• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : De la connaissance des prix à l’évaluation de la cherté de la vie

III. De la cherté perçue à la cherté de la vie

Partant du constat que les consommateurs raisonnent de manière plus exacte par comparaison plutôt que par mémorisation d’un prix exact (Estelami et al., 2001), un courant de recherche a récemment mis à jour l’utilisation par les consommateurs, non pas uniquement des connaissances nominales mais aussi des connaissances relatives. Ne pouvant stocker les prix réels en mémoire, les individus seraient davantage capables d’encoder l’information prix sous forme relative (par comparaison). Les individus seraient ainsi plus aptes à ranger les produits en termes de position relative de prix « La marque A est plus chère que la marque B qui elle-même est plus chère que la marque C » (Mazumdar and Monroe, 1990). Des travaux ont prouvé que le taux d’erreur s’avère être moindre lorsque l’on s’intéresse aux connaissances des prix comme une connaissance relative, c’est-à-dire dans le cadre de classements en termes de cherté (Coutelle-Brillet, 2001; Estelami et al., 2001). Ainsi, l’information utilisée par les consommateurs ne serait pas force de précision mémorielle mais plutôt de comparaisons.

Les quelques recherches relevées au sein de la littérature sur la cherté perçue présentent des niveaux d’agrégation différents de ce concept. En effet, le niveau d’agrégation du concept de cherté perçue n’a cessé d’évoluer au travers des différents travaux permettant la prise en compte des perceptions de plus en plus agrégées des prix par les consommateurs ; cherté d’un produit (Garbarino and Slonim, 2003; Slonim and Garbarino, 1999), d’une gamme de produits (Ladwein, 1995) ou encore celle des points de vente (Coutelle, 2000) (Figure 19).

Figure 19. Les différents niveaux d'agrégation de la cherté perçue au sein de la littérature

73 3.1. De la cherté perçue à l’image prix

Impuissants face à la dégradation de leur pouvoir d’achat et plus sensibles aux prix, les consommateurs adoptent de nouveaux arbitrages et de nouveaux comportements à l’égard des produits et des marques mais aussi envers les points de vente et les systèmes de distribution ou d’approvisionnement (achat low cost, ventes privées, autoréduction, etc. …) (Coutelle-Brillet and Hamelin). Dans l’optique de maintenir leur pouvoir d’achat et leur niveau de consommation, les consommateurs accordent une importance accrue d’une part à la cherté des produits (3.1.1) et d’autre part la cherté des enseignes (image prix) (3.1.2) (Coutelle-Brillet and Hamelin). C’est dans ce contexte que la cherté des enseignes (image prix) ainsi que la cherté perçue ont pris une envergure non négligeable dans les décisions d’achat des consommateurs.

3.1.1. La cherté perçue d’un produit et d’une gamme de produits

Les rares travaux sur la cherté perçue permettent d’affirmer qu’un prix est perçu comme cher lorsqu’il ne se situe pas au sein de la marge d’acceptabilité sur l’échelle de prix des consommateurs. Ainsi, plus le prix évalué se rapproche de la marge du prix de référence, plus il est accepté car perçu comme attractif, plus il s’en éloigne, plus il est susceptible d’être rejeté car perçu comme trop élevé. Le consentement à payer correspondant au montant maximal qu’un individu est prêt à sacrifier pour disposer d’un produit ou service donné est utilisé dans le cadre de la cherté perçue. Au-delà de ce consentement à payer, le produit est alors rejeté car perçu comme cher.

Un mécanisme similaire est susceptible d’être appliqué dans le cas d’une gamme de produits.

Dans le cadre d’une étude empirique, Ladwein (1995) s’est intéressé à la qualité de la mémorisation des prix d’une gamme de produits. Les résultats permettent de mettre en avant le fait que la mémorisation des prix de la gamme de produits s’avère être imprécise. L’image-prix d’une gamme de produits est constituée à partir d’un jugement du prix moyen des produits constituant la gamme. En effet, dans le cadre de l’image prix d’une gamme de produits, seuls les ordres de grandeur sont mémorisés par les individus. La gamme de produits est ainsi considérée comme une entité à part entière par le consommateur qui développe alors une représentation du prix pour cette gamme (Ladwein, 1995). Ayant plus de facilité à mémoriser les ordres de grandeur que les prix exacts des produits, c’est donc à partir de cette image prix

74 de la gamme de produits que les individus peuvent évaluer la cherté d’une gamme par rapport à une autre.

3.1.2. La cherté perçue d’un point de vente : l’image prix

C’est dans un contexte marqué par une concurrence accrue du hard discount en France que Coutelle (2000) s’est intéressée à l’opinion des consommateurs à l’égard des prix pratiqués au sein des magasins (Coutelle-Brillet and Hamelin). Pour ce faire, l’auteur s’est intéressée au concept d’image prix. Définie comme la représentation relative du niveau de prix d’un magasin (Coutelle, 2000), l’image prix permet d’apprécier, du point de vue des clients, le niveau de cherté perçue des enseignes comparativement à d’autres points de vente (Coutelle-Brillet and Hamelin). Ainsi, au travers de l’image prix, le client détermine le degré de cherté du lieu fréquenté. Un approche conceptuelle multidimensionnelle de l’image prix a été développée par Coutelle (2000). Trois principales dimensions ont ainsi été identifiées : l’image sécurité prix bas, l’image valeur et l’image panier. Le Tableau 14 présente les trois dimensions de l’échelle de mesure de l’image prix.

Tableau 14. Les trois dimensions de l'image prix (Coutelle, 2000)

Image sécurité prix bas Image valeur Image panier

Recherche de prix inférieurs sur tous les produits qu’il achète par rapport à la concurrence

Recherche d’un niveau de rapport qualité/prix des produits supérieur à ce qui est proposé chez les concurrence

Recherche d’un tarif final de son panier de produits attractif

Les résultats des travaux de Coutelle (1998; 1999; 2000; 2012) permettent de confirmer l’hypothèse du recours par les consommmateurs à des connaissances relatives du prix. En effet, les travaux de Coutelle permettent de constater que le taux d’erreur s’avère être moindre lorsqu’il s’agit de classer un produit ou un point de vente en terme de cherté (Estelami et al., 2001; Coutelle, 2000).

3.2. Un nouveau niveau d’agrégation de cherté : la cherté de la vie

Le concept de cherté perçue n’a cessé d’évoluer au fil des découvertes scientifiques permettant, au travers de différents niveaux d’agrégation, de tenir compte des perceptions de plus en plus

75 agrégées des prix par les consommateurs : cherté d’un produit  cherté d’une gamme de produits  cherté des points de vente. C’est dans cette dynamique d’évolution de la conceptualisation de la cherté perçue que nous positionnons le concept émergent de « cherté de la vie ». En effet, nous postulons que, dans le cadre de l’évaluation de la cherté de la vie, au-delà des produits, des gammes de produis et des points de vente, le consommateur fait référence à un niveau d’agrégation encore supérieur : la vie en général. La Figure 20 permet de visualiser les différents niveaux d’agrégation du concept de cherté perçue existants au sein de la littérature et de positionner l’évaluation de la cherté de la vie relativement aux autres concepts de cherté perçue.

Figure 20. La cherté de la vie : un nouveau niveau d'agrégation de la cherté perçue

Dans le cadre de ce nouveau niveau d’agrégation de la cherté, il semblerait que la notion de cherté de la vie soit directement liée aux notions de coût de vie et de pouvoir d’achat (Lambey, 2013). Ce qui fait l’objet du développement du chapitre II.

76

Outline

Documents relatifs