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Synthèse du chapitre I

III. L’étude du pouvoir d’achat perçu par les chercheurs en sciences de gestion

3.2.2. Le comportement de déconsommation

La déconsommation est un concept récent au sein de la recherche en marketing (Auger et al., 2009; Cova, 1996). Généralement associée à différentes problématiques concernant la baisse du pouvoir d’achat, les modes de consommations alternatifs ou encore le consommateur

115 résistant, ce phénomène de déconsommation a fait l’objet de peu de travaux. En 2013, Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) définissent la déconsommation comme un comportement visant à réduire de façon volontaire sa consommation, à moins consommer (Séré de Lanauze and Siadou-Martin, 2013).

Dans l’optique de définir au mieux le périmètre de la déconsommation, une distinction du concept avec le concept d’anticonsommation est proposée (3.2.1.1.) avant de poser les contours de la déconsommation (3.2.1.2.) et d’exposer les différents comportements composant le ce concept (3.2.1.3.).

3.2.2.1. La déconsommation vs l’anticonsommation

Développée dans un contexte de crise, la déconsommation telle que décrite par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) est étroitement liée aux problématiques de baisse du pouvoir d’achat.

L’étude exploratoire menée par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) permet de constater que les pratiques comportementales associées à la notion de déconsommation s’avèrent être extrêmement variées. Selon les chercheurs, ces différents comportements découlent, en partie, d’une position attitudinale critique à l’égard de la société de consommation et des pratiques des entreprises qui se retrouvent dans la « résistance du consommateur » et l’« anti-consommation

». La résistance est définie comme l’état motivationnel incitant le consommateur à s’opposer à des pratiques, des logiques ou des discours marchands jugés comme dissonants (Roux, 2007).

La résistance peut concerner un produit, une marque, une entreprise, ou plus largement le marché ou le système économique dans son ensemble (Iyer and Muncy, 2009). Lorsque la résistance concerne le marché ou le système économique dans son ensemble, il est alors question d’anticonsommation.

Attitude caractérisée par un dégoût ou un rejet de toute consommation, l’anti-consommation correspond au comportement d'évitement volontaire et intentionnel de la consommation (Iyer and Muncy, 2009). Domaine de recherche en plein expansion, ce concept d’anti-consommation a fait l’objet que de rares recherches conceptuelles (Basci, 2014). Diverses incohérences entre les définitions proposées dans le cadre des rares travaux existants sur l’anti-consommation contribuent à une certaine confusion sur le sujet. Ces incohérences nuisent à la délimitation claire de ce concept causant ainsi des ambiguïtés sur ce qui tient ou pas de l’anti-consommation.

Même si étroitement liée à une critique du système marchand et de la consommation, la déconsommation telle que définie par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) ne se confond

116 pas avec l’anticonsommation. L’anti-consommation est ainsi caractérisée comme un choix conscient et délibéré basé sur des décisions compatibles avec les valeurs de l’individu (Kozinets et al., 2010). Les partisans de l’anticonsommation choisissent délibéremment de rejeter, de réduire la consommation de certains biens, services ou marques (Lee et al., 2011). Tandis que dans le cadre de la déconsommation telle que décrite par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013), le développement des différents comportements de déconsommation correspond davantage à un choix contraint par la situation économique et financière de l’individu. Or, l’anti-consommation ayant lieu du fait que le prix soit hors budget (produit inaccessible) ainsi que la réduction de la consommation en raison d'une crise économique n’intègrent pas le périmètre de l’anti-consommation (Basci, 2014).

3.2.2.2. Les contours de la déconsommation

L’examen des discours des consommateurs par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) permet une analyse des contours du comportement de déconsommation. Quatre types de réduction de la consommation sont alors présentés dans le Tableau 19 : la suppression, le remplacement, la réduction et l’autoproduction.

Tableau 19. Les contours de la déconsommation par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013)

Arrêt de la consommation Poursuite de la consommation

Arrêt des achats Suppression Auto-production

Poursuite des achats Remplacement Réduction

La déconsommation peut ainsi correspondre à :

- Une suppression pure et simple du produit dans les habitudes alimentaires des répondants et traduire un rejet complet du produit inutile ou dangereux ;

- Une diminution des quantités consommées (baisse de fréquence ou des quantités moyennes achetées) suite à une réduction des besoins de l’individu, par refus de gaspillage ou dans une démarche de qualité selon le principe « consommer mieux, c’est consommer moins » ;

- Une réduction en valeur des dépenses liées à l’achat du produit et la recherche de prix moins élevés, sans baisse de la consommation à proprement parler ;

- Un arbitrage entre quantité et qualité propre à l’évaluation de toute offre et la recherche du meilleur rapport qualité-prix. Cet arbitrage entrainant un transfert de la consommation de certains produits vers d’autres présentant une meilleure valeur pour le consommateur.

