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Connaissance de l'environnement

1.6 Evaluation globale de l'instrument

1.6.1 Connaissance de l'environnement

Comme nous l'avons vu précédemment, le champ de pesanteur terrestre présente des variations spatio-temporelles. Pour pouvoir extraire une information exploitable de la mesure de pesanteur, il est donc important de pouvoir distinguer ces variations des anomalies de gravité. Cela nécessite de mesurer précisément certains paramètres (altitude, vitesse, cap...) an de pouvoir retrancher les eets qui y sont associés. Nous passons à présent en revue les diérents eets modiant localement la mesure du champ de pesanteur.

Altitude et profondeur Nous présentons un modèle simplié faisant apparaître la dé-pendance en altitude ou en profondeur du champ de pesanteur. La Terre est considérée à symétrie sphérique, composée d'une partie interne de rayon R et de densité ρ1, et d'une couche en surface de densité ρ2. La masse de la Terre est principalement contenue dans le noyau, ce qui s'écrit : MT = 43π.ρ1.R3. Les notations sont rappelées sur la gure 1.14.

Fig. 1.14 - Modèle simplié de la Terre.

Du fait du gradient de gravité, la mesure dépend de l'altitude. Pour pouvoir comparer diérentes campagnes de mesure, toutes les valeurs sont ramenées à une altitude nulle (c'est-à-dire au niveau de l'ellipsoïde de référence). On dénit alors l'anomalie à l'air libre comme la mesure de pesanteur retranchée de la valeur de la pesanteur donnée par l'ellipsoïde GRS80 et ramenée à une altitude nulle.

Pour déterminer les corrections à apporter en fonction de l'altitude, nous utilisons un mo-dèle simplié de la structure de la Terre : cette dernière est considérée à symétrie sphérique, possédant un noyau de rayon R, de densité constante ρ1 et de masse MT = ρ1.43πR3, et d'une couche en surface de densité ρ2. Nous utilisons le théorème de Gauss div −→g = 4π.ρ(r).G

que nous intégrons sur la boule de rayon R + h à l'aide du théorème d'Ostrogradsky. Un développement limité au premier ordre en h/R donne l'expression suivante :

g(h) ≈ G.MT R2 | {z } P esanteur de la partie interne − 2G.MT R3 .h | {z } Gradient vertical + 4π.ρ2.G.h | {z } Correction de plateau (1.24)

Les deux derniers termes de l'expression correspondent à la dépendance en altitude. Le premier est indépendant de la densité du milieu. Il correspond au gradient vertical associé à la masse de la partie interne. Cette correction doit être réalisée pour des mesures en surface comme pour les mesures sous-marines. Elle vaut :

∆g1 ≈ −308, 6.h (1.25) où h est l'altitude en m par rapport au géoïde de référence, et ∆g est en µGal. Ainsi, pour avoir obtenir une mesure exacte à 10 µGal, l'altitude doit être connue à 3 cm près.

Le dernier terme de l'expression (1.24) n'est important que pour des milieux susamment denses. Il traduit un double eet se produisant lors de l'élévation en altitude dans un milieu exerçant une force gravitationnelle : la masse de la couche d'épaisseur ∆h franchie cesse d'attirer vers le haut pour attirer vers le bas. Pour un milieu comme l'eau, la variation de cette anomalie avec l'altitude est de :

∆g2 ≈ 83, 8.h (1.26) où ∆g2 est donné en µGal, et h en m. Des corrections plus nes peuvent également être réalisées en tenant compte de la variation de densité de l'eau. Cette dernière est donnée par l'équation d'état internationale de l'UNESCO (IES 80) [80], et dépend de la profondeur, de la salinité et de la température. Pour des variations extrêmes10 de [T = 30C, S = 1 ppt, z = 0 m] à [T = −1C, S = 60 ppt, z = 2000 m], la densité varie de 0, 996 à 1, 057, ce qui correspond à une variation de 5, 1 µGal.m−1.

Pression atmosphérique L'augmentation de la pression atmosphérique δp a un double eet [81] : tout d'abord, elle provoque une augmentation de la densité de l'air δρ qui engendre une diminution du champ de pesanteur δg = −2π.δρ.G.H, où H est la colonne d'air sur-plombant le point de mesure. La variation de pression, pouvant être exprimée δp = g.H.δρ, on en déduit l'expression de la variation de pesanteur :

δg = −2πG

gδp ≈ −0, 43.δp (1.27) 10A titre indicatif, la salinité moyenne de l'eau de mer est de 35 ppt, celle de la mer morte de 200 ppt.

pour une pression en mbar et δg en µGal.

