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fonctionnement des services sociaux de base tels que les écoles et les centres de santé a amplifié les besoins d’assistance en sécurité alimentaire, nutrition, assainissement, sanitaire, éducation, protection et fourniture d’abris. Cette urgence humanitaire est accentuée par une insécurité qui se manifeste par des incidents d’enlèvement quotidiens des leaders communautaires qui sont les personnalités et partenaires de mise en œuvre des différents programmes. Ces personnalités sont généralement des leaders religieux, les responsables de la chefferie coutumière, les administrateurs du Conseil Villageois de Développement (CVD), des conseillers municipaux, des maires et des préfets. Après les Forces de

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Défense et de Sécurité, ce sont les leaders communautaires qui sont les plus ciblés par les groupes terroristes, parce qu’ils sont en contact avec les autorités politiques et administratives. Alors, pour éviter d’être enlevés, les leaders communautaires se sont retranchés dans des lieux sûrs où ils se font moins visibles dans des zones relativement mieux sécurisées en abandonnant leurs bureaux. Ce retranchement réduit leur contact avec les organisations qui n’ont plus de relais dans les zones d’intervention pour assurer la mobilisation des communautés pour la mise en œuvre des programmes. La majorité des organisations concentrent donc leurs actions en faveur des populations déplacées dans les camps et dans les familles d’accueil qui sont vulnérables. Les déplacements dans les familles d’accueil créent plusieurs enjeux entre populations déplacées et populations hôtes, « si on était 1000

dans notre village avec trois forages maintenant on est à 4000 avec toujours ce même nombre de forages ou si on avait un repas et demi par jour en étant cinq et que maintenant nous sommes une vingtaine » (E3), il devient impérieux d’intervenir pour éviter le risque d’explosion d’un autre conflit lié

à la pression sur les ressources vitales. La situation sécuritaire du Burkina Faso est telle que « Nous

vivons une situation de psychose quotidienne » (E12) et les visites des bailleurs de fonds qui sont pour

la plupart des Occidentaux sont extrêmement limitées, parce qu’ils sont la cible des groupes terroristes. En première ligne pour apporter l’assistance aux populations touchées résidant aussi bien dans les camps de déplacés que dans les zones d’insécurité, les organisations rencontrent plusieurs contraintes.

Même si les opérations humanitaires dans les camps de déplacés se déroulent dans un environnement mieux sécurisé, ce n’est pas le cas au niveau des populations restées bloquées dans les zones de tension. De ce fait, notre recherche s’intéresse particulièrement à l’assistance de ces populations restées sur place, ou les opérations sont plus contraignantes selon les différents acteurs. La contrainte principale reste l’accès à ces populations pour répondre aux impératifs humanitaires de façon sécurisée. Les possibilités d’accès évoluent d’une région à l’autre, car selon les répondants, la région du sahel est la plus contraignante sur le plan de l’accessibilité. Elle est suivie de loin par la région de l’Est, la région du Nord, la région de la Boucle du Mouhoun et la région du Centre-nord. L’assistance humanitaire fait face à des barrières imposées par les groupes armés qui empêchent violemment la libre circulation de l’aide vers les bénéficiaires. En plus de la menace principale qu’est l’insécurité, l’accessibilité humanitaire est restreinte par d’autres contraintes d’ordre financier, logistique, de ressources humaines, organisationnelles ou politiques (figure 10).

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Figure 10: Causes et contraintes d’accessibilité humanitaire

Légende

Source : E1

ACCÈS HUMANITAIRE RESTREINT

Déni de l’existence de besoins humanitaires État Routes inaccessibles/manque d’infrastructures État Attaques contre la population, tensions intercommunautaires

Groupe armé non étatique Groupe auto défense

Communauté Restriction de mouvement de biens ou de personnel humanitaire État Manque d’infrastructures aériennes État Couverture téléphonie mobile limitée Secteur privé

