focal setting at which spatial boundaries are defined for a specific social claim, activity or behaviour »

Toutefois, la comparaison d’un petit nombre de cas présente également des avantages à condition de construire rigoureusement et stratégiquement la comparaison et de choisir judicieusement les cas. Selon A. Lijphart, un choix pertinent de cas ou même l’étude d’un seul cas peut ainsi livrer des résultats intéressants non seulement au niveau empirique mais également en termes théoriques (Lijphart 1971 : 691-3). Selon T. Skocpol, les études statistiques produisent des corrélations trop minces par rapport à celles produites par les études de cas en profondeur, attentives aux contextes et à l’analyse des processus dans le temps (Skocpol 2003 : 415). La preuve de la capacité de généralisation des études utilisant un petit nombre de cas judicieusement choisis est fournie par le livre de T. Skocpol sur l’étude des révolutions sociales en France, en Russie et en Chine (Skocpol 1985b).

Le choix des cas est donc une condition importante de la validité des généralisations. La thèse a pour but d’établir que dans un contexte de rééchelonnement de l’État, la citoyenneté se rééchelonne. Autrement dit, il s’agit de montrer que la citoyenneté se rééchelonne dans des pays qui connaissent un processus de rééchelonnement de l’État, en dépit des différences qu’ils peuvent présenter en termes de citoyenneté, de structure institutionnelle ou de forme de l’État. La démonstration nécessite une orientation méthodologique de type « comparaison universalisante » (« universalizing comparison ») définie par C. Tilly afin d’établir une généralisation. Cette méthode se définit par la comparaison de plusieurs cas - ici des pays – qui partagent le phénomène à étudier : “It aims to establish that every instance of a phenomenon follows essentially the same rule” (Tilly 1984 : 82). Afin de multiplier la force de la généralisation, nous combinerons cette approche avec un choix de pays contrastés. Selon M. Dogan et D. Pelassy, le contraste signifie que les différences sont fondamentales et font sens au regard du phénomène étudié :

« Le ‘contraste’, dans cette optique, n’est pas synonyme de différence triviale. Il est d’essence générale, c’est-à-dire qu’il implique que les situations retenues aient été choisies pour leur exemplarité » (Dogan et Pelassy 1981 : 146).

Donc, dans la thèse, le but de la comparaison est de montrer que dans deux pays choisis en raison de certaines différences et qui connaissent un processus de rééchelonnement de l’État, la citoyenneté se rééchelonne. Afin que la généralisation ait plus de poids, nous avons choisi des pays contrastés, d’une part du point de vue de la

citoyenneté dans la façon dont cette dernière organise la gestion de la diversité ethnique et, d’autre part, du point de vue de la forme institutionnelle des États. Ceci permettra de montrer que le lien entre le rééchelonnement de l’État et le rééchelonnement de la citoyenneté ne dépend ni du type de citoyenneté, ni de la structure des États.

Le premier pays faisant l’objet de la comparaison est le Canada, et, au sein, de ce dernier, nous nous centrerons sur le cas du Québec. Le Canada est un État fédéral et il partage un trait caractéristique avec d’autres pays, tels le Royaume-Uni ou l’Espagne, à savoir qu’il est un État multinational (Gagnon et al. 2003). Le caractère multinational du Canada est la source d’une différence de conception entre la majorité anglophone et la minorité francophone du pays, au sujet de la forme de fédéralisme – territorial ou asymétrique - devant prévaloir (Kymlicka 2003 : 220-235). Selon certains, le caractère multinational du Canada exige un fédéralisme asymétrique qui aurait pour résultat de nourrir différentes « possibilités » d’organisation des communautés nationales. Comme le note A.-G. Gagnon :

« Le fédéralisme multinational exige l’implantation d’un modèle asymétrique de gouvernance afin de permettre aux diverses communautés de donner à leurs citoyens la possibilité de se réaliser pleinement en misant sur les moyens adaptés pour enrichir les contextes de choix pour chacune des grandes communautés à l’origine du contrat de fondation » (Gagnon 2006 : 290)

Sans entrer dans ce débat, qui se trouve, selon W. Kymlicka, dans une impasse (Kymlicka 2003 : 234), nous pouvons dire qu’au Canada, deux grands modèles de citoyenneté coexistent du point de vue de la gestion de la diversité ethnique. Le premier, qui correspond à la philosophie défendue par l’État fédéral, est fondé sur la philosophie du multiculturalisme (Kymlicka 2003; Labelle et Salée 1999). Ce modèle, inscrit au sein de la Constitution canadienne lors de son rapatriement en 1982 par l’enchâssement de la Charte des droits et libertés, se définit par le fait d’« assurer le maintien et l’épanouissement de l’identité culturelle des minorités ethniques en favorisant leur attachement aux coutumes et à l’histoire de leur pays d’origine » (Labelle et Salée 1999 : 129). Cette politique a connu un souffle nouveau avec la loi sur le multiculturalisme, adoptée en 198815.

