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PARTIE III – HYPNOSE ET PSYCHOTRAUMATISME

1) Le psychotraumatisme

1.3. Déclinaison des troubles

Suite à un traumatisme ou une catastrophe, les réactions psychiques se déclinent selon un critère de temporalité :

1.3.1. La réaction immédiate

Lors de la confrontation à un événement potentiellement traumatique, un individu peut présenter dans les minutes qui suivent et jusqu’à 24 heures :

¾ un état de stress adapté : adaptation à une situation inhabituelle comprenant un état d’alerte face au danger dans les sphères cognitives, affectives, volitionnelles et comportementales. C’est une réaction focalisatrice d’attention, mobilisatrice d’énergie et incitatrice à l’action, coûteuse en énergie et accompagnée de nombreux symptômes neuro- végétatifs. Il peut conduire à l’épuisement physique et psychique.

¾ un état de stress dépassé : réaction inadaptée du fait d’un débordement des mécanismes de défense psychique, pouvant se présenter sous quatre formes distinctes :

. la sidération : état de stupéfaction cognitive, de stupeur affective et de sidération motrice. La pensée est court-circuitée, la volonté et les affects inexistants.

. l’agitation : état d’excitation psychique et comportementale, l’action étant désorganisée et stérile.

. la fuite panique : plus ou moins adaptée, en général désordonnée, pouvant soustraire le sujet au danger ou au contraire l’y précipiter. Elle peut être solitaire ou collective, contagieuse au groupe.

. l’action automatique : exécution de séquences de gestes répétés et imitateurs d’apparence normale, mais échappant à la conscience du sujet et pouvant donner lieu à une amnésie.

¾ des réactions névrotiques : réaction anxieuse avec appréhension exagérée ou attaque de panique, réaction pseudophobique déclenchée par un stimulus rappelant la catastrophe mais plus souvent retrouvée après le stress immédiat, réaction expresso-émotive avec cris, agitation, états seconds plus fréquents chez les personnalités hystériques (147).

¾ des réactions psychotiques : réaction confusionnelle avec obnubilation et désorientation spatio-temporelle, réaction délirante avec bouffée délirante polymorphe ou décompensation d’un délire chronique mais plus souvent après un intervalle libre de quelques jours, réaction mélancoliforme ou maniaque. Elles sont plus rares.

La CIM-10 désigne les troubles de cette période immédiate sous le diagnostic de “réaction aiguë à un facteur de stress“.

Tous les sujets impliqués dans une catastrophe font l’objet d’une réaction de stress. On admet que 15% des individus présentent une réaction de stress parfaitement maîtrisée, et que 15% ont une réaction de stress dépassé voire névrotique ou psychotique. Les 70% restants auraient une réaction apparemment normale et adaptée, mais précaire et à la merci du moindre facteur panique (147).

1.3.2. La réaction post-immédiate

¾ le retour à la normale : les désordres émotionnels liés au stress aigu disparaissent en principe sans suite ni séquelles, même lors d’une réaction initiale de stress dépassé.

Quelques crises d’angoisse demeurent possibles dans les jours qui suivent, mais la quiétude habituelle est vite retrouvée, sans envahissement par des souvenirs liés à l’événement.

¾ la phase de latence d’un syndrome psychotraumatique : il n’y a pas, dans ce cas, de symptômes évidents, mais une difficulté à recouvrer son cadre de vie antérieur. Il existe une obnubilation par le souvenir de la catastrophe, un sentiment de torpeur et de détachement, une analgésie émotionnelle et une distance sociale inhabituelle.

Cela peut aller jusqu’à un vécu de déréalisation ou de dépersonnalisation.

Des troubles mnésiques, une anxiété importante voire des crises d’angoisse, des symptômes dépressifs et des reviviscences peuvent également persister.

Une forme clinique paradoxale existe avec une dispersion et une exubérance euphorique témoignant d’un état euphorique-agité, proche d’un état hypomane.

¾ l’Etat de Stress Aigu ou ESA : il s’agit d’un diagnostic du DSM-IV, trouble survenant dans les 4 semaines suivant le traumatisme et d’une durée maximum également de 4 semaines, et que nous décrirons en seconde partie.

1.3.3. Les troubles chronicisés

Les séquelles chroniques sont situées 30 jours après le traumatisme, sont d’une durée de plus d’un mois, et sont essentiellement constituées de :

¾ l’état de stress post-traumatique ou PTSD : terme du DSM depuis 1980, adopté par la CIM-10 en 1992, correspondant au diagnostic français de syndrome psychotraumatique différé et durable ; le vocable de PTSD est actuellement admis par la communauté scientifique internationale.

Notons toutefois que l’éclosion d’un PTSD peut avoir lieu au 15ème jour suivant le traumatisme par exemple, diminuant ainsi la durée de la période post-immédiate.

Le risque de développer un PTSD est plus élevé chez des personnes ayant présenté un état de stress dépassé ou un état de stress aigu mais il apparait aussi chez certains n’ayant montré aucun trouble manifeste au préalable. Nous le détaillerons en partie B.

¾ modifications durables de la personnalité après une expérience de catastrophe : expression recouvrant le diagnostic ajouté en 1992 par les auteurs de la CIM-10 (150), correspondant à l’évolution possible du PTSD mais pouvant aussi bien, selon les auteurs, survenir en l’absence de phase préliminaire d’état de stress post-traumatique manifeste.

Le facteur de stress doit être d’une intensité telle que la vulnérabilité psychologique individuelle ne rentre pas en ligne de compte : torture, camp de concentration, assauts terroristes répétés…

Les modifications sont permanentes, caractérisées par une certaine rigidité et un déficit des capacités adaptatives. Elles doivent persister depuis au moins deux ans et altérer le fonctionnement social, interpersonnel et professionnel.

Elles se manifestent, comme le souligne le Dr C. NAVARRE en 2007 (147), par un triple blocage des fonctions du moi : fonction de filtration de l’environnement, de présence dans le monde et de relation à autrui.

Le blocage de la fonction de filtration se traduit par l’incapacité de distinguer dans l’environnement les stimuli dangereux des stimuli anodins d’où l’état d’alerte et la méfiance permanents, l’évitement des stimuli pathogènes, les sursauts au bruit, la résistance à l’endormissement –car il faut relâcher sa vigilance, et les réveils nocturnes fréquents.

Le blocage de la fonction de présence se manifeste par la perte d’intérêt pour les activités antérieurement motivantes, l’éloignement et l’attitude hostile vis-à-vis du monde, l’aboulie, l’impression d’avenir péjoratif et de perte d’espoir .

Le blocage de la fonction de relation à autrui se manifeste par une analgésie affective et un retrait social, le sentiment de ne pas être aimé ou compris, une irritabilité et une dérive sinistrosique (147).

Ces modifications peuvent donner au sujet l’impression d’un changement profond d’identité.