Opérations militaires, tirs croisés, hostilités en cours

FDS

Groupe armé non étatique Groupe d’auto-défense

Présence de mines et d’engins explosifs

Groupe armé non étatique

Violence ciblée contre le personnel et les biens

humanitaires

Groupe armé non étatique

INSÉCURITÉ OBSTACLES BUREAUCRATIQUES OU POLITIQUES ACCÈS PHYSIQUE ET CONTRAINTES LOGISTIQUES ACCÈS DE LA POPULATION AUX SERVICES DE BASE

Règlementation interne limitant les opérations

Organisation humanitaire CONTRAINTES INTERNES AUX ORGANISATIONS Manque de financement ou d’équipements Organisation humanitaire Donateur Manque de personnel ou de partenaires qualifiés Organisation humanitaire

Ingérence dans la mise en œuvre des activités

humanitaires

État

État d’urgence, restriction administrative de

mouvement

État

Difficulté d’accès aux services sociaux à cause de

l’insécurité

Groupe armé non étatique FDS

Contraintes de mise en œuvre de l’action humanitaire, les causes et les acteurs impliqués.

Contraintes d’accessibilité des populations aux services sociaux de base, les causes et les acteurs impliqués.

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Cette figure tirée des rapports d’une organisation humanitaire internationale met en évidence les différentes contraintes d’accessibilité pour les interventions de première ligne et en dessous de chaque contrainte sont énumérées les causes suivies de l’acteur à qui la responsabilité incombe. Elle montre que le contexte sécuritaire est influencé par différents acteurs tels que l’État, les FDS, les groupes armés non étatiques, qui contribuent de différentes manières à la restriction de l’accessibilité humanitaire. Face à ces multiples barrières, il devient compliqué pour les organisations d’urgence de toujours agir selon les principes humanitaires et aux organisations de développement de mener des projets de long-terme. Elles sont ainsi obligées de s’adapter et/ou développer des stratégies d’intervention selon le contexte sécuritaire qui prévaut.

Stratégies d’intervention développées par les Organisations

Le contexte terroriste crée la désolation chez des milliers de familles qui manquent de tout et sont souvent contraintes de partir et les organisations interrogées sur le terrain développent des stratégies pour sauver la vie et la dignité de ces populations affligées. L’objectif global des stratégies déroulées par les organes humanitaires des Nations Unies, les ONG internationales et nationales ainsi que les services déconcentrés de l’État est de permettre aux populations vulnérables d’avoir accès à une assistance de façon sécurisée. C’est-à-dire, permettre au personnel de mise en œuvre d’intervenir, tout en mitigeant le risque pour les populations bénéficiaires.

Pour présenter nos résultats sur ce point, nous avons organisé les stratégies en nous inspirant des trois modèles de gestion de la sécurité évoqués par Vinhas (2014) et présentés dans la section 2.5 autour de l’image du « triangle de sécurité » : l’acceptation, la protection et la dissuasion. Dans le cas des organisations que nous avons interrogées, chaque approche se décline en stratégies et en actions stratégiques qui visent majoritairement la mise en œuvre des actions tant humanitaires que de développement. Nous les présentons d’abord sous forme schématique dans la figure 11, puis détaillons ensuite les différents éléments présentés dans la suite du chapitre.

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Figure 11: Résumé schématique des stratégies développées par les différentes organisations

Légende

Source : Données de l’entretien terrain

Ap

pro

ch

e

basée

su

r l'acceptatio

n

Collaboration avec les acteurs influents de la

communauté Responsabilisation des communautés locales pour

le ciblage Développement des thématiques acceptées Transfert du risque aux ONG locales et au personnel

local

Absence ou faible visibilité

Promotion des principes humanitaires

Appr

oche

basé

e

sur

la

di

ss

uasion

Utilisation des escortes militaires

Ap

proc

he

bas

ée

su

r l

a

protec

tion

Évitement du risque La gestion à distance ECO DATA Mobile money

Création d'un bureau de gestion de la sécurité

Adoption de bonnes attitudes

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4.5.1 Approche basée sur l’acceptation des communautés locales