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Chapitre 2 Révision conceptuelle de la Grille d’Analyse du Contre-transfert (GAC) et

2.3 Méthodologie

2.3.4 Cueillette de données

2.3.4.1 Participants

L’échantillon total était constitué de 107 participants. Au moment du recrutement, 75 d’entre eux étaient des étudiants en psychologie complétant leur troisième année de baccalauréat ou leur première année à la maitrise, sans avoir entrepris leur stage clinique. Tous ces participants prévoyaient s’engager dans des études supérieures en psychologie et dans la pratique clinique professionnelle de la psychothérapie aux termes de leurs études. Sept participants étaient des thérapeutes en formation complétant leur doctorat en psychologie et faisant de la pratique clinique au moment de l’étude. Treize participants de notre échantillon étaient des thérapeutes juniors, c’est-à-dire ayant moins de 10 ans d’expérience clinique. Douze participants étaient des thérapeutes seniors, ayant 10 années ou plus d’expérience en pratique clinique autonome. Cent-deux des participants venaient de Québec et des environs alors que cinq étaient de la région de Montréal. L’échantillon comprenait 77 femmes et 30 hommes. L’âge moyen de

l’échantillon était de 28 ans (ET = 8.9 ans) et variait entre 19 ans et 57 ans. Les

thérapeutes recrutés présentaient des niveaux d’expérience professionnelle variés, étaient d’approches théoriques variées et présentaient des caractéristiques personnelles et professionnelles diversifiées. Chaque participant a été informé des implications de leur participation à l’étude et chacun a donné par écrit et verbalement son consentement libre et éclairé.

Cet échantillon était constitué de deux sous-échantillons recrutés dans le cadre de deux études distinctes. Un premier échantillon était constitué de 47 participants, tous étudiants au baccalauréat ou à la maitrise en psychologie et n’ayant pas d’expérience clinique. Ces participants ont été exposés à la même procédure pour mesurer leur AM-T, ainsi qu’aux mêmes vignettes cliniques (trois patients) que ceux de la présente étude. Des données sociodémographiques avaient également été recueillies pour ces participants. Ces participants ont donc été intégrés à l’échantillon de l’étude actuelle et leur AM-T a été recodifiée à partir de la GAM-T révisée. Ce sont ces scores d’AM-T qui ont été conservés pour les analyses de la présente étude. Le second échantillon constitué de 60 participants a été recruté auprès d’une population de thérapeutes gradués et possédant un niveau d’expérience appréciable.

2.3.4.2 Mesure d’Activité Mentale

La mesure de l’AM-T s’effectuait individuellement, dans une salle de psychothérapie. Il s’agissait d’une activité de visionnement de sept vignettes cliniques vidéo, où le participant contrôlait le rythme du visionnement à l’aide d’une télécommande. L’activité durait entre 30 et 90 minutes. Les participants recevaient la consigne de réagir spontanément, à voix haute, à chacune des vignettes, en arrêtant la bande vidéo lorsqu’une réaction se présentait. Cette technique consiste à verbaliser les pensées, fantaisies, réflexions cliniques, impressions diagnostiques ou souvenirs qui viennent à l’esprit, de façon la plus spontanée possible. Cette procédure a été utilisée précédemment dans le cadre d’autres études portant sur la GAC et a été montrée comme étant efficace pour susciter et mesurer l’AM-T chez les participants (Ensink et al., 2013; Parent, 2005). Un exemplaire des consignes données au participant est présenté en annexe B.

Les vignettes cliniques vidéo ont été constituées à partir d’entrevues réalisées par des cliniciens d’expérience auprès de patients consultant dans une clinique de psychologie de la région de Québec. Les patients ont donné leur consentement à ce que le matériel soit utilisé dans le cadre de la recherche. Seules les interventions des patients étaient

présentées dans les vignettes vidéo (extraits vidéo visionnés), les interventions de l’interviewer ayant été retirées afin de ne pas influencer les participants. Afin de minimiser l’effet de variables potentiellement confondantes, les patients provenaient tous d’une population clinique présentant des traits dans le registre de l’organisation limite de la personnalité (adolescents à risques de développement d’un trouble de la personnalité limite). Ce type de patient a été retenu, car l’AM-T est grandement sollicitée par les individus présentant ce type de problématique (Dubé & Normandin, 1999). Les patients réels constituant ces vignettes ont reçu un nom fictif et sont désignés dans l’étude comme étant les patients A, B et C. Ces trois adolescents étaient des garçons similaires quant au diagnostic et à la problématique générale. Ces patients avaient tous une histoire passée ou présente de prise en charge par la protection de la jeunesse. Ils présentaient tous un haut niveau de délinquance et des comportements antisociaux (tels le vol à l’étalage, le vandalisme), mais présentaient aussi des caractéristiques individuelles qui leur sont propres. Lors du visionnement, l’âge ainsi que des informations factuelles sur la problématique et les comportements étaient présentés avant chaque vignette.

2.3.4.3 Codification et coteurs de l’AM-T

Les réactions spontanées des thérapeutes ont été enregistrées et retranscrites verbatim par six assistants de recherche qui ignoraient l’identité des participants, pour ensuite être codifiées à l’aide de la GAM-T révisée. Chaque protocole comprenait les réactions d’un participant à la série de sept vignettes cliniques.

