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La compatibilité des autorisations administratives préalables La Cour de justice a eu à connaître dans deux questions préjudicielles du problème des autorisations

Le contrôle juridictionnel des dispositifs d’aide aux transports maritimes

1/ La compatibilité des autorisations administratives préalables La Cour de justice a eu à connaître dans deux questions préjudicielles du problème des autorisations

administratives.

A l’occasion de l’affaire ANALIR, la question des autorisations administratives préalables, accordées par les États, dans le cadre de l’exploitation des lignes maritimes. Dans cette affaire, la haute juridiction espagnole s’est tournée vers la Cour de justice car elle devait apprécier la compatibilité du décret royal n° 1466/1997 avec le règlement du Conseil n°3577/92. Elle souhaitait poser trois questions à la Cour : le règlement n°3577/92 peut-il permettre de soumettre la prestation des services avec les îles à l'obtention d'une autorisation administrative préalable ? L’octroi et le maintien de cette autorisation peuvent-ils être subordonnés au respect de certaines conditions (être à jour dans le paiement de dettes d'impôt ou de sécurité sociale), distinctes de celles visées à l'article 4 § 2, du règlement ? L’article 4 § 1 du règlement peut-il permettre, sur une même ligne, d'imposer des obligations de service public à des armateurs et de conclure avec d'autres des contrats de service public pour les lignes à destination et en provenance d'îles ainsi qu'entre des îles?

Dans ses conclusions du 30 novembre 2000, l’avocat général relève que l’exigence d’autorisations administratives préalables constitue « une restriction à la libre prestation de services440 » et que toute exception doit être d'interprétation stricte et respecter les principes

de proportionnalité et de non-discrimination. Ainsi, une autorisation préalable ne peut être imposée que si elle est nécessaire pour obliger les opérateurs à fournir des prestations qu'ils ne fourniraient pas dans un contexte de libre concurrence ce qui ne peut être établi qu'à l'issue d'une analyse individuelle des liaisons considérées. Il indique alors qu’un État membre ne saurait « décréter a priori et sans analyse au cas par cas qu'une catégorie entière de liaisons, telles que, en l'espèce, les liaisons avec les îles et entre les îles, requièrent, pour être assurées de façon adéquate, l'adoption de mesures restrictives de la libre prestation de services441 ». Après avoir observé que le gouvernement espagnol soutient à l’inverse que les États membres peuvent imposer des obligations de service public en tant que condition à la prestation de services de cabotage à destination des îles, l’avocat général note qu’il ne « s'ensuit pas nécessairement que le contrôle du respect desdites conditions doive nécessairement être préalable. Il est, en effet, tout aussi concevable que les autorités compétentes procèdent aux contrôles nécessaires par le biais d'un régime de déclaration442 ». Il conclut que les articles 1

440 Conclusion de l’avocat général du 30 novembre 2000, Aff. C-205/ 99. (Pt 15) 441 Ibidem (Pt 34)

et 4 § 2 du règlement doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne permettent pas de soumettre la prestation des services de cabotage avec les îles par les armateurs à l'obtention d'une autorisation administrative préalable, sauf si l'État membre démontre que, dans un contexte de libre concurrence, le service public ne serait pas assuré, de manière satisfaisante, sur les lignes soumises à autorisation ; que le contrôle du respect des obligations de service public par les opérateurs ne peut être assuré qu'au moyen d'un régime d'autorisation préalable ; que les conditions de délivrance de l'autorisation sont définies, prévisibles, transparentes et non discriminatoires ; que les opérateurs remplissant les obligations de service public définies bénéficient automatiquement de l'autorisation.

La Cour va suivre les conclusions de l’avocat général. S’interrogeant sur le fait de savoir si une autorisation administrative préalable peut être justifiée pour imposer des obligations de service public, elle constate qu'il ne saurait être nié que l'objectif de garantir « la suffisance des services réguliers de transport maritime à destination et en provenance d'îles ainsi qu'entre des îles, relève d'un intérêt public légitime443 ». Cependant, elle relève que si, d’une part,

l’article 4 du règlement n° 3577/92 reconnait les missions de service public maritime de transport, et que, d’autre part, le Traité CE, par ses articles 158 et 299 § 2, reconnaît la spécificité des régions insulaires, « il ne saurait être inféré de ces dispositions que tous les services de cabotage maritime avec des îles ou entre des îles à l'intérieur d'un État membre doivent être, du fait de l'insularité, considérés comme des services publics444 ». La Cour

indique que l'application d'un régime d'autorisation administrative préalable comme moyen d'imposer des obligations de service public présuppose que les autorités nationales ont d'abord constaté, pour des trajets bien déterminés, « l'insuffisance des services réguliers de transport dans le cas où la prestation de ceux-ci serait laissée aux seules forces du marché. En d'autres termes, l'existence d'un besoin réel de service public doit pouvoir être démontrée445 ». La Cour relève que pour qu’un régime d'autorisation administrative préalable puisse être justifié il doit être démontré qu'il est « nécessaire pour pouvoir imposer des obligations de service public et qu'il est proportionnel au but poursuivi, de manière telle que le même objectif ne saurait être atteint par des mesures moins restrictives de la libre circulation des services, notamment, par un système de déclarations a posteriori446 ». La Cour relève qu’un tel régime ne peut conduire à légitimer un comportement discrétionnaire des autorités nationales qui serait de nature « à priver les dispositions communautaires, notamment celles relatives à une

443 CJCE, 20 février 2001, ANALIR e.a c/ Administración General del Estado, Aff. C-205/99, rec. 2001, p.I-1271. (Pt 27) 444 Ibidem (Pt 29)

445 Ibidem (Pt 34) 446 Ibidem (Pt 35)

liberté fondamentale telle que celle en cause au principal, de leur effet utile447 ». En conclusion, la Cour indique les dispositions combinées des articles 4 et 1er du règlement n°

3577/92 ne permettent de soumettre les services maritimes à destination et en provenance d'îles à l'obtention d'une autorisation administrative préalable que si un besoin réel de service public en raison de l'insuffisance des services réguliers de transport dans une situation de libre concurrence peut être démontré.

Dans l’arrêt préjudiciel du 17 mars 2011, relatif aux affaires opposant des compagnies maritimes à l’État grec, au sujet de la compatibilité d’un régime d’autorisation préalable instauré par la loi grecque 2932/2001 avec le règlement n°3577/92, la Cour a indiqué que « les dispositions combinées des articles 1 et 4 du règlement doivent être interprétées en ce sens qu’elles ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui institue un régime d’autorisation préalable pour les services de cabotage maritime prévoyant l’adoption de décisions administratives imposant le respect de certains créneaux horaires pour des raisons liées, d’une part, à la sécurité des navires et à l’ordre dans les ports et, d’autre part, à des obligations de service public, pourvu qu’un tel régime soit fondé sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l’avance, notamment dans l’éventualité où plusieurs armateurs souhaitent pénétrer dans le même port au même moment 448 ». La Cour réitère les conclusions

de la jurisprudence ANALIR et précise que s’agissant des obligations de service public imposées sur les lignes maritimes régulières intérieures, qu’il est « nécessaire qu’un besoin réel de service public en raison de l’insuffisance des services réguliers de transport dans une situation de libre concurrence puisse être démontré449 ». La Cour rappelle qu’il incombe à la juridiction nationale d’apprécier si, dans les affaires jugées au principal, ces conditions sont toutes remplies.

2/ La notion de cabotage insulaire. Dans le cadre de deux demandes préjudicielles, la

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