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1.4 T RANSFERT DE CONNAISSANCES AU SEIN DES EM 38

1.4.4 Facteurs influençant le transfert de connaissances 49


1.4.4.4 Caractéristiques contextuelles: facteurs exogènes 75

1.4.4.4.1 Culture nationale 75


Des travaux théoriques et empiriques montrent que le transfert de connaissances entre unités d’une même organisation est influencé par la distance socioculturelle existant entre les pays d’origine des unités impliquées dans le transfert. De façon générale, la plupart des recherches en la matière considèrent que la présence de similarités entre deux contextes facilite le transfert de connaissances et vice versa. Backley et Carter (2002) utilisent la notion de « frontières des connaissances » (knowledge boundaries) en faisant référence aux différents styles cognitifs, ainsi qu’aux différences dans les aspects linguistiques, sociaux et identitaires en vertu desquels les individus attribuent un sens à leurs activités. Toutes ces variables composent ce que Hofstede (1984) appelle « la programmation mentale » ou, dans un langage courant, la « culture sociétale ».

En effet, Hofstede (1984) indique que les connaissances utilisées pour résoudre un problème organisationnel dans un contexte donné ne seront probablement pas appropriées dans un contexte culturel distinct. Pour définir ce qu’est la culture, l’auteur

retient cinq dimensions. La première correspond à l’indice de la distance hiérarchique définie par l’auteur comme suit : « La distance hiérarchique est donc précisément la perception du degré d’inégalité de pouvoir entre celui qui détient le pouvoir hiérarchique et celui qui y est soumis. » (Hofstede, 1984 : 82). Les études du comportement démontrent que l’espèce humaine a des attitudes innées de domination (Galbraith, 1985). Tout au long de l’histoire de l’humanité, ces attitudes ont été présentes dans les sociétés. Les sources d’inégalité peuvent être d’ordre physique ou intellectuel; cela peut également être l’appartenance à un groupe particulier de la population. Certaines sociétés acceptent ces inégalités, vivent avec elles et les trouvent tout à fait normales. À l’opposé, il existe des sociétés qui ont tendance à réduire au minimum la domination d’une partie de la population sur une autre ou, à tout le moins, à en réduire le caractère visible (Hofstede, 1984).

La deuxième dimension correspond à l’indice de l’individualisme. Même si l’être humain est, par définition, un être social comme l’écrit Hofstede « [...] les sociétés diffèrent entre elles dans la relation que les individus entretiennent avec les autres membres de la collectivité » (1984 : 123). Cette dimension permet de classer les sociétés existantes en deux catégories dinstinctes : les sociétés individualistes et les sociétés communautaires. De façon générale, les membres d’une société individualiste valorisent beaucoup la liberté, le choix individuel et la vie privée des individus. Les liens entre les membres d’une telle société sont plutôt faibles. À l’intérieur d’une société communautaire, c’est au contraire le temps consacré à la collectivité qui est considéré par les membres comme étant le plus important. L’individu est, dans ce type de communauté, perçu avant tout comme représentant du groupe, de la famille ou de l’ethnie (Hofstede, 1984).

La troisième dimension culturelle identifiée par Hofstede est celle de la masculinité. Cette dimension représente le degré auquel les valeurs de compétition, de performance et de succès (traditionnellement associées aux hommes) dominent les valeurs dites « féminines » comme la qualité de vie, les relations personnelles, l’aide à autrui et la solidarité. Cette dimension repose sur le fait que la répartition sexuelle des rôles sociaux

ne se fait pas de la même façon dans toutes les sociétés. Plus les rôles sont différenciés, plus la société manifeste des traits masculins. Plus les rôles sont interchangeables, plus la société se révèle féminine.

