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PARTIE II – ACTUALITES DE L’HYPNOSE MEDICALE

4) Comportements hypnotiques

Nous avons déjà évoqué les différences existantes entre l’état hypnotique et l’état de veille au niveau comportemental, notamment avec les expériences d’ORNE en 1959. Evoquons cependant les indices permettant d’évaluer l’état hypnotique d’une personne, au niveau des comportements spontanés puis suggérés.

4.1. Comportements spontanés

4.1.1. Indices corporels

Ces signes donnent une appréciation de l’état du sujet, sans pour autant être spécifiques ni pathognomoniques de l’état hypnotique.

Le sujet adopte en général une posture de repos, les yeux fermés et montre une diminution nette de sa réactivité aux stimuli extérieurs. Il est peu enclin à la parole et présente un état de détente corporelle, une relaxation de la musculature volontaire, une inhibition des mouvements volontaires, des mouvements automatiques, des contractions musculaires saccadées, une activation passagère des muscles lisses, une inhibition du réfexe de déglutition, une dysarthrie légère avec bradyphémie, une baisse de la tension artérielle, des modifications perceptuelles ou sensorielles, du schéma corporel.

4.1.2. Indices psychologiques

Nous avons aussi déjà parlé des études sur la neurophysiologie de l’hypnose, dont celle de H. CRAWFORD de 1995 (55) révélant des performances accrues au niveau de la mémoire visuelle et spatiale, l’imagerie et les tâches de mémoire figurative en hypnose.

Soulignons qu’il existe principalement, en hypnose, une baisse du niveau d’attention par rapport à la réalité extérieure, notamment au niveau de la conscience de la situation et du corps dans l’espace, et une diminution des activités de contrôle. D’où l’image souvent employée de “lâcher-prise“.

Il existe de plus des modifications dans la perception de l’environnement, avec en général perception moindre des bruits parasites comparée à la voix du thérapeute, ainsi qu’un relâchement des associations d’idées.

La pensée se fait plus sur un mode analogique que digital, avec une interprétation littérale des mots c'est-à-dire que le sens concret est retenu en premier à défaut de l’abstraction ou de la négation.

La logique est particulière, différente, avec la possibilité d’accepter des incompatibilités logiques dans la perception, la sensation ou la cognition.

4.2. Comportements suggérés ou phénomènes hypnotiques

De nombreux phénomènes hypnotiques, désignant les expériences ou comportements issus des suggestions hypnotiques, peuvent être observés et il serait ardu d’en faire une liste exhaustive. Cependant nous pouvons les résumer ainsi :

4.2.1. Effets sensitivo-moteurs

Au niveau du système moteur volontaire il est possible d’induire des contractions musculaires variés ou bien d’inhiber le mouvement : paralysie, rigidité ou catalepsie.

Il est aussi possible de stimuler le système moteur involontaire : provoquer la salivation, la sécrétion d’enzymes digestives ou des réactions allergiques par exemple.

Au niveau sensitif, les suggestions hypnotiques peuvent entraîner une hyperesthésie, une hypoesthésie, une anesthésie ou perte de sensibilité, une analgésie ou disparition douloureuse, ou encore des hallucinations sensitives selon Y. HALFON en 2007 (143).

4.2.2. Effets mnésiques et idéationnels

L’amnésie est un phénomène hypnotique bien connu, pouvant concerner des événements passés ou le fait même d’être en transe. L’amnésie post-hypnotique, l’oubli de ce qui s’est passé durant la séance, est un marqueur de transe profonde.

Certains souvenirs oubliés peuvent revenir grâce à l’hypnose. En revanche, il faut être prudent dans ce domaine afin de ne pas provoquer la création de souvenirs erronés.

Il existe une distorsion temporelle en hypnose , et il est possible de créer une contraction ou une expansion du temps durant la séance.