15 Cette loi prévoit en effet que :

« (…) la diversité culturelle est une réalité permanente et centrale, non pas marginale ou éphémère ; davantage qu’une simple politique culturelle, elle comprend des dimensions sociales,

Le second est propre au Québec et repose sur l’interculturalisme. Il est caractérisé par une reconnaissance et une acceptation des différences dans un espace marqué par des valeurs communes dont la pierre angulaire est la langue française. Il repose, à partir de l’Énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration de 1990, sur un principe de contrat moral :

« Au cœur de cet énoncé, un nouveau concept, celui de contrat moral traduit le principe selon lequel les nouveaux arrivants accepteraient de s’intégrer au Québec avec sa langue et ses valeur fondamentales tandis que la société québécoise tout entière s’engage à s’adapter à une réalité pluraliste où de nouveaux citoyens de pleins droits composerait une part croissante de celle-ci » (Gagné et Chamberland 1999 : 78).

Notons également que ce modèle a été réaffirmé récemment à la suite des travaux de la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles. Selon les auteurs du rapport de la Commission, G. Bouchard et C. Taylor :

« La notion d’interculturalisme - sauf pour les années récentes - n’a jamais été utilisée dans des textes officiels de l’État pour caractériser sa politique d’intégration (…). Cela dit, dans l’ensemble de la documentation gouvernementale sur le sujet, on repère aisément l’énoncé des prémisses ou des principes qui fondent encore aujourd’hui l’interculturalisme. Parmi ces derniers, un élément principal ou structurant se dégage. Dans ses versions anciennes et récentes, l’interculturalisme québécois est porteur d’une tension entre deux pôles : d’un côté la diversité ethnoculturelle et, de l’autre, la continuité du noyau francophone et la préservation du lien social. Il se caractérise aussi par l’accent (variable) mis sur le second pôle. Mais cet accent, qui fait écho à l’insécurité culturelle des Francophones, à leur sensibilité de minoritaires, se traduit principalement par une vigilance accrue pour tout ce qui touche à l’intégration et par une valorisation des rapprochements (échanges, communication, interaction, concertation, formation d’une culture commune, action intercommunautaire, enrichissement mutuel). Fidèle à l’idéal d’égalité, il ne s’érige cependant pas (et ne doit pas s’ériger) en une priorité qui instituerait une hiérarchie entre les citoyens » (CCPARDC 2008 : 119).

Évoquer le rééchelonnement de l’État dans un État fédéral pose le problème d’identifier de quel État il s’agit. Selon V. Lemieux, en théorie, un État fédéral se compose de deux ordres de gouvernement ayant une souveraineté partagée qui émane de

politiques et économiques ; elle s’adresse à tous les Canadiens et à toutes les institutions et non pas seulement aux groupes ethniques ; elle dit promouvoir la participation entière et équitable des individus et des communautés de toutes origines à l’évolution de la nation, au façonnement de tous les secteurs de la société et vise l’élimination de tout obstacle à cette participation ; elle cherche à favoriser la reconnaissance et l’estime réciproque des diverses cultures du pays et à encourager l’expression et les manifestations progressives de ces cultures dans la société canadienne ; (…) » (Labelle et Salée 1999 : 129).

Ces auteurs notent également que, à partir des années 1990, le gouvernement fédéral a mis l’accent sur une conception qui « cherche dorénavant à revaloriser la citoyenneté canadienne, à trouver des moyens de renforcer la cohésion et l’unité de la société canadienne par-delà la diversité culturelle » (Labelle et Salée 1999 : 129).

la Constitution. Chaque ordre a une compétence de légiférer officiellement définie (Lemieux 1997 : 21). Selon nous, afin de cibler le bon ensemble institutionnel, le bon « État », il s’agit de raisonner en tenant compte des compétences à étudier - dans notre cas, les politiques en direction des populations issues de l’immigration - et des acteurs impliqués ainsi que leurs rapports (villes et État). Depuis l’accord Canada-Québec signé en 199116, le Québec a compétence totale sur l’intégration des immigrants à la société québécoise. Il a la maîtrise de la formulation et de l’application des programmes avec la seule condition, mentionnée à l’article 26 de cet accord, que ces programmes soient équivalents à ceux mis en place dans le reste du Canada et qu’ils s’adressent également à tous les immigrants admis au Canada. De plus, selon l’article 92(8) de la Loi Constitutionnelle de 1867, les municipalités sont de compétence exclusivement provinciale. Évoquer le rééchelonnement de l’État, qui implique une analyse des rapports entre les municipalités et l’État dans le domaine des politiques en direction des immigrants, amène donc à analyser l’État québécois.