Toutefois, cette augmentation du poids de l'atmosphère provoque une déformation locale de la croûte terrestre entraînant une légère augmentation de la pesanteur. En tenant compte de cet eet, l'expression (1.27) est nalement ramenée à :

∆g3 ≈ −0, 3.δp (1.28) Phénomènes de marée Les eets de marée sont des variations locales du champ de pesanteur qui résultent principalement de l'attraction de la lune et du soleil. Leur eet est double : dans un premier temps, la position relative des astres crée une certaine géométrie du champ de pesanteur ; ce champ de pesanteur crée alors un déplacement des masses océaniques et terrestres, qui entraînent à leur tour une modication du champ de pesanteur [81].

A nos latitudes, l'amplitude de la marée lunaire est de l'ordre de 0, 35 mGal sur une période de 24 heures. De nombreux modèles de marées océaniques ont été réalisés à partir de données de satellites d'altimétrie comme Topex-Poséidon (1992-2006), ERS 1 et 2 (European Remote System,1991-1995 pour ERS-1, et 1995-2005 pour ERS-2), Jason 1 (lancé en 2001) et Jason 2 (prévu en 2008). Le modèle FES99, par exemple, développé par l'équipe de Le Provost au Laboratoire d'Etudes en Géophysique et Océanographie Spatiales (LEGOS) à Toulouse, donne le niveau des mers en tout point du globe avec une exactitude de 11, 8 cm

11 [83].

Correction d'Eötvös Considérons un mobile se déplaçant à une vitesse V le long d'une équipotentielle de pesanteur. C'est notamment le cas d'un bateau, ou d'un sous-marin en surface. Une mesure de pesanteur réalisée dans un tel porteur aura deux composantes verti-cales supplémentaires associées au mouvement du porteur : la force de Coriolis d'une part, et la force centrifuge du fait que le mobile suit une trajectoire circulaire d'autre part. Ainsi, pour un véhicule se déplaçant à une vitesse V (en n÷uds Nd), à une latitude L, avec un 11Notons au passage que le passage de l'altitude du géoïde N en un point à l'anomalie de gravité ∆g en ce même point ne peut se faire simplement en multipliant la hauteur par le gradient de gravité γ. Le passage rigoureux de l'un à l'autre nécessite la connaissance globale du champ à la surface σ. Les deux grandeurs sont reliées par la formule de Stokes (1849) [82] :

N = 1 4πγ

Z Z

σ

∆g.S(R, ψ).dS (1.29)

où S(R, ψ) est la fonction de Stokes : S(R, ψ) = 1 R. " 1 + 1 sinψ2 − 6 sinψ 2 − 5 cos ψ − 3 cos ψ. ln  sinψ 2 + sin ψ 2 2# (1.30) L'inversion de la formule de Stokes fut donnée par Molodenski en 1948 et permet de retrouver l'anomalie de gravité à partir de l'altitude du géoïde en tout point de la surface du globe [81].

angle d'azimut12 a

z, au niveau de la mer, l'expression de la correction d'Eötvös, en mGal, s'écrit [27] :

∆gE ¨o = 7, 503.V. cos L. sin az+ 0, 004 154.V2 (1.31) Pour des mesures aéroportées, une formule plus générale est utilisée [81] :

∆gE ¨o =  1 + h a  .  2ω.V. cos L. sin az+V 2 r  − 1 fV

2a.(1 − cos L2).(3 − 2 sin az2) (1.32) où h est l'altitude au-dessus de l'ellipsoïde, a est la taille du demi-axe majeur de la Terre, 1/f est l'aplatissement de la Terre, ω est la vitesse angulaire de la Terre, r est la distance au centre du référentiel géocentrique.

Fig. 1.15 - Incertitude sur la mesure de pesanteur (en mGal) pour une erreur en vitesse et cap du porteur allant jusqu'à 10%. Les valeurs sont calculées pour une mesure en mer (a) ou une mesure aéroportée (b).

Cet eet est important et doit impérativement être précisément déterminé an d'être retranché à la mesure. Dans le cas le plus défavorable (azimth az = 90, latitude L = 0), pour un navire avançant à V = 10 Nd), l'eet d'Eötvös est de 75.103 µGal. Il faut donc connaître avec précision la vitesse, l'azimut, la latitude et l'altitude. La gure 1.15 présente les erreurs sur la mesure de pesanteur en fonction d'une incertitude sur la vitesse et l'azimut allant jusqu'à 10%. Vitesse et altitude sont choisies de façon à représenter une mesure sur bateau (h = 0 m, V = 10 Nd, gure a) et en avion (h = 400 m, V = 200 Nd, gure b). La vitesse importante en avion est principalement responsable de l'augmentation de l'incertitude.

En dénitive, la connaissance précise de certains paramètres extérieurs est indispensable à l'obtention d'une mesure exploitable, car nous avons mis en évidence l'existence d'eets engendrant des perturbations importantes.