La progression en âge, le fait de faire des projections dans le futur, ainsi que la régression en âge : retourner dans le passé sont des expériences hypnotiques assez courantes. Le sujet qui effectue une réelle régression en âge revit littéralement les événements comme s’il avait de nouveau l’âge en question, et, par exemple, va communiquer de la même façon qu’à cet âge. Les différentes émotions comme la colère ou la joie peuvent être provoquées, et les processus symboliques comme les rêves induits, l’écriture automatique, l’aphasie ou l’agnosie existent aussi.

Les hallucinations provoquées peuvent être positives, c'est-à-dire une perception sensorielle sans objet à percevoir, ou négatives : la disparition d’une perception.

Contrairement aux mouvements actifs que l’on obtient dans 70 à 80% des cas, les hallucinations pendant ou après l’hypnose sont plus rares : 30 à 45% de réussite selon D. MICHAUX en 2007(143).

4.3. Profondeur et mesure de l’hypnose

Les outils de mesure ont évolué avec le temps, distinguant en général les transes légères, moyennes et profondes, selon une hiérarchie supposée du niveau de difficulté des suggestions. La réalisation d’une suggestion rarement observée indique en général un niveau de transe hypnotique supposé élevé.

Il existe donc plusieurs outils de mesure, les plus fiables étant les échelles de Stanford mises au point vers la fin des années 1950 en Californie par WEITZENHOFFER et HILGARD(197).

Elles permettent de disposer d’un jeu d’outils de mesure se prêtant réellement à une utilisation psychométrique. Il s’agit de procédures d’induction hypnotique standardisées avec plusieurs suggestions de difficultés variables, permettant de déterminer la susceptibilité hypnotique des sujets. Ces échelles ont un fort niveau de cohérence et montrent une grande stabilité des mesures, ce qui en a fait la référence incontournable des études portant sur l’hypnose. L’échelle de Stanford forme A est présentée en Annexe III.

Inspiré de la description des niveaux de transe hypnotique de G. SALEM de 2007 (167)ainsi que de celle de DAVIS ET HUSBAND rapportée par Y. HALFON en 2007 (143), voici un tableau résumant certaines caractéristiques des niveaux de transe, en sachant qu’il n’est pas exhaustif et qu’il existe parfois de grandes différences interindividuelles.

Profondeur Symptômes selon Davis et Husband / selon Salem(italique)

Réfractaire

Hypnoïde

Relaxation

Battement des paupières Fermeture des yeux

Relaxation physique complète

Transe légère

Catalepsie oculaire Catalepsie des membres Catalepsie rigide

Anesthésie (main gantée)

Légers mouvements, relaxation, battements des paupières Salivation augmentée

Baisse de la fréquence respiratoire et mouvements respiratoires approfondis, Affaissement du menton et relaxation des muscles du visage, congestion des lèvres

Transe moyenne

Anesthésie partielle Anesthésie post-hypnotique Changements de personnalité

Simples suggestions post-hypnotiques Illusions kinesthésiques ; amnésie totale

Augmentation de la relaxation et de la sensation de calme intérieur

Changements du rythme respiratoire et du tonus musculaire congruent au thème Poursuite des réajustements corporels adaptatifs

Mouvements oculaires rapides et réponses concrètes aux suggestions

Transe profonde

Capacité d’ouvrir les yeux sans modifier la transe Suggestions post-hypnotiques fantaisistes Somnambulisme complet

Hallucinations visuelles positives post-hypnotiques Hallucinations auditives positives post-hypnotiques Amnésies post hypnotiques systématisées

Hallucinations auditives négatives

Hallucinations visuelles négatives, hyperesthésies

Etat somnambulique Lévitation possible des bras Activité physique ralentie

Réponse ralentie aux suggestions et difficulté à parler sans stimulations extérieures

Soulignons que le somnambulisme correspond à la conjonction d’une forte suggestibilité dans tous les domaines et d’un fort vécu hypnotique.