117 3.2.2.3. Les différents comportements compensatoires composant la déconsommation La déconsommation telle que définie par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) recouvre plusieurs comportements qui se distinguent par différents degrés de relation au marché. Dans le cadre de sa relation avec le marché, l’individu peut souhaiter concilier avec le système marchand traditionnel, se placer en marge de ce dernier ou encore l’influencer par ses propres actions. A partir de ce constat, Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) délimitent les contours de la déconsommation aux concepts de consommation experte, de simplicité volontaire, de consommation socialement responsable ainsi qu’au concept de consommation de récupération. Ces quatre comportements composant le comportement de déconsommation traduisent différents niveaux de prise de distance par rapport aux stratégies traditionnelles des marques et par rapport à un paradigme de marché fondé sur la croissance (Tableau 20).

Tableau 20. Les différentes composantes du comportement de déconsommation et leurs relations avec le marché

Définitions Relation avec le marché

La

Un cadre de marché accepté que le consommateur cherche à exploiter au mieux de ses propres intérêts en développant et utilisant une connaissance et une vigilance vis-à-vis des offres établies.

La simplicité volontaire (Zavestosky,

2002)

Mode de vie consistant à réduire volontairement sa consommation en vue de mener une vie davantage centrée sur des valeurs essentielles.

Une volonté de marginalisation du marché par des recours à des échanges non marchands et un recentrage sur le cœur des besoins. L’individu doit choisir un style de vie qui doit minimiser sa consommation.

S’apparente au Consumer to Consumer Ensemble des actions quotidiennes qui permettent de donner une seconde vie à des objets déjà utilisés ou de modifier les fonctionnalités de certains objets pour prolonger leur durée de vie.

Consommation dans la sphère de consommation réalisés suite à la prise de conscience de conséquences négatives de la consommation sur le monde extérieur.

Une position active vis-à-vis du marché et de ses acteurs. Par ses choix de consommation, le consommateur responsable signifie ses préoccupations sociales, environnementales et économiques et utilise le pouvoir dont il dispose pour faire évoluer les offres (Ozçaglar-Toulouse, 2009 ; François-Lecompte et Valette-Florence, 2004).

3.2.2.4. Les motivations de la déconsommation : une analyse par la valeur

Les différentes motivations évoquées par les répondants pour expliquer leurs pratiques de déconsommation s’avèrent être multiples et peuvent être imbriquées les unes avec les autres.

Du point de vue des consommateurs, la déconsommation est associée à différentes sources de

118 valeur ajoutée : valeur utilitaire , valeur hédonique, valeur sociale et la valeur spirituelle. Ces valeurs ajoutées sont présentées dans le Tableau 21.

Tableau 21. Typologie de la valeur recherchée au travers des pratiques de déconsommation par Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013) Redonner de la valeur utilitaire à l’objet, considéré comme un moyen

pour satisfaire un besoin individuel Acheter moins, moins cher, meilleur

Valeur hédonique

Redonner de la valeur de plaisir à l’objet, considéré comme porteur de valeur individuelle

par sa production et son utilisation Faire soi-même

Orientée vers les autres

Valeur sociale

Redonner de la valeur sociale à l’objet, considéré comme porteur en lui-même éthique, voire politique, à l’objet, en tenant

compte de l’ensemble des implications Acheter équitable, éduquer, militer

Eminemment liée à l’individu et à la situation dans laquelle s’inscrit l’acte d’achat, selon Séré de Lanauze and Siadou-Martin (2013), la réduction de la consommation va s’opérer avant tout sur les produits ou attributs du produit jugés comme superflus par les consommateurs. La réduction s’opère ainsi sur les produits de grande consommation qui, selon Bertrandias and Lapeyre (2015a), ne jouent plus un rôle social et statutaire dans la consommation des individus sauf durant les fêtes de fin d’année. Toutefois, cette déconsommation ne semble pas être une fin en soi mais plutôt un moyen de réaliser des économies dans l’optique de pouvoir ré-investir les économies réalisées dans d’autres postes de dépenses.

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