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Du contrôle de la voie publique au contrôle de salubrité

tout en s’occupant des objets de la vie quotidienne

1. Du contrôle de la voie publique au contrôle de salubrité

a. La voie et la salubrité publique à travers les rapports quotidiens et les tableaux mensuels

La part de l’activité des commissaires consacrée à la voie publique est considérable. En effet, il y a 30 faits consignés qui sont en relation avec la voie publique, soit 14,7%, sur la totalité des 204 délits constatés sur les rapports quotidiens de janvier, février et mars 1834. Les tableaux mensuels, quant à eux, relatent seulement 6 faits, à savoir 2%, des procès-verbaux qui ont un rapport avec la voie publique. On suppose ainsi que la mauvaise circulation des voitures n’était pas à même de mériter un procès-verbal. Cependant, on constate qu’il y a une part très importante de procès-verbaux qui sont intentés aux personnes commentant des délits compromettant la salubrité publique. En effet, 13,5% des procès-verbaux concernent ces faits. A l’inverse, il n’y a aucun rapport écrit par les commissaires de police sur des délits compromettant la salubrité publique. On peut donc émettre l’hypothèse que les commissaires de police avaient pour principe de ne pas mentionner les délits compromettants la salubrité publique. L’examen des délits qui construisent ces deux catégories pourrait sans doute nous aider à comprendre cet état de choses.

La voie publique comprend plusieurs types de délits. Nous pouvons apprécier leur variété à travers le tableau 13. Tout d’abord, les commissaires de police sont confrontés à la gestion de la circulation des voitures publiques. Plusieurs titres, ou motifs, servent à désigner les délits de circulation. Il y a la mention « voiture publique » qui sert à la fois à désigner un

stationnement gênant508 et la plainte des voyageurs qui trouvent que « les diligences de Nantes

165 compromettent leur sûreté par la surcharge de ces voitures. »509 On trouve également trois « voitures non éclairées » et deux « voitures mal stationnées ». Un autre fait, majoritairement lié à la circulation sur la voie publique, correspond à l’accident. Les commissaires de police ne rapportent pas moins de 14 accidents liés à la circulation de voitures ou d’animaux. Ces faits sont mentionnés soit par « Accidents sur la voie publique »510 soit par « Accident », tout simplement. Par exemple, le commissaire Tribert consigne sur l’un de ses rapports qu’un maçon en haut d’une échelle est tombé mortellement à cause d’une voiture qui l’a percuté. Le commissaire signale également qu’il a connaissance de la personne qui conduisait la voiture. On remarque donc que le commissaire de police souhaite faire une enquête à ce propos. La troisième catégorie de faits concernant la voie publique concerne ce que les commissaires appellent l’« embarras de la voie publique » ou le « refus d’enlever les décombres ». Les animaux constituent, pour terminer, le dernier type d’infraction qui peut entraver la circulation publique. Par exemple, on remarque qu’un homme s’est vu administrer un procès-verbal car il menait son cheval au galop sur la voie. Il est vrai que nombreux sont les accidents causés par les animaux étant donné qu’à cette époque, ils circulaient eux aussi sur la voie publique.

Les animaux nous amènent, tout naturellement, à analyser la question de la salubrité publique. On constate, par exemple, que les commissaires de police ont intenté un procès-verbal à 17 personnes différentes car celles-ci avaient « nourri et élevé des porcs en ville malgré l’incitation qui leur a été donnée de s’en défaire. »511 Ils écopent chacun de 2 francs d’amende. La question de la salubrité, on l’a vu, importait beaucoup dans les tableaux mensuels de procès- verbaux. Le jet, par la fenêtre, d’un pot rempli d’un liquide « sale » fait l’objet d’une mesure de répression importante. En effet, 37,5 % des objets en lien avec la salubrité concernent le « jet », par la fenêtre, d’eau sale et de matières organiques humaines et font l’objet, nous l’avons vu, d’une contravention généralement équivalente à 1 franc. Celle-ci peut être plus importante, de l’ordre de 3 francs, quand un passant reçoit le contenu du pot sur la tête512. Il y a également le problème non négligeable des immondices, des latrines non ou mal vidangées. Quant à la mention « salubrité contravention » qui correspond à la traduction devant le simple tribunal de police de deux personnes qui fait suite à la mesure du maire du 29 février 1832 sur les mesures de salubrité, mesure, nous n’avons pu malheureusement retrouver. En outre, si les mesures de salubrité font l’objet de procès-verbaux, ce n’est plus le cas à partir de 1870. Jean-François

