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COMPOSITION DES MOMENTS CINÉTIQUES

Dans le document Mécanique quantique (Page 157-161)

Moment cinétique

6.5 COMPOSITION DES MOMENTS CINÉTIQUES

6.5.1 Position du problème

Considérons un système formé de deux parties de moments cinétiques respectifsJ1et J2. S’il n’existe pas d’interaction entre les parties, la loi de conservation du moment cinétique joue pour chacune des parties et le moment totalJdu système tout entier peut être considéré comme la sommeJ=J1+J2.

Lorsqu’une interaction entre parties existe, même si elle est relativement faible, les lois de conservation deJ1 etJ2 ne sont plus strictement observées. Cependant les nombresj1etj2, déterminant les valeurs propres deJ21etJ22, restent des nombres quantiques intéressants pour la description approchée de l’état du système ainsi que nous allons le voir.

Plus précisément, connaissant une base de l’espace des états formée de vecteurs propres communs àJ21,J1z,J22,J2z, nous chercherons à construire à partir de la base précédente une nouvelle base constituée de vecteurs propres communs àJ2 et Jz. C’est le problème de lacomposition des moments cinétiques.

L’intérêt de cette nouvelle base apparaîtra au cours de ses utilisations. Auparavant, cherchons quels sont les vecteurs propres de la composanteJzde l’opérateurJ.

6.5.2 Opérateur de moment cinétique total

Les espaces formés des vecteurs propres des moments cinétiquesJ1 etJ2 sont des espacesE(j1)etE(j2)des représentations irréductibles du groupe SO(3). Nous allons étudier la composition de ces représentations.

Soient deux représentations irréductiblesD(j1)etD(j2)du groupe SO(3) ayant pour espaces de représentation respectifs E(j1) etE(j2). Notons E(j1j2) = E(j1)⊗E(j2) l’espace produit direct sur lequel se réalise la représentationD(j1j2) =D(j1)⊗D(j2). Cherchons les opérateurs infinitésimaux de la représentationD(j1j2) en développant en série, au voisinage de l’opérateur unité, les opérateurs de rotationR(j1)etR(j2)qui opèrent respectivement sur les espacesE(j1)etE(j2).

NotonsR(xj1)(a) l’opérateur de rotation représentant une rotation autour de l’axe Oxd’un angleainfiniment petit au voisinage dea = 0. Selon la formule (6.2.32), on a :

R(jx1)(a)=11(j1)−ia

J(xj1) (6.5.1)

On a une formule analogue pourR(xj2)(a) qui est un opérateur agissant dans l’espace E(j2). L’opérateurR(xj1j2)(a)=R(xj1)(a)⊗R(xj2)(a), agissant sur les vecteurs de l’espace E(j1j2), a pour développement, en se limitant au premier ordre ena:

R(xj1j2)(a)=

11(j1)−ia Jx(j1)

11(j2)−ia J(xj2)

=11(j1)11(j2)−ia

(Jx(j1)11(j2)+11(j1)⊗Jx(j2))

(6.5.2)

Le générateur infinitésimalJx(j1j2) opérant sur l’espace produit tensorielE(j1j2)a donc pour expression :

Jx(j1j2) =Jx(j1)11(j2)+11(j1)⊗Jx(j2) (6.5.3) Les deux autres générateurs infinitésimauxJy(j1j2)etJ(zj1j2) ont des expressions ana-logues où seuls les indices inférieurs sont changés.

Les générateurs infinitésimaux opérant sur les espacesE(j1)etE(j2) vérifient les relations de commutation du moment cinétique ; il en est donc de même des opéra-teurs Jx(j1j2),Jy(j1j2) et Jz(j1j2). Ces derniers sont donc des opérateurs de moment ci-nétique, agissant dans l’espace E(j1j2), et sont appelés les opérateurs de moment cinétique total pour un système composé de deux parties de moments cinétiques respectifsJ1etJ2.