Enfin, la dernière dimension définie par Hofstede est le contrôle de l’incertitude. Cette dimension, selon les termes de l’auteur, « mesure le degré de tolérance qu’une culture peut accepter face à l’inquiétude provoquée par des événements futurs » (1984 : 82). Il existe des sociétés qui acceptent cette incertitude et vivent au jour le jour (faible contrôle de l’incertitude). Dans d’autres sociétés, les individus cherchent à maîtriser l’avenir et à éliminer toute incertitude en ayant recours à la science et à la technologie ou en créant des institutions qui leur procurent une sécurité relative face aux imprévus. Cette sécurité peut être assurée par des règles juridiques de même que par la religion. Un peu plus tard, Hofstede ajoute une cinquième dimension selon laquelle se distinguent les sociétés : l’orientation temporelle. Par cette idée, le chercheur indique qu’il existe des sociétés ayant une orientation à long terme, contrairement à d’autres qui vivent plutôt dans une perspective à court terme (Hofstede, 1992).

D’autres chercheurs ont également contribué à la définition du concept de « culture ». Trompenaar et Hampden-Terner (1998) ont empiriquement identifié sept dimensions culturelles distinctes. L’universalisme peut être illustré par la phrase suivante : « What is good and right can be defined and always applies » (1998 : 8). Contrairement à cette approche, la culture particulariste accorde plus d’attention aux circonstances particulières et aux obligations découlant des relations entre individus. Dans les sociétés dites « particularistes », les individus accordent moins d’importance aux codes sociétaux abstraits. L’individualisme fait référence à la perception de l’homme comme individu seul et unique. Pour illustrer cette dimension, la question suivante peut être posée: « […] is it more important to focus on individuals so that they can contribute to the community as and if they wish, or is it more important to consider the community first since that is shared by many individuals ?» (1998 : 9). Est-ce que les interactions entre individus doivent être neutres ou bien émotionnelles ? Est-ce que les émotions sont acceptables ou bien est-ce que les relations entre individus doivent en tout temps

demeurer objectives et neutres? Ces questions définissent la troisième dimension culturelle identifiée par ces auteurs. La quatrième dimension, quant à elle, met en valeur le type de relations existant entre individus. Dans plusieurs pays, les relations diffusées (ou informelles), qui ne sont inscrites dans aucun protocole, sont beaucoup plus fructueuses que les relations spécifiques, définies, par exemple, par les termes d’un contrat. La cinquième dimension fait référence au statut de l’individu dans la société. Dans certaines cultures l’individu est jugé selon ce qu’il a accompli durant sa vie. Dans d’autres cultures, le statut social est attribué à la naissance ou bien selon le sexe, selon l’appartenance à une classe sociale, selon le réseau de connaissances, etc. La sixième dimension culturelle identifiée par Trompenaar et Hampden-Turner, est la dimension temporelle. Les représentants de différentes cultures n’attribuent pas la même valeur aux accomplissements passés, présents et futurs. Dans certaines sociétés, le temps est perçu comme une ligne continue, composée d’une série d’événements séquentiels; dans d’autres, le temps est plutôt cyclique, composé d’activités répétitives. Finalement, la dernière dimension est l’attitude face à l’environnement. Il existe des cultures où les gens croient à la suprématie de la nature et des forces extérieures sur l’individu et jugent qu’il faut vivre en harmonie avec le monde qui les entoure. À l’opposé, certaines sociétés considèrent l’homme comme une pièce maitresse de la nature, capable de soumettre le monde extérieur à sa volonté.

En se basant sur les dimensions culturelles que nous venons d’exposer, Kedia et Bhagat (1988) avancent une série de propositions théoriques concernant l’influence de différents profils culturels sur le transfert de connaissances. Les quatre dimensions du modèle hofstedien ont amené les chercheurs à soutenir l’idée selon laquelle un transfert de connaissances se produisant dans un contexte multiculturel sera plus facile entre des pays culturellement proches. Le travail de Bhagat et al. (2002) reprend le cadre théorique précédent et apporte certaines précisions au niveau des variables utilisées. Ainsi, les caractéristiques suivantes sont ajoutées aux connaissances à être transférées : les connaissances simples / complexes, tacites / explicites et indépendantes / systémiques. En ce qui concerne la dimension ontologique, les auteurs distinguent la connaissance individuelle, sociale et structurelle (Bhagat et al., 2002).