Le second pays sur lequel se porte notre choix est la France. La France est un État unitaire décentralisé, ce qui signifie que la forme de l’État y est différente de celle du Canada et donc du Québec. Rappelons qu’au sein d’un État unitaire :

« (…) la souveraineté interne et internationale appartient à l’État. Les autres personnes publiques, et notamment les collectivités territoriales, ne sont qu’une modalité de l’organisation administrative, elles n’existent que par l’État (…) » (Bourdon et al. 1990 : 29).

Le modèle de citoyenneté français diffère en outre de ceux du Canada et du Québec car il est « républicain ». Ce dernier, né lors de la Révolution, emprunte à différentes sources philosophiques (Kriegel 1998 : 83) mais repose avant tout sur l’idée de « pacte » ou de « contrat social » « qui a réalisé l’identité entre l’individu et le corps politique » (Schnapper 2000 : 49). Cette conception, essentiellement politique, s’accompagne de l’idée que l’intégration au corps politique repose sur l’assimilation culturelle :

« In the French tradition, the nation has been conceived in relation to the institutional and territorial frame of the state. Revolutionary and Republican definitions of nationhood and citizenship – unitarist, universalist, and secular – reinforced what was already in the Ancien

16 Il s’agit de la quatrième entente du genre. Ces accords s’expliquent par le fait que l’immigration est une

compétence partagée dans l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique (art 95) et par le fait que, progressivement, le Québec s’est doté d’outils en matière de politiques d’intégration (voir chapitre 2).

regime an essentially political understanding of nationhood. Yet while French nationhood is constituted by political unity, it is centrally expressed in the striving for cultural unity. Political inclusion has entailed cultural assimilation, for regional cultural minorities and immigrant alike » (Brubaker 1992 : 1)

Dans ce modèle, l’aménagement de la diversité ethnique ne se traduit pas, dans le modèle français de citoyenneté, par une reconnaissance ni sociale, ni juridique, de l’existence de communautés (Schnapper 2000 : 50).

Ce modèle a connu des évolutions en fonction des conjonctures politiques - voire une inflexion majeure dans la période récente - mais continue néanmoins de marquer les politiques françaises. À partir des années 1980, en dépit du fait qu’un discours lié au « droit à la différence » ait été affirmé par la Gauche socialiste avant et au moment de son accession au pouvoir en 1981 (Hargreaves 2007 : 182), celui-ci a été abandonné suite à la montée du Front National (Hargreaves 2007 : 183). « L’affaire du foulard islamique » en 1989 a entraîné une série de réponses institutionnelles - dont la création du Haut conseil à l’intégration (HCI) (Hargreaves 2007 : 183). Selon A. C. Hargreaves, la terminologie officielle, centrée autour de la notion d’intégration, met l’accent sur le fait que les politiques publiques doivent réduire les différences culturelles :

« (…) the whole thrust of the preferred term, ‘integration’, was to suggest that any difference separating minorities from the majority population were being reduced or eliminated by enlightened public policy” (Hargreaves 2007 : 183-4).

Selon cet auteur, malgré le durcissement de la politique d’acquisition de la nationalité sous le gouvernement Balladur (1993-1995), la notion d’intégration reste néanmoins au cœur des politiques françaises (Hargreaves 2007 : 184).

À partir de 1997, la politique française en matière de gestion de la diversité ethnique a connu une inflexion majeure, au cours de laquelle les mots de « diversité », « anti-discrimination » et égalité des chances » ont peu à peu acquis une place centrale (Hargreaves 2007 : 186-7). La Haute autorité de lutte contre les discriminations et l’égalité (HALDE) a ainsi été créée en 2005, notamment sous la pression d’une directive de l’Union européenne (Hargreaves 2007 : 190). D’autres changements peuvent être relevés (débat sur l’incorporation d’indicateurs d’appartenance ethnique dans le

recensement17, mesure de discrimination positive à l’entrée de Sciences Po pour les élèves des zones d’éducation prioritaires) (Hargreaves 2007 : 193-6 et 197).

Pour autant, si ces changements sont significatifs (Hargreaves 2007 : 210), le modèle républicain de citoyenneté reste, selon nous, prégnant. Par exemple, selon A. C Hargreaves, l’introduction de mesures de politiques publiques de type discrimination positive sur critère d’appartenance ethnique semble toujours « très improbable » (Hargreaves 2007 : 210, notre traduction).

La France et le Québec, au sein du Canada, correspondent donc aux critères de choix des pays que nous avons identifiés.