6.5.3 Base deEEE(j1j2)

Notons|j1m1 et|j2m2 les vecteurs des bases canoniques respectives des espaces E(j1) et E(j2); rappelons que ces vecteurs sont des vecteurs propres respectifs de Jz(j1) et Jz(j2). Les vecteurs de base de l’espace E(j1j2) sont les produits tensoriels

|j1m1 ⊗ |j2m2qu’on note|j1j2; m1m2:

|j1j2; m1m2=|j1m1 ⊗ |j2m2 (6.5.4) Montrons que les vecteurs de base|j1j2; m1m2sont des vecteurs propres communs des opérateursJz(j1)11(j2)et11(j1)⊗Jz(j2). On a en effet :

(Jz(j1)11(j2))|j1m1 ⊗ |j2m2=Jz(j1)|j1m111(j2)|j2m2

=m1|j1m1 ⊗ |j2m2

=m1|j1j2; m1m2

(6.5.5) Un calcul analogue montre que|j1j2 ; m1m2 est un vecteur propre de l’opérateur 11(j1)⊗Jz(j2)associé à la valeur proprem2.

À partir de l’opérateurJ21=(Jx(j1))2+ (Jy(j1))2+ (Jz(j1))2, on peut former l’opérateur J2111(j2) agissant sur les vecteurs de l’espace E(j1j2). Utilisant une démonstration analogue à (6.5.5), on montre que les vecteurs |j1 j2 ; m1 m2 sont des vecteurs propres deJ2111(j2), soit :

J2111(j2)|j1j2; m1m2=2j1(j1+ 1)|j1j2; m1m2 (6.5.6) Un calcul analogue est également valable pour l’opérateur11(j1) J22; les vecteurs

|j1j2; m1m2sont ses vecteurs propres associés à la valeur propre2j2(j2+ 1).

Valeurs et vecteurs propres deJ(zj1j2)

Le générateur infinitésimalJz(j1j2)a pour expression :

Jz(j1j2) =Jz(j1)11(j2)+11(j1)⊗Jz(j2) (6.5.7)

Selon (6.5.5), ses vecteurs propres sont les vecteurs|j1j2; m1m2et ils sont associés aux valeurs propres(m1+m2). Les nombresm1etm2prennent respectivement des valeurs de−j1àj1et de−j2àj2par saut d’une unité. Leur sommem=m1+m2peut donc prendre 2(j1+j2) + 1 valeurs distinctes, soit :

(j1+j2)mj1+j2 (6.5.8) Puisque le nombre de vecteurs de base|j1j2; m1m2est égal à (2j1+ 1)(2j2+ 1), on a 4j1j2valeurs propresmqui sont dégénérées. La représentationD(j1j2)=D(j1) ⊗D(j2) est donc réductible et peut être décomposée en parties irréductibles.

6.5.4 Décomposition de Clebsch-Gordan

La représentationD(j1) D(j2)peut être décomposée en représentations irréductibles D(j)sous la forme :

D(j1) D(j2)=

j

⊕aj1j2j D(j) (6.5.11) oùdésigne une somme directe.

C’est la décomposition dite deClebsch-Gordan. Le problème de la détermination des valeurs possibles dej, pourj1etj2donnés, se ramène à l’obtention de la décom-position (6.5.11).

a) Caractère de la représentation D(j1)D(j2)

Remarquons que les matrices de la représentationD(j1)⊗D(j2)sont les produits tenso-riels des matrices de chacune des représentationsD(j1)etD(j2). Les matrices R(zj1)(g) et R(zj2)(g) sont données par (6.2.35) ; ce sont des matrices diagonales correspondant à une rotation R(g) d’un angleg autour de l’axe Oz. À cette même rotation cor-respond, dans la représentationD(j1)⊗D(j2), des matrices qui restent diagonales et dont les éléments sont les (2j1+ 1)(2j2+ 1) exponentielles : exp[i(m1+m2)g], avec

−j1 m1 j1et−j2 m2 j2. Le caractère de la représentationD(j1)⊗D(j2)est donné par la trace des matrices de cette représentation, soit :

x(j1j2)[R(g)]=

j1

m1=j1 j2

m2=j2

exp [i(m1+m2)g] (6.5.12) La somme ci-dessus peut s’écrire sous la forme suivante qui met en évidence les caractères de différentes représentations irréductiblesD(j)dont l’expression générale est donnée par (6.2.36). On a :

x(j1j2)[R(g)]=

j1+j2

j=|j1j2|

j k=j

eikg=

j1+j2

j=|j1j2|

x(j)[R(g)] (6.5.13)

b) Décomposition de la représentation D(j1)D(j2)

À chaque caractère x(j)[R(g)] correspond une représentation matricielle D(j). D’autre part, la décomposition d’une représentation réductible en représentations irréductibles étant unique, la décomposition de Clebsch-Gordan pour le groupe SO(3) est donnée par :

D(j1) D(j2)=D(j1+j2) D(j1+j21) ... D|j1j2| (6.5.14) Le produit direct de deux représentations de poids respectifsj1etj2 se décompose donc en représentations irréductibles de poids respectifsj1+j2,j1+j21, ...,|j1−j2|, chacune de ces représentations ne figurant qu’une seule fois dans la décomposition.