509 ADR : 4M34 : Rapport quotidien, du 1er au 2 mars 1834.

510 ADR : 4M34 : Rapport quotidien, du 18 au 19 février1834.

511 AMR : I9 : Procès-verbal du 23 avril 1832. 512 AMR : I9 : Procès-verbal du 3 mai 1832.

166 Tanguy écrit, en effet, que la négligence était tellement courant, en termes de salubrité, que les procès-verbaux n’étaient dressés que rarement pour ce motif. Il aurait fallu poursuivre les réparateurs en simple police toute l’année. Il montre, cependant, que les fosses non vidées, ou vidées sans autorisation, font l’objet d’une répression vigilante.

Avril Mai Juin Total Janv Fé v. Mars Total

Total de s faits consigné s 81 67 52 200 93 58 53 204

Dé lits

Voie publique 3 1 4 8 9 7 24

Voiture publique 1 1 2

Voiture publique serrée 1 1

Voiture non éclairée 3 3

Voiture mal stationnée 1 1 2

Embarras de la voie publique

1 1

Refus enlever décombles 1 1

Accident 3 5 6 14

Chien malfaisant/enragé 1 1 1 1

Vache 1 1

Cheval mené au galop 1 1

Salubrité 20 5 2 27

Jet d'eau sale 2 2 1 5

Jet de matières fécales 1 2 3

Jet d'urine 1 1 Vidange 2 2 Immondices 2 2 Matières fécales 3 1 4 Latrines 1 1 2 Répurgateurs 3 3 Porcs contraventions/Porcherie 3 3 Salubrité contravention 2 2

Table aux me nsue ls (1832)

Rapports quotidie n (1834)

Tableau 13 : Récapitulatif des délits commis sur la voie publique

Rapports quotidiens (1834)

167 b. La vision de Duchemin

De quelle manière le commissaire Duchemin, dans son projet de réorganisation de la police, envisage-t-il la voie publique et de la salubrité publique ? Dans sa première lettre Duchemin souhaite arrêter des mesures qui « donnent la facilité de pouvoir remplir d’une manière convenable les fonctions » auxquelles les agents « sont appelés à concourir avec les

commissaires de Police dans l’intérêt Public. »513 Le commissaire Duchemin met ainsi sous les

yeux du maire quelques nomenclatures de différents services qui sont dévolues aux agents du maintien de l’ordre. La santé publique figure dans la première nomenclature. Celle-ci exige, selon lui, que les agents et les commissaires de police veillent à différentes mesures. Premièrement, à ce que la salubrité de l’air ne soit pas corrompue par des amas de fumiers dans les rues, sur les places et les promenades publiques, ni dans les cours des maisons particulières. Ils doivent également veiller à ce qu’il ne se fasse aucune vidange de latrines ou de fosses d’aisances, que ce soit la nuit ou le jour, avant les heures voulues et selon les saisons. Il ne faut pas non plus que les vidangeurs troublent le repos des habitants. Duchemin désire également que les fosses soient bien fermées et les alentours bien nettoyés et lavés. Dans sa troisième lettre au maire, en 1836, le commissaire Duchemin imagine pour le service de la police municipale la mise en place de deux nouveaux fonctionnaires. En effet, il y a déjà trois agents qui sont en charge de ce service mais qui s’avèrent être en nombre insuffisant « pour pouvoir s’occuper de tous les détails que comporte une aussi grande surveillance. » Ainsi, selon Duchemin il eut été nécessaire de leur adjoindre deux agents qui, sous le titre d’« Inspecteur, de salubrité de petite voirie et des marchés » auraient eu pour mission de veiller au nettoyage et à l’enlèvement des immondices et de faire débarrasser la voie publique. Ils auraient aussi surveillé les alignements et les constructions ainsi que les marchés. 514

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