La méthode de codification de la GAM-T conceptualise les trois principales catégories d’AM-T comme étant des dimensions pouvant toutes être utilisées par le thérapeute. Ce dernier peut les utiliser simultanément, de façon séquentielle ou parallèle dans son processus d’écoute et de pensée. Chaque AM-T est évaluée sur une échelle de 0 à 4 et le score sur l’échelle reflète la contribution relative de chaque AM-T dans le processus d’écoute du thérapeute pour une vignette donnée. Un score de 0 signifie qu’il y a absence de cette AM-T dans la vignette et un score de 4 signifie que l’AM-T est claire et

complète et constitue le mode privilégié du thérapeute. Cette méthode de codification permet le dégagement de scores distincts pour chaque forme principale d’AM-T (trois scores sont donc attribués par vignette, un score pour chaque échelle d’AM-T). Le score global du participant est déterminé par la moyenne des scores pour l’ensemble des vignettes, sur chaque échelle d’AM-T (dégageant ainsi un score global par échelle d’AM-T). Dans le système de codification, le coteur choisit également une AM-T dominante à travers les trois échelles, qui représente l’AM-T ayant le plus d’impact dans la vignette. La feuille de codification utilisée est présentée en Annexe C.

Les verbatims ont été codifiés par deux coteurs formés à la GAM-T. Les coteurs étaient deux doctorant(e)s en psychologie. Pour effectuer la codification, ils utilisaient tous deux le manuel de codification révisé de la GAM-T. Ces coteurs étaient aveugles quant aux caractéristiques ou à l’identité des participants. Lors de la phase d’entente interjuge, avant la codification officielle du matériel, une période de pratique a été effectuée, où les juges s’exerçaient à l’aide de protocoles issus de précédentes études. Lorsqu’il y avait désaccord, les divergences étaient discutées et résolues à l’aide de cotes consensuelles. Suite à la formation, les coteurs ont codifié indépendamment les mêmes protocoles représentant 10% des protocoles de la présente recherche. Des mesures d’accords interjuges ont été calculées à partir des cotes obtenues. Les juges ont ensuite coté de façon indépendante le reste du matériel. Lorsque la moitié du matériel restant a été codifiée, les juges ont procédé à nouveau à la codification de trois protocoles pour vérifier si l’entente était toujours de niveau satisfaisant.

2.3.4.4 Mesure du Fonctionnement Réflexif

Suite à la mesure de l’AM-T, huit participants de l’échantillon ont également été inclus au volet pilote de cette étude, concernant la mesure du FR personnel du thérapeute. La mesure reconnue du FR à partir du Adult Attachment Interview (AAI) (George et al., 1985) est une procédure d’envergure qui peut s’avérer longue et couteuse. De plus, bien que certains liens théoriques aient été soulevés entre l’AM-T et le FR, aucune donnée empirique n’est disponible à ce jour dans la littérature scientifique concernant le lien

entre les AM-Ts et le FR du thérapeute. Pour ces raisons, nous nous sommes proposés d’effectuer d’abord une étude préliminaire pour explorer le lien entre ces construits. L’entrevue AAI a été administrée à ces huit participants afin de mesurer leur FR. Ces participants ont été rencontrés par une professionnelle de recherche qui a administré l’entrevue AAI. Cette personne était formée spécifiquement pour l’administration de cette entrevue.

Le AAI est une entrevue semi-structurée s’attardant aux expériences passées qu’ont eues les participants avec leurs principales figures d’attachement. Le temps d’administration est d’une à deux heures et l’entrevue comporte 20 questions prédéterminées (questions ouvertes). Au cours de l’entrevue, les participants se voient demander de donner cinq adjectifs pouvant décrire la relation qu’ils avaient avec chacun de leur parent à l’enfance et se font ensuite solliciter à prodiguer des exemples spécifiques illustrant chacun de ces adjectifs. Les participants sont ultérieurement questionnés sur ce qu’ils faisaient lorsqu’ils étaient bouleversés ou dérangés affectivement, sur ce qui se produisait lorsqu’ils étaient blessés ou malades, sur un vécu potentiel de menaces de la part des parents, sur l’expérience de sentiments de rejet au sein de la famille et sur la façon dont le participant comprend les comportements des parents. L’entrevue se centre ensuite sur l’expérience de deuils de personnes significatives et sur les expériences d’abus potentiellement vécus. Finalement, les participants se voient demander s’ils considèrent que certaines expériences qu’ils ont vécues ont nui ou auraient pu nuire à leur développement et sur la façon dont, selon eux, leurs expériences ont affecté leur personnalité.

2.3.4.5 Codification du Fonctionnement Réflexif

Les entrevues AAI ont été enregistrées en format vidéo, ensuite transcrites verbatim et finalement dirigées vers les coteurs respectifs pour la cotation du FR. Les entrevues ont été codifiées par deux coteurs entraînés, Nicolas Berthelot, Ph.D. et Julie Maheux, Candidate au Ph.D., tous deux formés par Karin Ensink, Ph.D.

Le système de cotation du FR s’intéresse uniquement aux questions spécifiques, soient celles qui demandent une réflexion de la part du participant et une considération d’états mentaux complexes non observables. Six questions de ce type font au départ parties intégrantes de l’entrevue. D’autres sous-questions demandant au participant sa compréhension de ce qui a amené l’autre ou lui-même à agir d’une certaine façon sont aussi considérées. Les réponses sont individuellement cotées à partir d’une échelle sur 11 points allant de FR négatif/bizarre (-1) à FR élevé/exceptionnel (9). Ces cotes de FR sont déterminées en fonction de : 1) la conscience qu’ont les participants de la nature des états mentaux; 2) l’intérêt qu’ils démontrent à comprendre les comportements en termes d’états mentaux sous-jacents; 3) leur reconnaissance de l’aspect développemental des états mentaux; 4) leur reconnaissance des états mentaux en lien avec l’interviewer. Le manuel de cotation du FR (Fonagy et al., 1998) décrit les sous-composantes de chacun de ces aspects et donne des illustrations de FR en lien avec ces critères.

2.4 Résultats