L’espaceE(j1)⊗E(j2) est l’espace de représentation deD(j1)⊗D(j2). La décom-position (6.5.14) montre que cet espace se décompose sous la forme d’une somme directe :

E(j1)⊗E(j2)=E(j1+j2)⊕E(j1+j2−1)⊕ · · · ⊕ E|j1j2|=

j1+j2

j=|j1j2|

⊕E(j) (6.5.15) où l’espaceE(j1+j2k)est l’espace de représentation deD(j1+j2k).

c) Coefficients de Clebsch-Gordan

Dans la décomposition (6.5.15),jprend les valeurs suivantes :

j=(j1+j2), (j1+j21), ..., |j1−j2| (6.5.16) Cherchons les vecteurs de base de chacun des sous-espaces E(j) figurant dans la décompositon (6.5.15) de l’espaceE(j1)⊗E(j2). Les vecteurs de base deE(j1)⊗E(j2) sont les vecteurs|j1j2; m1m2définis par (6.5.4) et les vecteurs de base deE(j)sont des combinaisons linéaires de ces derniers.

Selon (6.5.5), les vecteurs|j1j2; m1m2sont des vecteurs propres deJ(zj1j2)dont les valeurs propres sont égales à m = (m1 +m2). Par suite, toute combinaison linéaire des vecteurs|j1j2; m1m2est également vecteur propre deJ(zj1j2). Notons alors|j1 j2 jm les vecteurs de base d’un sous-espaceE(j)décomposés sur la base {|j1j2; m1m2}:

|j1j2j m=

m1m2

C(j1j2j, m1m2m)|j1j2; m1m2 (6.5.17) où m1varie de −j1 à j1 etm2 de−j2 à j2. Les coefficientsC(j1j2j, m1m2m) sont appelés lescoefficients de Clebsch-Gordanou encore coefficients de Wigner. Ce sont les éléments matriciels de la matrice de passage d’une base à l’autre ; compte tenu de la relation de fermeture, ils s’écrivent :

C(j1j2j, m1m2m)=j1j2; m1m2|j1j2j m (6.5.18) L’expression générale de ces coefficients peut être déterminée par le calcul ; nous nous contenterons d’en donner quelques valeurs, pour j2 = 1/2, qui nous seront utiles par la suite.

TABLEAU6.1 COEFFICIENTS DECLEBSCH-GORDANj11

2; (mm2)m2|j11 2jm. m2= 1

2 m2=1

2

j=j1+1 2

j1+m+1/2 2j1+1

j1m+1/2 2j1+1

j=j11

2

j1m+1/2 2j1+1

j1+m+1/2 2j1+1

d) Nouvelle base de l’espaceEEE(j1j2)

La base formée par les vecteurs|j1j2 ; m1m2 n’est pas la plus utile. Si tous les vecteurs d’état ayant un intérêt pratique sont des vecteurs propres de l’hamiltonien Hd’un système physique, alors une base intéressante pour de nombreux calculs est celle formée par des vecteurs propres d’opérateurs qui commutent avecH. En géné-ral, ce sont les opérateurs de moment cinétique total.

Les différentes bases{|j1j2j m}des sous-espacesE(j)qui figurent dans l’espace E(j1)⊗E(j2) forment une nouvelle base de ce dernier. Les vecteurs|j1j2j msont précisément des vecteurs propres des opérateurs de moment cinétique total. Nous avons vu que ce sont des vecteurs propres deJz(j1j2); ce sont également des vecteurs propres deJ2111(j2), selon (6.5.6) ainsi que de11(j1)J22. Enfin, ce sont des vecteurs propres de :

J2=(Jx(j1j2))2+ (Jy(j1j2))2+ (Jz(j1j2))2 (6.5.19) correspondant à la valeur propre2j(j+ 1). Ces divers opérateurs commutent tous entre eux.

EXERCICES

Exercice 6.1. Commutateurs du moment cinétique avec les coordonnées

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