Au sein de ces deux ensembles, nous avons choisi pour terrain d’étude les villes de Marseille et Montréal. Ce choix s’explique en raison de la présence de groupes immigrants et de la place qu’ils occupent dans la vie de la cité. En premier lieu, selon Statistique Canada, Montréal est l’une des trois plus importantes régions métropolitaines de recensement (RMR) d’accueil des immigrants au Canada, avec Toronto et Vancouver. Elle se situe au deuxième rang (14,9 % des immigrants admis au Canada entre 2001 et 2006 s’établissent à Montréal) (Canada 2007 : 20). Par ailleurs, en 2009, la région métropolitaine de Montréal accueillait plus des trois quarts de l’immigration admise au Québec entre 1998 et 2007 (Québec 2009 : 15). Enfin, la caractéristique de la population immigrante est la diversité croissante de sa provenance (Piché 2003 : 236). Selon de nombreux auteurs, la diversité ethnique est ainsi un trait caractéristique de Montréal (Anctil 1984 : 441; Germain 1997 : 1; Meintel 2000 : 16; McNicoll 1993).

En second lieu, Marseille constitue également une ville diverse ethniquement en raison de sa localisation au bord de la Méditerranée (« Porte de l’Orient » selon le mot du journaliste Albert Londres), source d’une forte immigration à diverses époques18. La

17 À ce sujet, il semble que le recueil systématique de statistiques de ce type dans le recensement de la

population ait été abandonné. Le rapport du Commissaire à la diversité et l’égalité des chances, Yazid Sabeg, récemment remis au président de la République, prône plutôt un recueil de ce type dans le cadre d’enquêtes « volontaires et anonymes ». On pourra se reporter au site d’information en ligne

http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/societe/20090507.OBS6030/mesure_de_la_diversite__sarkozy_ decidera_en_juin.html, (consulté le 3 juin 2009).

18 Voir l’œuvre en plusieurs volumes de l’historien É. Témime : Migrances, Histoire des Migrations à

Marseille (1991). Les observateurs français de toutes les époques ont par ailleurs noté le contraste que

présentait de ce point de vue Marseille avec d’autres villes françaises (voir, pour quelques exemples, le

comptabilité des populations « immigrées » et issues de l’immigration, qui se base sur les travaux de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), ne permet pas de disposer des mêmes données qu’au Canada car les catégories statistiques diffèrent entre ces deux pays19. Les documents disponibles les plus récents, issus des recensements annuels20 de 2004 et 2005 pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), permettent néanmoins de montrer l’importance de la proportion des populations issues de l’immigration. En 2004, 9,7 % des habitants de la région PACA sont « immigrés », au sens de l’INSEE. Cette région se situe au troisième rang, en termes de pourcentage d’immigrés par rapport à la population totale, derrière l’Île de France et l’Alsace (France 2006d : 3).

4.3.3 Pour une analyse des rapports entre acteurs institutionnels dans le cadre des politiques de gestion de la diversité ethnique à l’échelle locale

L’utilisation dans la thèse de la notion d’échelle implique que le critère de l’analyse ne porte pas sur les politiques mises en place par un acteur en particulier, mais plutôt sur les relations que différents acteurs entretiennent dans la mise en place de politiques à une certaine échelle. La méthode de recherche développée dans la thèse doit permettre de vérifier que les politiques de gestion de la diversité dans les villes sont modifiées par les processus institutionnels de rééchelonnement de l’État. Il s’agit donc de comparer ces politiques dans le temps afin de montrer l’évolution des rapports entre les acteurs institutionnels dans le cadre de la mise en œuvre de ces politiques. La méthode privilégiée repose donc sur l’analyse des relations entre acteurs institutionnels au sein des politiques de gestion de la diversité ethnique à l’échelle urbaine. À partir

19 La définition employée par l’INSEE repose sur les critères du recensement de la population. Elle ne

permet donc pas un recensement de l’origine ethnique. En France, le terme « d’immigré » a une signification précise au sens de l’INSEE. Il s’agit d’une « personne résidant en France, née étrangère dans un pays étranger » (France 2006d : 16). Les catégories statistiques françaises et canadiennes ne se recoupent pas. Dans le reste de la thèse, nous emploierons néanmoins le terme « immigrant » dans le cas québécois. Pour le cas français nous utiliserons celui de « immigrés » plus commun dans le contexte français, sans faire de distinction avec le mot « immigrant », utilisé au Québec et au Canada.

d’une observation de ces rapports (de négociation, de collaboration, de force etc.)21, l’objectif est de saisir le rôle respectif et les pouvoirs de négociation des villes, de l’État central et des échelons locaux de l’État dans la gestion de la diversité ethnique à l’échelle urbaine.

L’hypothèse opératoire à vérifier est donc qu’à l’issue du rééchelonnement de l’État, l’État est un acteur majeur de la gestion de la diversité ethnique et que les villes et les échelons déconcentrés de l’État ont une marge de manœuvre par rapport à l’État central pour mettre en œuvre des politiques de gestion de la diversité ethnique à