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Les contextes de l’appropriation d’une deuxième langue chez les enfants

L’acquisition-apprentissage précoce d’une deuxième langue Dans le chapitre précédent, nous avons étudié la relation qu’entretient l’enfant dès sa

3.1 Les contextes de l’appropriation d’une deuxième langue chez les enfants

Les contextes dans lesquels les enfants acquièrent ou apprennent une deuxième (ou troisième) langue sont extrêmement variés.

A. Pinter (2011) énumère 3 contextes dans lesquels un enfant acquiert une deuxième langue : le bilinguisme pendant la petite enfance, l’acquisition d’une deuxième langue en contexte bilingue ou en contexte d’immersion et l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école primaire.

3.1.1 Le bilinguisme pendant la petite enfance

Le premier contexte, celui du bilinguisme pendant la petite enfance, engloberait les enfants nés dans des familles où deux langues sont utilisées et entendues de façon équilibrée. A. Pinter (2011), citant S. Romaine (1995) cite des catégories des contextes bilingues :

-! une personne-une langue, c’est-à-dire que les parents ont des langues maternelles différentes (dont une langue est la langue dominante de la société). Chaque parent utilise sa propre langue maternelle pour parler à son enfant.

-! une langue non-dominante que l’enfant utilise à la maison avec ses deux parents et une langue dominante (qui est également la langue maternelle d’un de ses parents) que l’enfant utilise en dehors de la maison.

-! les deux parents ont la même langue maternelle, une langue non-dominante, mais ils ont des compétences limitées dans la langue dominante de la société. C’est souvent le cas des familles nouvellement immigrées.

-! Les parents ont des langues maternelles différentes qui sont différentes de la langue dominante de la société. Chaque parent parle sa propre langue à l’enfant et ce dernier apprend la troisième langue en dehors de la maison. -! Les parents ont la même langue maternelle, qui est la langue dominante de la

société, mais l’un des deux décide d’utiliser une autre langue avec l’enfant. -! Les deux parents sont bilingues et la société où ils habitent fournit un contexte

bilingue. Les parents mélangent les deux langues et ils font du « code- switching » (alternance des codes) en fonction du contexte des interactions.

3.1.2 L’appropriation d’une deuxième langue en contexte bilingue ou en contexte d’immersion

Selon A. Pinter (2011), d’autres contextes de bilinguisme chez le jeune enfant existent, comme ceux qui sont entraînés par l’immigration ou par la scolarisation. Pour ce qui concerne les processus d’acquisition d’une deuxième langue chez le jeune enfant, A. Pinter (2011), citant Tabors (1997), explique que le jeune enfant connaît une période de silence, suivie d’une période « télégraphique », après laquelle il commence à utiliser la langue de façon créative. Ce processus a été observé chez de jeunes enfants issus de groupes minoritaires dans des écoles maternelles anglophones aux États-Unis.

« Young children during the first few months in the new country simply continue to use their home language and then go through a non-verbal period or ‘silent period’ when they just listen actively but do not seem to talk much. Next, they will begin to use some formulaic language (‘telegraphic period’) and finally, they begin to produce language creatively. » (2011 : 75).

« Les jeunes enfants pendant leurs premiers mois dans le nouveau pays continuent tout simplement à utiliser leur langue natale et ils traversent ensuite une période non- verbale ou une période ‘de silence’ pendant laquelle ils écoutent activement mais ne parlent pas beaucoup. Puis, ils commencent à utiliser la langue de façon formulaïque

(‘la période télégraphique’) et enfin, ils commencent à utiliser la langue de façon créative. »

Les « programmes d’immersion » ont leurs origines au Canada. Pour ce qui concerne les contextes de type « immersion », A. Pinter (2011), citant R. Johnson et M. Swain (1997), en énumère les caractéristiques suivantes :

-! La L2 sert toujours de langue d’enseignement.

-! Le programme en immersion est parallèle au programme L1. -! La L1 bénéficie d’un soutien manifeste.

-! Dans la communauté, les attitudes vis-à-vis des deux langues sont positives. -! Le dispositif vise le bilinguisme additif, avec une grande maîtrise des deux

langues.

-! L’utilisation de la L2 se limite en grande partie à la salle de classe.

-! Au début, les enfants ont des compétences pareilles (et limitées) et les démarches pédagogiques, le matériel et le programme peuvent être adaptés aux besoins du public.

-! Les enseignants sont bilingues et peuvent communiquer avec les apprenants en L1, au besoin.

-! La culture en classe est celle de la communauté locale L1 plutôt que celle de la culture cible.

L’immersion peut être totale (l’ensemble du programme est enseigné en L2) ou partielle (certaines matières scolaires sont enseignées en L1).

3.1.3 L’acquisition d’une troisième langue

Dans plusieurs régions du monde, des situations de multilinguisme existent. Les enfants y apprennent une troisième langue. Par exemple, en Afrique ou en Inde, un enfant acquiert et parle sa langue maternelle chez lui, puis, à l’école, il apprend une langue régionale officielle, et enfin, à l’âge de dix ans, une langue internationale. D’après A. Pinter (2011), les bilingues bénéficient de certains avantages par rapport aux monolingues dans l’apprentissage d’une troisième langue. Citant Cohen, Tucker et Lambert (1967), Davine, Tucker et Lambert (1971), Enomoto (1994), Edwards et

al. (1977) et Wightman (1981), A. Pinter (2011) précise que ces avantages concernent la discrimination perceptuelle et la compréhension de l’oral. Citant Klein (1995), elle ajoute que les bilingues ont également des avantages pour l’apprentissage lexical et syntaxique. De plus, citant Muñoz (2000) et Lasagabaster (2000), et prenant appui sur l’hypothèse d’interdépendance de Cummins (1981), selon laquelle une relation positive et significative existerait entre le développement en L1 et en L2, elle postule qu’une relation pareille pourrait tenir pour une troisième langue. L’étude menée par Muñoz (2000) chez des enfants (parlant catalan, espagnol et anglais) a confirmé qu’un haut niveau de compétence en L1 et en L2 serait en corrélation avec un haut niveau de compétence en L3.

De même, A. Pinter (2011), citant Nation et McLaughlin (1986), McLaughlin et Nayak (1989) et Nayak et al. (1990), souligne que les études menées ont trouvé que les multilingues ont plus de souplesse dans l’alternance des stratégies dans les tâches impliquant la découverte des règles, grâce à leurs expériences en tant qu’apprenants de langue. Citant Lasagabaster (1997), elle ajoute que les bilingues apprenant une troisième langue ont une conscience métalinguistique plus développée par rapport aux monolingues. Citant Möhle (1989) et Singleton (1987), elle rappelle que lorsque les langues ont des similitudes, des transferts ont lieu. Pour déterminer le transfert, le degré de similitude entre les langues semblerait plus important que le statut de la langue (L1 ou L2 de l’apprenant).

3.1.4 L’apprentissage d’une langue étrangère

Le troisième contexte de l’appropriation d’une deuxième langue chez l’enfant concerne les dispositifs d’enseignement des langues étrangères. Ces dispositifs ne visent ni le bilinguisme ni l’immersion, mais proposent aux apprenants une découverte (limitée) de la langue étrangère. Souvent, cet apprentissage commence lorsque l’enfant a 8 ou 9 ans. Ces contextes se caractérisent normalement par un faible volume horaire d’apprentissage et l’absence totale (ou presque totale) de la langue cible en dehors de la salle de classe.

Soulignant le contraste entre les contextes d’enseignement d’une langue étrangère et ceux d’enseignement d’une langue seconde, A. Pinter (2011) rappelle que dans le

cadre d’un enseignement d’une langue étrangère, le niveau d’input est faible (entre une et trois heures de cours par semaine), il n’y a pas de possibilités (ou il y en a très peu) d’utiliser la langue cible en dehors de la classe, et l’accent est mis sur la langue en tant que système formel et matière. Par contre, dans un contexte de langue seconde, le niveau d’input est (plus) élevé, il y a régulièrement des possibilités d’utilisation de la langue cible en dehors de la classe, et l’accent est mis sur les contenus, la langue cible étant intégrée au programme.

Selon A. Pinter (2011), les dispositifs d’enseignement des langues étrangères se donnent pour objectifs :

-! de développer des compétences communicatives de base

-! de développer la motivation en proposant une première découverte amusante de l’apprentissage de la langue

-! d’encourager une première familiarisation avec une nouvelle culture

-! de développer des compétences cognitives, métacognitives et métalinguistiques par le biais d’un premier contact avec une langue étrangère